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sous cette coupole, en marbre blanc, la statue de Shakespeare: voilà, lui dit-il, le tribut de reconnaissance que je dois à l'homme qui a fait ma con. sidération, ma fortune et mon talent......L'Anglais est joueur, il joue des sommes effroyables, il joue sans parler, il perd sans se plaindre. Il use en un moment toutes les ressources de la vie; rien n'est plus commun que de trouver un homme de trente ans devenu insensible à la richesse, à la table, aux femmes, à l'étude, même à la bienfaisance. L'ennui les saisit au milieu des délices, et les conduit dans la Tamise, à moins qu'ils ne préfèrent de prendre un pistolet entre les dents, etc.

"Après cela, voyez combien un voyageur et un voyageur se ressemblent peu. Helvétius est revenu de Londres, fou à lier des Anglais. Le baron en est revenu bien désabusé."

Il ne faut dissimuler pas le baron ne passa que que fort peu de temps à Londres, et que c'est en 1765 qu'il y fut, époque où il était difficile à un Français de parler de l'Angleterre sans humeur.

Quelques personnes ont assuré avoir vu, ces jours passés, une gravure répresentant un gros fermier au milieu de sa basse-cour, entouré de poules, de coqs, de dindons, etc. avec ce petit dialogue au bas :

Le Fermier.-Mes bons amis, je vous ai rassemblés tous pour savoir à quelle sauce vous voulez que je vous mange.

Un Coq (dressant sa créte).-Mais nous ne voulons pas qu'on nous mange.

Le Fermier-Vous vous écartez de la question. Nous n'avons point vu cette gravure; mais qu'elle ait jamais existé ou non, le bruit qui en a pu donner l'idée est entièrement tombé; il n'est plus permis de douter aujourd'hui que l'intention du seigneur bienfaisant ne soit que ses notables délibèrent également et sur le fond et sur la forme des projets confiés à leur examen.

Portrait des Maris.

Avril, 1787.

Chanson.

Un amant léger, frivole,
D'une jeune enfant rafole :
Doux regard, belle parole
Le font choisir pour époux.
Soumis quand l'hymen s'apprête,
Tendre le jour de la fête,
Il faut déjà filer doux.

Sitôt que du mariage

Le lien sacré l'engage,

Plus de vœux, pas un hommage,
Plaisirs, talens, tout s'enfuit.

En vertu de l'hyménée

Il vous gronde à la journée,
Bâille toute la soirée ;

Et Dieu sait s'il dort la nuit.

Sa countenance engourdie,
Quelque grave fantaisie,
Son humeur, sa jalousie,
Oui, c'est là tout notre bien;

Et pour avoir l'avantage

De rester dans l'esclavage,

Il faut garder au volage
Un cœur dont il ne fait rien.

Inscription donnée à M. le marquis de La Fayette par M. Marmontel, pour le buste du général Washington.

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Anecdote tirée des Lettres de Diderot à mademoiselle Voland, en 1760.

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Quelqu'un nous raconta, ce fut, je crois, le docteur Gati, le trait suivant: Il faut que vous sachiez que les sénateurs de Venise sont les esclaves les plus malheureux de leur grandeur ; ils ne peuvent s'entretenir avec aucun étranger, sous peine de perdre la vie, à moins qu'ils n'aillent s'accuser euxmêmes, et dire qu'ils ont, par hasard, trouvé un Français, un Anglais, un Allemand, à qui ils ont dit un mot. Entrer dans la maison d'un ambassadeur de quelque Cour que ce soit est un crime capital. Un sénateur aimait une femme de son rang dont il était aimé. Tous les soirs, sur le minuit, il sortait, enveloppé dans son manteau, seul, sans domestique, et allait passer une ou deux heures avec elle. Il fallait, pour arriver chez son amie, faire un grand circuit ou traverser l'hôtel de l'ambassadeur de France: l'amour ne voit point de danger, et l'amour heureux compte les momens

perdus. Notre sénateur amoureux ne balança pas à prendre le plus court chemiu; il traversa plusieurs fois l'hôtel de l'ambassadeur français; enfin il fut aperçu, dénoncé et pris. On l'interroge: d'un mot il pouvait perdre l'honneur et exposer la vie de celle qu'il aimait, et conserver la sienne; il se tut et fut décapité. Cela est bien; mais était-il permis aussi à la femme qu'il aimait de garder le silence?

Une Année de la Vie du chevalier de Faublas,
Cinq vols. petit format.

C'est une année de la vie d'un jeune homme de qualité qui entre dans le monde, il a seize ans, arrive à Paris, et devient éperdument amoureux dé Sophie de Pointis, jeune personne qui demeure dans le même couvent que sa sœur; mais cette grande passion ne l'empêche pas de se livrer tous les jours à de nouvelles illusions; il passe sa vie à concilier son, amour avec ses bonnes fortunes, et j'ai trouvé des lecteurs moins étonnés de la facilité avec laquelle il y réussit, que du merveilleux talent aveć lequel on le voit suffire à tant de travaux. La belle marquise de B*** est l'heureuse enchanteresse qui se charge de l'éducation de notre jeune Hercule c'est une femme de vingt-quatre à vingt-cinq ans, qui sait tirer parti de tout, ne s'embarrasse de rien, et joint à la présence d'esprit la plus imperturbable infiniment d'usage, d'intrigue et de séduction. Son mari est tel qu'on pouvait le désirer, aussi fat qu'imbécille, un vrai personnage de co

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médie; il finit, à la vérité, par ouvrir les yeux et vouloir venger son honneur, mais cela lui réussit mal, on le tue; et si après ce duel le chevalier est obligé de s'enfuir, il emmène, pour s'en consoler, sa chère Sophie; elle se trouve être la fille du meilleur ami de son père, et il l'épouse.

Le récit des malheurs du père de Sophie, un des confédérés de Pologne, épisode où l'on a fait entrer l'histoire singulière de l'enlèvement du roi à Varsovie, une expédition de Tartares et d'autres aventures également étrangères à nos mœurs, pour être fort romanesque, n'en forme pas moins un contraste assez piquant avec toutes les scènes de boudoir qui occupent la plus grande partie de ce nouveau roman; mais ce qui distingue de la manière la plus favorable le talent de l'auteur, c'est le grand nombre de situations et de scènes plaisantes qu'offre son ouvrage. Il en est sans doute où la gaîté paraîtra poussée un peu trop loin, mais dont le génie original de Collé n'eût désavoué ni l'idée ni l'exécution; plusieurs sont toutes dialoguées et semblent faites pour le théâtre on y trouve autant d'esprit que de naturel et de vérité, quelques-unes même ont un côté trèsmoral, telles que la scène où la marquise, déguisée sous les habits du vicomte de Florville, et cachée dans un cabinet, entend de quelle manière la traite le baron dans les remontrances qu'il se croit obligé de faire à son fils, etc.

L'auteur de ce roman est M. Louvet; c'est un jeune homme de vingt-six à vingt-sept ans, qui,

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