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lagune (1). Le Modenais, qui s'élève au-dessus du niveau des eaux courantes, dut se former par des exhaussements successifs (2). L'Appennin, qui s'étend dans toute la longueur de l'Italie, la divise en deux systèmes géologiques à partir du versant oriental, ce sont tous des terrains de seconde et troisième formation; du côté occidental, on rencontre partout les traces du feu, qui d'ailleurs y règne encore, comme en font foi le Vésuve, l'Etna, Stromboli et les champs phlégréens.

L'Italie doit à ces circonstances géologiques de voir toute espèce de végétation prospérer sur son territoire. La sombre verdure des sapins se dessine continuellement sur les neiges éternelles du mont Cenis, du Splügen, du Saint-Gothard; des prairies aromatiques offrent, au pied des Alpes, de gras pâturages aux troupeaux de génisses et de brebis, et les cités lombardes s'élèvent dans la plaine au milieu des rangées de mûriers et de peupliers. Le Pô une fois passé, vous voyez se dessiner les hauteurs couronnées de jardins en terrasse, et de buttes ornées, comme en un jour solennel, de festons, de pampres, au milieu desquels scintille la feuille argentée de l'olivier. Puis viennent les bosquets d'orangers et de citronniers de la Campanie, et le palmier, le cactus, l'aloès, vous avertissent du voisinage de l'Afrique. Si vous arrivez de la mer, le sourire de Naples et de Mergellina vous fait trouver ce que vous a promis le proverbe, un morceau du ciel tombé sur la terre. Mais, quand de la cime neigeuse et fumante de l'Etna, avec son châtaignier où peuvent s'abriter cent chevaux et son aloès de soixante pieds de hauteur, vous embrassez d'un coup d'œil l'Italie et ses îles, depuis les sombres forêts de Scylla jusqu'aux sommets gigantesques des Alpes; quand vous vous rappelez les cités ensevelies sous les laves, et celles qui, autrefois immenses et populeuses, sont presque désertes aujourd'hui; ces ports, maintenant vides, de chacun desquels sortaient jadis six cents navires; lorsque le souvenir se reporte sur tant de nations qui du nord et du midi vinrent arroser le sol de leur sang et du nôtre, et sur cette ville éternelle qui domina d'abord par la force, puis par les lois, enfin par la religion, vous vous

mètres à la mer. Les alluvions ont donc avancé, depuis 1200 jusqu'à l'année 1600, de 25 mètres par an, et de 70 durant ces deux derniers siècles.

Ces assertions de Prony, acceptées par les savants à cause de sa réputation, sont maintenant reconnues erronées dans les faits et exagérées dans les conclusions.

(1) Berthazzoli, Del sostegno di Governolo. di Venezia.

SILVESTRI, Paludi Atriane.

(2) RAMAZZINI, de Font. Mutin.

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TREVISANO, Della laguna

VALLISNIERI, Opusc., p. 56.

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sentez frappé d'une admiration qui ressemble à de la douleur; votre front, levé dans l'orgueil d'un temps qui n'est plus, s'incline tout pensif, et vos lèvres murmurent les lamentations de Jérémie.

Ce nom d'Italie (1) n'embrassait pas anciennement toute la contrée entre les Alpes et la mer. Il lui vint probablement d'un des peuples qui l'habitèrent, et fut d'abord restreint entre les golfes du Lamète et de Scyllace (2); il s'étendit ensuite à mesure que se perdirent les noms d'Ausonie, d'Enotrie (terre des vins), d'Hespérie (terre occidentale), qui lui furent donnés par les Grecs; mais il ne devint général que lors de la guerre sociale, quand huit peuples se liguèrent contre Rome.

Dans ce mouvement de migrations qui précède l'histoire, les peuples venus les derniers chassaient devant eux les premiers, qui transportaient ailleurs leur nom, et laissaient sur la terre abandonnée des traces de leur séjour dans une dénomination particulière de pays. Dans une péninsule, il faut chercher les premiers venus parmi ceux qui en habitent l'extrémité opposée; puis, comme il est impossible d'aller plus loin, les bandes qui surviennent se mêlent avec les premiers immigrants. De là naît la grande difficulté de déterminer quels furent les plus anciens peuples de l'Italie, d'autant plus qu'il en arriva, non-seulement du nord, mais encore par mer. S'il est vrai que la mer inondât une grande partie de la

(1) 'Itaλó; signifie veau (Vitulus, Fítuλoç); aussi les étymologistes grecs ne manquèrent-ils pas de faire dériver le nom de la terre de Saturne du grand nombre de bœufs qu'elle nourrissait; d'autres imaginèrent un roi Italus; d'autres songèrent à Atlas, et crurent à l'origine africaine de la civilisation italique en s'appuyant sur le Quæ docuit maximus Atlas de Virgile. Telle fut l'opinion de G. D. Romagnosi, dans son Esame della storia degli antichi popoli italiani. On aimera mieux y trouver, avec Bochart (Géographie sacrée, liv. I, c. 30), une dérivation phénicienne. En effet, Itaria, en phénicien, signifie terre de la paix, comme ilipa terre des métaux, nom qui s'altéra en Ilba et en Elba. Ce qui ne laisserait pas que d'appuyer cette supposition, c'est la quantité de dénominations semblables de lieux en Italie et dans le pays de Chanaan. Des peuples du nom de Sabins et de Rasènes habitaient près de la Mésopotamie: Fik de Syrie rappelle le Picenum; Marsi Elojun était une ville du littoral de Syrie, près du fleuve Macra, et la Macra coule aussi en Italie dans le pays des Marses. Il y a une Ameria en Arménie, et une Albe en Mésopotamie; Aulon est une vallée de la Palestine, le long du Jourdain, et uue colline près de Tarente. Caparbio d'Italie correspond à Capharabis de l'Idumée, et Colle, dans la Toscane, à Cholle, dans la Palmyrène. Il existe une Tamar dans la Campanie et en Syrie, une Thèbes en Syrie et chez les Sabins, etc. Voy. FABRONI, Memoria letta all' Accademia toscana, 1803.

(2) C'est là peut-être, sur les bords du Lamète, qu'abordèrent les frères Italus et Enotrus avec leur colonie d'Arcadiens,

vallée du Pô, même les deux versants de l'Apennin, il faudrait regarder comme antérieurs à tous les autres les peuples des montagnes. En effet, le nom d'Aborigènes, qu'on attribue aux plus anciens, signifie montagnard (opos, mont). On peut croire que les Aborigènes appartenaient à la première immigration des peuples japhétiques, appelés Tyrsènes, Tyrrhènes ou Rasènes, qui donnèrent leur nom à toute la Péninsule et à la mer dont les eaux baignent l'occident; ainsi la mer à l'orient fut nommée Adriatique d'Adria, ville également tyrrhène.

Platon (1) fait les Tyrrhènes contemporains des Atlantides, de même que les Égyptiens. Les fables les associent aux souvenirs de Bacchus, de Jupiter, des satyres, et Hésiode mentionne « les forts Tyrrhènes, illustres parmi les dieux et les héros ». Les Vénètes, les Euganéens, les Orobes, antérieurs aux Ombriens, faisaient partie de cette race très-ancienne; il en était de même des Camuniens, des Lépontiens et d'autres peuples du Tyrol en deçà du Brenner, soit qu'ils fussent venus du nord en Italie, soit plutôt qu'ils eussent cherché un refuge au milieu des Alpes pour se mettre à l'abri des incursions des Galls (2). A ces Tyrrhènes appartenaient peut-être encore les Taurisques dans le pays subalpin, et, dans l'Italie moyenne, les Étrusques, les Opiques (3) et les Osques, dont le nom, par l'addition de l'article, forme celui de Tosques. Il est certain que l'histoire les présente toujours comme différant des Sicules et des Pélasges; il paraît que leur langue a constitué le fond des dialectes italiques; à l'époque la plus brillante de Rome, les fables atellanes chantées en osque amusaient la plèbe et la jeunesse. Plus tard, lorsque la majesté romaine déclina, l'osque survécut avec le peuple resté debout, et devint peutêtre le père de l'italien moderne.

Dix-huit siècles avant Jésus-Christ, vinrent les Ibères, qui sortaient de l'Ibérie asiatique, près de l'Arménie, d'où ils s'avancè

(1) Dans le Critias.

(2) Tirol, Tir, Tusis, Retzuns, tous noms de pays rhétiques qui indiquent une origine tyrrhène. Voir HORMAYR, Gesch. von Tirol, I, 127, et, avant lui, TSCHUDI, De prisca et vera alpina Rhætia, et QUADRIO, Dissertazioni critico-storiche sulla Rezia di qua delle Alpi. Une inscription étrusque a été découverte près de Dos de Trente. Le baron de Crazannes assure qu'on trouve à Reinzallern, dans la Bavière rhénane, beaucoup de fragments de poteries avec des caractères étrusques; il prétend que ces caractères appartiennent également au celtibère, à l'euganéen, à l'osque, au samnite, au grec antique, de sorte qu'il est facile de les confondre l'un avec l'autre. Voir le Journal des artistes, Paris, 1832, décembre. (3) De ops, terre. Οπικοὶ καὶ πρότερον καὶ νῦν καλούμενοι τὴν ἐπονυμίαν Αὔσονες. ARISTOTE, Polit. VII.-ANTIOCHUS de Syracuse dans STRABON, V. Puis ils dégénérè rent au point que leur nom équivalait à grossier et corrompu.

rent jusqu'à l'Espagne (1), à laquelle ils laissèrent leur nom; ils auraient même pénétré en Afrique, selon un passage fameux de Salluste. A cette race appartenaient les Ligures dans la haute Italie; dans la moyenne, peut-être les Itales, établis le long de la nier occidentale entre la Macra et le Tibre; dans la basse, les Sicanes. Thucydide trouve le fleuve Sicanus dans le voisinage des Ligures, qui, dit-il, habitaient les rivages de la mer au-dessus de Massalie; or, comme le nom des Sicanes se rapproche de celui des Séquanes, établis aux sources de la Seine, quelques auteurs le font d'origine celtique, et attribuent à cette parenté le grand nombre de mots de racine celtique que l'italien et plus encore le sicilien ont conservés (2). D'autres, au contraire, placent le berceau des Sicanes dans l'Épire, et les font identiques avec les Pélasges (Corcia); quelques-uns y voient une branche des Tyrrhènes (Abeken) qui, modifiée par son union avec les Aborigènes ou Casques, forma les Latins. On prétend aussi que les Ombriens sont Ligures et non Gallo-Celtes; mais le nom même de Ligures est général, et répandu en divers lieux. Les Osques s'appelaient aussi Ligures. Edwards a rattaché la race ligure à la celtique; ainsi tous les anciens Italiens appartenaient peut-être à la migration connue sous le nom de Celtes.

Néanmoins les nombreuses conquêtes celtiques ne permettent pas de croire que cette migration fut antérieure à celles dont nous venons de parler. Le nom de Celte appartient à une race trèsétendue, dont les Galls faisaient seulement partie (3); car il est écrit que le Danube naît et coule au milieu des Celtes, et l'on appelle Celtes les peuples qui habitent les deux rives du Rhin.

Appien raconte que Polyphème et Galatée eurent trois fils, Illyrius, Celtas et Gallas, qui peuplèrent, le premier l'Illyrie, les deux autres l'Italie sous le nom d'Ombriens (4). Ce langage mythologique fait allusion à la très-ancienne migration des Celtes qui, de la Thesprotie et de la Thrace, se répandirent jusqu'au

(1) Petit-Radel, Origines historiques des villes de l'Espagne; Humboldt, Prüfung der Untersuchungen über die Urbewohner Hispaniens, vermittelst der vaskischen Sprache; et, avec des faits plus nouveaux, PRITCHARD, The natural history of man. Au lieu donc de croire que les Ibères d'Espagne aient habité l'Italie, nous sommes persuadé qu'ils passèrent d'Italie en Espagne. Humboldt pense que la migration des Ibères est antérieure à celle des Celtes.

(2) Aqua, mare, pisces, vejæ, rota... de ach, mor, fische, wagen, räder. Selon nos principes, il faudrait en conclure que le latin est une des langues indogermaniques, qui n'a point traversé le grec.

(3) HERODOTE, II, 23; IV, 4. DION, XXXIX. (4) Illyr., § 2.

ARRIEN, 1.

cap Domes-Ness en Courlande, et sur les côtes occidentales'jusqu'au Finistère d'Espagne. On les réputait si anciens que Pline (1) les dit sauvés du déluge. Dans leurs courses vagabondes à travers la forêt Hercynienne, qui alors occupait toute l'Europe boréale et la haute Asie jusqu'aux frontières de la Chine, ils perdirent le souvenir de leur origine. Nous n'avons pas à la rechercher ici; seulement nous ferons remarquer que Ambra ou Amhra, dans leur langue, signifie preux, vaillant. Descendus sous ce nom en Italie, ils la divisèrent en trois régions, qui donnèrent leur nom à trois provinces: Oll-Ombrie, ou haute Ombrie, entre l'Apennin et la mer Ionienne; Is-Ombrie, ou basse Ombrie, autour du Pô; Vil-Ombrie, ou Ombrie littorale, qui fut ensuite appelée Étrurie. Selon Caton, Améria, leur ville, avait été rebâtie 381 avant Rome (2) : date historique.

Les grandes migrations de peuples entiers étaient accompagnées de migrations partielles, et toutes n'étaient pas japhétiques; les Titans, les Cyclopes et les Lestrygons, qui semblent avoir précédé les Sicules dans l'ile à laquelle ils donnèrent leur nom, appartenaient peut-être à la race de Cham et sortaient de l'Afrique.

Les peuples qui vinrent ensuite n'ont plus l'aspect d'immigrants, mais de conquérants. Telle fut peut-être la race connue sous le nom de Pélasges, population industrieuse et vouée au malheur, que nous avons vue étendre ses colonies, pendant quatre siècles, sur les côtes de l'Europe occidentale et de l'Asie Mineure, et précéder partout les peuples qui ont acquis une renommée classique. Peut-être vinrent-ils en Italie à différentes reprises; la première fois, Peucétius et OEnotrus, fils dé Lycaon, les amenèrent de l'Arcadie et de la Thessalie, dix-sept générations avant la chute de Troie. Ils trouvèrent les Tyrrhènes déjà subjugués et réduits à la condition d'esclaves, les Ombriens établis sur le versant oriental, les Ibères sur l'occidental; ayant rencontré une tribu de Sicules, qui s'appelait les Ausones, ils donnèrent ce nom à toute la Péninsule. Ils ne furent jamais les maîtres de l'Italie, où ils campèrent armés comme des étrangers. Pausanias assure que le voyage d'Enotrus fut la première expédition maritime qui sortit de Grèce pour aller fonder des colonies (3). Les Peucètes s'établirent sur le golfe ioni

(1) Hist. nat., liv. III.

(2) On a trouvé en 1444, à Gubbio, leur ville, qu'ils appelaient Ikuveina, les fameuses tables Eugubines, dont cinq en caractères étrusques, deux en lettres latines, et une en langue ombre, sur lesquelles se sont exercées la patience et l'imagination d'un très-grand nombre d'érudits,

(3) Arcadia, ch. III, p. 603,

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