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Les fonctions de ce comité avaient été bornées par l'Assemblée elle-même à « recevoir des dénonciations et des dépositions sur les trames, complots et conspirations qui » pourraient être découverts; à s'assurer en cas de besoin, » des personnes dénoncées, à les interroger et à rassembler » les pièces et preuves qu'ils pourraient acquérir pour former » un corps d'instruction (1). :

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C'est d'après cette mission qu'il avait reçue, que le comité avait enjoint au procureur-syndic de la commune de dénoncer le baron de Besenval le 18 novembre.

C'est également ce comité qui avait rédigé lui-même la dénonciation.

S'il se fût arrêté là; si après avoir remis le baron de Besenval entre les mains de la justice; il eût respectueusement abandonné à la justice elle-même le soin de le poursuivre et de le punir dans le cas où elle l'eût trouvé coupable, le baron de Besenval ne croirait pas avoir le moindre reproche à lui faire et il subirait en silence l'instruction de l'accusation dont il est victime.

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Mais il s'en faut bien que le comité se soit astreint au rôle de dénonciateur, dans lequel il lui était ordonné de se renfermer.

Il vient, au contraire, franchissant toutes les bornes du devoir qui lui était prescrit, et au mépris même de l'humanité qui lui commandait la plus profonde circonspection, de publier un rapport détaillé de toutes les circonstances qu'il suppose avoir précédé ou accompagné la conspiration qu'il dénonce, et qui n'est qu'un tissu d'assertions hardies, ou de faits calomnieux, tous également et heureusement démentis par la procédure. Et, pour mieux nourrir les préventions populaires qui, d'abord, avaient existé contre le baron de Be

(1) Journal de Paris, du 26 octobre 1789.

senval, ou plutôt pour les ranimer et en exciter même de nouvelles, ce comité ne s'est pas contenté de répandre ce rapport dans Paris avec profusion; il l'a fait insérer dans tous les journaux, pour que les provinces partageassent aussi elles-mêmes l'opinion si cruelle qui pouvait en naître.

Nous n'avons pas le temps de nous livrer à toutes les réflexions que peut présenter une pareille conduite de la part de citoyens, dont nous faisons profession d'honorer le zèle. Nous sommes obligés d'écrire à la hâte.

Nous demande rons seulement au comité des recherches de quel droit il a cru pouvoir se permettre de poursuivre le baron de Besenval jusqu'aux pieds des tribunaux, et s'y constituer, non pas seulement son ennemi, mais, en quelque sorte, son assassin, en présence même de la loi.

Si nous consultons les premières règles de l'équité et de la justice, il n'y a point d'exemple que les dénonciateurs qui ont confié au ministère public la recherche d'un délit quelconque, se soient emparés ensuite eux-mêmes des fonctions. de ce ministère, et soient devenus avec lui les parties du malheureux accusé que leur dénonciation a mis dans les fers.

Si nous consultons les fonctions mêmes du comité des recherches, nous voyons que l'Assemblée des représentans les avait sagement bornées à recevoir les dénonciations et dépositions, s'assurer en cas de besoin des personnes dénoncées, les interroger, et rassembler les pièces et preuves qui pourraient former un corps d'instruction.

Mais là finissait le devoir qui lui était imposé, et il semble qu'on n'avait pas besoin de lui défendre de passer ces. bornes.

L'humanité seule l'interdisait assez.

Si nous consultons les décrets de l'Assemblée nationale, le baron de Besenval avait été mis solennellement par cette Assemblée sous la sauvegarde de la loi, et, par ce mot seul,

nul homme au monde n'avait le droit d'attenter à sa perla violence, et encore moins à son honneur par la

sonne par calomnie.

Enfin, si nous consultons l'exactitude des faits en euxmêmes, nous trouvons que ce rapport si long, si pénible, si envenimé, n'est, pour ainsi dire, au moins à l'égard du baron de Besenval, qu'un long mensonge.

On voit d'abord que l'auteur se tourmente beaucoup pour établir qu'il y a eu une véritable conspiration contre la liberté du peuple français et surtout contre la ville de Paris; et, aux efforts qu'il fait pour développer ce qu'il appelle les preuves de cette conspiration dont il parle, on dirait presque que la conviction qu'il se propose d'en acquérir doit ajouter quelque chose au bonheur public ou à la liberté même dont nous jouissons.

Il remonte en effet jusqu'au mois de mai; il cite les premiers obstacles apportés dès cette époque à la liberté de la presse; le rassemblement de troupes autour de Paris, les armes fournies à ces troupes, la suspension des séances de l'Assemblée nationale, la séance royale du 23 juin, les grains coupés avant leur maturité; et il présente tous ces faits ensemble comme des signes, en quelque sorte éclatans, de cette conspiration qu'il dénonce. Jusque-là le baron de Besenval n'a point à se plaindre de l'auteur du rapport, et cette partie de son ouvrage lui est absolument étrangère.

Il n'entre pas même dans sa défense d'examiner s'il y a eu ou non une conspiration.

Il n'est chargé que de justifier sa conduite personnelle, et à cet égard il s'en rapporte à la procédure même dont il est l'objet.

Mais voici où l'auteur du rapport s'est permis, contre le baron de Besenval, des suppositions bien coupables.

D'abord il commence par affirmer que le baron de Besenval

était initié, dès le mois de mai, dans la conspiration dénoncée par le comité des recherches (1).

Et il l'affirme pendant que la justice recherche précisément ce fait-là même.

Et, en preuve de cette affirmation révoltante, il cite:

1o Le commandement donné au baron de Besenval des troupes qui étaient aux environs de Paris.

Mais ces troupes étaient nécessaires pour l'approvisionnement de Paris même.

Elles étaient nécessaires pour protéger les marchés destinés à cet approvisionnement, et les convois qui en étaient l'objet.

Elles étaient nécessaires pour réprimer les brigands qui avaient déjà causé des désordres dans Paris (2) et qui pouvaient en projeter d'autres.

Et le commandement de ces troupes n'avait pu naturellement être donné qu'à celui qui commandait déjà les provinces de l'intérieur.

2o L'auteur cite les armes fournies à ces troupes; mais des troupes ne vont point sans armes, et c'est au commandant de la province à ordonner qu'on les fournisse.

3° L'auteur prétend que ces troupes, commandées par le baron de Besenval, avaient des ordres contre la liberté publique.

Et ces ordres, qui ont été lus en public dans la procédure, portent expressément :

« De donner les ordres les plus précis et les plus modérés >> aux officiers qui commanderaient le détachement que vous >> seriez dans le cas d'employer, pour qu'ils ne soient que pro>>tecteurs ; et éviter, avec le plus grand soin, de se com

(1) Page 41.

(2) On se rappelle entre autres le désastre du sieur Réveillon,

>> promettre et d'engager aucun combat avec le peuple, à » moins qu'on ne se portât à mettre le feu, ou à commettre » des excès ou pillages qui menaçassent la sûreté des ci» toyens (1).

>>

4° L'auteur suppose que le baron de Besenval a retenu à Sèvres, pendant plusieurs heures, le mardi 14 juillet, deux électeurs de Paris, en députation vers l'Assemblée nationale, pour les empêcher de porter à cette Assemblée les réclamations de la ville.

Et le baron de Besenval ne commandait point à Sèvres.

Et les électeurs ont été entendus dans la procédure, et ont déposé qu'ils n'avaient point été arrêtés par le baron de Besenval.

5° L'auteur suppose encore que le baron de Besenval avait envoyé le prince de Lambesc dans les Tuileries, pour souiller ce palais du sang des citoyens.

Et le baron de Besenval n'a jamais donné un pareil ordre au prince de Lambesc.

Il était même bien impossible qu'il pût le donner, d'après ceux qu'il avait lui-même.

6o Enfin l'auteur du rapport accuse le baron de Besenval d'avoir donné ordre au gouverneur de la Bastille de faire feu sur les citoyens qui s'étaient présentés pour l'assiéger.

Et la procédure prouve encore que le baron de Besenval n'a jamais donné d'ordre semblable au gouverneur de la Bastille.

Mais il lui a, dit-on, donné au moins celui de se défendre. Oui, sans doute, il le lui a donné; et cet ordre honore la fidélité du baron de Besenval, et justifie son zèle.

J'ignore, a-t-il répondu devant la justice, si en effet » M. de Launay, sous l'appât de donner des armes,

a fait

(1) Ordre donné le 12 juillet au baron de Besenval.

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