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personnes d'une conduite irréprochable; mais il existait aussi des plaies, et de quelle nature!

L'éducation variait selon les conditions, mais elle était généralement soignée; l'autorité publique instituait les maîtres et fixait même les heures de l'enseignement. On punissait de mort quiconque entrait dans les écoles lorsque les enfants y étaient encore; d'infâmes habitudes réclamaient cet excès de rigueur. Mais nous ne saurions donner le motif d'une autre loi qui défendait, sous la même peine, d'enseigner la philosophie sans le consentement du sénat et du peuple. Il est vrai que cette loi fut révoquée un an après, et que celui qui l'avait proposée fut condamné à une amende de cinq talents (1).

Lois

Le fils n'était pas tenu de fournir des aliments à son père, si celui-ci ne lui avait pas fait apprendre un métier, jou s'il l'avait judiciaires. engendré d'une courtisane. Des couronnes glorieuses étaient décernées aux citoyens qui avaient bien mérité de la patrie; on élevait aux frais de l'État les enfants des citoyens morts en combattant, et les débauchés étaient exclus du sacerdoce, du sénat, des emplois publics.

Les juges étaient choisis dans toutes les classes indistinctement; mais ils devaient avoir trente ans révolus, être exempts de toute accusation et de dettes envers le fisc; ils recevaient trois oboles (2) par séance. Quatre tribunaux étaient institués pour les meurtres, six pour tous les autres délits : proportion qui indique combien les actes de violence étaient fréquents. Chacun d'eux se composait ordinairement de cinq cents juges, convoqués et présidés par l'archonte. Un tel nombre de juges, la multiplicité des tribunaux et la diversité de leurs attributions rendent la législation criminelle d'Athènes très-compliquée et fort peu intelligible (3).

(1) Environ 27,500 francs. (2) Environ 50 centimes.

(3) Les tribunaux athéniens étaient :

10 L'assemblée du peuple, qui connaissait des crimes d'État.

2o Le conseil ou sénat (Bovλń ).

30 L'aréopage, qui connaissait de certains homicides et des affaires concernant l'État et la religion.

40 Les héliastes, qui étaient au nombre de 6,000 : ils siégeaient en deux ou trois sections, dont la moindre comptait 500 membres.

5 L'épipalladium, pour les meurtres prémédités.

6o L'épidelphinium, pour les meurtres non prémédités.

7° L'emphréatium, pour les exilés accusés d'homicide et non encore purifiés. 80 L'épiprytanium, pour les accidents mortels occasionnés par les animaux ou par des êtres inanimés.

Les villes sujettes d'Athènes devaient y porter leurs différends; on peut juger des inconvénients qui en résultaient pour elles. Quant aux habitants de la campagne, cinquante juges étaient expédiés pour leur rendre une justice sommaire dans les contestations qui ne dépassaient pas la valeur de dix drachmes; celles qui s'élevaient au-dessus de cette somme étaient décidées par des arbitres sexagénaires, choisis annuellement dans chaque tribu. On pouvait appeler de leur décision; mais, s'ils avaient été désignés par les parties, leur sentence était définitive.

Celui qui réclamait judiciairement une succession devait déposer un dixième de la valeur de l'héritage, et il le perdait si sa demande était rejetée. Aucune plaidoirie ne devait excéder le temps qu'une clepsydre met à se vider. Les témoins déposaient à haute voix, et l'accusateur pouvait demander que les serviteurs du prévenu fussent mis à la torture.

Tout offensé pouvait porter son accusation, soit publique ou privée, devant les tribunaux. Si elle était privée, il ne réclamait qu'une amende; si elle était publique, il demandait l'application de la loi, et devait alors jurer de ne retirer sa plainte qu'après le jugement rendu. Le calomniateur pouvait être cité en jugement, et celui qui n'obtenait pas au moins un cinquième des votes était, comme téméraire, passible d'une peine corporelle, mais avec liberté de s'en affranchir en s'exilant avant le prononcé de la sentence. Une admirable maxime de Solon disait que l'injustice disparaîtrait bientôt si celui qui en a connaissance s'en plaignait autant que celui qui en souffre; chacun pouvait donc se constituer accusateur et citer devant le tribunal quiconque se portait à des actes de violence envers un enfant ou une femme, soit libre, soit esclave. Mais l'accusateur devait déposer une somme d'argent; puis, debout sur les chairs consacrées d'un porc, d'un agneau, d'un taureau (1),

90 L'épithalattium, pour les délits commis en mer. Venaient ensuite les tribunaux présidés par les archontes :

10o Le tribunal pupillaire, présidé par l'éponyme avec deux assesseurs et un greffier.

11o Celui du roi, pour les profanations.

12o Celui du polémarque, pour les simples habitants et pour les étrangers.
13o Les thesmothètes jugeaient en premier ressort les affaires de commerce.
140 La police était exercée par les Onze, qui connaissaient des vols noctur-
nes et des vols commis de jour, jusqu'à la valeur de 50 drachmes.
15° Au Pirée siégeaient les nautodices, devant lesquels étaient portés en pre-
mière instance les différends entre marchands et marins.

(1) Les animaux mêmes qui avaient servi aux sacrifices, les suovetaurilia des Romains.

immolés aux dieux avec les solennités prescrites, il prononçait de terribles imprécations sur lui-même, sur ses enfants, sur sa race, dans le cas où il ne dirait point la vérité.

L'individu qui tuait un boeuf de labour encourait la peine capitale, reste des anciennes coutumes sacerdotales. Dracon lui-même n'avait prononcé aucun châtiment contre celui qui, pour défendre ce qui lui appartenait, avait tué quelqu'un en flagrant délit. Un tribunal spécial connaissait des meurtres involontaires (1). Aucune peine n'avait été portée contre le parricide, réputé impossible. Le coupable de viol devait épouser la femme qu'il avait outragée, ou mourir. L'adultère était puni de mort, s'il n'y avait pas composition à prix d'argent avec le mari, qui pouvait, en outre, vendre la complice. Le suicide était un crime d'État; son châtiment consistait dans l'amputation de la main droite du cadavre et dans une sépulture ignominieuse, à moins toutefois que le suicidé n'eût d'avance exposé au sénat les motifs qui le dégoûtaient de la vie. Lente, d'ordinaire, à punir les particuliers, la justice athénienne était prompte et très-rigoureuse à l'égard des magistrats: l'archonte surpris en état d'ivresse était mis à mort. Les peines tenaient, en général, de la férocité antique, bien que Dracon les eût adoucies en partie, et que Solon fît souvent appel aux sentiments de l'honneur et à la crainte de l'infamie: car un des plus grands châtiments qu'il eût établis était d'être déshonoré (átiμos).

Le déshonneur atteignait celui qui n'avait point de profession. Il Lois de police. était défendu de médire des morts, prescription d'une exécution difficile, comme on peut trouver trop minutieuse celle qui prohibe aux marchands de poisson de diminuer rien du prix demandé, pour les contraindre à ne point surfaire d'abord; ils devaient aussi rester debout tant qu'ils n'avaient pas débité toute leur marchandise.

de

Il vaut mieux rappeler les compagnies de secours mutuels, dont compagnies les membres versaient chaque mois une somme convenue pour subvenir à ceux d'entre eux qui tombaient dans l'indigence.

La guerre ne pouvait être déclarée qu'après trois discussions. publiques; les citoyens étaient obligés de s'armer, d'équiper un cheval, de fournir les navires qu'ils possédaient. La solde ne fut introduite que sous Périclès.

(1) Dans les cités de Mycènes et d'Argos, le meurtre par accident était considéré comme quelque chose de pire qu'un malheur, pour un effet du courroux particulier des dieux; c'est pourquoi le coupable devait aller en exil et se purifier par les rites de l'expiation.

secours mutuels.

Lois militaires.

Lorsque Athènes eut grandi et se fut corrompue par les richesses et la puissance, une foule de lois se succédèrent, proposées, sanctionnées, changées, dénaturées par des orateurs démagogues et la multitude inconstante; c'est pourquoi un satirique disait d'eile, comme Dante de Florence, que celui qui y retournerait après trois mois d'absence ne reconnaîtrait plus le gouvernement et les lois.

Pour n'en citer qu'un exemple, Solon avait accordé les droits de citoyen aux bâtards et aux enfants nés d'une femme étrangère. Périclès fit passer une loi qui les excluait; puis, ayant perdu ses deux fils et voulant faire admettre comme citoyen un de ses bâtards, il fit révoquer cette dernière loi. Après l'expulsion des trente tyrans, la loi de Solon fut de nouveau abrogée, et les enfants nés d'une étrangère, déclarés illégitimes.

Il est impossible, au milieu de semblables variations, de se former une idée nette et uniforme de la législation athénienne; aussi, tandis que celle des Doriens reste fidèle à son origine étrangère, celle-ci se rapproche-t-elle de plus en plus de la nature hellénique. Les Athéniens, fiers de leur liberté et de leur culture individuelle, sensibles, turbulents, avides, éclairés, fantasques, nous offrent le type du caractère grec.

Comme tout autre législateur, Solon dut faire, en beaucoup de choses, des concessions au génie de son peuple. Interrogé s'il croyait lui avoir donné les meilleures lois, il répondit : Les meilleures qu'il puisse supporter. Anacharsis lui disait que les lois étaient comme les toiles d'araignée, où les mouches sont prises tandis que les hirondelles passent à travers : Les miennes, répliqua Solon, seront observées, car je les accommode aux intérêts des citoyens, de telle sorte que personne ne trouve son compte à les violer.

Il connaissait donc les deux principes capitaux de l'opportunité et de l'intérêt privé, rendu gardien de l'intérêt public; on aura pu d'ailleurs s'apercevoir qu'il ne sacrifia point, comme Lycurgue, la morale à la politique. Ce dernier vit que son petit pays suffisait à la nourriture de ses habitants, et il en bannit tout commerce et tout étranger. Solon dut chercher à naturaliser sur le sol aride de l'Attique les arts et l'industrie. Lycurgue, dans un gouvernement de rois, put faire ce qu'il voulut; Solon, dans un gouvernement populaire, dut faire ce qu'il put. Le premier avait à diriger un peuple grossier et habitué à la tyrannie, patricienne; celui d'Athènes, qui avait déjà traversé plusieurs révolutions, voyait ce qui lui était le plus avantageux et la possibilité de l'obtenir. Ly

curgue, d'un naturel austère, soumit les mœurs aux lois; Solon, d'un caractère doux, adapta les lois aux mœurs; le premier forma le peuple le plus guerrier, l'autre, le plus cultivé. Sparte gardait avec un soin jaloux sa grossièreté traditionnelle, ses lois à l'esprit oriental, et redoutait tout progrès; Athènes, à l'aurore de la liberté, s'élançait vers l'avenir. A Sparte, on apprenait à mépriser la mort; à Athènes, à jouir de la vie; dans l'une, à mourir pour la patrie; dans l'autre, à vivre pour elle. Les Spartiates, régis avec une verge de fer, éprouvèrent moins de secousses intérieures, tandis que la teinture de politique dont chacun était frotté dans Athènes y multiplia les troubles civils. Les uns conservèrent plus longtemps leur indépendance, les autres la perdirent; mais, par bonheur, les armes et la victoire ne sont pas tout au monde, et l'empire des lettres et des sciences ne fut pas perdu avec la bataille d'Egos-Potamos. Les Athéniens, d'ailleurs, supportèrent l'infortune avec dignité; après la prise de leur ville par les Perses et Lysandre, ils ne perdirent pas courage et se relevèrent; tandis que les Spartiates, après les défaites de Pylos, de Cythère, de Leuctres, tombèrent dans l'abattement comme une nation sans passé et sans avenir. Ainsi ces deux cités représentèrent dans la Grèce les deux éléments de tout État : l'un qui conserve, l'autre qui perfectionne. Sparte aristocratique est la figure des gouvernements taillés à l'asiatique, basés sur la foi, sur l'immobilité sacrée des usages héréditaires, sur l'amour et le respect pour tout ce qui est vieux; Athènes populaire marche en avant dans la voie de la libre discussion, a l'oeil fixé sur l'avenir et fonde la liberté.

Lorsque Solon eut exposé ses lois en public, ce furent des allées et des venues continuelles dans sa maison : l'un lui demandait une explication, un autre lui suggérait un changement, un autre lui reprochait telle ou telle disposition. Ennuyé de cela, il sortit encore une fois de la ville, et se remit à voyager durant dix ans.

CHAPITRE XIII.

PISISTRATE.

A son retour dans sa patrie, Solon y trouva ranimées les dissensions entre le peuple, qui, désormais affranchi du joug, voulait se venger, et les nobles, qui cherchaient à recouvrer leurancienne

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