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nous avons les autorités les plus graves pour soutenir que la première propagation de la foi dans la haute Asie a été faite par des catholiques orthodoxes et nullement entachés d'hérésie. Ébedjesus, auteur syrien très-versé dans les antiquités chrétiennes de l'Orient, s'exprime ainsi dans son Épitome canonique :

« Catholicos (1) Saliba-Zacha créa les métropolitains <«< de Hérie (dans le Khorassan) de Samarkande et de « Chine; d'autres, au contraire, prétendent qu'ils fu«< rent institués par Achæus et Silas (2). » Ainsi, selon Ébedjesus, plusieurs pensaient qu'Achæus et Silas avaient institué les métropolitains de la Chine. Or, Achæus, archevêque de Séleucie, fut à la tête des Chaldéens orthodoxes depuis l'an 411 jusqu'en 415; Silas fut patriarche des nestoriens de 503 à 520 et Saliba-Zacha occupa le même siége depuis 714 jus. qu'en 728 (3).

Lors même qu'on admettrait, contrairement à l'opinion de plusieurs, que Saliba-Zacha fut le premier créateur du siége métropolitain de la Chine, il n'en serait pas moins certain que les Chinois ont dû être convertis au christianisme bien longtemps avant ce patriarche nestorien. Comment, en effet, eût-on pu songer à créer un siége métropolitain dans un pays si le christianisme n'y eût déjà fait depuis longtemps des progrès considérables et s'il n'y eût eu plusieurs siéges épiscopaux. La création d'un métropolitain

(1) Titre que prirent les patriarches nestoriens.

(2) Heriæ et Samarkandæ et Sinæ metropolitanos creavit Saliba-Zacha. Aiunt vero quidam Achæum et Silam illos constituisse. (Ebedjesus Sobensis, in Epitome canonum, par. 8, cap. 15.)

(3) Assemani, Bibliotheca orientalis, t. III, p. 347.

L

suppose une Église florissante et déjà constituée, ce qui assurément ne peut avoir lieu qu'après un laps de temps considérable. Mais si l'on croit, avec les auteurs dont parle Ébedjesus, que le métropolitain de la Chine fut créé par Achæus, archevêque de Séléucie, vers l'an 411, alors se trouve pleinement justifiée la tradition qui fait remonter aux apôtres la propagation de la foi en Chine, et il n'est pas étonnant qu'Arnobe, qui vivait au troisième siècle, ait compté les Sères où Chinois parmi les peuples qui déjà de son temps avaient reçu l'Évangile.

Assemani nous fournit, dans son ouvrage si plein d'érudition, un argument des plus concluents pour prouver l'antiquité du christianisme dans l'empire chinois. Le savant orientaliste rapporte (1), d'après Amrus, la liste des métropolitains soumis au patriarché de Séleucie, et dans ce catalogue l'Église métropolitaine de Chine est unie à celle de l'Inde (2). On peut en conclure que le siége métropolitain de la Chine fut institué presque en même temps que celui de l'Inde; car Ebedjesus dit expressément : « Le motif de la pri& mauté des siéges est tiré de la priorité du temps où « vécurent les patriarches qui les fondèrent (3). » Or, la preuve de l'antiquité du christianisme dans les Indes repose sur les fondements les plus solides. Nous avons vu que l'apostolat de saint Thomas dans la haute Asie est appuyé sur la tradition constante de l'Église, sur le témoignage des écrivains grecs, latins et syriaques,

(1) Assem., t. II, p. 413.

(2) La Chine occupe le treizième rang et l'Inde le quatorzième.

(3) Causa primatus sedium ex prioritate temporum desumitur quibus earum fundatores patriarchæ vixerunt. Assem., t. III, p. 346.

sur les liturgies les plus anciennes et enfin sur les monuments archéologiques (1) les plus authentiques. La propagation de la foi chrétienne en Chine doit donc présenter aussi les mêmes caractères d'antiquité, puisque, d'après le catalogue d'Amrus, cité dans la Bibliothèque orientale du savant Assemäni, le siége métropolitain de la Chine est placé à côté de celui de

l'Inde.

Il nous a semblé important d'insister sur ces preuves de l'introduction du christianisme en Chine durant les premiers siècles de l'Église, parce que, s'il est démontré que l'Évangile à été connu dans ces contrées avant le septième siècle, on peut dès lors admettre à priori l'authenticité du monument de Si-ngan-Fou dont nous allons nous occuper.

(1) Mémoire de M. Reinaud, p. 95.

CHAPITRE II.

I. Découverte de la fameuse inscription de Si-ngan-Fou.

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duction de cette inscription. — III. État de l'empire chinois à l'époque de l'érection du monument. Affluence des étrangers en Chine sous la dynastie du Thang. IV. Étude critique de l'inscription de Si-ngan-Fou. - Patrie d'Olopen et des autres missionnaires en Chine au septième siècle. Caractères syriaques. - Doctrine nestorienne.

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– V. Objections de Voltaire et de Milne contre l'authenticité de l'inscription. Réfutation. - VI. Authenticité du monument prouvée

par les écrivains chinois. - Livres anciens et modernes.

Bonne

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En 1625 des ouvriers chinois creusaient les fondements d'une maison en dehors des murs de la ville de Si-ngan-Fou (1), capitale de la province du Chen-si. Ils trouvèrent enfoncée dans la terre une grande pierre monumentale, semblable à celles que les Chinois ont l'habitude d'élever pour conserver à la postérité le souvenir des événements remarquables et des hommes illustres. La table de marbre était de couleur foncée; elle avait dix pieds de haut et cinq de large. Sur une de ses faces étaient gravées une croix et

(1) Cette ville, située sur les bords d'un des affluents du fleuve Jaune, à plus de deux cents lieues de la mer, se nommait autrefois Tchangngan. Les écrivains arabes et syriaques du moyen âge lui donnent le nom de Komdan.

une inscription en ancien chinois. On remarquait aussi d'autres caractères tout à fait étrangers à la Chine. Cette découverte excita l'attention des mandarins et de la population de la contrée. La pierre fut exposée en public et visitée par une foule de curieux. Plusieurs missionnaires jésuites, répandus à cette époque dans les missions de la Chine, allèrent l'examiner. Le P. Alvarès Sémédo en prit connaissance le premier, puis vinrent les PP. Martin Martini, auteur de l'Atlas chinois, et Michel Boym, Polonais, qui en entreprit l'interprétation avec l'aide d'un lettré chinois.

A la nouvelle de cette curieuse découverte, le gouvernement de Péking fit demander une copie de l'inscription, et l'empereur donna ordre que l'original fût placé, comme monument, dans une pagode célèbre, à un quart de lieue de Si-ngan-Fou, où sans doute on pourrait encore la retrouver (1). Plusieurs copies, calquées exactement sur la pierre, furent envoyées en Europe par des jésuites qui se disaient témoins oculaires de toutes ces choses. La bibliothèque de leur maison, à Rome, posséda de bonne heure une de ces copies, qui attira de nombreux visiteurs, et plus tard une autre copie authentique, dans les dimensions du monument, fut envoyée à Paris et déposée à la bibliothèque de la rue Richelieu, où on peut la voir encore aujourd'hui dans la galerie des manuscrits.

Ce monument, retrouvé par hasard parmi des décombres, aux environs d'une ancienne capitale de l'empire chinois, excita un grand émoi dans le monde. Car en examinant cette pierre, en cherchant à expli

(1) Durant notre résidence à Péking plusieurs Chinois de nos amis nous ont assuré avoir vu l'inscription dans cette pagode.

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