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DIMA S.

PHiloctète, eft-ce vous ? quel coup affreux du fort

Dans ces lieux empeftés vous fait chercher la mort?
Venez-vous de nos dieux affronter la colère ?
Nul mortel n'ofe ici mettre un pied téméraire ;
Ces climats font remplis du céleste courroux,
Et la mort dévorante habite parmi nous.
Thèbe depuis longtems aux horreurs confacrée
Du refte des vivans femble être féparée :
Retournez.....

PHILO CTETE.

Ce féjour convient aux malheureux. laiffe-moi le foin de mes deftins affreux, Et di-moi fi des dieux la colère inhumaine

Va

>

En accablant ce peuple, a respecté la reine?

DIMA S.

Oui, feigneur, elle vit ; mais la contagion
Jufqu'au pied de fon trône apporte fon poison.
Chaque inftant lui dérobe un ferviteur fidelle,
Et la mort par degrés femble s'approcher d'elle.
On dit, qu'enfin le ciel, après tant de courroux,
Va retirer fon bras appefanti fur nous.

Tant de fang, tant de morts ont dû le fatisfaire.

PHILO CTETE.

Eh! quel crime a produit un courroux fi févère ?

DIMAS.

Depuis la mort du roi̟. . .

PHILOC TETE.

Qu'entens-je? quoi Laïus...

DIMA S.

Seigneur, depuis quatre ans ce héros ne vit plus.

PHILO CTETE.

Il ne vit plus! Quel mot a frapé mon oreille!
Quel efpoir féduifant dans mon coeur fe réveille?
Quoi, Jocafte! les dieux me feraient-ils plus doux?
Quoi! Philoctete enfin pourrait-il être à vous ?
Il ne vit plus!.. quel fort a terminé fa vie?

DIMAS.

Quatre ans font écoulés depuis qu'en Béotie,
Pour la dernière fois le fort guida vos pas.

A peine vous quittiez le fein de vos états,
A peine vous preniez le chemin de l'Afie,
Lorfque d'un coup perfide une main ennemie
Ravit à fes fujets ce prince infortuné.

PHILOC TETE.

Quoi! Dimas, votre maître eft mort affaffiné?

DIMAS.

Ce fut de nos malheurs la première origine;
Ce crime a de l'empire entraîné la ruine.
Du bruit de fon trépas mortellement frapés,
A répandre des pleurs nous étions occupés,
Quand du courroux des dieux miniftre épouvantable,
Funefte à l'innocent, fans punir le coupable,
Un monftre (loin de nous que faifiez-vous alors?)
Un monftre furieux vient ravager ces bords.
Le ciel induftrieux dans fa trifte vengeance,
Avait à le former épuifé fa puiffance.

Né parmi des rochers au pied du Cythéron,
Ce monftre à voix humaine, aigle, femme & lion a
De la nature entière exécrable affemblage,

Uniffait contre nous l'artifice à la rage.

1

Il n'était qu'un moyen d'en préferver ces lieux.
D'un fens embarraffé dans des mots captieux,
Le monftre chaque jour dans Thèbe épouvantée
Propofait une énigme avec art concertée;
Et fi quelque mortel voulait nous fecourir,
Il devait voir le monftre, & l'entendre, ou périr.
A cette loi terrible il nous falut foufcrire ;

D'une commune voix Thèbe offrit fon empire
A l'heureux interprète infpiré par les dieux

Qui nous dévoilerait ce fens mystérieux.
Nos fages, nos vieillards, féduits par l'efpérance
Ofèrent, fur la foi d'une vaine fcience,

Du monftre impénétrable affronter le courroux;
Nul d'eux ne l'entendit, ils expirèrent tous.
Mais Oedipe, héritier du fceptre de Corinthe,
Au-deffus de fon âge, au-deffus de la crainte,
Guidé par la fortune en ces lieux pleins d'effroi,
Vint, vit ce monftre affreux, l'entendit & fut ro
Il vit, il règne encor; mais fa trifte puiffance
Ne voit que des mourans fous fon obéiffance.
Hélas! nous nous flations que fes heureufes mains
Pour jamais à fon trône enchaînaient les deftins.
Déja même les dieux nous femblaient plus faciles ;
Le monstre en expirant laiffait ces murs tranquiles
Mais la ftérilité, fur ce funefte bord,

Bientôt avec la faim nous raporta la mort.

Les dieux nous ont conduit de fupplice en fupplice;
La famine a ceffé, mais non leur injustice;
Et la contagion, dépeuplant nos états,
Pourfuit un faible refte échapé du trépas.

Tel eft l'état horrible où les dieux nous réduifent ;
Mais vous, heureux guerrier, que ces dieux favorifent
Qui du fein de la gloire a pû vous arracher?
Dans ce féjour affreux que venez-vous chercher ?

PHILOCTETE.

J'y viens porter mes pleurs, & ma douleur profonde.
Appren mon infortune & les malheurs du monde.
Mes yeux ne verront plus ce digne fils des dieux,
Cet appui de la terre, invincible comme eux.

L'innocent opprimé perd fon Dieu tutélaire;
Je pleure mon ami, le monde pleure un père.

Hercule eft mort?

DIMAS.

PHILO CTETE.

Ami, ces malheureufes mains

Ont mis fur le bucher le plus grand des humains.
Je raporte en ces lieux ces fléches invincibles,
Du fils de Jupiter préfens chers & terribles.
Je raporte fa cendre, & viens à ce héros,
Attendant des autels, élever des tombeaux.
Croi-moi, s'il eût vécu, fi d'un préfent fi rare
Le ciel pour les humains eût été moins avare,
J'aurais loin de Jocafte achevé mon destin ;
Et dût ma paffion renaitre dans mon fein, ཀྭ
Tu ne me verrais point, fuivant l'amour pour guide,
Pour fervir une femme abandonner Alcide.

DIMAS.

J'ai plaint longtems ce feu fi puiffant & fi doux;
Il naquit dans l'enfance, il croiffait avec vous.
Jocaste par un père à fon hymen forcée,
Au trône de Laïus à regret fut placée.

Hélas! par cet hymen, qui coûta tant de pleurs,
Les deftins en fecret préparaient nos malheurs.
Que j'admirais en vous cette vertu fuprême,
Ce cœur digne du trône, & vainqueur de foi-même !
En vain l'amour parlait à ce cœur agité,

C'est le premier tyran que vous avez domté.

PHILO CTETE.

Il faut fuir pour vaincre ; oui, je te le confeffe;

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