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Le nouveau d'Assas, trait civique, en un acte, en prose, mêlée d'ariettes, paroles de M. le baron de Jore, musique de M. Le Breton, a été représenté pour la première fois sur le Théâtre italien le vendredi 15.

Des soldats de Châteauvieux, qui en buvant et chantant s'excitent à l'insurrection, bravent les prières de leurs chefs et les ordres que leur apportent les Députés qu'ils ont envoyés au général chargé de faire exécuter les décrets de l'Assemblée nationale; une belle conversation entre deux Officiers du régiment du Roi, dont l'un conseille prudemment à l'autre de ne point se compromettre dans une pareille bagarre, de ridicules dispositions pour opposer la force à la force; des Gardes nationales qui arrivent à la tête de l'armée et contre lesquelles on pointe un canon; notre nouveau d'Assas qui embrasse la bouche du canon pour empêcher qu'on n'y mette le feu, et qui dans cette noble attitude reçoit plusieurs coups de fusil dont il est renversé; beaucoup de tapage et de bruit, encore plus de fumée; lorsqu'elle est un peu éclaircie, on voit les vainqueurs porter sur un lit entouré de drapeaux l'intéressant jeune homme (M. Désilles), dangereusement blessé; les femmes de Nancy l'environnent, célèbrent son dévouement civique, et s'adressent au Ciel pour obtenir la conservation de ses jours devenus sacrés à la Patrie.

Voilà ce qu'on a raison de ne pas vouloir appeler une œuvre dramatique, mais ce qui n'en a pas moins été applaudi avec transport. Il y a dans la

musique quelques morceaux brillans et d'un effet bien senti.

La seule nouveauté qu'on ait vue depuis longtemps au Théâtre de la Nation est le début de mademoiselle Joly dans le rôle d'Athalie. Ce début probablement n'aura pas de grandes suites; on a remarqué cependant dans son jeu plusieurs intentions fort justes, l'intelligence générale de la scène, une manière de débiter les vers assez soutenue, mais le caractère de sa figure et de sa voix se refusent également à la dignité de l'expression tragique, et ses moyens, qui dans la Comédie sont très-suffisans, ont paru d'une grande faiblesse dans la Tragédie.

S'il y a eu peu de nouveautés dramatiques à ce spectacle, il y en a eu d'un autre genre, et peu s'en est fallu qu'il ne soit devenu le théâtre de quelques dissensions assez vives pour donner de justes alarmes à la sagesse de notre auguste Municipalité. Le parterre a plus d'une fois fait frémir l'orchestre et les loges, et il est arrivé au moins deux fois que des citoyens paisibles, ne pouvant se sauver par la porte, ont jugé qu'ils n'avaient point de meilleur parti à prendre que celui d'escalader le théâtre et de s'enfuir par les coulisses. L'origine ou le premier prétexte de toutes ces scènes a été le refus de remettre la tragédie de Charles IX lors de la Fédération; on répondit au public qui demandait la pièce que deux acteurs qui devaient y jouer étaient malades. M. Talma

s'avança fort indiscrètement sur la scène et fit trop bien entendre que, si tous les Comédiens étaient aussi bons Révolutionnaires que lui, la pièce pouvait être donnée. Un pareil soupçon d'aristocratie jeté publiquement sur ses camarades leur parut dans les circonstances actuelles un crime de lésecomédie, et tous, à l'exception de madame Vestris, de M. Dugazon et mademoiselle Desgarcins, arrêtèrent de ne plus communiquer avec le sieur Talma. Le parterre échauffé par les amis de M. Talma, de madame Vestris, de M. Chénier, ne perdit aucune occasion de redemander à grands cris et Charles IX et Talma. L'autre parti ne manqua pas d'y envoyer également ses émissaires, et le spectacle fut souvent interrompu par cette grande querelle qui faillit plusieurs fois donner lieu à l'explosion la plus violente; enfin l'autorité municipale ne crut pas devoir différer plus longtemps de s'en mêler. En attendant que l'on eût examiné le fonds même du procès, l'on ordonna provisoirement aux Comédiens de donner une représentation de Charles IX. Ces Messieurs ayant osé résister, on fit fermer un jour leur salle, en les menaçant de toute la sévérité municipale et de toute la colère du Peuple. Ils furent obligés de céder à la force et de donner la représentation qu'on avait exigée de leur obéissance. Elle fut fort tumultueuse, mais il n'y avait point de précautions qu'on n'eût prises pour empêcher le désordre: dans la salle même le chef de la Municipalité, environné des principaux officiers de la ville, occupait la loge

du Roi, et toutes les avenues étaient gardées par de nombreux détachemens de la Garde à cheval; la contre-révolution, dont beaucoup d'honnêtes citoyens se voyaient déjà ménacés, fut heureusement prévenue ou réprimée. Le lendemain plusieurs Comédiens n'en eurent pas moins l'audace de donner leur démission, entre autres mesdemoiselles Raucour et Contat qui n'ont pas reparu depuis. Quant au sieur Désessarts, il abandonne, dit-on, les rôles à manteau pour les rôles à écharpe; il a reçu son brevet de surnuméraire dans la brave Légion des vétérans, connue sous la dénomination de Régiment Royal-Pituite. Les Actes des Apôtres assurent qu'il a commandé dans l'Inde une nappe de soixante-dix couverts pour lui servir d'écharpe.

De l'Etat de la France présent et à venir. Par M. de Calonne, Ministre d'Etat. Un volume in-8° de 440 pages, ayant pour épigraphe :

Statuo esse optimè constitutam Rempublicam quæ ex tribus generibus illis, Regali, Optimo et Populari, confusa modicè.....

CICER, de Repub.

C'est tout uniment un manifesté de ContreRévolution. L'auteur analyse tous les décrets de l'Assemblée nationale, les compare avec les principes établis dans les cahiers des différens bailliages, montre combien ces decrets et ces principes sont peu d'accord, et cherche à prouver que l'As

semblée n'a pu s'arroger le droit d'établir une nouvelle forme de gouvernement, et qu'en prétendant s'ériger en pouvoir constituant au lieu de pouvoir constitué, elle a véritablement usurpé le droit le plus inaliénable de la Nation. Il ose dire qu'après avoir renversé le gouvernemeut monarchique, on n'y a rien substitué qui puisse s'appeler gouvernement; que dans ce bizarre assemblage de pouvoirs et de principes qu'on a nommé Démocratie Royale, faute de pouvoir lui donner une dénomination raisonnable, on ne peut trouver qu'une source de dissensions intestines, qu'anarchie et chaos; qu'enfin le délire de nos augustes Législateurs se porte jusqu'à vouloir étendre leur fanatisme antimonarchique dans toute l'Europe, qu'ils menacent toutes les Couronnes, conjurent contre toutes les Souverainetés, attaquent la tranquillité de tous les pays.

Il conclut à ce que l'Assemblée défère à la réclamation nationale exprimée par les protestations des corps et par les déclarations individuelles, pour décider quels sont les décrets à maintenir, quels sont ceux à revoir, quels sont ceux à déclarer nuls. Mais si l'Assemblée se refuse à de si justes réclamations, si elle persiste å vouloir enchaîner les opinions par la peur, si elle prétend forcer l'intérêt général à se prosterner devant ses systèmes, il sera bien évident, dit-il, d'elle seule vient l'oppression, et tout moyen d'en préserver la Nation devra paraître légitime. Cet ouvrage, comme on peut croire, est fort

que

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