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La Bigotière portent l'empreinte du respect pour | résulter de ces contrats en avaient introduit et l'autorité que l'on doit attendre d'un fidèle ma- fait autoriser la pratique.

gistrat; s'ils témoignent, non seulement de sa La Bigotière, dans son Institution au droit piété, mais même d'un zèle ardent pour la reli- français, ne se borna pas à défendre cet usage gion, il faut convenir aussi que l'on y rencontre à l'aide des considérations que l'on pouvait une indépendance d'allure qui rappelle beaucoup mettre en avant pour le soutenir; mais il attaplus le ton des jurisconsultes du xvi siècle, qua de front la doctrine contraire, et entreprit comme d'Argentré et Dumoulin, que celui des de prouver que, ni la loi naturelle, ni le droit auteurs contemporains du règne de Louis XIV. ecclésiastique, ni les lois civiles. n'interdiIl est à croire que, par compensation à l'accrois-saient les stipulations d'intérêt renfermées dans sement des impôts, à la suppression des liber- des conditions équitables. tés municipales attaquées par des édits bursaux, L'autorité des lois était aussi bien engagée aux réformations si rigoureuses du domaine, à dans le débat que celle de l'Eglise. On ne voit la création de nouveaux offices vénaux, et à pas que le clergé breton se soit vivement préoctoutes les charges créées pour soutenir le poids cupé des assertions mises en avant par le jurisde trop longues guerres, on laissait parfois quel- consulte, car, sur neuf évêques de Bretagne. que liberté au peuple surtaxé, puisque la cen- un seul, nous ne savons lequel, crut devoir sure officielle ne fut pas offusquée des hardies- exprimer son opinion contre le prêt à intérêt ses du loyal écrivain. Mais, si celle d'une par-des deniers pupillaires. La faculté de théolotie du public se montra plus rigoureuse, c'est gie de l'Université de Nantes condamna aussi que ses doctrines, lorsqu'il fut appelé incidem-les propositions de La Bigotière, qui donnèrent ment à traiter de quelque point de discipline lieu à divers écrits. ecclésiastique, semblèrent aheurter toutes les opinions. L'extension que l'autorité des papes a reçue depuis le xre siècle ne lui plaît pas plus que celle que les rois se sont fait attribuer sur les nominations aux prélatures à une époque plus récente, et c'est tout au plus si la puissance épiscopale trouve grâce devant ses yeux, fixés avec complaisance sur la communauté de biens Un jurisconsulte bas-breton, M. Kerbuel, enet la participation à l'exercice de la juridiction treprit de répondre au P. Hernio, par un livre spirituelle qu'il croit voir régner dans le sacer-quí a pour titre : Traité des deniers pupillaidoce de la primitive Église. Il s'élève aussi contre la perception du casuel ecclésiastique, qu'il considère comme entaché de simonie.

Le P. Hernio, dominicain à Rennes, soutint, en 1692, la justesse de ces dernières décisions dans un Traité de l'usure, qu'il dédia au premier président de la Faluère; ce qui ferait supposer que le chef de la compagnie n'était pas tout-à-fait de l'avis de son collègue dans le Parlement.

res. Là Bigotière écrivit de son côté un Factum pour savoir si l'usage permet aux tuteurs de colloquer les deniers pupillaires à intérêt.

On conçoit très-bien que cet esprit de rigo- On pense bien que cette thèse favorite ne fut risme étroit et morose, renouvelé dans les con- pas oubliée dans le Commentaire sur la Coututroverses soutenues avec tant d'obstination par me, que notre auteur fit paraître en 1702, c'estles opposants à la bulle Unigenitus, ait ren-à-dire peu d'années après les débats que l'on contré des critiques peu indulgents, et que, dans les disputes qu'il provoquait, le caractère, la bonne foi et les sentiments de l'honnête magistrat n'aient pas toujours été respectés. Mais, d'après ce qui nous reste de la polémique soulevée par ses ouvrages, ce serait principalement son opinion sur le prêt à intérêt, dont il soutenait la légitimité contre le sentiment commun des théologiens de son temps, qui aurait amené ses adversaires dans la lice.

vient de relater. Il la soutient avec une nouvelle vigueur dans la septième partie de cet ouvrage. qui a pour titre : Du préi gratuit et usuraire; et comme, apparemment, les dissidents n'étaient pas encore rangés à son avis, il fit paraitre bientôt après son Traité de l'Usure et Intérét, dont il est fait mention dans les observations de Duparc - Poulain sur ses ouvrages, et dont M. de Kerdanet ajoute qu'il sert comme de suite au Commentaire de la Coutume, édition de 1702. Toujours est-il que nous ne le trouvons pas dans l'exemplaire de ce dernier ouvrage que nous avons sous les yeux.

L'art. 104 de l'ordonnance d'Orléans, alors en vigueur, défendait formellement le prêt à intérêt; mais, parmi les tolérances que l'usage avait pu faire admettre, il s'en était établi une La Bigotière était si préoccupé de la solidité en Bretagne pour les capitaux accumulés par des arguments qui recommandent l'admission l'économie des tuteurs. Les magistrals pen- du prêt à intérêt, que, dans un voyage qu'il fit saient qu'il était licite de les faire valoir, sans à Paris, il entreprit de les faire agréer par la Sorles engager et les aliéner à l'emprunteur par bonne, et il put reconnaître lui-même à cette ocdes arrentements à titre de constitut, et il pa- casion que leur force n'avait pas échappé à la raît que si tous les théologiens du pays n'ap- pénétration des graves docteurs. « J'ai trouvé prouvaient pas ce mode de placement, con- ces raisons si fortes, écrit-il dans son Comdamné par la rigueur des canons, la faveur des » mentaire sur la Coutume, que j'ai cru être minorités et le peu d'inconvénients qu'on voyait | » obligé de consulter MM. de la Sorbonne. Or,

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> dans la conférence que nous eûmes sur cela, | mination étaient responsables. La perspective > ils n'attaquèrent pas ces raisons, mais en d'un pareil danger, révélé par quelques exemreconnurent la force, et me dirent que depuis ples récents, effrayait les proches, et tous les peu M. Colbert les avait mandés pour leur moyens d'excuse étaient épuisés pour se garan» faire voir une déclaration toute dressée qui al- tir de la participation aux tutelles. » lait permettre la stipulation pour marchands, et il souhaitait qu'ils fissent un décret sur vénients, Louis XV régla l'ordre des tutelles Invité par les Etats à pourvoir à ces incon> cela. Ces messieurs lui répondirent que, si on de la province par son édit du 2 décembre 1732, interrogeait chacun des docteurs en particu- dont une disposition rappelle le droit commun lier, on en trouverait un très-grand nombre de la France, même à l'égard des deniers pupil» dans l'opinion que je défends; mais que ja-laires, et interdit pour l'avenir l'usage qui s'émais on ne porterait la sacrée Faculté à l'au- tait établi d'en autoriser le placement à intérêt. toriser par un décret, parce qu'ayant fait des > résolutions contraires en plusieurs rencontres, il ne fallait pas attendre une rétractation pu» blique. >>

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qu'elle a survécu aux changements introduits Quant à la question théologique, on sait dans nos lois civiles, qui ont enfin réhabilité ces Toutefois, heureux d'avoir pour lui l'opinion elle n'est pas résolue, elle a du moins fait un contrats si usités à l'époque où nous vivons. Si avouée du grand Colbert et l'approbation privée grand pas, alors que répondant à une consultade MM. de la Sorbonne, le vieux magistrat ne tion adressée par l'évêque de Rennes, le Saintdésespérait pas de voir triompher son sentiment, Siége a exprimé l'avis qu'on ne devait pas trouet il le recommandait à la sollicitude des minis- bler la conscience des prêteurs. Ce ne sont pas tres parmi les mesures que l'intérêt du pays ré- les bonnes raisons qui manquaient à la cause du clamait le plus instamment. «Nous avions, con- prêt à intérêt; mais elle avait le malheur d'avoir >> tinue La Bigotière dans le même ouvrage, contre elle les anathèmes de tous les SS. PP. et >> prié feu M. le chancelier (M. Boucherat, au- de tous les conciles, depuis la naissance du quel succéda en 1699 M. de Ponchartrain) de Christianisme. Or l'Église, qui vit par l'autorité » vouloir bien entrer dans nos besoins, et de Christianisme. Or l'Église, qui vit »> nous aider près du roi pour avoir des lois fixes et la tradition, ne pouvait pas secouer facile> qui puissent assurer le repos des familles et Il y avait quelque chose de mieux à faire que ment le poids de ces préjugés si considérables. » des consciences. Nous lui avions représenté Π >> que toutes nos lois en Bretagne avaient be-d'argumenter : c'était de signaler, en étudiant soin de revue et d'appui, et que nos juridic-les mœurs des premiers siècles, les différences »tions étaient en trop grand nombre, que cette qui séparent le prêt à intérêt moderne de l'u> multiplication et la cherté des procédures ren> nuée d'officiers mangeait le peuple, que la >> daient la justice inaccessible aux pauvres, que » nos Etats ressemblaient à un fou furieux qui » ne se sert d'une ombre de liberté qui lui reste » que pour se faire du mal, et que rien n'était plus pressant que de régler les matières d'u- M. de Kerdanet cite, parmi les ouvrages de La >> sure comme avaient fait nos empereurs, parce Bigotière, un excellent petit livre intitulé: Du >> que l'Université de Nantes voulait condamner devoir des juges et de tous ceux qui sont dans les > l'intérêt des deniers pupillaires, et qu'un de fonctions publiques. Rennes, Nic. Audran, 1695. » nos évêques avait défendu d'absoudre de ce in-16. Si, comme nous n'en doutons pas, cet > crime si l'on ne voulait restituer ces intérêts. opuscule n'est autre chose que la dissertation > Espérons que M. de Pontchartrain, qui a tant sur le même sujet qui se lit en tête de l'Insti» de pénétration et qui connaît toutes nos né-tution du droit français, et qui est reproduite » cessités, voudra bien s'y rendre présent, et » qu'il ne sera pas insensible à nos plaintes. » La Bigolière ne vit pas juger la cause qu'il avait embrassée avec tant d'ardeur, car sa décision traîna encore long-temps; il aurait eu d'ailleurs le chagrin d'être déçu dans ses voeux et ses espérances.

cette tâche de patience et d'érudition, feu M. le sure justement flétrie et interdite par les premiers interprètes de l'Évangile; et en abordant cardinal de la Luzerne semble avoir plus fait que tous ceux qui, comme La Bigotière, se sont renfermés dans la voie du raisonnement.

sous une autre forme dans le premier chapitre du Commentaire sur la Coutume, nous nous permettrons de n'être pas de l'avis du biographe, et de dire que nous n'y trouvons pas la précision qui distingue ordinairement les productions de notre auteur.

La Bigotière était retiré dans sa famille, au En Bretagne, le tuteur devait, aux termes château de la Baratière, voisin de Vitré, lorsde la Coutume, donner caution préalable de sa qu'il succomba, le 29 septembre 1727, à l'âge gestion, ce qui était au moins difficile, surtout de 90 ans. Il n'y avait guère que deux ans lorsque la durée de la tutelle ou l'importance qu'il avait cessé de prendre part aux travaux de la fortune des mineurs pouvaient porter la de sa compagnie; car, ainsi que le marque Dusomme du compte à un chiffre considérable. parc-Poullain, il exerça ses fonctions pendant En cas d'insolvabilité du tuteur, les parents et près de soixante ans. Il a laissé après lui des même les juges qui avaient concouru à sa no-marques de sa piété dans diverses fondations

auxquelles son humilité lui a interdit d'atta- | » Un an après arriva le combat entre la Surveilcher son nom. "lante et le Québec. Je n'en rappelle pas les cirLes Tables du Parlement de Bretagne font» constances; ce combat opiniâtre a été assez aussi mention d'un magistrat du même nom » célébré en Angleterre. J'y eus le bras droit emqui fut reçu conseiller en 1706. Cette famille,» porté, et je fus blessé à la main gauche et au aujourd'hui éteinte, a dû se fondre par alliance » côté. Je reçus pour récompense la croix de dans celle des Legonidec, qui a donné aussi » Saint-Louis, à l'âge de vingt-et-un ans, et une plusieurs magistrats à ce Parlement. A. D. B. » pension de 1,000 fr. (44 liv. sterl.) et le grade » de lieutenant de vaisseau. Un an après le LA BINTINAYE (le chevalier AGATHON-» combat, les trois ordres des Etats de BretaMARIE-René de), - né à Rennes, le 24 mars » gne (15, 16 novembre 1780) m'accordèrent, à 1758, était major de vaisseau, lorsqu'il quitta» vingt-deux ans, le droit de séance dans leur le service de la marine. Ayant émigré en An- » assemblée, que la loi n'accordait qu'à vingtgleterre, au commencement de la Révolution,» cinq ans. Aussitôt que la guérison de mes il se trouvait à Londres lorsque le Morning-» blessures me permit de reprendre mon serChronicle publia, sous le titre de The only pri-» vice. je fus nommé au commandement d'un vileges the nobility valued were distinction o» petit bâtiment. Je n'avais point encore servi frank and exemption from taxes, un article » sur des vaisseaux de ligne, et je voulais accalomnieux contre la noblesse française. La» quérir tous les genres d'instruction. Je refu Bintinaye, indigné, le réfuta dans une brochure» sai le commandement, et je m'embarquai sur qui fut accueillie avec faveur et qui était inti- » le Triomphant: de là je passai à bord de l'Intulée Observations du chevalier de la Binti- vincible. Ensuite je refusai un congé qui me naye sur un article inséré dans le Morning- » fut offert par le ministre pour m'embarquer Chronicle (27 janvier 1792), ouvrage qui a pour » à bord du Magnifique, et puis surla Couronne, but de faire connaitre l'état des choses en France » pour passer aux Indes-Occidentales, où je avant la Révolution, et de dévoiler les causes et » restai jusqu'à la fin de la guerre. J'en revins les moyens qui l'ont produite. London, J. de » en juin 1783. Des circonstances particuBrett, 1792, in-8o de 110 p., outre le titre. On» lières enchaînèrent mon activité jusqu'au trouve, aux pages 6, 7, 11 et suivantes, une » commencement de juin 1785. Je pris alors le auto-biographie de La Bintinaye, écrite avec la » commandement d'une flûte du roi que je conmodestie et la dignité dont il avait fait preuve » duisis dans la Baltique. Je fis, en 1786 et aux États de Bretagne, le 16 novembre 1780, » 1787, deux campagnes d'évolutions; M. le lorsque cette assemblée l'admit, avant l'âge, à » vicomte de Marigny me chargea des fonctions prendre part à ses travaux, en récompense du» de major de l'avant-garde qu'il commandait. courage qu'il avait montré dans le combat de» En septembre 1787, lors des préparatifs de la Surveillante, le 10 octobre 1779. ( Voir les » guerre occasionés par les troubles de Holregistres manuscrits des Etats de Bretagne.)» lande, je reçus ordre de me rendre à Toulon Voici les passages de la brochure du chevalier » pour y prendre le commandement de la fréde la Bintinaye, dans lesquels il raconte sa vie : » gate la Friponne, de 32 canons. A mon arriJe vais, dit-il, tàcher d'opposer quelques » vée dans ce port, les préparatifs de guerre » vérités à ces mensonges. Il (le journaliste) ose » ayant cessé, on substitua à la frégate qui >> traiter ainsi un ordre qui s'est toujours fait un» m'était destinée la corvette la Sardine. Je » devoir de sacrifier ses biens et son sang à la » conduisis cette corvette dans les Echelles du » défense de la patrie, et dont tout membre, pour » Levant, où elle faisait partie d'une division > ainsi dire, naissait soldat. Trop indigné pour » de huit bâtiments destinés à la mission délicate » m'arrêter à recueillir les exemples sans nom-» de faire respecter la neutralité de la France au "bre qui attestent le dévouement de la noblesse » milieu des hostilités des Russes et des Turcs. » française, je citerai le mien, je découvrirai ma » Je revins à Toulon, au mois de décembre poitrine et je montrerai mes blessures. » 1788. Là finit mon activité. J'obtins, pour

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» Je suis entré dans le corps de la marine de» revenir au sein de ma famille, un congé qui » France à la fin de 1773, à l'âge de quinze ans. » expirait à la fin de 1789. Avant son expira» Après avoir fait une première campagne dans » tion, je demandai ma retraite. Je n'ai pas be» la Manche, je me suis embarqué à la fin de» soin d'en détailler les motifs, je les ai publiés 4775 sur une frégate du roi expédiée aux In- » dans une déclaration qu'à mon arrivée à Lon⚫des-Orientales. Je suis revenu en France au dres j'ai trouvée traduite en Anglais. J'ai re» mois de janvier 1778. Au mois d'août de cette » noncé solennellement à ma pension et aux » année, j'armai sur la frégate la Surveillante,» appointements de retraite que je pouvais es» commandée par M. du Couédic. Le comman-» pérer. Ainsi, il ne me reste aucun prix de mes » dant en second de cette fregate ayant passé » services, que l'estime des honnêtes gens. » au mois d'octobre suivant sur un autre vais-» J'espère qu'il ne sera pas au pouvoir d'un vil » seau, M. du Couédic me fit l'honneur de me» calomniateur de me l'oter. » confier les fonctions que cet officier quittait. Le chevalier de la Bintinaye mourut à Lon

dres à la fin du mois de décembre 1792, noyé | fut successivement nommé échevin, prieurdans la Tamise.

P. L...t.

consul, juge royal de police et l'un des prévôts et administrateurs des hôpitaux. De la vivaLA BINTINAYE (l'abbé FRANÇOIS-MARIE- cité, une mémoire des plus heureuses, un goût Elisabeth de), — frère aîné du précédent, né vif et précoce pour le travail permirent à La le 3 novembre 1751, à Rennes, où il est mort Bletterie de commencer, dès l'âge de six ans, le 23 novembre 1816, a coopéré aux Actes des ses études au collège de Rennes, où, chaque Apôtres de Peltier et à l'ouvrage intitulé: Co- année, il obtint les premiers prix dans toutes mus, masque de Milton, représenté au château les classes et dans toutes les facultés. Entré en de Ludlow, en 1634, devant John Egerton, 1712 dans la congrégation de l'Oratoire, il alla comte de Bridgewater, lord président du pays l'année suivante faire son cours de théologie à de Galles (publié par les soins et aux frais de Saumur. Choisi ensuite pour professer les huM. Francis-Henri Egerton), traduction lit- manités à Soissons, et la rhétorique à Nantes, térale (en vers français, par M. de la Binti-il s'y fit connaître par diverses pièces de poénaye, et en vers italiens, par Gaetano Polidori sie dans lesquelles on remarqua, outre la véda Bientina). Paris, de l'imprimerie de P. Di- rité des pensées et la noblesse des sentiments, dot l'aîné, 1812, in-4°. Doublement excentri- un certain talent de versification. De ce nombre que comme Anglais et comme bibliomane, sir étaient une tragédie de Thémistocle, qu'il comFrancis Egerton, qui était d'ailleurs constam-posa pour ses élèves du collége de Nantes; une ment occupé de l'illustration de sa famille, crut réponse qu'il fit, à l'occasion d'une aventure la rehausser en publiant le poème de Comus, peu ridicule, aujourd'hui oubliée, et sous le titre de connu en France, mais qui, indépendamment très-humbles Remontrances à M. de Montemde son mérite intrinsèque, en avait un autre à puis, à un vaudeville malin attribué au P. Duses yeux, celui d'avoir été composé par Milton pour être récité par les membres des deux sexes de la famille Egerton. Par une conception bizarre, sir Francis exigea des deux traducteurs que chaque vers anglais fût reproduit littéralement ligne pour vers, sans rime ni mesure c'est-à-dire comme on n'a jamais traduit. « J'ai > engagé, dit sir Francis, deux personnes dont » les talents littéraires sont connus, à faire ces > deux traductions. Je les ai revues avec soin, > afin qu'elles fussent littérales et exprimas> sent le véritable sens de l'auteur. Dans ce but, > je me suis permis de faire des mots composés. ▸ J'en ai même créé de nouveaux. On trouvera > que le français et l'italien ne sont pas bien purs. (Sir Francis y avait mis bon ordre ). >L'on y découvrira aussi de nombreux défauts. » Je désirerais qu'on ne les imputât qu'à moi > seul. Ce souhait a dû être amplement exaucé. On peut juger, par l'échantillon suivant, de la bizarrerie du travail amphigourique pour l'exécution duquel sir Francis avait attaché ses deux traducteurs au lit de Procuste :

Avant que cet espion babillard d'Orient,
L'aube delicate des hauteurs indiennes,
Commence à poindre par son soupirail,
Et découvre au soleil bavard
Nos solennités cachées, etc.

cerceau, et une petite épître qu'il adressa au duc de Saint-Aignan, nommé ambassadeur à Rome, épître que M. Miorcec de Kerdanet nous a conservée dans ses Notices sur les écrivains de la Bretagne, p. 326.

La Bletterie enseignait la philosophie dans la maison de Montmorency, où l'école de théologie de Saumur avait été transférée, lorsqu'il fût chargé, en 1723, des conférences théologiques établies à Tours. Ces conférences, qui embrassaient l'Écriture-Sainte, la doctrine des pères et des conciles, le dogme, la morale et l'histoire ecclésiastique, se continuèrent pendant cinq ou six ans aux applaudissements d'un grand nombre d'auditeurs. Les succès de La Bletterie dans cet enseignement déterminèrent ses supérieurs à le choisir pour occuper une chaire semblable au séminaire de Saint-Magloire, à Paris. Afin de répondre dignement à la confiance dont il était l'objet, il crut devoir faire une étude encore plus spéciale qu'auparavant de l'Écriture-Sainte et de la langue hébraïque, et il s'y livra avec une telle ardeur qu'il faillit perdre la vue, laquelle resta grandement affaiblie pour le reste de ses jours.

C'est dans ce temps que parut le système de Masclef, qui proposait de dégager l'hébreu de cette multitude de signes et de points massoréLa famille de l'abbé de la Bintinaye et plu- thiques dont plusieurs servent de voyelles, et sieurs émigrés qui connaissaient sa liaison avec à se borner à mettre après la consonne la Ed. Burke, lui attribuent la traduction des Ré-voyelle qu'elle a dans l'ordre de l'alphabet. Ce flerions sur la Révolution de France, etc., 4790, in-8°. La deuxième édition corrigée nous apprend que la première et les contrefaçons renferment beaucoup de fautes. P. L...t.

LA BLETTERIE (Jean-Philippe-René de), - naquit le 25 février 1696, à Rennes, où son père, qui exerçait la profession de pharmacien,

système était développé dans la Grammaire intitulée: Grammatica hebraïca à punctis aliisque inventis massorethicis libera. Parisiis, ColTombat, 1716, in-12. Il eut un grand nombre de défenseurs et de détracteurs. La Bletterie se rangea parmi les premiers, et publia, pour le soutenir, ses Vindicio methodi Masclefiance, qu'il inséra dans le t. II de la grammaire de

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Masclef, dont il donna une seconde édition. [de Constance, son persécuteur et le bourreau Paris, 1731, 2 vol. in-12. Malgré l'exposition de sa famille, l'ancienne religion des maîtres la plus claire et la plus précise de la méthode du monde, qui, faisant de lui un empereur et proposée; malgré l'habilité de l'éditeur à en un pontife, offrait une double satisfaction à sa préconiser les avantages; malgré enfin la lati- vanité. nité pure et élégante des Vindicia, La Bletterie ne put faire triompher la mauvaise cause dont il s'était fait le champion, et son livre est depuis long-temps oublié, comme le système qui le fit naître.

Saint-Honoré avec plusieurs de ses confrères qui, comme lui, n'avaient pas voulu se soumettre à un réglement de discipline sur les perruques, La Bletterie n'en resta pas moins attaché de cœur à une congrégation à laquelle il tenait par choix, par estime et par reconnaissance. Quoique sans fortune, il refusa l'hospi talité que lui offraient à l'envi des amis puissants, et préféra se retirer chez M. Thomé, où, autant par goût que par reconnaissance, il se chargea de l'éducation des deux fils de ce respectable magistrat.

A la Vie de Julien succéda l'Histoire de l'empereur Jovien, etc. Paris, Prault, 1748, 2 vol. in-12. - Paris, 1776, in-12. On trouve dans cet ouvrage une Dissertation sur le Traité de Jovien avec les Perses, et une traduction des La santé de l'abbé La Bletterie ne lui per- Césars, du Misopogon et de quelques Lettres mettant plus de suffire aux exigences de l'en- de Julien, avec des notes curieuses. Cette nouseignement, il quitta la maison de Saint-Ma- velle production parut moins intéressante que gloire pour se retirer dans celle de la rue la Vie de Julien et lui fut jugée bien inférieure. Saint-Honoré, la principale de l'ordre des Ora- Cela devait être. L'histoire d'un homme métoriens, et considérée comme le sanctuaire de diocre, malgré son dévouement au Christianisl'érudition sacrée et de l'éloquence chrétienne. me, n'offrait pas le même attrait que celle d'un Là, se rappelant les œuvres de l'empereur Ju-prince qui fut grand malgré ses erreurs. lien, dont il avait autrefois conçu, en les lisant, Sorti volontairement de la maison de la rue une idée supérieure peut-être à leur mérite, il résolut d'en traduire quelques morceaux choisis; mais, comme l'état de sa vue ne lui permettait guère de la fixer sur les textes grecs, il s'occupa d'une préface historique de ce recueil, laquelle devint insensiblement une histoire complète qu'il publia sous ce titre : Vie de l'empereur Julien (en six livres). Paris, Prault, 1735, in-12, réimprimée en 1746, chez Desaint et Saillant, avec des additions, des corrections et deux cartes. Cet ouvrage curieux, impartial, aussi sensé que bien écrit, et dont les critiques de Voltaire et de Condorcet n'ont pas Sa nouvelle situation lui ouvrit les portes des diminué la réputation, fit la fortune littéraire sociétés littéraires. L'Académie des inscriptions de l'auteur. On lui sut gré d'avoir tracé un et belles-lettres l'avait adopté depuis 1742. portrait exact et consciencieux du prince qui, Quelques années après, ses amis lui conseillèbien qu'infidèle à la religion dans laquelle il rent de solliciter une place vacante à l'Acadéavait été élevé, en avait pourtant, jusqu'à un mie française. Son concurrent était Racine le certain point, observé les prescriptions mora- fils. La Bletterie l'emporta; mais la cour exclut les. Généralement, en effet, La Bletterie nous les deux rivaux comme jansénistes. La Blettele montre tel qu'il fut un mélange singulier rie n'insista pas, et quoique ses amis fussent de grandes qualités, de vertus, de faiblesses. parvenus à faire révoquer l'exclusion, il se rede travers. Des critiques judicieux ont pensé fusa à toute démarche, et content de l'estime qu'il n'avait conçu ni développé avec assez des académiciens « qui, dit le président Héd'ampleur certaines faces du caractère de Ju-» nault, le regardaient comme un collègue qu'ils lien; qu'il n'avait pas fait preuve d'une saime» n'avaient pas,» il se renferma dans le sein critique en accueillant des anecdotes, accréditées il est vrai par une longue tradition, ou en semblant convaincu que Julien fût attaché de bonne foi, jusqu'à la superstition même, aux fables du paganisme. C'est ce que nul penseur solide ne supposera jamais d'un homme tel que Julien, quoi qu'en ait dit Prudence, dans ces vers qui caractérisent assez bien d'ailleurs ce prince philosophe :

Ductor fortissimus armis, Consultor patriæ, sed non consultor habendæ Relligionis; amans tercentum millia divùm, Perfidus ille Deo, sed non et perfidus orbi. Il est aujourd'hui avéré pour tous que, par une malheureuse politique qui aggrave les torts de sa déplorable apostasie, puisqu'elle fut calculée, Julien crut devoir préférer à la religion

de l'Académie des inscriptions et dans ses fonctions de professeur au Collège de France. En effet, par une inexplicable bizarrerie, les soupçons jetés sur ses doctrines n'avaient pas empèché de lui conserver cette chaire, et l'orthodoxie avait été jugée plus nécessaire chez l'académicien que chez le professeur.

A force d'expliquer Tacite au Collège de France, il se passionna tellement pour cet historien, qu'il se persuada ou se laissa persuader qu'à lui seul appartenait l'honneur de traduire un auteur qui n'avait point encore eu de digne interprète dans notre langue. Le succès sembla justifier ses espérances, lorsqu'il débuta, en 1755, par la publication en 2 vol. in-12 de la traduction de la Vie d'Agricola et des mœurs des Germains. Ces deux opuscules, précédés

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