Imatges de pàgina
PDF
EPUB

colonies de la Guyane hollandaise, dont les Anglais s'étaient emparés.

Martinique à Saint-Eustache, l'Améthiste combattit à la fois contre une frégate anglaise de 40 canons et un brigantin de 10 canons qui, La division mouilla, le 29 janvier 1782, dans ayant eu avis de son départ, partirent d'Anti- la rivière de Surinam, et deux cent cinquante gue pour venir l'attaquer. Le commandant ral- hommes furent débarqués pendant la nuit. lia tout son convoi, auquel il facilita les moyens Après une marche de près de vingt-quatre heude s'échapper, en soutenant pendant cinq heu- res dans les bois et dans les marécages, ce déres, malgré l'infériorité de ses forces, un com- tachement, qui avait été égaré par ses guides, bat acharné. A la nuit, ayant beaucoup d'hom- entra sans éprouver de résistance dans Démémes tués ou blessés, toutes ses manœuvres dé-rary, dont le fort avait été évacué à l'apparition gréées, et ses deux mâts de hune coupés et de la division française. Essequibo capitula le tombés à la mer, il fut abandonné des Anglais, 5 février, et, le 8, Berbice se rendit au chevaqui se mirent à la poursuite du convoi, dont ils lier de Suzannet, lequel y avait été envoyé avec ne purent prendre qu'un seul bâtiment. Le ré- les corvettes. Après avoir rempli, du 1er août sultat de ce combat valut la croix de Saint-Louis au 30 décembre 1782, d'après les ordres du au chevalier de Courcy, âgé de trente-cinq ans, gouverneur des Iles-du-Vent, les fonctions de et fils d'un lieutenant de vaisseau ayant fait gouverneur particulier de Démérary, Essequibo partie de l'expédition de Duclerc contre Rio-Ja- et Berbice, Kersaint reprit la mer sur l'ĺphineiro, où il subit trois années de captivité jus- génie, d'où il ne débarqua que le 14 avril 1784. qu'à sa délivrance par Duguay - Trouin. Ker- Peu après il se rendit à Versailles, où il proposa saint, après avoir passé encore quelques années au maréchal de Castries, ministre de la marine, aux Antilles, reçut à son tour un commande- l'adoption de divers changements imaginés par ment, celui de la Lunette, dans l'escadre de lui dans l'armement et l'arrimage des vaisseaux. M. de Breugnon; envoyé pour faire la paix avec Il s'était en outre occupé du perfectionnement le Maroc en 1766, et nommé lieutenant de vais- du doublage en cuivre, et c'était sur sa demande seau en 1770, il retourna avec un nouveau com- que la frégate l'Iphigénie, qu'il commandait mandement aux Antilles, où il épousa, en 1771, en 1778, fut doublée sur le modèle de sa prise, demoiselle Claire Dalesso d'Esragny, dont illa Lively. Il avait aussi donné le plan des cuieut une fille unique, Claire, née à Brest le 20 sines, dites à la Kersaint, qui ont été perfectionfévrier 1777, et mariée au duc de Duras. (Voy. nées depuis. Enfin, il avait imaginé un nouveau Biog. bret., t. Ier, p. 654.) système de voilure; d'après lequel la coupe des basses voiles des vaisseaux était triangulaire au lieu d'être carrée. Il se proposait de faire l'épreuve de ce système sur le vaisseau le Léopard, qu'il commandait en 1786; mais, ayant été promu chef de division le 1er mai de cette année, il dut remettre son commandement au vicomte Bernard de Marigny, qui expérimenta la nouvelle voilure pendant une campagne de quelques mois dans les mers du Levant. Le nouveau système, jugé défavorablement par M. de Marigny, donna lieu à un rapport contraire à son adoption. Kersaint, blessé dans son amour-propre d'auteur, cessa dès ce moment d'entretenir aucune relation avec M. de Marigny, lequel, comme nous l'avons vu, avait épousé une de ses sœurs, veuve du baron de Courcy. Reparti pour Versailles, à l'époque de l'Assemblée des notables, Kersaint ne put détruire dans l'esprit du nouveau ministre, La Luzerne, l'effet du jugement que son beau-frère avait porté de ses inventions. Ce dernier ayant ensuite été nommé sous-gouverneur du Ďauphin, et ayant embrassé le parti de la cour, il n en fallut pas davantage pour jeter Kersaint dans le parti opposé; l'ambition et l'envie de se populariser firent le reste.

Il commandait en 4776 la frégate la Favorite, lorsqu'il soutint un combat à la suite duquel il fut promu chevalier de Saint-Louis. En 1778, comme chargé du commandement de la frégate de 32 l'Iphigénie, dont il était pourvu depuis l'année précédente, il était attaché à l'armée du lieutenant-général d'Orvilliers, qui croisait dans la Manche. Ayant reçu l'ordre de chasser en avant de l'armée, il joignit, le 10 juillet, à la hauteur d'Ouessant, la frégate anglaise la Lively, de 22 canons et de cent quatre-vingts hommes d'équipage, qu'il hêla. L'Anglais ayant refusé d'obéir à la sommation qui lui était faite de venir se faire raisonner par le général, amena son pavillon aux premiers coups de canon qui lui furent tirés. Après cette croisière, il en fit une autre dans laquelle il s'empara de la Cérès et de plusieurs bâtiments, qui amenèrent la capture de six cent quatre-vingt-seize hommes d'équipage et de cent seize pièces de canon. Fait capitaine de vaisseau le 13 mars 1779, il commandait encore l'Iphigénie lorsqu'il partit de Rochefort, le 8 octobre 1781, avec la frégate de 26 l'Aimable, capitaine chevalier de Suzannet; la corvette de 20 le Rossignol, capitaine chevalier de Kersaint, frère du commandant de l'expédition; le Chien-de-Chasse, de 22, capitaine vicomte de Pluvinel; le David, de 18, capitaine chevalier Dombideau, et quelques bâtiments de transport portant six cent soixante hommes de troupes de terre et de mer, pour reprendre les

Renonçant à la carrière active du marin, il se fixa à Paris, où son esprit actif et pénétrant le fit bientôt remarquer. Lié avec les principaux organes du parti philosophique, il partagea leurs doctrines et réclama le premier en faveur

fut presque entièrement abandonné, et que ses principaux membres établirent celui des Feuillants, Kersaint, effrayé de la solitude des Jacobins, conseilla aux membres restants de se dissoudre, de fermer la salle et d'en porter les clés aux Feuillants. Cet avis fut repoussé par Pétion, Robespierre, Buzot, et même l'abbé Sieyes, à peu près les seuls constituants qui n'eussent pas déserté le club. Ceux-ci firent de nouvelles recrues, et le club continua sous la direction des Girondins, auxquels Kersaint se trouva ainsi affilié: Il le fut aussi par sa colla

de la double représentation du Tiers par son écrit intitulé Le Bon Sens, par un gentilhomme breton. Paris, 1788, in-8° et in-4°. Cet écrit, dans lequel il attaquait non seulement les priviléges, mais encore l'existence des deux premiers ordres, fut le signal de la guerre livrée à l'ancienne constitution de la France. Comme on supposait à Kersaint une connaissance approfondie des ordonnances et réglements organiques de la marine militaire et administrative; comme il traitait ces matières dans le Journal de la Société, publié, dès 1789, par Condorcet, Dupont de Nemours, etc., le comité de l'As-boration à la Chronique du mois, journal dont semblée constituante le fit; plusieurs fois, ap- Clavière, Condorcet, Mercier, Brissot, etc., peler dans son sein pour s'éclairer de ses con- commencèrent, en 1794, la publication contiseils et de ses lumières. Ce fut dans ce but qu'il nuée jusqu'en 1794, et où Kersaint fut encore lui lut, au mois de novembre 1789, ses Insti- chargé de traiter les questions maritimes et cotutions navales. Dans cet ouvrage, contenant loniales. Cette collaboration est attestée par un un projet de reconstitution entière de la marine, grand nombre d'articles parmi lesquels on requi fut repoussé par le comité, Kersaint se pro- marque ceux sur l'Etat des colonies, et par nonçait pour la liberté des professions mariti-d'autres sur des sujets différents, tels que ceux mes, et s'élevait contre le système des classes, sur l'Inde et la Monarchie sans roi, ce dernier qu'il appelait un régime de servitude régulière-inséré dans la Chronique du mois de septembre ment ordonné, et convenant assez bien à un 1792. despotisme dissimulé et usé. A ce moyen de Kersaint étant venu prendre place à l'Assemrecrutement de l'armée navale, il préférait la blée législative, le 2 avril 1792, en remplacepresse,« moyen hardi, disait-il, mais que jus- ment. de Mosneron, démissionnaire, chercha »tifient la nécessité et la loi suprême du salut aussitôt à faire prévaloir ceux de ses projets qu'a» public, et qui convient à un peuple libre, à vait repoussés le comité de l'Assemblée natio> des hommes accoutumés à courir des hasards nale. Quatre jours après son admission, il fit » et à les braver. » Il voulait aussi une liberté rejeter la motion présentée par Théod. Lameth, absolue dans la composition de l'administration au nom du comité de la marine, de créer des de la marine. Kersaint, mécontent des justes corps spéciaux d'artillerie et d'infanterie, par le refus du comité, l'attaqua vivement dans les motif que la marine devait faire partie du déjournaux, et en appela aux assemblées futures partement de la guerre, et que d'ailleurs les cadu peu de cas qu'on faisait de ses projets. Le nonniers matelots suffisaient au service de l'arministère, de son côté, lui montra combien il tillerie des vaisseaux. Le 1er mai suivant, il fit, était mécontent de ses dangereuses utopies, en au nom des comités diplomatique et de la mal'écartant du nombre des contre-amiraux nom-rine, un rapport sur un projet de décret qu'il més lors de la réorganisation du mois de mai 1794; mais il fut amplement dédommagé de cette exclusion par son élévation, le 1er janvier 1793, au grade de vice-amiral, qui ne fut, du reste, pour lui qu'une distinction purement honorifique et de bien courte durée

leur avait soumis, en vue de faire prononcer l'abolition de la course ou des armements de corsaires. Ce projet, conçu, sous l'empire d'idées plus chevaleresques que réfléchies, ne tendait à rien moins qu'à réduire nos moyens de défense contre les nations ennemies. L'Assemblée l'éKersaint, qui avait présidé, en 1789, l'As- carta. le 30 mai, et le remplaça, sur la motion semblée électorale de Paris, fut élu, l'année de Vergniaud, par une invitation au pouvoir suivante, administrateur du département de la exécutif de convoquer la réunion d'un congrès Seine et député suppléant à l'Assemblée légis- européen qui aurait été appelé à prononcer la lative. Ce fut en cette double qualité que, le suppression des armements en course, et à as5 janvier et le 12 février 1792, il vint haran- surer, en temps de guerre, la libre navigation guer l'Assemblée, soit pour lui assurer, au commerciale de tous les peuples. Le projet de nom du Conseil général du département, qu'il créer une artillerie et une infanterie spéciales partagerait tous les dangers dont elle pourrait à la marine ayant de nouveau été présenté, le être menacée, soit pour lui proposer de bâtir, sur les ruines de l'ancienne église de la Madelaine, un palais qui eùt servi aux séances de la représentation nationale et aux travaux de ses comités.

A la formation des clubs, il fit partie de celui des Jacobins, et, lorsqu'après les événements, au Champ-de-Mars, le 17 juillet 1794, ce club

12 mai, Kersaint le combattit comme onéreux à l'Etat, comme nuisible à la marine elle-même et en particulier aux canonniers matelots. comme imprudent surtout, en ce qu'il mettait neuf mille hommes de plus à la disposition du pouvoir exécutif. Il termina en demandant l'incorporation dans l'armée de terre de toutes les forces dépendantes de la marine, et proposa de

fonder dans les ports des écoles d'instruction pour le canonnage.

Les opinions qui précèdent servirent de base à toutes celles que Kersaint développa, soit à la tribune, soit par la voie de la presse; elles ne sauraient néanmoins faire connaître suffisam-jet de décret prononçant la suspension du poument son caractère politique. Il se dessine nettement dans ses votes enregistrés au Moniteur, votes dont nous retracerons succinctement les principaux. Tous démontrent que sa pensée dominante était l'abaissement, l'abolition même de la royauté. Ce rôle, il l'avait fait pressentir dès le mois de mars 1794, en reprochant dans les journaux à M. de Lessart, alors ministre de l'intérieur, d'avoir donné au roi, dans une proclamation, le titre de chef suprême de la na-me commissaire de l'Assemblée, de calmer

de concert avec Lacroix et Lasource, fait décréter la formation d'un corps de Savoyards, sous le nom de Légion Allobroge, il poursuivit sa demande de déchéance du roi, en lisant, le 8 août, à la commission extraordinaire, un provoir exécutif dans les mains de Louis XVI, et il proposa une organisation provisoire du ministère, telle à peu près qu'elle fut décidée après le 10 août. Il joua un rôle actif dans cette journée, soit à l'intérieur de l'Assemblée, en demandant que la commune fût tenue de rendre compte de tous les mandats d'amener qu'elle avait décernés ou fait décerner, etc., soit à l'extérieur, en essayant, à trois reprises, comtion. l'effervescence du peuple. Envoyé le même Lorsqu'il fut question, le 13 avril 1792, de jour, avec Antonelle et Péraldi, à l'armée du mettre en accusation le marquis de Noailles, centre; il proclama la République à Soissons et ambassadeur à Vienne, Kersaint demanda à Reims, et dès le 12, les commissaires adresqu'auparavant les pièces qui le compromettaient sèrent à l'Assemblée un rapport attestant les fussent soigneusement examinées, parce qu'il dispositions favorables de toutes les populations. était impossible, à son avis, que l'ambassadeur S'étant ensuite rendu dans le département des n'eût pas agi conformément aux ordres du roi. Ardennes, il concourut aux promptes mesures Le 24 du même mois, à l'occasion d'un acte de qui garantirent la France de l'invasion étranpolice exécuté dans le jardin des Tuileries par gère. Réélu à la Convention par le département les Suisses et les gardes nationaux contre des de Seine-et-Oise, il s'empressa, le 23 septemindividus qui avaient proféré de grossières in-bre, de déposer sa croix de Saint-Louis sur le jures contre le roi et la reine, jusque sous les bureau-du président, non comme don patriofenêtres de leurs appartements, il demanda que tique, mais à titre de restitution. Le 2 octobre, les Suisses ne montassent plus la garde chez à l'occasion d'une pétition demandant l'augle roi; que la garde nationale ne fit plus auprès mentation du prix de la journée des ouvriers et de lui que le service de garde d'honneur, et la réduction du traitement des députés, il fit que la garde constitutionnelle de ce prince ne arrêter une proclamation pour éclairer le peupût, dans aucun cas, être employée comme ple sur les manoeuvres par lesquelles on l'égafaisant partie de la force publique armée. Le rait. Le 9 du même mois, la Convention, sur 23 mai, il appuya le projet de mettre en accu- sa demande, décréta que les puissances bellisation M. de Montmorin, ministre des affaires gérantes répondraient des représailles que les étrangères, comme fauteur du comité autri- émigrés pourraient exercer sur les Français qui chien. Le 1er juin, il émit l'avis qu'aucun trai- tomberaient en leur pouvoir. Le 3 décembre tement ne fut alloué aux ministres, et qu'ils suivant, accusé d'intelligence avec Louis XVI, fussent mis entièrement dans la dépendance à l'occasion d'une lettre de lui trouvée dans de la liste civile.. Lorsque, peu de jours après l'armoire de fer, il se disculpa en faisant lire, le 20 juin, Lafayette se présenta à la barre de le 6 du même mois, la lettre incriminée dans l'Assemblée pour appuyer la lettre où il avait laquelle il engageait ce prince à éloigner de sa demandé justice des injures et des violences personne tous les individus qui ne cherchaient auxquelles le roi avait été en butte dans cette qu'à le tromper, «les prêtres, les magistrats. journée, Kersaint opina pour sa mise en accu-»les financiers, en un mot tous les intrigants. sation et pour qu'il passât au banc des péti- Le 46, il s'opposa au renvoi de Pache et de Rotionnaires, par la raison que, n'étant pas un land. Le 19, il fut accueilli par les murmures 84 département, il ne devait pas être placé dans des tribunes, lorsqu'il s'éleva contre la tyranl'intérieur de la salle. Le 23 juillet, se fondant nie qu'elles exerçaient sur la Convention. Mais, sur ce que l'imminence notoire des hostilités dans la même séance, il demanda que, la grande de la Sardaigne n'avait pas provoqué une dé- majorité de ces mêmes tribunes étant animée claration de guerre contre cette puissance, il de sentiments purs et pleins de respect pour la s'éleva contre la trahison du pouvoir exécutif, Convention, elles fussent chargées de leur proet demanda, aux applaudissements d'une par- pre police, ce qui fut adopté. Il vota aussi, dans tie de l'Assemblée et de toutes les tribunes pu- la même séance, pour l'ajournement jusqu'abliques, que sa dénonciation contre le roi fùt près le procés du roi de la discussion du décret renvoyée à la commission extraordinaire, pour de bannissement des Bourbons. Le 22, il dequ'elle examinât s'il n'y avait pas lieu de pro-manda que le comité de législation fùt chargé noncer sa déchéance. Après avoir, le 1er août, de rédiger une instruction générale sur la con

[blocks in formation]

duite à tenir par les représentants en mission; Convention. « Comment, s'écria-t-il, la majo<moi-même, ajouta- t-il, j'ai été revêtu de pou- rité a-t-elle la pusillanimité de s'en laisser imvoirs illimités, et j'en ai frémi. » Le 1er janvier » poser par une poignée de factieux?....... Je fais 1793, jour où Kersaint fut promu vice-amiral,» la motion expresse que si la Convention ne il fit à la Convention un long rapport concluant fait pas ouvrir les spectacles, elle ordonne à l'armement immédiat de trente vaisseaux et » que tout lieu de rassemblement soit fermé, vingt frégates, ainsi qu'à la construction de» et que les assassins du 2 septembre n'iront vingt-cinq vaisseaux et à l'adoption de toutes» pas aiguiser leurs poignards sur le bureau du les mesures qu'exigeait la guerre maritime im- président des Jacobins. » minente. Son rapport se terminait par la demande de création d'un comité de sûreté géné-atteste chez Kersaint une fermeté et une génénérale, devenu bientôt ce fameux comité de salut public qui fit mettre à mort celui même auquel il devait son existence.

Cette lutte corps à corps avec la démagogie

rosité naturelle de sentiments qu'une circonstance solennelle, le jugement de Louis XVI, vint mettre encore plus en saillie, en même A partir de ce moment, Kersaint, qui voulait temps qu'elle lui fournit une occasion d'expier sincèrement la République, mais une Répu- sa participation aux actes qui amenèrent ce siblique sans anarchie, sans violence, fit fous nistre drame. Le 16 janvier, il vota la réclusion ses efforts pour que l'autorité usurpatrice de la jusqu'à la paix avec appel au peuple, et formula commune ne prévalût pas sur celle de la Con- ainsi son vote : « Je vais motiver mon dernier vention, et que l'intimidation n'altérât point la » avis; car je ne me crois pas appelé à prononliberté de ses votes. Le 3 janvier, il protesta » cer une sentence. Si j'étais juge, je voterais énergiquement contre les poursuites auxquelles » par clémence et non par haine; car c'est ainsi Boze était en butte pour avoir servi d'intermé- » seulement que j'espérerais d'être le véritable diaire à Guadet, Vergniaud et Gensonné, lors-» interprète d'une nation généreuse. Comme qu'ils avaient écrit à Louis XVI, au mois de » législateur, l'idée d'une nation qui se venge juillet précédent, dans le but de l'engager à» ne peut entrer dans mon esprit: l'inégalité user de son influence pour que les armées en- » de cette lutte le révolte; cependant je crois nemies se retirassent du territoire. Kersaint » que Louis est coupable. Je vote pour la récluavait aussi fait cette démarche, soit avec les sion jusqu'à la paix. » Quand il fut convaincu députés qui viennent d'être nommés, soit avec qu'un crime inutile serait commis, le 48 au Manuel et Pétion, et cette démarche, couron- soir, au moment où allait commencer le dépouilnée de succès, amena, a-t-on assuré, une lel-lement du scrutin sur l'application de la peine, tre de Louis XVI au duc de Brunswick; lettre se séparant avec éclat de ses amis politiques, qui, plus peut-être que les savantes manoeu-il monta à la tribune, répéta son vote, et dit vres de Dumouriez, aurait déterminé la retraite «Je veux épargner un crime aux assassins, en des Prussiens. Le 7 janvier, Chaumette, pro- » me dépouillant de mon inviolabilité; je donne cureur de la commune, ayant assigné le repré- » ma démission, et je dépose les motifs de cette sentant Villette devant les tribunaux, pour qu'il résolution entre les mains du président. » eût à répondre aux arrêtés de deux sections. Deux jours après, la Convention entendit la << relativement à des expressions, des tours de lecture de cette démission ainsi motivée : phrases anti-civiques, tendant à diminuer la » confiance due à la municipalité, » Kersaint demanda le renvoi de cette étrange demande » Ma santé, depuis long-temps affaiblie, me au comité de législation. « Il faut enfin, dit-il,» rend l'habitude de la vie d'une Assemblée > faire fléchir sous la loi cette commune en in- » aussi orageuse que la Convention, impossible. »surrection. Rappelez autour de vous les bons » Mais, ce qui m'est plus impossible encore » citoyens, indignés des attentats de cette au c'est de supporter la honte de m'asseoir dans » torité, qui n'est qu'un foyer de troubles et de son enceinte avec des hommes de sang, alors > révolte, ou la morale du peuple est sans cesse que leur avis, précédé de la terreur, l'emporte » égarée, où l'on veut le conduire par le mal- » sur celui des gens de bien; alors que Marat » heur à l'anarchie, et par l'anarchie au des- l'emporte sur Petion. Si l'amour de mon pays › potisme. » — A quatre jours de là, la com- m'a fait endurer la honte d'être le collègue mune voulant empêcher la représentation de» des panegyristes et des promoteurs des assasl'Ami des Lois, de Laya, demandée par le peu-» sinats du 2 septembre, je veux au moins déple, Kersaint fit adopter l'ordre du jour motivé» fendre ma mémoire du reproche d'avoir été sur ce qu'aucune loi ne permettait aux muni- » leur complice, et je n'ai pour cela qu'un mocipalités d'exercer la censure sur les pièces de» ment, celui-ci; demain, il ne sera plus théâtre. Le surlendemain, l'insolente commune » temps.

« Citoyen président,

ayant fait fermer tous les spectacles, cette me- » Je rentre dans le sein du peuple; je me désure provoqua, dans la Convention, des débats » pouille de l'inviolabilité dont il m'avait revèorageux. Kersaint, bravant la Montagne, qui» iu; prêt à lui rendre compte de toutes mes soutenait la commune, interpella vivement la» actions, et sans crainte et sans reproche, je

> donne ma démission de député à la Conven» tion nationale.

» A. GUI KERSAINT. »

Il serait difficile de rendre les diveres sensations que produisit, à ce moment suprême, cet héroïque défi à la mort. La majorité de la Convention, plus irritée qu'émue de cette preuve inusitée d'énergie, la qualifia d'audace et d'impudence. Choudieu, se faisant son organe, demanda qu'on appliquât à Kersaint la loi qui déclarait infâmes et traîtres à la patrie ceux qui désertaient leur poste. La démission n'en fut pas moins acceptée, et la demande d'arrestation écartée. Toutefois, mandé le 22; par un décret, à la barre de l'Assemblée, Kersaint, loin de rétracter aucune des expressions de sa lettre, les répéta, les commenta. Invité à reprendre ses fonctions, il déclara persister, et refusa même les honneurs de la séance.

Conseil du département de Paris, le 15 décembre 1791. Paris, Didot aîné, 1791, in-4° (fig). VIII. Moyens proposés à l'Assemblée nationale pour rétablir la paix et l'ordre dans les colonies. Paris, 4792 ̊, in-8°. IX. Discours sur l'organisation de l'artillerie et de l'infanterie de la marine. Opinion sur l'artillerie de la marine. Paris, Imprimerie nationale, 1792, in-8°. X. Discours sur l'organisation provisoire du service de mer. Paris, Imprimerie nationale, 1792, in-8°. XI. Opinion et projet de décret sur la suppression des corsaires. Paris, Imprimerie nationale, 1792, in-8°. XII. Le Naufrage et la mort du comte de Boulainvilliers (rédigés par Kersaint), publiés par M. Paillet, bibliothécaire de l'Ecole centrale de Seine-et-Oise. Versailles, Ph. D. Pierres, an VI, in-18 de 83 p. P. L...t.

[ocr errors]

Les amis de Kersaint, dans la vue de le sous- KERSAINT (GUY - PIERRE COETNEMtraire à la proscription qui ne pouvait manquer PREN, successivement chevalier, baron et de l'atteindre, essayèrent, le 18 février suivant, eomte DE), frère du précédent, né à Brest le de le porter au ministère de la marine en con- 26 novembre 1747, entra au service de la macurrence avec Monge; mais cette imprudente rine, en 1764. Après plusieurs campagnes aux tentative, faite sans sa participation, n'eut Antilles et dans l'Inde, il fit la guerre de 1778. d'autre résultat que de le mettre bien inutile- à la suite de laquelle il fut nommé chevalier de ment en évidence. Pressé, après le 31 mai, de Saint-Louis, et capitaine de vaisseau le 1er mai chercher un asile hors de France, il s'y refusa. 1786. L'année suivante, il commandait dans Oublié pendant quatre mois, il se croyait sauvé, les mers de Chine la frégate la Dryade, ayant lorsqu'il fut arrêté, le 2 octobre 1793, dans sa mission de porter en Cochinchine l'évêque d'Aretraite de Ville-d'Avray et traîné à l'Abbaye, dron, ambassadeur de France, et de faire des où sa fermeté ne se démentit pas. Traduit, le observations hydrographiques, En 1790, il 4 décembre, devant le tribunal révolutionnaire, émigra, prit du service dans l'armée des prinil fut condamné à mort comme « convaincu ces, et résida successivement à Aix-la-Cha» d'avoir sciemment et méchamment avili la pelle, Maestricht et Hambourg. Mais, rentré en >> représentation nationale, et provoqué le réta- France, il fut réintégré dans la marine, en 1803. blissement de la royauté en France; d'avoir avec le grade de capitaine de vaisseau de 2o clas» participé à la conspiration qui a existé contre se, à compter du 3 mai 1798. Fait chevalier de » l'unité et l'indivisibité de la République, con- la Légion-d'Honneur, le 5 février 1804, il obtint »tre la liberté et la sûreté du peuple français.» la décoration d'officier de l'ordre le 44 juin suiOutre le Bon Sens et les articles insérés dans yant. Lorsque Napoléon eut résolu la création du le Journal de la Société et la Chronique du port d'Anvers, Decrès, ancien ami de Kersaint, mois, Kersaint a laissé : I. Le Rubicon, par l'au- le désigna à l'Empereur comme bon et intègre teur du Bon Sens. Paris, 1789, in-8°. II. Lettre administrateur, capable, en raison des exploen réponse à M. Alex. Lameth. Paris, 1788, rations qu'il avait faites avant la Révolution, de in-8°. III. Considérations sur la force publique certains fleuves del'Inde, de diriger les travaux et l'institution des gardes nationales. Paris, de l'Escaut, dont le lit, croyait-on, avait beau1789, in-8°. IV. Institutions navales, ou Pre-coup d'analogie avec celui de l'un de ces fleumières Vues sur les classes et l'administration ves. Ces motifs firent choisir Kersaint comme de ta France, considérée dans ses rapports chef des mouvements militaires du port d'Anmaritimes. Secondes Vues de la formation vere, en 1806. Promu capitaine de vaisseau de et constitution du corps militaire de la marine. Are classe, le 1er janvier 1812, il fut nommé préParis, Garnery, an Ier, an II, 2 pièces in-8°. V. fet maritime d'Anvers le 9 mars suivant. La Réponse aux dires de Defermonet Chapelier.première Restauration le nomma contre-amiFaits rappelés à la mémoire de Kersaint (sur ral, le 14 juin 1814, commandeur de la Légioncette question) par Defermon. - Petite discus- d'Honneur, le 18 août suivant, et commandeur sion entre Defermon et Kersaint. Paris, impri-de Saint-Louis à peu près à la même époque. merie du Patriote Français, Imprimerie nationale, 4790, in-8°. VI. Lettres à Mirabeau à l'occasion de l'élection du Directoire du département de Paris. Paris, 1794, in-8°. VII. Discours sur les monuments publics, prononcé au

Appelé, le 15 août 1815, à remplir les fonctions de préfet de la Meurthe, il reçut de l'empereur Alexandre la décoration en diamants de l'ordre de Sainte-Anne de 2e classe, en reconnaissance des soins qu'il avait pris des troupes russes pen

« AnteriorContinua »