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rite de ce travail. Les matériaux nous en ont été fournis par le vénérable doyen des antiquaires bretons, notre parent. Il a bien voulu nous donner les notes qu'il avait recueillies sur la maison de Léon, pour son usage, et que ses goûts, aussi bien que le poids des années, l'éloignaient de colliger pour une publication (1).

Bretons insulaires. Mais, quelle que soit l'opinion que l'on adopte sur ce point, il reste à expliquer par quelles circonstances les institutions convenancières, qui dominaient autour du pays de Léon, en Cornouaille, Vannes, Poher, Tréguier et Goëllo, ne pénétrèrent pas dans ce coin de terre, où l'on rencontre d'ailleurs les mêmes usages et la même langue; car ce n'est que depuis une période moderne que quelques terres y ont été mises à domaine congéable. Juste- (1) Au moment où notre érudit et modeste collaborament frappé de ce fait considérable et singulier, le travail ci-dessus, la mort s'apprêtait à frapper le sateur constatait la part revenant à son oncle vénéré dans M. Baudouin n'a pu s'en rendre compte que vant doyen de la marine française et de l'archéologie par les conditions particulières où se trouvait bretonne. Malgré son extrême vieillesse, M. de Blois ce pays au temps des migrations bretonnes. Il possédait encore toute la sûreté de son jugement, toute était, nous dit-il, occupé par une de ces légions tion bretonne avaient remarqué, comme nous, il y a deux la pénétration de son esprit. Nos collègues de l'Associaromaines qui, suivant Procope, se détachèrent ans, lors du congrès de Morlaix, que la vie intellectuelle de l'Empire, demeurèrent pour leur propre avait conservé chez lui toute sa seve, et que nul ne sacompte maîtresses du territoire où elles étaient vait mieux attirer et attacher par la dignité jointe à l'atcantonnées, et firent alliance avec les Francs. Ce moire n'avait rien perdu de sa fraicheur, et nous en reticisme du langage et à l'urbanité des manières. Sa médernier fait, poursuit-il, est établi par les légen-cueillimes personnellement une preuve frappante dans daires, puisque l'évêché de Saint-Pol dut son une conversation où nous lui parlames de la guerre de érection au roi Childebert. Les terres qui assu-1778 et des travaux de l'ancienne Académie royale de la raient la subsistance de cette légion étaient te-marine. Nous évoquions chez lui des souvenirs de plus nues sous un régime différent, celui du ser- Puisque la Biographie bretonne n'a pu se terminer avant vage. Les légionnaires, indépendants dans un sa mort. c'est pour elle un devoir de lui rendre ici un petit État, n'eurent garde d'y admettre des hommage qui, nous le savons, sera l'expression des usages qui leur eussent été moins favorables.bilité de l'ordre alphabétique ne nous permet plus de (Inst. conv., t. Ier, p. 15).

de soixante ans, et ils furent tous fidèles.

sentiments unanimes de nos collaborateurs. Si l'inflexi

reporter cet hommage à son rang naturel, du moins ne

Nous ne pouvons nous défendre d'entrer paraitra-t-il pas trop déplacé ici, puisqu'il se trouvera dans le sentiment de cet auteur. Si peu de associé au travail que le savant archéologue avait préconfiance que l'on veuille accorder aux légen-historique : il est donc un acte de sa vie, et comme tel, paré et inspiré. C'etait, en quelque sorte, son testament daires qui viennent d'être cités, les circon-il ajoute aux motifs qui nous commandent de retracer stances sont trop concordantes pour n'avoir les phases principales de son honorable carrière. pas quelque autorité. C'est un détail curieux à relever, une donnée nouvelle à l'appui des judicieuses investigations de Dubos sur l'établissement de la monarchie, et qui concourt, avec d'autres observations modernes, à justifier les déductions de sa critique.

BLOIS DE LA CALANDE (AYMAR-JOSEPH-EMMAnuel-RaPHAEL DE), né à Morlaix, le 9 novembre 1760, appartenait à une ancienne famille de Champagne, que ses traditions domestiques rattachent à la maison de Châtillon-sur-Marne. Son aieul, compagnon d'armes de Duguay-Trouin, mourut en 1719, de blessures reçues au siége de Pensacola, en Floride, pendant la guerre avec l'Espagne. Marié en Bretagne, il laissait un fils qui, parune mort prématurée. C'était le père de l'homme distinvenu au grade de capitaine de vaisseau, fut enlevé par gué dont nous allons raconter la vie. Sa mère était fille de M. de Boisbilly, président à la Chambre des Comptes de Bretagne, dont il a été parlé dans la notice consacrée à l'abbé de Boisbilly, son fils.

Bientôt privés de leur mère, M. de Blois, son frère et sa sœur trouvèrent près d'amis fidèles et près de leur oncle les soins d'une paternelle sollicitude.

La Flèche et à l'école militaire de Paris, M. de Blois fut Après avoir fait son cours d'études au collège royal de admis dans la marine, le 6 mai 1776. On était à la veille d'une guerre maritime, la plus brillante de nos annales.

D'Argentré, et plus tard Albert Le Grand, dans le récit des aventures plus touchantes que croyables, qui se rapportent à la naissance de Saint-Budoc, parlent d'un seigneur breton qui avait épousé la fille du duc Hoel II (1), et en aurait reçu en dot le droit de bris sur ses terres et la ville de Morlaix, dont le château, construit sur la rive opposée du Jarlo, appartenait, par sa situation, au pays de Tréguier. Plus tard. ces seigneurs jettent un vif éclat pendant la période des rois carolingiens. C'est alors seulemeut que l'on commence à en apercevoir la M. de Blois eut le bonheur de prendre part aux évènesuite, et à en démêler l'histoire d'autant plus inles ordres de l'un des plus habiles et des plus intrépides téressante à constater, que les Bénédictins bre-marins de la flotte française, le comte de Soulanges, comtons n'ont donné qu'une table généalogique im- mandant le vaisseau le Sphinx, qui appartint tour à tour parfaite de ces feudataires, et qu'ils ont con- aux escadres dirigées par le comte d'Orvilliers, le comte fondu avec leur lignée celle bien distincte des d'Estaing et le comte de Guichen. M. de Blois était sur ce vaisseau au combat d'Ouessant, à la prise des îles de vicomtes de Léon, auxquels devait s'étendre Saint-Vincent et de la Grenade; à l'expédition de la Georcette notice. gine, il commandait une chaloupe de débarquement dans l'attaque de Savannah. Il était au combat de la Dominique et aux deux autres engagements du comte de Guichen avec la flotte anglaise devant la Martinique et Sainte(1) Elle se nommait Aliénor. L'abbé Gallet la croit fille Lucie; il fut blessé à la seconde de ces actions. du roi Budoc. Sa santé s'étant altérée pendant la croisière du comte 37

Nous n'avons rien à prétendre dans le mé

ments les plus considérables de cette lutte glorieuse, sous

T. II.

COMTES DE LÉON.

tons. L'empire de Charlemagne n'était reconnu MORVAN, Comte de Léon et roi des Bre-que dans une partie de la Bretagne, lorsque la

de Guichen dans la Manche, il fut attaché aux construc- d'agriculture de cette ville, il concourut, de 1822 á 1829, tions navales du port de Brest. En peu de temps, il fut à ses travaux, par deux mémoires, le premier sur l'Emassez au courant de ce service spécial pour être en me- ploi des engrais maritimes, le second sur le Commerce et sure de faire des rapports sur les matières le concernant; l'exportation des beurres de la localité. L'usage des vabien qu'il ne fût qu'enseigne, le marquis de La Galisson-rechs ou goëmons, comme élément de fertilisation, était nière, qui en avait la direction, le chargea de l'intérim connu depuis long-temps dans les communes riveraines pendant une absence. de la mer, auxquelles ceux provenant de la coupe annuelle sont exclusivement réservés. Mais le commerce de ces débris de plantes jetées par le flot commençait à s'étendre; on commençait aussi à draguer les sables calcaires et débris de coraux connus sous le nom local de très et de merl, dont l'agriculture fait aujourd'hui une si grande consommation.

Lieutenant de vaisseau en 1786, il reprit la mer, et l'année suivante, par un précieux et honorable témoignage d'estime, il fut, sur la désignation de son ancien chef, nommé major de l'escadre aux ordres du comte de Soulanges, qui devait suivre, le long des côtes de Hollande, l'expédition des troupes prussiennes dans ce pays; mais le départ de cette escadre fut contremandé. En 1789, il devint, par son agrégation, comme associé, à l'Académie royale de la marine, le collègue des hommes les plus éminents dont s'honorât notre armée navale. En 1790, il quittait Saint-Domingue, porteur de dépêches qui annonçaient l'état alarmant de cette colonie. Ce n'était que le contre-importance pour la science agronomique du pays. Il fixa coup d'une révolution qui allait briser sa carrière.

Retardé par une maladie dans ses dispositions pour suivre hors de France la plus grande partie de ses anciens compagnons d'armes, parmi lesquels se trouvait son frère, qui servait aussi dans la marine, il fut bientôt amené à Paris par des ordres de Louis XVI, transmis par le chevalier de Lezardière, lieutenant de vaisseau. Le malhureux roi désirait que les officiers restes fidèles à la cause du trône se linssent à portée des chances de salut qui pourraient s'offrir.

La fatale journée du 10 août vint détruire ces vaines espérances, et l'issue de la campagne des princes montrer de quelles illusions on s'était berce de l'autre côté du Rhin. M. de Blois prit alors le parti de se retirer près de Tours, dans la maison de campagne habitée par les parents de sa femme, M" Péan de Livaudière, et d'attendre un temps plus favorable pour s'établir en Bretagne.

Un travail qui résumait et traduisait en règles pratiques les faits nombreux de l'expérience individuelle sur ces matières, pour indiquer d'une manière sure les effets que l'on en pouvait obtenir sur chaque nature de terrain, devait être regardé comme un document de première l'attention du ministre de la marine et plus encore celle du conseil général du Finistère, qui désira se charger de sa publication pour en répandre des exemplaires. Trente années d'un emploi de ces engrais, qu'il a contribué à rendre plus general, n'ont fait que confirmer les judicieuses déductions contenues dans ce mémoire, dont l'autorité est aujourd'hui plus grande que lorsqu'il a paru.

Mais c'est vers l'étude des antiquités, des antiquités de la Bretagne surtout, que M. de Blois se sentait porté. soit par une impulsion reçue de son oncle, l'abbé de Boisbilly, fort versé dans ces recherches, soit par un esprit naturellement investigateur, que secondait la plus heureuse mémoire. Il n'est aucune des branches multipliées de cette science complexe qu'il ne possédât d'une manière distinguée. A la connaissance de plusieurs langues, il joignait celle des divers dialectes bretons, même De retour à son habitation près de Morlaix, il fut, en des dialectes propres au pays de Galles. Les origines 1800, nommé adjoint de sa commune, et, en 1806, ap- bretonnes, l'hagiographie, l'histoire du pays au moyenpelé au conseil général du Finistère qui, presque immé-âge, celle de ses institutions politiques, civiles, munici diatement, l'envoya en députation à Paris pour appuyer pales, les généalogies, avaient été pour lui les sujets diverses réclamations présentées par le département. Il d'une exploration sérieuse, alors que ces études vegés'agissait d'obtenir la liberté d'exporter les céréales dont taient dans l'ombre et le dédain où les avaient reléguées le cours était tombé au dessous du prix rémunérateur, et l'esprit philosophique, et, plus tard, le génie révolutionde faire reduire le contingent des levées départementales. naire. C'était justice en effet que l'on tint compte du grand nom- Ces connaissances, recueillies par une intelligence cabre d'hommes que le fittoral fournit à l'inscription mari-pable de les mettre en œuvre, auraient du fournir la matime. M. de Blois eut la satisfaction de contribuer effica- tière de plusieurs ouvrages. Mais M. de Blois, comme il cement au succès de ces réclamations. Après avoir rempli le disait lui-même, n'aimait à travailler que pour son provisoirement les fonctions de conseiller de préfecture, instruction. L'idée d'y associer le public aurait troublé le et, en cette qualité, présidé au recrutement en remplace- charme de ses études et répugnait à une simplicité qui cement du préfet, il retourna à Paris pour solliciter de écartait jusqu'aux plus légitimes satisfactions de l'amournouvelles mesures tendant à rendre la conscription moins désastreuse pour les familles et demander que la ville de Morlaix fut exonérée du traitement d'un commissaire général de police. Il réussit encore par les bons offices d'un ancien camarade, M. de Champagny, duc de Cadore, qui siégeait alors dans les conseils de l'Empire.

Nommé capitaine de vaisseau et chevalier de SaintLouis, en 1814, puis appelé au service actif en 1816, il fut attaché au port de Brest jusqu'à la mesure générale par suite de laquelle les officiers de l'ancienne marine furent admis à la retraite. Il reçut, en 1825, la décoration de la Légion-d'Honneur.

Les habitudes d'une vie laborieuse et réglée laissaient à M. de Blois, après qu'il avait consacré une partie de son temps à sa famille et à la société, des loisirs disponibles pour le soin des administrations ou associations dont il était membre, et pour ses études de goût. Il était assidu aux réunions du conseil de l'hospice et du bureau sanitaire, et, en 1832, alors septuagénaire, il présida par lui-même à la distribution des secours dans le quartier le plus attaqué, pendant le choléra qui sévissait si cruellement à Morlaix. L'un des fondateurs de la Société

propre.

Du reste, loin de vouloir cacher ses travaux sous le voile du mystere, il était toujours prêt à en faire part aux écrivains honorables qui désiraient les consulter. Ainsi ses notes ont été à la disposition de MM. de Courson et de la Villemarqué; il a même été jusqu'à écrire des mémoires pour des savants, sur des points relatifs à l'histoire de Bretagne. Ses entretiens, ses souvenirs d'usages abolis par la Révolution, étaient peut-être recueillis avec plus de fruit encore. Ce furent aussi ses conseils qui donnèrent à MM. de Courson et de la Villemarqué l'idée première d'interroger les monuments du pays de Galles, jusque là à peu près inconnus ou négligés par les historiens bretons.

Un mémoire intitulé: Remarques sur l'accent breton armoricain, communiqué en 1810 à l'Académie celtique. dont il était membre; une Notice historique sur le château du Taureau, communiquée au Congrès breton tenu en 1850 à Morlaix; les notes originales dont il avait chargé son exemplaire du Dictionnaire d'Ogée, notes dont il lui fut demandé copie pour la nouvelle édition de cet ouvrage, sont à peu près les seuls de ses travaux archéologiques

mort violente des princes Méliau et Méloir, D'Argentré, organe des traditions, écrit que ainsi que les dissensions civiles auxquelles se Morvan « était issu des comtes de Léon, et de rattachait ce double meurtre, fournirent à son» la race, comme on disait, de Conan. » Ainsi lieutenant un prétexte et une occasion pour at- l'opinion qui avait cours, qu'elle fût fondée sur taquer la liberté d'un peuple non encore sou- la vérité des faits ou sur le désir d'étendre jusmis. En présence de ce péril imminent, Mor-qu'aux dernières limites connues l'antiquité des van du Léon fut élu chef de la nation (818), et comtes de Léon, cette opinion, disons-nous, il justifia ce choix par le courage avec lequel rattachait cette famille à Withur, et Withur au il en défendit l'indépendance. La lutte se pro- sang des rois bretons. longeait sans résultat pour l'héritier du grand empereur. Après avoir aussi inutilement tenté les négociations, il prit le parti de marcher luimême contre les Bretons. Morvan n'eut garde d'engager ses forces vis-à-vis d'une armée aussi formidable que celle des Francs: mais, retiré dans des lieux d'un accès difficile, il suivait l'ennemi, harcelait sa marche, et profitait, pour le tenir en échec, des occasions que pouvaient offrir ses divers mouvements. Il trouva, enfin, la mort dans un de ces combats (1).

WIOMARCH OU GUYOMARCH Ier,-comte de Léon et roi des Bretons, comme l'avait été Morvan, dont on le croit fils, essaya de réparer les désastres qu'avait amenés la perte du héros breton et de secouer le joug des Francs. Informés de ses desseins, ils fondirent inopinément sur ses états, afin de s'emparer d'un chef si audacieux (822). Guyomarch leur échappa par la fuite, mais il ne put épargner à ses vassaux les ravages d'un ennemi furieux. Bientôt il reprit l'offensive et remporta divers avantages sur Morvan a été placé par nos historiens au nom- les oppresseurs de sa nation. Louis-le-Débonbre des rois bretons. On peut se faire une idée naire crut alors devoir se mêler une seconde du caractère de ce grand guerrier et des mœurs fois à cette lutte, et, pour frapper un coup de ce temps dans les vers d'Ermold Le Noir, terrible, il s'avança dans le pays, accompagné poète contemporain, qui a célébré les événe-de trois corps d'armée. A la vue d'un déploiements mémorables de la vie de Louis-le-Dé- ment de forces si nombreuses, plusieurs des bonnaire (2).

sa vieillesse.

qui aient vu le jour. Cependant parmi les notes qu'il avait amassées, il en est auxquelles la justesse de sa critique n'a pu manquer de donner de la valeur. Nous pourrions ciler, comme exemple, cette étude monographique sur les comtes de Léon, et ses annotations sur le Dictionnaire breton de dom Le Pelletier, qui sont peut-être aussi étendues que le texte de l'auteur; c'était l'œuvre favorite de Les longues années de M. de Blois s'écoulaient au milieu de ces paisibles études. Exempt de toute infirmité, il sentit pourtant, vers l'âge de quatre-vingt-dix ans, le besoin de se livrer au repos. Une légère indisposition vint troubler sa santé, le 3 septembre 1852, comme pour lui rappeler le terme d'une carrière qu'un secret pressentiment lui faisait envisager comme prochain. Elle reparut promptement avec des symptômes alarmants; après quelques heures de souffrance, il s'endormit, le 7 septembre, à l'âge de quatre-vingt-onze ans et dix mois, dans le calme qui accompagne le dernier jour d'une vie toute consacrée á l'accomplissement du devoir, laissant après lui s x des onze enfants auxquels il avait donné le jour, et la digne compagne d'une heureuse union dont il avait, cinq ans auparavant, célébré le soixantième anniversaire. Justement vénéré de tous ceux qui le connaissaient, il rappelait, par l'aménité de ses mœurs, la parfaite droiture de Du Cange dont la vie patriarcale ne fut pas sans rapports

son caractère et sa science modeste, ce bon et laborieux

avec la sienne.

P. L...t.

chefs écoutèrent les conseils de la prudence et ne laissèrent plus à Guyomarch d'autre parti que celui de la soumission. Mandé avec les autres seigneurs de sa nation pour renouveler son allégeance devant les grands du royaume, à l'assemblée générale d'Aix-la-Chapelle, en 825, il y reçut un accueil distingué. Mais ces honneurs ne lui rendirent pas plus supportable la domination d'un prince étranger; il reprit les armes et attaqua encore les Francs. Lambert, comte des Marches, s'étant mis à sa poursuite, le surprit dans un de ses châteaux, ét, persuadé qu'il n'y avait rien à obtenir d'une nature si indomptable, il le fit périr (826). Après cette insurrection, les chefs bretons furent appelés à l'assemblée générale d'Ingelheim pour reconnaître encore l'autorité de l'Empereur.

PLINIS, suivant dom Morice, fils de Wiomarch, et vraisemblablement son successeur dans le comté de Léon, fit une donation à SaintSauveur de Redon. Cet acte, où il est dénommé Plinis, filius Wuiomarch, peut être placé aux environs de l'année 850. Ce nom semble le même que celui de Pirinis ou Pirenès, connu en (1) Morvan, ou Maurice, car c'est le même nom, est Bretagne, et qui se rencontre dans un titre du regardé comme le fondateur du château de la Roche-même monastère, postérieur de peu d'années. Maurice, près Landerneau. Ce château portait encore le nom de la Roche-Morvan au xin siècle. (Pr. de l'Histoire GUYOMARCH II-et Ewon ou EVEN, Son fils de Bretagne, t. I, col. 989.) La poésie lui avait donné probablement, souscrivirent à la charte accorun autre nom qui dépeint sa situation sur un rocher dée vers 854 à Saint-Sauveur de Redon, pour abrupte et élevé, en l'appelant Roch-an-Tron ou la Roche-la libre élection de ses abbés. Son nom se renaux-Aigles. contre encore au bas de celle donnée par Salomon de Bretagne, en 860, en faveur du célèbre monastère de Prum, en Allemagne.

(2) On trouvera les vers d'Ermold Le Noir cités dans 'Histoire des Peuples bretons, où M. de Courson a mis en relief les événements de nos guerres carolingiennes. On peut aussi lire D. Lobineau, p. 29 et 30, et des fragments

EVEN I", dit le GRAND, - dont un acte conépiques sur Morvan, insérés dans la 3 édition des Chants temporain (D. Morice, Pr., t. Ier, col. 335)

bretons de M. de la Villemarqué.

confirme le glorieux surnom, fut, dans son un autre sens se présente naturellement : c'est pays, la terreur des Normands, que la faiblesse que l'annotateur a voulu dire seulement que et la division des enfants de Louis-le-Débon- les nobles comparants avaient régné successinaire encourageaient dans leurs invasions. vement sur le comté de Léon. On laisse de côté Leurs ravages furent affreux en Bretagne. Ils d'autres explications qui ressortiraient des usase renouvelèrent, tantôt sur un point, tantôt ges anciens constatés par les diplomatistes (1). sur un autre, durant un siècle entier, avec une Quant au titre de vicomte, Guyomarch et Mortelle violence que les seigneurs furent obligés van ne sont pas les seuls seigneurs de Léon qui de quitter le pays, et les ecclésiastiques d'em- l'aient porté, même bien long-temps après cette porter avec eux les reliques et objets précieux date. La qualité de comte, qu'ils prenaient parconsacrés par la religion. fois dans leurs actes, et que les chroniqueurs ne

Ce fut de 875 à 878 qu'ils attaquèrent sur-leur ont donnée que par exception, leur était tout le pays de Léon, où Even leur tint tête. Ils essayèrent inutilement, dit Albert Le Grand, de s'emparer de Brest.

L'indépendance bretonne avait été reconquise par Nominoë et maintenue par Erispoë, son successeur. Mais la mort de ce dernier, assassiné par ordre de Salomon III, qui s'était emparé du pouvoir, et qui périt bientôt lui-même, devint une semence de discordes anarchiques. La lutte de Gurvand, comte de Rennes, et de Pasquiten, comte de Vannes, pour la puissance souveraine, s'était terminée avec leur vie, sans que l'ordre fût encore rétabli. Les comtes de Léon et de Goëllo prirent alors en mains l'autorité, débattue jusqu'à ce que les droits d'Alain, fils de Pasquiten, fussent reconnus.

évidemment déniée; ils ne sont désignés que comme vicomtes, dans les chartes qu'ils sousScrivent avec d'autres feudataires. C'est cette diversité d'appellation qui a été l'écueil de nos historiens. D'où provenait l'opposition qu'elle révèle ? Nous l'ignorons. Nous constatons simplement l'identité des comté et vicomté de Léon jusqu'au temps de Guyomarch VII, sous lequel se place le démembrement que l'on a désigné par le titre de vicomté.

Guyomarch III assista à la confirmation des droits de l'abbaye de Redon, en 1024. On croit que c'est lui qui, joint à Alain III, duc de Bretagne, faisait la guerre à Alain Canhiart, en 1031 (2).

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MORVAN HI eut aussi des démêlés avec Even est regardé comme le fondateur de Les- Alain Canhiart, et il assistait, en 1065, Coneven. Cette position centrale pour le comté, et nan II, duc de Bretagne, au siége du château éloignée de la côte, dut être jugée avantageuse, de Combourg. On a cru pouvoir conjecturer surtout dans un temps où l'on devait être tou- qu'il épousa l'aînée des filles de Rivelin de Ceojours en garde contre les incursions des Nor-zou, dont les domaines seraient entrés dans sa mands. Il fut l'un des bienfaiteurs de l'abbaye de Landévenec. Dans une charte de donation à ce monastère, il est appelé Felix et nobilis comes Ewenus.

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HERVÉ Ier, dit Ehuarn, nom qui est parmi les Bretons une des variantes de celui d'Hervé, n'est connu que par sa souscription à une charte de Budic, comte de Cornouaille, en faveur de l'abbaye de Landévenec. Les Bénédictins le désignent comme fils d'Even. «Ehuarn, son » fils » marque D. Morice (t. Ier, Pr., p. XI >> et xn de la préface), en parlant d'Even-«lais»sa deux enfants, Guyomarch et Morvan, qui »> ne prenaient que la qualité de vicomtes de » Léon. L'aîné continua la postérité, et le cadet >> fit, selon les apparences, la tige des seigneurs » du Fou. » Nous n'avons pas suivi cette opinion, comme on le verra plus loin.

famille par cette alliance. Il est fait mention, dans une donation de 1070 par Alain Fergent, à l'abbaye de Quimperlé, d'un fils de Morvan, appelé Ehuarn ou Hervé; c'est le père d'Alain qui suit.

ALAIN était en effet petit-fils de son prédécesseur, comme on l'apprend d'un acte de l'abbaye de Saint-Georges de Rennes, où son nom suit celui de Juhel, archevêque de Dol. C'est une donation des droits de la duchesse Berthe, veuve d'Alain III, sur la paroisse de Plougasnou, que la charte place mal à propos dans le pays de Léon, car elle est en Tréguíer, où les sires de Léon étaient à la vérité fort puissants, ce qui rendait leur adhésion intéressante pour le donataire. Un autre titre relatif aux

(1) On peut notamment consulter le Dictionnaire de D. de Vaines, v souscription. La souscription n'atteste pas toujours la présence à la solennité de l'acte. On a même des exemples de souscripteurs qui n'étaient pas nés au temps des actes où figure leur nom.

GUYOMARCH III souscrivit avec son frère un acte d'Alain Canhiart, en faveur de l'abbaye de Quimperlé, de l'année 1029 environ. La souscription est conçue en ces termes : Guihomarch et Morvan, vice comites. De là est venue l'idée de les faire dominer simultanément, l'un sur le pays de Léon, l'autre sur la seigneurie du Faou. Mais, si l'on réfléchit que ce texte a collective de Guyomarch et Morvan semble les rattacher été pris dans un cartulaire écrit environ un siè-l'un à l'autre, nous ne nous sommes pas préoccupé du cle après l'époque où vivaient ces deux témoins, personnage qui se placerait entre eux.

des Bénédictins, qui mentionnent, dans le Catalogue ou (2) Cette opinion ne serait pas conforme à l'assertion table généalogique des seigneurs de Léon, un vicomte Hamon, marchant à la suite du duc dans son expedition de 1029. Mais, comme les savants auteurs ne citent aucun document à l'appui de ce fait, et que la souscription

droits du prévôt de cette même abbaye, en Tréguier, fait connaître qu'il avait un frère du nom d'Alfred.

GUYOMARCH IV,- réputé fils du précédent, fut l'un des guerriers bretons qui accompagnèrent Guillaume, duc de Normandie, dans la conquête de l'Angleterre, en 1066. Il en reçut plusieurs terres qui durent être perdues pour sa maison dans le cours des démêlés de ces princes avec les rois de la maison Plantagenet. Il y a lieu de penser, d'après une autre charte de l'abbaye de Saint-Georges, que la femme de Guyomarch s'appelait Orwen ou Onwen, nom commun dans la maison de Cornouaille. Une mort violente termina la vie de ce seigneur, en 1403. Occisus est Guichomarius vice comes dolo, marque la chronique de Bretagne. Cet événement, ajoute Albert Le Grand, fut la suite d'une sédition qui s'éleva parmi les sujets du comte, tandis que son fils était à la TerreSainte.

Hervé, en 1163, faisait la guerre au vicomte du Faou. Ce seigneur trouva le moyen de le surprendre par ruse avec Guyomarch son fils, et les tint enfermés à Châteaulin. A la nouvelle de cet événement, Hamon, évêque de Léon, frère puîné de Guyomarch, arma la noblesse et le peuple, et implora le secours de Conan IV. qui vint en personne combattre pour la délivrance des prisonniers. Châteaulin fut emporté d'assaut, et le vicomte du Faou fut, avec ses adhérents, enfermé au château de Daoulas, où ils périrent misérablement. Après avoir rapporté ce fait dans sa chronique, Guillaume le Breton ajoute que Hervé était un chevalier des plus valeureux; qu'en Angleterre et ailleurs il avait figuré à un grand nombre de batailles, et qu'il avait perdu un œil à la guerre.

Hervé continua de se montrer fidèle à la cause du vicomte de Porhoët dans le cours des hostilités qui se renouvelèrent entre lui et Conan. Eudon, pour resserrer davantage ces liens, HERVÉ II, qui prit possession des biens rechercha la petite-fille du sire de Léon, qui de son père en revenant de la première croi-devint sa seconde femme. Cet attachement aux sade, où il avait suivi, en 4096, le duc Alain Fergent, assista aux funérailles de ce prince en 1149.

Le soin de ses possessions d'Angleterre ne rendait pas Hervé soucieux de faire sa cour à Henri Ier, roi de ce pays. C'est de lui que Guillaume de Malmesbury écrit: Hervæus de Leions, qui esset tantæ nobilitatis, tanti supercilii ut nunquam rege Henrico petente animum induxerit in Angliam venire. » Il parut dans le pays, après la mort de Henri, mais comme ennemi de ses droits. Ayant épousé la fille d'Etienne de Blois et d'Adèle de Normandie, il combattit pour la cause de ce prince, qui disputait la couronne à l'impératrice Mathilde. Chargé par son beau-père de la garde du château de Devise, dans le Wiltshire, il fut assiégé par les troupes de Mathilde. La place fut prise, malgré ses efforts. Tombé ainsi au pouvoir de l'ennemi, il fut contraint de s'éloigner de l'Angleterre. Il est remarquable que ce fier seigneur n'ait pas songé à s'attribuer, même dans ses domaines, le titre qu'avait porte Evenle-Grand, l'un de ses aïeux. Il est simplement qualifié vicomte, dans l'acte de fondation du prieuré de Saint-Martin de Morlaix, en 1128, prieuré auquel il donna notamment le faubourg de Bourret, dans la même ville.

GUYOMARCH V, fils du précédent, fonda, vers 1450, le prieuré de Saint-Melaine, à Morlaix. On ne lui connaît que deux fils: Hervé, qui suit, et Guyomarch, qui vivait en 1164.

HERVÉ III confirma, en 1154, la donation du prieuré de Saint-Melaine, faite par son père. Il est qualifié dans cet acte: Dei gratiâ Leonensis comes. Il prit parti, en 1154, pour Eudon, comte de Porhoët, dans les guerres que ce seigneur eut à soutenir contre le duc Conan IV, son gendre.

intérêts d'Eudon devint pour lui un sujet d'in-fortunes: Guyomarch de Léon et Raoul de Fougères s'étant en effet réunis au comte de Porhoët, pour faire des ravages sur les terres de Conan IV, ce prince appela à son aide le roi d'Angleterre. Henri II entra en Bretagne en 1166, battit les seigneurs confédérés, et conclut le mariage de son fils Geoffroi, encore enfant. avec la fille unique de son protégé, sous le nom duquel il domina bientôt. Les partisans d'Eudon reprirent les armes, après le départ du roi ; mais Henri fit une descente au pays de Léon, détruisit les châteaux de Lesneven, Saint-Pol et Trebez; mit tout à feu et à sang, et contraignit Hervé à lui faire hommage et à donner des ôtages pour garantie de sa soumission.

Hervé survécut peu à ces infortunes; il mourut en 1169, laissant de son mariage avec la fille d'Etienne, comte d'Aumale, en France, et de Halderness, en Angleterre, qui était de la maison de Champagne: 1° Guyomarch qui suit; 2o Even, dont on ne sait pas l'histoire; 3 Hamon, évêque de Léon, dont on a parlé. Il eut aussi un fils naturel nommé Hervé, à qui l'on connaît trois enfants : Gradlon, Budic et Guégou.

On a différentes chartes de ce prince, dont une en faveur du prieuré de Saint-Melaine, une autre relative à l'affranchissement des dépendances de l'abbaye de Saint-Mathieu, et une lettre du pape Adrien IV, adressée à Hervé et à d'autres hauts personnages du pays.

GUYOMARCH VI- signala son avènement par de sanglants démêlés avec l'évêque, son frère. La chronique de Bretagne indique par ses expressions que la famille en général prenait part à cette animosité. Elle pouvait avoir pour cause le refus de Hamon d'épouser et de soutenir de son influence les intérêts et les luttes politiques

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