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sieurs reprises, et Boucaï, forcé d'obéir, quitta Argoun avec un vif regret. A son arrivée à la cour, il fut traité avec distinction, et même revêtu de l'une des robes du grand Ilkhan, c'est-à-dire, de Houlagou; mais à cette heure il était chagrin d'avoir perdu son crédit auprès d'Ahmed, qui lui préférait un autre officier, nommé Cara-Boucaï; il forma le projet de délivrer Argoun et de détrôner Ahmed. Il le communiqua d'abord à plusieurs généraux, dont quelques-uns étaient ses parents; il dit à chacun, en particulier, qu'Ahmed avait décidé avec ses confidents Hougaï, Cara-Boucaï, Alinac et Abougan, de se défaire d'eux, près d'Esferaïn. « Il faut, ajoutait-il, << saisir l'occasion de prévenir notre perte (1). <«< Ahmed a résolu d'avilir, et même d'exter« miner les descendants de Tchinguiz-khan; «< il protège, il préfère les Musulmans, par <«< l'influence du vézir. C'est pour détruire les Mongols qu'il a mis les troupes géorgiennes << sous les ordres d'Alinac, et qu'il l'a élevé « au-dessus de tous les généraux et de tous « les courtisans. » Trompés par ces calomnies, les généraux, ainsi que les princes Tchouschkab et Houladjou, entrèrent dans ses

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(1) Raschid.

vues; il fut décidé que parmi les princes, Houladjou, parmi les généraux, Boucaï seraient les chefs de l'entreprise, qu'ils résolurent d'exécuter dans la nuit même (1).

Boucaï invita à un festin Cara-Boucaï, Biac et Alinac. Ce dernier s'excusa en alléguant qu'il ne pouvait pas se livrer à la boisson parce que son régiment (Kézik) était, la nuit suivante de garde auprès d'Argoun; mais Tchouschkab lui ayant offert de le remplacer, il se rendit au festin, et à l'heure du coucher du soleil, il était déjà ivre-mort.

Boucaï suivi de trois cavaliers, entra dans l'enceinte du quartier d'Argoun; c'était la 18 r.-2. nuit du mardi 4 juillet; il détacha un de ses gens pour aller tout doucement le réveiller, et lui annoncer que Boucaï, ayant formé un grand parti en sa faveur, était là pour le sauver. Ce prince fut d'abord effrayé, croyant qu'on en voulait à sa vie; rassuré enfin par les serments les plus terribles, il sortit de sa tente, et Boucaï le fit monter à cheval. Lorsqu'ils furent à la porte de l'enceinte, le factionnaire mongol leur demanda pourquoi ils sortaient cinq, puisqu'ils n'étaient entrés que quatre; ils lui firent ac

(1) Vassaf, 1. c.

croire qu'il s'était mépris, et ils arrivèrent heureusement au quartier de Boucaï (1).

Argoun se revêtit d'une armure, et alla sur le champ avec Boucaï, au quartier d'Alinac, qu'ils tuèrent dans sa tente; ils le mirent en pièces, avec la cage de crin qui le garantissait des insectes. Quelques-uns de ses gardes saisirent leurs arcs. Boucaï leur cria: « Jusqu'à présent nous avons obéi « à Ahmed; nous venons de tuer Alinac, « par l'ordre de Houladjou. » Les gardes jetèrent leurs armes, et se prosternèrent. Arouc et Houladjou courant au quartier du prince Yessar, le trouvèrent plongé dans le sommeil de l'ivresse, ainsi que plusieurs de ses gens, et les tuèrent (2). Cara-Boucaï, Biac, Taboui et d'autres officiers furent arrêtés; le lendemain on mit à mort plusieurs d'entre .eux; les autres furent relâchés.

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Un cavalier s'échappa du camp, au milieu de la nuit, et courut apprendre ce qui venait de se passer, à Ahmed, qu'il atteignit à quatre fersenks au-delà d'Esféraïn (3). Le sultan avait auprès de lui le prince Kin

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schou, les émirs Mektchin, Acbouca et Lékézi. Il avait déjà rebroussé chemin, pour aller châtier les rebelles, lorsqu'il apprit que ses principaux officiers étaient tués, et que toute l'armée s'avançait contre lui. Il ne lui restait d'autre parti que celui d'une prompte fuite; il tourna bride et alla passer la nuit à Calbousch, auprès de Toudaï Khatoun; il prit ensuite la route du Coumouss et de l'Irac, pour se rendre à l'Ordou de sa mère Coutouï Khatoun, près de Sérab (1). Dans cette route, les généraux, les officiers, les petits souverains, qui composaient son cortège, restaient, l'un après l'autre, en arrière; à chaque station sa suite était diminuée. Le vézir, separé de ses gens, arriva à Djadjérem avec un seul palefrenier, et prit le chemin d'Ispahan. << C'était, dit Vassaf, une véritable « déroute, dans laquelle le trouble, la peur, << la confusion étaient telles que les balischs « d'or et d'argent, les vases garnis de pier

reries, les paquets de robes de drap d'or « et de soieries peintes de la Chine, étaient « parsemés sur le chemin, comme des pierres << et des feuilles, sans que personne, tant

(1) Sérab est un bourg de l'Azerbaïdjan, situé entre Tébriz et Ardbil.

<< était grande la frayeur, se souciât de les « ramasser. Les fuyards jetaient à terre les perles et les bijoux qu'ils portaient au <«< cou et aux oreilles, couraient à pied çà et « là, et se cachaient dans des vallons et des

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« cavernes. >>

Sougoundjac, qui escortait les bagages et le trésor du sultan, avait pris la route de Mosslémi, et allait rejoindre le sultan à Sérab; il fut atteint et attaqué sur cette route, par Taïdjou Couschdji et Kitouga Couroudji. A la suite d'un combat, ces derniers firent rétrograder le trésor, et restèrent à Mosslémi pour le garder (1).

Après avoir envoyé deux corps de troupes à la poursuite d'Ahmed, les princes du sang et les Oméras s'étaient réunis à Kharkan, auprès d'Argoun, pour tenir conseil sur l'élection d'un nouveau souverain. Les princes Kinschou et Houladjou y arrivèrent le lundi, 10 juillet. Il y avait trois partis : Boucaï était pour Argoun; Arouc, pour Tchouschkab et Bekta, pour Houladjou. Bekta alléguait en faveur de ce dernier prince, qu'il était fils de Houlagou, et que les fils devaient passer

(1) Vassaf, 1. c.

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