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Dès-lors, Madjd-ul-mulk fut l'objet de tous les. respects (1). Il plaça dans les provinces ses intendants chargés de concourir à l'assiette et à la perception des impôts; toutes les expéditions émanées du Divan royal portaient, à droite, la signature et le sceau du vézir, gauche, celles de sorr associé (2).

à

Le vézir voyait avec douleur le déclin de son crédit, mais il se gardait de montrer de l'abattement. On cite deux traits qui font connaître à la fois ce que son orgueil avait à endurer et la manière dont les princes mongols traitaient leurs ministres persans.

(1) Raschid.

(2) Vassaf.

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Ce fut dans ce haut période de faveur que Madjd-ul-Mulk adressa au vézir un quatrain, dont voici le sens :

« Je veux plonger dans l'abîme de ton chagrin,

«

M'y noyer, ou en rapporter une perle.

« On ne peut t'attaquer sans danger; je le ferai néanmoins.

« Et l'issue rougira ou mon visage, ou mon cou. »

Le vézir lui répondit par cet autre quatrain:

<< Comme il ne sied pas de porter sa cause devant le souverain,

<«< Du sort il faut supporter les rigueurs;

« Mais dans l'affaire où tu t'es engagé,

« Tu te rougiras et le visage et le cou.»> (Raschid).

Abaca l'avait demandé un jour pour le confronter à Madjd-ul-mulk, au sujet d'un rapport qui lui avait été fait. Selon l'usage, les deux comparants se mirent à genoux devant le trône, en face l'un de l'autre. Le prince ordonna au vézir d'aller s'agenouiller plus loin. Dans un festin royal, Schems-ud-din avait présenté trois fois la coupe à son maître, sans que ce prince eut voulu la recevoir de sa main. Le ministre ne se rebuta pas, tant il désirait de faire cesser la joie maligne de ses ennemis; il offrit la coupe une quatrième fois. Alors Abaca lui tendit, au bout de son couteau, un morceau d'une viande impure pour un Mahométan. Le vézir, après avoir baisé la terre, mangea ce morceau, et le Khan but le verre qui lui était présenté, puis il dit à ses courtisans : « Voilà un

<< homme bien obstiné; vous voyez que mes << refus ne l'ont pas rebuté; mais s'il n'eut « pas accepté la viande, je lui enlevais l'œil << avec la pointe de ce couteau. » Malgré ces signes évidents de défaveur, Schems-ud-din restait en place.

cour à

Son frère Alaï-ud-din vint de Bagdad, au mois de juillet de 1281, faire sa Abaca. Il remit à ce prince une forte somme en or, représentant une année des revenus

rabi.-1.

680.

de l'Irac, son gouvernement, et puis il lui en offrit une seconde, provenant des accroissements que les recettes y avaient éprouvés. Alors Madjd-ul-mulk exposa, que depuis douze ans qu'Alaï-ud-din avait obtenu la ferme générale de l'Irac Aréb et du Khouzistan, il avait, chaque année, perçu vingt toumans d'or au-delà de sa redevance, et qu'il avait enfoui ces fonds avec d'autres richesses mal acquises. Plusieurs intendants des finances, comblés des bienfaits du vézir, élevés à son école, sur lesquels il comptait pour repousser les attaques de ses ennemis, lui montrèrent la plus noire ingratitude, en affirmant faussement la vérité de l'accusation contre Alaï-ud-din. Ce gouverneur démontra qu'il lui eut été impossible d'amasser de l'excédent des recettes la somme désignée, avec toutes les dépenses extraordinaires qui provenaient annuellement, soit des assignations données sur les revenus publics, par les princes du sang, les Khatouns, les généraux; soit de l'entretien des commissaires et des officiers en mission; soit des libéralités du souverain; que même tous ces frais entamaient le revenu ordinaire; mais que malgré le déficit qu'il y avait eu dans ce revenu l'année précédente, il avait apporté à la cour la somme inté

grale de son bail, et qu'il y avait été traité avec beaucoup de bienveillance; que cette année, voyant que la fortune lui était contraire, il avait voulu faire encore plus, et sans y être réduit par les attaques de ses ennemis, il avait livré des excédants de recettes qui n'existaient pas, puisqu'au contraire, les dépenses extraordinaires s'étaient accrues pendant ces deux dernières années; qu'il avait été obligé, pour soulager les contribuables, de faire des remises au trésor de ses propres fonds, vu que, lorsque le fisc demande de l'argent, on ne peut pas répondre qu'il n'y en a pas, et produire les comptes; il faut pourvoir de manière ou d'autre à ses besoins. Les ennemis d'Alaï-ud-din, craignant de le voir prouver qu'il avait été réduit aux expédients, pour fournir les sommes remises à titre d'excédants de recettes, changèrent de batterie. Ils exposèrent que dans l'année 669 (1270-1), les officiers chargés de revoir les états des recettes et des dépenses dans le gouvernement d'Alaï-ud-din, avaient trouvé un arrièré de deux cent cinquante toumans, qui était encore dû à l'époque actuelle; mais ils se gardaient de rappeler à Abaca, qu'ayant appris dans le temps que cet arrièré était dû par des fermiers de districts, et qu'il serait

impossible d'en obtenir le recouvrement sans
ruiner les habitants, et les forcer à émigrer, ce
prince y avait renoncé, et qu'après avoir traité
Alaï-ud-din avec bonté, il l'avait renvoyé dans
son gouvernement.

Ces molestations exercées contre Alaï-uddin avaient pour cause première le besoin d'argent, à la veille d'une guerre avec l'Égypte. On avait reçu de la frontière l'avis que le sultan Kélavoun faisait des armements. Abaca fit marcher de ce côté une armée sous les ordres de son frère Mangou-Timour. Il envoya des troupes au prince Argoun dans le Khorassan, et fit passer des renforts au corps cantonné sur la frontière du Derbend. 1.er redj.

Au milieu du mois de septembre, Abaca prit la route d'Irbil et de Moussoul pour se rendre à Bagdad où il voulait passer l'hiver. Il avait fait partir en avant le gouverneur Alaï-ud-din pour lui préparer les relais et les vivres. Le jour même du départ de cet intendant, Madjd-ul-mulk rappela à Abaca l'affaire de l'arrièré. Ce prince chargea plusieurs officiers d'aller interroger Alaï-uddin sur ce point; ils l'accompagnèrent à Bagdad, et mirent sous le séquestre toutes ses propriétés. Le vézir, qui était à la suite d'Abaca, obtint de ce prince la permission

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