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<«< solu dans la province de Bagdad. Il s'est fait faire une couronne garnie de pierreries,

qui est digne d'un souverain. Enfin si l'em« pereur l'ordonne, je prouverai que le vézir << s'est acheté pour quatre cent toumans de

propriétés, et qu'il possède en outre deux <<< mille toumans en espèces, en bijoux et en «< bétail; et si tous les trésors du souverain, << non compris ce qui a été emporté de Bagdad << et des châteaux des Ismaïliyens, s'élèvent à la << valeur de plus de mille toumans d'or, je « veux perdre la tête comme un criminel. « C'est parce que le vézir sait que je suis << bien instruit de toutes ces circonstances, qu'il a voulu me fermer la bouche, par « une somme d'argent et le gouvernement <<< de Sivas. >>

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Argoun rapporta ces paroles à son père, qui lui recommanda le secret, voulant prendre ses mesures avec précaution. Pendant le séjour que fit Abaca à Schérouyaz (1), dans le printemps de cette année, Madjd-ul-mulk parvint, par le moyen du général Togatchar,

(1) C'est un canton dans le nord de l'Irac-Adjém, entre Zendjan et Ebher, qui a de belles prairies, et où fut bâtie, dans la suite, la ville de Solttaniyé.

et de son intendant, Sadr-ud-din de Zindjan, ennemis secrets du vézir, à obtenir une audience de ce prince, qui le reçut au bain (1). Madjd-ul-mulk s'exprimait avec facilité, et avait les manières élégantes d'un courtisan. Il adressa au Khan les mêmes discours qu'il avait tenus à son fils. Il soutint que Schemsud-din, depuis qu'il était ministre, n'avait jamais rendu un compte fidèle des revenus du royaume, et qu'il regardait l'empire comme son propre domaine; que son frère Bahaï-uddin, depuis qu'il administrait l'Yrac, avait levé dans cette province, outre le montant des impositions fiscales, la somme de six cent toumans, dont il n'avait pas employé un dinar aux dépenses publiques, ni aux besoins des troupes.

Ces accusations agirent vivement sur l'esprit d'Abaca. Il traita Madjd-ul-mulk avec beaucoup de bonté; il lui fit même l'honneur de lui présenter une coupe et de le faire revêtir d'une de ses robes. Aux questions que le prince lui adressa sur des matières d'administration générale, Madjd-ul-mulk répondit d'une manière si satisfaisante qu'Abaca

(1) Raschid.

le nomma contrôleur général des finances, et le chargea de reviser les comptes des dernières années, afin de pouvoir constater l'excédent des recettes sur les dépenses. Dans l'ordonnance qui le constituait, il fut défendu que personne, ni commandants militaires, ni Khatouns, ni princes du sang, ne mît obstacle à l'accomplissement de cette commission, et à cet effet Abaca fit délivrer à Madjd-ul-mulk une patente à tête de lion, marque de faveur qui jusqu'alors n'avait été accordée à aucun musulman, pas même à des souverains (1). En même temps il ordonna que les intendants du vézir fussent amenés, avec leurs registres, à la résidence royale. Le ministre alarmé se rendit à la cour et implora la protection d'Oldjaï-Khatoun, qui trouva l'occasion de parler en sa faveur (2). Lorsqu'il parut devant Abaca, ce prince lui dit d'un ton animé : « Tu as a long-temps servi mon père; à mon avé«nement, je t'ai conservé dans tes fonctions; « je t'ai laissé la gestion des finances de mon << royaume; aujourd'hui Madjd-ul-mulk expose « telles choses. Comment as tu pu agir avec

(1) Vassaf, Tom. I.

(2) Raschid.

<< tant d'ingratitude. » Le vézir comprit que ce n'était pas le moment d'accuser de calomnies son adversaire; à ses reproches il voyait qu'Abaca était trop prévenu. Il ne

chercha son salut que dans une parfaite résignation. «Ma vie et mes biens, dit-il, sont << à mon maître. Sans nul doute, nous avons « vécu de ses bienfaits, moi, mon frère et << mes enfants; nous avons aussi fait part à << d'autres de ce que nous tenions de sa mu«nificence. Nous en avons employé une par<< tie au service des princes du sang, des « Khatouns, des Grands de l'État. Nous en « avons dépensé une autre partie en aumô<«< nes, pour la durée de votre glorieux règne, << et ce que je possède aujourd'hui, soit en « fonds de terres ou en effets, soit en escla<< ves et en troupeaux, je le dois à vos bien« faits; dès que vous l'ordonnerez, seigneur, je livrerai le tout; quant à moi, je ne de<«< mande qu'à continuer de servir mon maître « jusqu'au dernier jour de ma vie. » Ces paroles apaisèrent Abaca, qui rendit au ministre ses bonnes grâces, et révoqua l'ordre d'arrêter ses intendants.

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Désespéré de ce retour de faveur, Madjdul-mulk écrivit à Abaca: « Qu'ayant désor<< mais tout à craindre du ressentiment du

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«vézir, il le suppliait ou de le mettre sous <<< la protection de l'un des Grands du royaume, « ou de le renvoyer de sa cour. » Abaca lui répondit : Quoique j'aie rendu mes bonnes grâces au vézir, je ne t'en veux pas. Reste « à ma cour auprès de Togatchar. » Madjdul-Mulk y demeura, continuant ses intrigues, et fit si bien, qu'au printemps de l'année 1280, il fut tout à coup nommé administrateur du royaume, conjointement avec Schems-ud-din. Abaca fit même lire à haute voix l'ordonnance de sa nomination, dans le temple d'idoles à Méraga, en présence des princes, des princesses du sang et des seigneurs qui y étaient assemblés. On remarqua que jamais souverain mongol n'avait traité un persan avec autant de distinction (1). Abaca l'autorisa de prendre connaissance de toutes les affaires relatives à l'administration, aux finances, à son trésor, à ses écuries; de placer partout ses agents afin qu'ils pussent exercer leur contrôle, et lui recommanda de bien prendre garde à lui, de ne pas s'éloigner de la résidence, pour quelque raison que ce fut, ajoutant: « Si quelqu'un ose at« tenter à ta vie, c'est à moi qu'il aura affaire. »

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