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fils Sa'ïd, âgé de dix-neuf ans, se fit prêter le serment de fidélité. (1)

Cependant Abaca, vivement affligé de la perte de ses troupes, était parti de Tébriz dans le courant du mois de juillet. Il entra safer. dans le Roum et suivit les traces des Égyptiens, qu'il avait espéré de combattre. Il versa des larmes à l'aspect du champ de bataille d'Aboulistin, couvert de cadavres mongols, et vit avec surprise le petit nombre des morts roumiens et égyptiens. Dans sa colère il fit mourir plusieurs généraux roumiens, qu'il regardait comme les premiers auteurs de ce désastre (2). Il alla examiner l'emplacement du camp égyptien, le fit mesurer avec le manche d'une masse d'armes pour connaître quelle avait été la force numérique de l'ennemi. Il reprocha au Pervané, qui après avoir été le recevoir à la frontière du Roum, l'accompagnait dans cette marche, de ne l'avoir pas informé plus exactement de la force de l'armée égyptienne. Ce ministre voulut s'excuser en alléguant qu'il n'avait pu la connaître, tant cette armée était arrivée à l'improviste; mais il ne réussit pas

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à se justifier. L'émir Yzz-ud-din Eïbeg, qui avait quitté le service de Beïbars, se trouvait auprès d'Abaca, qui lui dit de lui montrer où étaient placées les ailes et le centre des Égyptiens. Eibeg planta planta une lance à chacun de ces trois points. Le Khan ayant examiné les distances, dit que l'armée qu'il avait avec lui était moins nombreuse que celle de l'ennemi, et cependant il avait trente mille hommes.

Ses troupes se répandirent, par son ordre, dans le pays entre Césarée et Erzen-ur-Roum, qu'elles mirent à feu et à sang; c'est une étendue de sept journées; il y périt plus de deux cent mille ames (1). Les Mongols n'épargnèrent pas même les cadhis et les docteurs de la loi; mais ils ne tuèrent aucun chrétien (2). La moitié de la ville de Sivas fut saccagée. Enfin le vézir Schems-ud-din parvint à fléchir Abaca, en le suppliant de ne pas punir tout un peuple du crime de quelques individus (3). Quoique ce prince eut défendu à ses troupes de maltraiter les Chrétiens, en considération de ce qu'ils avaient caché et nourri beaucoup de Mongols, pour les soustraire aux armes des

(1) Navaïri.

(2) Macrizi.

(3) Raschid.

Égyptiens, il y en eut cependant un grand nombre qui devinrent les victimes de la cupidité du soldat, et furent tués, ou pillés ou réduits en captivité. Mais Abaca, instruit de ces infractions à ses défenses expresses, fit munir un prêtre et un moine d'une ordonnance qui les autorisait à parcourir son camp et à délivrer les Chrétiens captifs du pays de Roum (1)..

Abaca laissa dans ce royaume, une armée sous les ordres de son frère Coungcourataï, et retourna à Alatac. On rapporte que lorsqu'il passa près du château de Baïbourt, un Scheïkh lui demanda la permission de lui parler librement, et l'ayant obtenue, lui dit: « Seigneur, votre ennemi est « entré dans votre pays, et n'a pas fait de « mal à vos sujets; il n'a pas répandu une palette de leur sang; Vous avez marché « contre ce ennemi, vous l'avez suivi dans << sa retraite, et parce qu'il vous a échap« pé, vous avez tué vos propres sujets, ra«< vagé et ruiné leur pays; et quel Khan parmi vos prédécesseurs a agi de la sor<< te? » On ajoute que ces paroles firent une

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(1) Bar Hebræus, p. 557.

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vive impression sur l'esprit d'Abaca; qu'il s'emporta contre les généraux qui l'avaient si mal conseillé, et ordonna de relâcher tous les captifs musulmans, qui étaient au nombre de quatre cent mille (1).

Dès qu'il fut de retour à sa résidence d'Alatac, il fit traduire le Pervané devant un conseil de généraux, qui le jugèrent coupable sur trois chefs; il avait fui devant l'ennemi; il avait trop tardé à instruire Abaca de l'invasion des Égyptiens, et après la défaite d'Aboulistin, il ne s'était pas rendu tout de suite auprès de ce prince. Il fut arrêté. Quelque temps après ceux qu'Abaca avait envoyés en Égypte avec un message menaçant, étant revenus, rapportèrent à ce souverain, qu'on les avait assurés au Caire que l'expédition dans le Roum n'avait été entreprise qu'à l'invitation du Pervané, qui avait ensuite trompé le sultan Beïbars, en fuyant à son approche, au lieu de lui livrer le royaume. Alors le Pervané fut condamné à mort, et exécuté à Alatac le 23 juillet 1278 (2). Mo'yin-ud-din

(1) Novaïri.

(2) Raschid.

Selon Novaïri, Abaca s'était décidé à le renvoyer dans le Roum, lorsque les veuves des mili

Soleïman était originaire du Deïlem, d'où son père, Mohazzab-ud-din Ali, était venu, jeune encore, chercher fortune dans le Roum.

taires mongols qui avaient péri à Aboulistin, s'assemblèrent devant la demeure royale et se répandirent en pleurs et en gémissements. Abaca en demanda la cause; on lui dit que ces femmes ayant appris que le Khan avait l'intention de rendre la liberté au Pervané, pleuraient sur les mânes de leurs maris qui ne seraient pas vengés. Alors Abaca résolut sa mort; il ordonna à l'un de ses officiers nommé Gueukdji Bahadour de conduire le Pervané dans un lieu qu'il lui indiqua, et de lui ôter la vie. L'officier dit au Pervané que le Khan voulait monter à cheval et avait ordonné que le ministre et les personnes de sa suite l'accompagnassent. Le Pervané partit avec trente-deux de ses gens, et Gueukdji Bahadour, suivi de deux cents cavaliers, le mena au lieu fixé où il le fit entourer. Le Pervané connut alors le sort qui lui était réservé; il demanda un instant de répit, qu'il employa à faire un Namaz de deux rék'ats, et lorsqu'il eut fini sa prière, il reçut la mort. Avec lui furent tués tous ceux qui l'accompagnaient. —« A l'égard du traître Per<< vané, dit Haïton (Hist. or., chap. 34), Abaca le fit « couper par le milieu du corps, suivant la coutume des « Tartares, et ordonna que dans tous les mets qu'on lui « servirait, on mit de la chair de Pervané, dont il « mangea lui et les principaux de son armée ! » Selon Macrizi (1re partie), Mo'yin-ud-din Soleïman était un homme courageux, prudent, généreux et instruit, mais rusé et artificieux.

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