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« l'héritage que leurs aïeux leur ont conquis; « mais qui est l'auteur de cette guerre? De << tous les petits-fils de Tchinguiz-khan, je << suis le plus mal partagé. Les autres possè«<dent des villes opulentes ou de gras pâtu<«< rages; je n'ai que ce territoire borné; en«< core Caïdou et Mangou-timour s'unissent-ils « pour me le ravir. » Kiptchac dit qu'il fallait oublier le passé, et se réunir en Couriltaï, pour se jurer une alliance éternelle. Abattu de sa triste position, Borac consentit à tout, et Kiptchac le quitta au bout d'une semaine. Ces princes, naguère ennemis, se réunirent, 667. au printemps de 1269, dans les prairies de Talas (1) et de Coundjouc. Ils passèrent en fêtes les sept premiers jours; le huitième, ils parlèrent d'affaires. On arrêta, dans ce Couriltaï, que Borac garderait les deux tiers de la Transoxiane; que le reste appartiendrait à Mangoutimour et à Caïdou, et comme Borac se plaignait de l'insuffisance de son territoire pour la subsistance de ses hordes, il fut convenu, qu'au printemps suivant, ce prince passerait le Djihoum, pour tenter la conquête du Kho

(1) La rivière de Talas et le lac de ce nom sont à l'est du fleuve Sihoun.

rassan, qui serait réuni à ses domaines. Caïdou, ennemi d'Abaca, avait applaudi à ce projet mis en avant par Borac, et ne demandant pas mieux que de le voir occupé du côté de l'ouest, il lui promit des troupes pour l'exécu tion de son dessein. Les princes, considérant, d'ailleurs, que la Transoxiane était ruinée, que les champs étaient en grande partie incultes, s'engagèrent à n'habiter que les steppes et les montagnes, à ne pas lâcher leur bétail dans les terres ensemencées, à ne pas approcher des villes, à n'exiger des habitants aucune taxe extraordinaire. Ils jurèrent d'observer fidèlement cette convention, et suivant l'usage, ils mirent de l'or dans la boisson qu'ils burent pour confirmer ce serment (1).

Mass'oud Bey fut chargé par les trois souverains alliés de parcourir la Transoxiane, afin d'y réparer les maux de la guerre, de réunir les habitants dispersés, de donner des encouragements à l'agriculture; mais Borac ne lui laissa pas le temps d'avancer l'exécution de cette œuvre bienfaisante. Il renouvella ses extorsions, pillant les habitants et enlevant

(1) C'est ce que les Mongols appelaient boire de l'or ou du sang d'or.

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leurs chevaux et leur bétail pour son expédi tion en Perse. Enfin Mass'oud Bey lui représenta qu'il ruinait son pays pour une conquête incertaine (1), et que s'il éprouvait des revers, qui le forçassent à la retraite, il ne trouverait plus dans la Transoxiane les ressources dont il aurait besoin pour réparer les pertes de son armée. Irrité de ces avis, Borac fit appliquer à Mass'oud sept coups de bâton; mais lorsque sa colère fut appaisée il reconnut que cet administrateur avait raison, et renonça à ses mesures de violence.

A la fin de l'année 1268, lorsque Borac eut conçu le projet de s'emparer du Khorassan, Mass'oud Bey avait été envoyé par lui et par Caïdou à la cour d'Abaca, qui passait l'hiver dans le Mazendéran, avec la mission apparente de réviser les comptes des revenus des domaines appartenant à ces deux princes, dans les États d'Abaca, et de resserrer les liens de l'amitié qui existait entre eux; mais avec l'ordre secret de se procurer les renseignements dont les deux princes avaient besoin pour l'expédition qu'ils méditaient. Lorsque Mass'oud-Bey fut près de la résidence d'Abaca,

(1) Raschid.

les généraux de ce prince et son vézir Schemsud-din allèrent à sa rencontre; ce dernier, tout grand personnage qu'il était, mit pied à terre et baisa l'étrier de Mass'oud-Bey, qui lui dit avec dédain : « C'est toi qui est le «< chef du Divan? ta renommée vaut mieux « que ta personne. » Le vézir dissimula son ressentiment de cette apostrophe (1). Abaca fit revêtir l'ambassadeur de la tunique de Tchinguiz-khan, et le fit asseoir au-dessus de tous ses généraux, excepté le noyan Ilga. Il ordonna que l'état demandé par Mass'oud fut prêt au bout de huit jours. Mass'oud ne l'eut pas plutôt reçu qu'il partit. On apprit, vingtquatre heures après, que des troupes s'étaient montrées sur l'autre rive du Djihoun. Abaca s'aperçut alors que cet ambassadeur n'était venu que pour observer; il fit courir après lui; mais Mass'oud avait eu la précaution de placer à chaque relai un homme de confiance avec deux chevaux, et déjà il traversait le fleuve, lorsque les gens expédiés à sa poursuite atteignirent la rive du Djihoun (1).

Avant d'entrer en campagne, Borac envoya des ambassadeurs à la cour d'Abaca. 11 les

(1) Raschid.

chargea de quelques présents pour le prince Nigoudar, petit-fils de Tchagataï, qui avait passé en Perse avec Houlagou, à la tête du contingent que l'Oulouss de Tchagataï lui avait fourni pour son expédition en Occident, s'était établi en Perse, et commandait alors un Touman dans les armées d'Abaca. Il y avait, parmi ces présents, une flèche de l'espèce que les Mongols appellent tougané; en la lui remettant l'ambassadeur lui fit un léger signe; Nigoudar le comprit, et lorsqu'il fut seul, ayant rompu cette flèche, il y trouva une lettre de Borac, qui lui annoncait son invasion en Perse, et lui exprimait l'espoir que Nigoudar, issu comme Borac de Tchagataï, ne servirait pas contre lui sous les drapeaux d'Abaca. En effet, Nigoudar demanda la permission de retourner à ses quartiers en Géorgie, et s'y rendit. Peu après, sur les nouvelles alarmantes qui arrivaient du Khorassan, Abaca manda Nigoudar, afin qu'il assistât à un conseil de guerre. Celui-ci s'en excusa, et continua à donner diverses défaites aux messagers que lui dépêchait Abaca. Enfin, ayant confié son secret à ses officiers, il prit la route du Derbend, pour aller joindre Borac par le nord de la Mer Caspienne; mais le noyan Schiramoun, qui commandait sur cette

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