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1259.

du pays de Scheherzour. Nassir les prit à son service, les traita généreusement, et sur l'avis que, malgré tous ses dons, ils voulaient le quitter pour se rendre à Carac, il redoubla de largesses; ce fut en vain, ils partirent. Avec ces forces et les Mameloucs Bahriyés, le prince Moguith crut pouvoir s'emparer de Damas, et marcha sur cette ville. Nassir en sortit à sa rencontre et alla camper sur le bord du lac Ziza. Il y demeura six mois, négociant par ses envoyés avec le prince Moguith. Il fut enfin convenu que ce dernier livrerait à Nassir tous les Mameloucs Bahriyés qui étaient à son service, et qu'il congédierait les Scheherzouriens.

Ce traité conclu et exécuté, Nassir retourna à Damas. Lorsqu'il eut appris que Houlagou était à Harran, il tint conseil avec ses généraux, et l'on résolut de combattre les Mongols. Nassir posa son camp à Berzé, à une petite distance au nord de Damas (1); mais il n'avait pas grande confiance dans la résolution de ses troupes, composées d'Arabes, de Turcs et de volontaires; il savait que généraux et soldats craignaient de se mesurer avec l'armée victorieuse

(1) Novaïri. Macrizi, 1re partic.

de Houlagou (1). Ce prince faible de caractère, qui négligeait les soins du gouvernement, pour se livrer aux charmes de la poésie, n'inspirait non plus aucune confiance à son armée. Le vézir Zeïn-ud-din El-Hafizzi voyant l'inquiétude de Nassir, se mit à exalter la puissance de Houlagou, et conseilla de recourir à la voie de la soumission plutôt qu'à celle des armes. Indigné de cet avis pusillanime, l'émir Beïbars le Boundoucdar s'élança un jour sur le vézir, le frappa, et l'accusa, en le comblant de malédictions, de vouloir la perte des Musulmans. Zeïn-ud-din alla se plaindre à son maître de ces outrages. La nuit suivante, Nassir fut assailli, dans un jardin, par une troupe de Mameloucs, résolus de le tuer et de se donner un autre souverain. Il n'eut que le temps de se réfugier, avec son frère Zahir, dans la citadelle de Damas. Les officiers Caïmériyés, l'émir Djémal-ud-din, fils de Yagmour, et d'autres seigneurs, y coururent pour lui conseiller de retourner au camp. Nassir y revint; mais Beïbars partit pour Gaza, d'où il envoya un officier nommé Taïbars au nouveau souverain de l'Égypte, pour lui porter

(1) Ibn Tagri-birdi.

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son serment de fidélité. Dans un conseil provoqué par ces circonstances menaçantes, il fut unanimement résolu que le prince, ses officiers, ses soldats enverraient leurs familles en Égypte. Nassir fit partir pour ce pays sa femme, qui était fille du sultan du Roum Keï-Cobad, son fils, ses trésors, que suivirent les femmes et les enfants des officiers de l'armée, et un grand nombre d'individus. La frayeur des habitants se communiquait aux troupes. Des militaires partirent avec leurs familles, sous prétexte de les escorter, et beaucoup d'entre eux ne revinrent pas. Ainsi l'armée de Nassir se débanda.

Ce prince demanda du secours à Moguith, et envoya au Caire, le sahib Kémal ud-din Omar, pour engager le roi d'Égypte à le soutenir. Le Mamelouc Eibeg, qui s'était assis sur le trône des Eyoubites, venait d'être assassiné dans le bain par l'ordre de sa femme 11 avr. Schedjer-ud-durr, laquelle persuadée qu'il voulait la faire périr, s'était hâtée de le prévenir; mais sa punition fut prompte. On la livra à la veuve du sultan Aʼziz qui, aidée de ses femmes et de ses eunuques, la fit mourir sous les coups, et fit jeter son corps du haut du mur dans le fossé du château, où il resta nu plusieurs jours. Les chefs des Mameloucs

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d'Eïbeg mirent sur le trône son fils Manssour, et lui donnèrent pour Atabeg ou tuteur, d'abord Acttaï, l'ancien camarade de son père, ensuite le général Couttouz, qui avait été son esclave (1).

A l'arrivée de l'ambassadeur de Nassir, les généraux égyptiens tinrent conseil, en présence du sultan Manssour. On demanda au grand-juge Bedr-ud-din Hassan et au scheïkh Y'zz-ud-din Ibn Abd-us-Sélam, qui assistaient à cette assemblée, si l'on pouvait mettre légalement un impôt de guerre sur la nation, pour l'entretien de l'armée (2). Ibn Abd-usSélam répondit: « Dès que l'ennemi est en« tré sur la territoire de l'Islamisme, tout << Musulman est tenu de s'armer. Vous aurez « le droit de prendre aux sujets, pour faire << la guerre, ce dont ils peuvent se passer, mais après que le trésor aura été épuisé, que « vous aurez vendu tout ce que vous pos«< sédez de vases d'or et de meubles de prix;

«

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après que le militaire, réduit à son che«< val et à ses armes, se sera mis au niveau << de l'homme du peuple. Il n'est point légal

(1) Novaïri. (2) Macrizi.

« de prendre l'argent de la nation, tant qu'il << reste entre les mains des militaires de l'ar<< gent et des effets précieux. » Cette décision canonique fut adoptée par le conseil. Le sultan encore fort jeune garda le silence (1). La gravité des circonstances faisait souhaiter un autre chef qu'un enfant, uniquement occupé de jeux puérils, et déjà livré à de mauvaises habitudes, par l'effet de la trop grande indulgence de sa mère. L'émir Seïf-ud-din Couttouz, en se plaignant de la jeunesse du souverain, convoitait le pouvoir suprême, et n'attendait pour s'en saisir que le départ des généraux pour la Haute-Égypte. Alors il em28 zoulc. prisonna le sultan, son frère Cacan, et leur 657. mère, et se fit proclamer souverain (2). Pris 1259. par les Mongols dans sa jeunesse, Couttouz

16 nov.

avait été vendu à Damas et transporté au Caire. On le disait neveu du sultan Djelalud-din Khorazmschah (3). Affranchi de Moïzzud-din Eïbeg, il ajoutait à son nom celui de son patron, suivant l'usage des Mameloucs, s'appelant El-Moïzzi.

(1) Ibn Tagri-birdi, 3° partie.

(2) Novaïri.

(2) Macrizi.

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