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14 saf.

Le mercredi 20 février, Houlagou s'éloigna de Bagdad, à cause de la corruption de l'air, et s'arrêta près du village de Vacaf. Après avoir fait partir l'Emir Abd-our-Rahman, pour lui soumettre le Khouzistan, il manda Mosta'ssim. Ce pontife, qui prévoyait son sort, demanda, en tremblant, à son vézir s'il y avait encore quelque moyen de salut: « J'ai une longue barbe, lui répondit Ibn-Alcamiyi, faisant allusion à ce que le Dévatdar, lorsque le vézir avait conseillé au Khalife d'envoyer de riches présents à Houlagou, afin d'en obtenir la paix, avait dit, en s'opposant à son avis, qui fut aussi rejeté : Le vézir a une longue barbe, pour faire entendre qu'en revanche il avait l'esprit borné. Alors le Khalife, se préparant à la mort, demanda à entrer au bain, pour faire ses ablutions. Houlagou voulut l'y faire accompagner de cinq Mongols; Mosta'ssim déclara qu'il ne voulait pas de la société de ces suppôts de l'enfer. Enfin, ce même jour, 21 février, le Khalife, son fils aîné et cinq eunuques qui le servaient, furent mis à mort près du village de Vacaf (1). Mosta'ssim et son fils furent enfermés chacun dans

(1) Raschid.

un sac, et foulés aux pieds des chevaux jusqu'à ce qu'ils eussent expiré (1). Mosta'ssim, né en 1212 d'une esclave Ethiopienne, nommée Hadjir (2), était âgé de quarante-six ans; il en avait régné quinze. Il était le trenteseptième Khalife Abbasside. Après sa mort, les Musulmans n'eurent pas de chef spirituel pendant trois ans (3).

(1) Novaïri.

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Car, ajoute cet auteur, les Mongols ne répandent pas le sang des souverains et des princes qu'ils font mourir. » — Bar Hebræus, p. 529. Ben Tagri-birdi, 3 partie.

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(2) Tarikh Monédjim Baschi.

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(3) L'historien persan Nikby rapporte que Houlagou, lorsque le Khalife lui présenta ses trésors, mit devant Mosta'ssim une assiette pleine de pièces d'or et lui dit d'en manger. « Mais l'or ne se mange pàs, » répondit le Khalife. «Eh bien, reprit Houlagou, pourquoi l'avez « vous gardé, au lieu de le donner à vos troupes; pourquoi n'avez vous pas fait convertir ces portes de fer « en pointes de flèches, et ne vous êtes vous pas avancé « jusqu'au bord du Djihoun, pour m'en disputer le pas« sage? Le Khalife s'écria: « Telle était la volonté di« vine. » Ce qui va vous arriver, dit le prince mongol, « est aussi l'effet de la volonté divine. » Mirkhond rapporte le même trait à-peu-près de la même manière. Il est possible que Houlagou ait pris plaisir à insulter ainsi son captif, et que ce soit l'origine du conte, répété par plusieurs auteurs du temps, qu'il avait laissé

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Le lendemain de la mort du Khalife, on tua tous ceux qui avaient été conduits avec

mourir de faim le Khalife devant des plats remplis d'or et de pierreries. Voici d'abord le récit de Joinville « (Histoire de St. Louis, édit. de Capperonnier, p. 122), sur la catastrophe du Khalife : « Tandis que le roy fer<< mait (fortifiait) Sayéte (Saïd sur le bord de la mer), « vindrent marchéans en l'ost, qui nous distrent et con

tèrent que le roy des Tartarins avait prise la cité de « Baudas (Bagdad) et l'apostole des Sarazins qui estoit sire « de la ville, lequel en appeloit le Calife de Baudas. « La manière comment ils pristrent la cité de Baudas et « du Calife, nous contèrent les marchéans, et la manière « fu tèle:

« Car quant il orent la cité du Calife assiégée, il manda « au Calife que il feroit volentiers mariage de ses en« fans et des siens; et le conseil leur louèrent que il s'ac« cordassent au mariage (le conseil du Khalife se accorda « et advisa qu'il se devait accorder au mariage). Et le « roy des Tartarins li manda que il li envoiast jusques « à quarante personnes de son conseil et des plus grans gens, pour jurer le mariage; et le Calife si fist. Encore « li manda le roy des Tartarins, que il li envoiast quarante des plus riches et des meilleurs homes que il «<eust; et le Calife si fist. A la tierce foiz li manda que « il li envoiast quarante des meilleurs que il eust; et il « si fist. Quant le roy des Tartarins vit que il ot touz « les chevetains de la ville, il s'apensa (s'imagina) que le menu peuple de la ville ne s'auroit pooir de deffendre << sanz gouverneur. Il fist à touz les six-vingt homes co

«

lui au quartier de Kitou-boca, devant la porte

de Kelvadhi. Le vendredi, 22, on ôta la vie 16 saf.

« per les testes, et puis fist assaillir la ville et la prist et a le Calife aussi.

« Pour couvrir sa desloiauté et pour geter le blasme « sur le Calife de la prise de la ville que il avait fète, il « fist prenre le Calife et le fist mettre en une cage de fer, << et le fist jeuner tant comme l'en peust faire home sanz « mourir, et puis li manda se il avait fain. Et le Calife « dit que oyl; car ce n'estoit pas merveille. Lors le fist « aporter le roy des Tartarins un grant taillouer d'or (un grand bassin d'or) chargé de joyaus à pierres pré

«

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«< cieuses et li dit : «< Cognois tu ces joiaus? Et le Calife

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respondi que oyl: » il furent miens. « Et il li demanda « se il les amait bien, et il respondi que oyl. » Puisque << tu les amoies tant, fist le roy des Tartarins, or pren « de celle part que tu vourras et manju. « Le Calife li respondi que il ne pourrait; car ce n'estoit pas viande « que l'en peust manger. Lors li dit le roy des Tarta«< rins: « Or peus veoir ô Calife ta défaute; car se tu << eusses donné ton trésor d'or, tu te feusses bien def« fendu à nous par ton trésor se tu l'eusse despendu, qui au plus grant besoing te faut que tu eusses on«ques. » Joinville se trompe lorsqu'il dit que les marchands vinrent au camp et racontèrent ces choses, tandis que St. Louis était occupé à fortifier Sayéte, c'est-à-dire en 1253, puisque Bagdad ne fut prise qu'en 1258. Haïton dit (dans son Histoire orientale, chap. 26): « Ensuite Haolou ordonna qu'on mit le Caliphe dans une « chambre, et qu'on jetât devant lui son or et ses pier-.

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au fils puiné du Khalife, et l'on fit mourir tous les individus de la maison Abbasside qu'on put trouver. Il n'en resta que quelquesuns, qui n'avaient pas été portés sur la liste fatale, et de ce nombre était Mobarek-schah, fils cadet de Mosta'ssim, que Houlagou donna à son épouse Oldjaï-Khatoun; elle l'envoya à Méraga, auprès du Khodja Nassir-ud-din. On lui fit épouser une fille mongole dont il eut deux fils.

Le jour même de la mort du Khalife, Houlagou avait nommé ceux qui devaient exercer l'autorité dans Bagdad et ses dépendances. Ali-Bahadour fut gouverneur de la ville; Ibn Alcamiyi conserva la dignité de vézir

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« reries pour en manger autant qu'il voudrait, et défen« dit qu'on lui donnât d'autre chose à manger et à << boire. >> Marin Sanut, qui a beaucoup copié de Haïton, renchérit ici sur cet historien : << Capti vero Calypha gutturi liquatum aurum jussit infundi, avari« tiam exprobrans, quia cum immensis afflueret thesauris, cupiditate detentus, pro salute sua eos expendere « renuit.» (Secreta fidelium crucis, etc. Lib. III, pars XIII, cap. VII). L'historien grec Pachymeres raconte la même chose. Jean d'Ypres, dans sa Chronique du monastère de St. Bertin (chap. 49, partie 6), Zantfliet et Giov. Villani, dans leurs Chroniques, ont aussi copié Haïton.

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