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« Sachez cependant que si, dans notre colère, « nous marchons sur Bagdad, vous ne nous

échapperez pas, quand vous vous cacheriez <«< dans le ciel, ou dans les entrailles de la « terre. Si donc vous voulez votre salut et « celui de votre maison, prêtez l'oreille à nos <«< conseils; sinon, nous verrons quelle est la « volonté de Dieu. >>

Le Khalife répondit à cette sommation: « Jeune homme qui, séduit par une fortune « de dix jours, vous croyez déjà le maître << du monde, et pensez que vos commande«ments sont irrésistibles comme les arrêts du

destin, que me demandez vous ce que vous « n'obtiendrez pas. Vous ignorez donc que << de l'occident à l'orient, tous ceux qui << adorent Dieu et professent la vraie foi sont << mes serviteurs. Lorsque je le voudrai, avec les <«< seuls débris de l'ancienne population, je me « rendrai maître de l'Iran et passant dans le << Touran, j'y remettrai chacun à sa place; «mais la face de la terre en serait bouleversée « et je ne souhaite pas la guerre; je désire «< éviter ce fléau de l'humanité; je ne veux « pas que la marche de mes troupes arrache <«< des imprécations de la bouche de mes sujets, surtout comme je suis l'ami du Caan <«< et du prince Houlagou. Si vous avez, comme

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« moi, répandu la semence de l'amitié, que « vous importent les murailles et les fossés « de ma résidence. Suivez donc la voie de la « paix et retournez en Khorassan (1). »

Le Khalife chargea de sa réponse trois de ses officiers, qu'il fit partir avec les ambassadeurs mongols. Ceux-ci trouvèrent hors de la ville une foule immense qui les attendait; on les accabla d'injures; on déchira leurs vêtements; on leur cracha au visage, et on les eut massacrés, si des gardes envoyés en toute hâte par le vézir, ne les eussent tirés des mains de la populace.

En apprenant ces outrages Houlagou s'écria: La conduite du Khalife à mon égard est aussi tortueuse que cet arc; mais, si Dieu m'assiste, je le châtierai au point de le rendre aussi droit qu'une fleche. Ce prince, choqué de la réponse que lui apportèrent les ambassadeurs de Mosta'ssim, les congédia en leur déclarant Que Dieu avait donné l'empire de la terre au grand Tchinguiz-khan et à ses descendants; et que, puisque leur maître refu

(1) Nous rapportons cette réponse du Khalife, d'après l'historien Raschid, bien que son style nous fasse douter de son authenticité.

sait de se soumettre à leur puissance, il n'avait qu'à se préparer à la guerre.

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Le Khalife demanda à son vézir ce qu'il fallait faire pour se délivrer d'un pareil ennemi. <«< Lui prodiguer, répondit-il, vos tré« sors, qui ne peuvent être mieux employés qu'au salut de votre empire; lui envoyer, << en présents, mille charges d'effets précieux, <«< mille mulets, mille chevaux richement en«< harnachés; il faut enfin mettre son nom « dans le Khoutbé et sur la monnaie. »> Le Khalife y consentit et donna ses ordres en conséquence.

Le Dévatdar combattit cette résolution; il manda au Khalife que le premier ministre, ne consultant que son intérêt personnel, voulait tous les sacrifier pour faire ensuite valoir auprès de Houlagou les services qu'il lui aurait rendus; «< mais, ajoutait-t-il, nous gardons les «< chemins, et si vous faites partir les ambas<< sadeurs et les présents, nous les arrêterons. >>

Le Khalife, rassuré par des discours qui flattaient à la fois son orgueil et sa mollesse, dit au vézir que ses craintes étaient mal fondées, que les Mongols se borneraient à de vaines menaces, et que si même ils osaient attaquer la maison Abbasside, qui règnait sur tant de princes, ils ne feraient que courir à leur perte.

Cependant le général Soleiman - schah, le Dévatdar et d'autres chefs militaires, assemblés chez le vézir, s'emportèrent contre la pusillanimité du Khalife: « Entièrement livré, disaient-ils, à ses bouffons et baladins, il << ne prend nul intérêt au soldat. Nous som<< mes réduits à vendre ce que nous << acquis sous le règne de son père. « ne prend pas, dit Soleïman-schah, des me- . «sures vigoureuses, nous verrons dans peu <«< l'ennemi aux portes de Bagdad, qui subira << le sort de tant d'autres villes. Ni grands, ni

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avons

« S'il

petits, ni pauvres ni riches n'échapperont <«< au massacre, et nos femmes passeront dans << les bras de ces barbares. Si nous n'étions «< resserrés de tous les côtés par les Mongols, << il nous serait encore facile de lever une ar<«<mée; nous irions les surprendre, et si la « fortune nous était contraire, nous péririons «< du moins avec honneur. »

Le discours du général, rapporté au Khalife, releva son courage. Il chargea le vézir d'expédier des ordres pour lever des troupes et renforcer l'armée, qui devait avoir pour chef Soleiman-schah; mais le vézir recommanda au commissaire chargé de ces levées, d'y procéder avec beaucoup de lenteur; les Mongols eurent tout le temps de connaître

ces préparatifs et le projet de les surprendre échoua. L'armée ne fut prête qu'au bout de cinq mois, et lorsqu'il fallut lui distribuer de l'argent, l'avarice du Khalife éluda cette dépense.

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Alors Mosta'ssim chargea deux ambassadeurs de porter à Houlagou ce singulier message: « Tous les princes qui ont attaqué le siége de la maison Abbasside, quelque puis<< sants qu'ils fussent, ont fini malheureuse<«<ment, si fermes sont les fondements de «< cette maison qui doit durer jusqu'à la fin << des siècles. Vous l'ignorez peut-être; mais interrogez les hommes qui connaissent l'his<< toire de cet empire, ils vous diront que << dans les temps anciens Yacoub Leïss, le Sof

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faride, qui marcha contre Bagdad à la tête « d'une grande armée, fut, avant d'y arriver, «< surpris par la mort; que son frère Amrou, qui osa tenter la même entreprise, fut pris « et enchaîné par Ismaïl fils d'Ahmed, le Sa« manide, qui l'envoya à Bagdad, où il finit <«< sa destinée. Bessassiry, venu d'Égypte, en« tra dans Bagdad, et s'empara de la personne « du Khalife, qu'il retint prisonnier; mais au « bout de deux ans, Togroul-Bey, le Seldjoukide, attaqua le vainqueur, le tua et « délivra le Khalife. Un autre Seldjoukide,

a

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