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23 mai

1124.

ne les inquiéta plus pendant son long règne, qui fut l'époque de leur plus grande puissance.

Hassan Sabbah mourut trente-quatre ans après son entrée dans Alamout, et durant ce long période, il ne descendit jamais de son château, il ne sortit même de son habitation que deux fois, passant sa vie dans la retraite, occupé à lire, à écrire sur les dogmes de sa secte, et à gouverner l'État qu'il avait créé (1).

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Il démontrait, par des argumens captieux et concis, la vérité de la doctrine qu'il professait : « Quant à la connaissance de Dieu, « il faut, disait-il, de deux choses l'une: ou prétendre connaître Dieu, par les seules « lumières de la raison, sans nul besoin d'enseignement, ou bien, admettre qu'on ne peut <«<le connaître par les seules lumières de la « raison, et qu'on a besoin de la direction <«< d'un instituteur. Or, celui qui soutient la première opinion ne peut pas rejeter les

«

(1) Djouvéini Tarikh Djihankuschaï, tom. II. — Mirkhond, Raouzat-us-safa, tom. IV. Tarikh Monédjim Baschi, tom. II. Tévarikh Al Seldjouc. (Histoire de la maison de Seldjouc), par Mohammed de Ravend, ms. turc de la Bibl. de Leyde. Nossret ul fithret ve O'ssret ul fithret, contenant l'histoire des vézirs des sultans Seldjoucides, par A'mad-ud-din d'Isfahan; ms. arabe de la Bibl. royale à Paris.

« dictées de la raison d'autrui, sans admettre

«

par-là même la nécessité d'un guide uni«< versel. » Hassan combattait, par ce dilemme, les prétentions des philosophes grecs.

Il poursuivait: « La nécessité d'un guide <«< étant constatée, il s'agit de savoir si tout <«< instituteur est bon, ou s'il est nécessaire « d'avoir un instituteur infaillible. Or, celui qui soutient que tout instituteur est bon, << ne peut plus récuser celui de son adver<«<saire, sans reconnaître la nécessité d'un

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guide, digne d'une confiance et d'une sou<< mission universelles. » Par-là il cherchait à réfuter les traditionnaires.

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«Il est donc prouvé, ajoutait-il, que le « genre humain a besoin d'un instituteur véridique, infaillible. Or, il faut parvenir à « le connaître, pour recevoir son enseigne<<< ment; il doit donc avoir été désigné, institué; il faut que sa véracité ait été con<< statée. On aurait tort de se mettre en <<< route sans avoir un guide; il faut trouver «ce guide avant de se mettre en route. « Par-là il réfutait la doctrine des Schiyis. »

«

« La diversité des opinions prouve l'er<< reur; l'accord des opinions prouve la vérité; l'unité est le signe de la vérité; la plu<«<ralité, le signe de l'erreur; l'unité résulte

<< de l'enseignement; la pluralité, de la liberté << des opinions; l'enseignement conduit à l'union, << et l'union dépend de la soumission à un <<< Imam; la liberté d'opinion produit, au <«< contraire, les schismes, qui proviennent de << la pluralité des chefs (1). »

Austère dans ses mœurs, et strict observateur des préceptes du Coran, Hassan Sabbah, veillait à ce qu'ils ne fussent point transgressés par ses sujets. On peut juger de l'inflexibilité de son caractère par la rigueur qu'il déploya envers ses deux fils; il les fit périr sous le bâton, l'un pour avoir assassiné un chef ismaïliyen, gouverneur du Couhistan; l'autre, à cause de ses mœurs dissolues. Peu avant sa mort il manda l'un de ses anciens compagnons, Kia Buzurk Umid, commandant de la forteresse de Lemscher, et l'institua son successeur.

Sous ce nouveau chef, les assassinats se multiplièrent. Ce n'étaient pas seulement les ennemis de la secte qui tombaient sous les coups de ses sicaires; plutôt que de s'expo

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(1) Djouvéini, tom. II. Kitab-ul-Millel vé in Nahal, Sur les religions et les sectes philosophiques, par Schehristani; ms. arabe de la Bibl. de Leyde; Chapitre Asshab-udda'vét-il-djédidét.

ser aux poignards des Ismaïliyens, en se déclarant leurs ennemis, des souverains, des hommes puissants vivaient avec eux en bonne intelligence, et obtenaient, pour prix de leurs ménagements, que le chef de la secte mit à leur disposition de ces individus qui se dévouaient à la mort (1) pour exécuter les ordres de leur maître, par lesquels ils faisaient assassiner leurs ennemis; mais souvent ces crimes étaient cruellement vengés sur des populations ismaïliennes, que l'on passait au fil de l'épée, et dans la destruction des vrais sectaires étaient quelque fois enveloppés nombre d'individus établis parmi eux ou seulement soupçonnés de partager leurs hérésies. Abou Nassir, vézir du sultan Sindjar, avait fait ravager le pays des Ismaïliyens; l'année suivante il fut assassiné. Pour le venger Sindjar fit périr plus de dix mille Bathiniyens. Deux Khalifes Abbassides tombèrent successivement sous le fer de ces assassins; Mostéreschid, près de la ville de 1135. Maraga et Raschid, devant Ispahan. Depuis 1138. ces deux attentats, les Khalifes Abbassides ne se montrèrent plus en public.

(1) Ils s'appelaient eux-mêmes fidayis, mot arabe qui signifie dévoué, victime.

8 août

1164.

Kia-Buzurk était mort quatre mois avant ce dernier meurtre, laissant les rènes du gouvernement à son fils Mohammed, qui, après avoir règné vingt-cinq ans, eut pour successeur son fils Hassan.

Jusqu'alors les princes d'Alamout s'étaient dits les missionnaires de l'Imam, c'est-à-dire, du Khalife fathimite, et avaient scrupuleusement observé les pratiques du mahométisme. Hassan se déclara le vicaire de l'Imam 17 ram. invisible, et annonça aux Ismaïliyens assem559. blés par son ordre, vers le milieu du mois de Ramazan, que l'Imam les affranchissait désormais des devoirs imposés par la religion; qu'ils étaient arrivés au jour de la résurrection, êre nouvelle, où ils ne devaient plus s'occuper que de contempler Dieu intuitivement; que c'était là le vrai Namaz; qu'ils n'étaient plus tenus de faire les cinq prières du jour, ni d'observer les autres pratiques extérieures prescrites par la religion. Ensuite des tables furent dressées, et l'on invita le peuple à rompre le jeûne. Dès-lors ce jour de Ramazan fut célébré par les Ismaïliyens, comme la fête de la résurrection; ils le passaient à boire du vin et à se divertir, au grand scandale des bons Musulmans. Depuis cette époque aussi, les Ismaïliyens furent flétris de

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