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Le Maabed est un des monuments les plus précieux pour l'intelligence des religions sémitiques.

Les deux cellas purement égyptiennes trouvées près d'un lieu d'Amrit appelé Aïn el Hayât contribuent encore à faire considérer la Phénicie comme une province d'Egypte.

El Méghazil (les Fuseaux): - Ces quatre monuments en forme de pyramides, et qui sont des sépultures, offrent dans leur disposition l'heureux mélange de la proportion élégante et de la majesté. Le plus remarquable se compose d'un soubassement rond flanqué de quatre lions monumentaux et d'un cylindre terminé au sommet en demi-sphère, monolithe de 7 mètres de haut. Ce cylindre est entouré de deux couronnes formées de grandes denticules et de découpures pyramidales à gradins semblables aux ornements de Gébeil. Les caveaux funéraires ont été fouillés par M. RENAN. Le roc est parsemé à l'entour de grottes sépulcrales qui font de toute cette colline comme la nécropole de Marathus. Ces Meghâzils sont les pyramides que des riches faisaient dresser sur leurs tombes au temps de Job (III, 14; XXI, 32). Quant aux travaux creusés dans le roc, ils présentent une grande analogie avec ceux de Saïda et de Carthage, décrits par M. BEULÉ (1).

Burdj-el-bezzák (Tour du limaçon). Enorme mausolée, présentant aujourd'hui la forme d'un cube terminé par une corniche et construit sans ciment, en pierres de plus de 5 mètres à peine équarries, autrefois couronné, comme en témoignent les débris trouvés au pied, par une pyramide. Deux chambres superposées à l'intérieur semblent rappeler le mausolée de Kadès. Ce monument est certaitainement antérieur à Alexandre.

El-Meklâa (la Carrière), immense stade de 225 mètres de long sur 30 de large. Dix gradins de 60 centimètres de large sur 40 de hauteur entourent l'arène, taillés dans le roc ou complétés en constructions. C'est, à n'en pas douter, un stade phénicien. Près de là, sont des restes de grandes constructions qui marquent sans doute le siége du gouvernement de Marathus. Le plan de cette partie de la ville antique présente une clarté frappante.

(1) Voy. t. IV de nos Comptes rendus, p. 7-9.

Enfin M. RENAN a trouvé à Amrit une maison monolithe tout entière isolée et évidée dans le roc, avec des murs hauts de 6 mètres, ménageant dans leur épaisseur des niches et des armoires. Les fouilles dirigées aux abords de ce monument ont fait découvrir un pressoir, des poids coniques, des meules, traces aussi remarquables qu'à Tyr d'une antique exploitation industrielle, à l'autre extrémité de la Phénicie.

M. RENAN cite enfin parmi les monuments d'Amrit un énorme cube de calcaire enterré dans le sable, et dont chacune des faces a 8m50 de large et 5 mètres de haut au-dessus du sol: usage inexpliqué.

En résumé, les ruines de Marathus sont bien exclusivement phéniciennes, car M. RENAN n'y a trouvé aucune inscription grecque ou romaine. On sait, en effet, que, si Alexandre trouva Marathus grande et florissante (Arrien, II, XIII, 7; XIV, xv), Diodore nous parle de la tentative des Aradiens pour détruire Marathus en 148; de son temps, Strabon la mentionne comme une ville en ruine et abandonnée. Tous les caractères, si frappants, de l'art phénicien se retrouvent dans les monuments d'Amrit, dont l'ensemble a une homogénéité évidente: force massive, dédain des détails et du fini, goût des monolithes, préférence marquée pour la stabilité de la pierre adhérente au sol, et artificiellement isolée du rocher dans lequel elle a été dégrossie, rareté des sculptures, absence de marbre et de granit. Avec Oumm-el-Awamid, Amrit est donc le trésor des monuments phéniciens.

II.-M. RENAN n'a pu compléter son exploration ni des pays situés entre Tripoli et Tortose, ni de la côte située entre Tortose et Lattakich (Laodicée). Il rapporte des inscriptions grecques de Banias (Balancé), des indications sur le théâtre de Giblet (Gabala), le plus beau vestige romain de la contrée après ceux de Baalbek, des notes sur les sépultures de Laodicée, limite extrême de la Phénicie, et au delà de laquelle commence la Syrie grecque, romaine et chrétienne.

L'exploration du Djebel-Akkar a été également très-sommaire. Les inscriptions grecques du temple de Hosn-el-Sefiri ont été relevées. Les grottes de Mar-Maroun, vers les sources de l'Oronte, en

Cœlésyrie, et le célèbre monument de Hurmul ont été visités. Ce dernier n'est pas pour M. RENAN, comme pour MM. Thomson et Rawlinson, d'origine assyrienne, mais il est néo-syrien de l'époque romaine, et présente des formes analogues à celle du mausolée de Sampsicéramus, près d'Emèse, du temps des Antonins, comme on

sait.

L'exploration du haut Liban, depuis le fleuve du Chien jusqu'à la hauteur de Tripoli, a été très-complète. Les souvenirs du culte d'Adonis font l'intérêt principal de cette région, notamment près du fleuve qui en a porté le nom. Là sans doute était localisée la tradition de la mort d'Adonis, avec sa sépulture. Le temple d'Afka, qui est tel aujourd'hui qu'il devait se trouver le lendemain de sa destruction par Constantin, se rapporte visiblement au même cycle religieux, ainsi que celui de Kalaat-Fakra, grecs tous deux, avec une forte empreinte d'art indigène.

M. RENAN a gagné la Cœlésyrie par le passage d'Akoura, une des plus anciennnes routes du monde, et par laquelle toutes les expéditions de l'Orient contre la Phénicie ont été conduites. Il a relevé des inscriptions assyriennes archaïques, signalé au lac El-Yamouni un centre religieux remarquable avec deux temples: l'un grec, l'autre romain.

A Baalbek, les substructions principales du temple ont paru au savant voyageur contemporaines des Romains. Une autre observation importante, c'est que les blocs employés dans la construction du temple de Jupiter sont supérieurs à tous ceux qui restent de l'époque phénicienne; on ne saurait donc rien arguer de la dimension des pierres pour établir l'ancienneté des monuments.

M. RENAN a relevé quelques-unes des inscriptions gravées sur le roc par centaines sous le règne d'Adrien, et dont nous avons donné un spécimen page 117 de notre T. V. (5e année). Sur une d'elles on lit: ARBORVM GENERA IV CETERA PRIVATA.

La gorge de Jrapta près Mischmisch renferme un énorme médaillon sculpté en relief sur le rocher et représentant un sacrifice. On trouve d'autres sculptures sur le rocher à Tirza, à Tannourin, à Ghineh, à Maschnaka, à Semar-Gébeil. Les grandes constructions de Naous près Kisbé révèlent l'existence d'un ancien centre religieux considérable.

Une inscription fixe la position et le caractère phénicien de la ville de Gigartus, près du petit château de Museilcha.

III. Voyage en Palestine. Le but de ce voyage n'était pas une exploration scientifique complète, mais c'était le complément archéologique de l'étude de la Phénicie et le couronnement nécessaire des travaux de M. RENAN dans ce premier pays par l'examen comparé des monuments de ces deux contrées.

Il n'y a guère que deux points où les monuments nous parlent du passé dans la Palestine: Hébron et Jérusalem. Partout ailleurs, vide archéologique. Bethel, Thersa n'ont point de ruines. Silo n'offre que ses belles sépultures anciennes et quelques travaux exécutés dans le roc. Les autres édifices qu'on y voit sont postérieurs à notre ère. Samarie (Sébaste) ne présente que des souvenirs romains. Sichem (Néapolis) a plus de caractère, mais rien de monumental. M. DE SAULCY a cru retrouver dans les ruines qui couvrent le Garizim les vestiges de l'ancien temple des Samaritains; mais M. RENAN n'y saurait voir rien d'antérieur aux Romains, sauf quelques grossières substructions. Tout y rappelle l'époque byzantine et le siècle de Justinien. Rappelons-nous d'ailleurs: 1° que le Psalmiste cite Jérusalem comme une merveille exceptionnelle, parceque « les maisons s'y touchaient» (Vulg. CXXI); 2o qu'il était interdit de bâtir de temple ailleurs qu'à Jérusalem et de faire des images d'êtres animés. En mille ans, les Juifs n'ont construit que trois temples, dont deux furent édifiés sous l'influence d'un art étranger. Quant aux synagogues, on sait qu'elles n'apparaissent qu'à l'époque asmonéenne, c'est-à-dire pendant la période où l'art grec s'était substitué aux formes indigènes.

La Judée n'eut pas, comme la Phénicie, de renaissance antonine. Le christianisme seul put rendre la vie artistique à ce sol frappé de stérilité dans le domaine plastique.

A Jérusalem du moins, quelques parties des murs, le souterrain de la mosquée El-Aksa, les Tombeaux dits des rois et des juges, ceux de la vallée de Hinnon, les trois ou quatre grands tombeaux de la vallée de Josaphat, sont bien des monuments juifs. Or, pour M. REnan, si l'on excepte les piscines et les travaux dans le roc, tels que le curieux monolithe de Siloam, on peut douter qu'il y ait rien dans la

ville sainte qui soit antérieur à la captivité ou même au temps des Séleucides. Certes les tombeaux dits d'Absalon et de Zacharie tranchent avec l'architecture grecque et romaine et semblent rappeler les monuments d'Amrit; mais l'emploi des ordres grecs dans ces tombeaux célèbres décèle une époque très-postérieure à Alexandre. On sait que les monuments de Pétra, qui ont de même un caractère sémitique très-frappant, sont cependant postérieurs, pour la plupart, à Trajan.

Les tombeaux des Machabées à Modin, élevés vers 140 ans avant J.-C., semblent avoir dû présenter les mêmes formes que ceux de la vallée de Josaphat. (Objection de M. DE SAULCY: voy. la DISCUSSION à la fin de l'analyse.) Ce sont sans doute ces grands tombeaux que Jésus montrait du doigt quand il s'élevait contre le judaïsme officiel. Les tombeaux dits des rois trahissent également dans leur décoration les emprunts faits à la Grèce. Quant aux tombeaux de Hinnon, ils sont d'une époque beaucoup plus ancienne et font penser aux monuments de Byblos.

Les portions de l'enceinte du Temple, et surtout le fameux mur occidental, baigné par les larmes des Juifs, ne présentent aucun témoignage authentique d'ancienneté, puisque le bossage et la dimension des pierres ne suffisent pas à établir l'âge reculé des monuments, et se rencontrent dans les édifices du temps des Grecs, de Mahomet, et même des croisés. Nous savons qu'Hérode employa pour la reconstruction du temple des matériaux énormes (Josèphe, Ant., XV, XI, 3) dont la beauté frappa tous les contemporains. (Matth., XXIV, 1-2; Marc, XIII, 1-2; Luc, XXI, 5-6). Josèphe ne nous apprendil pas que ce roi enleva jusqu'aux fondements de l'ancien temple et qu'il en bâtit de nouveaux? On voit dans ce mur les vestiges d'un grand arc, et les constructions phéniciennes pures et originales ne nous offrent pas un seul exemple de voûte.

Quant à la tour de David, ou d'Hippicus, elle semble construite par les ouvriers mêmes qui ont élevé le mur occidental.

Il est donc fort douteux qu'il y ait à Jérusalem aucun assemblage de pierres antérieur à la captivité. Tyr et Sidon n'offrent, pas plus que Jérusalem, de vestige de leur passé phénicien.

Mais les souterrains de la mosquée El-Aksa présentent un monu

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