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promptement effectuée. Les étrangers, surtout des Anglais, achetèrent, et à très-haut prix, ceux qui avaient été à l'usage de Louis XVI et de la reine Marie-Antoinette : le discrédit des assignats les favorisait (*).

Depuis cette époque, Versailles ne présentait plus qu'une vaste solitude. La Convention fit du château une succursale de l'hôtel des Invalides. On a vu pendant deux ans ces soldats mutilés, au nombre de deux mille, réclamer un hospice convenable, et, manquant de bois, s'en prendre aux parquets, aux boiseries, faire sécher leur linge en dehors des croisées sur le jardin, et noircir de la fumée de leurs pipes les appartemens qui avaient été occupés par Louis XVI, par la reine et par Mesdames de France, tantes du Roi.

(*) Voy. le Catalogue des meubles et effets précieux provenant de la ci-devant Liste civile, dont la vente se fera en présence des commissaires du Conseil exécutif provisoire et des commissaires du district, au ci-devant château de Versailles, le 1.er messidor de l'an deuxième ( 19 juin 1794) de la République française une et indivisible, et jours suivans, en exécution de la loi du 10 juin 1793. (v. st.) Paris, imprimerie nationale; in-8.o, de 14 pages. Cet opuscule n'est pas commun.

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Versailles destiné par différens décrets à divers établissemens d'utilité publique, était, par l'incurie des comités, resté dans le même abandon. Néanmoins, après le départ des invalides, le Conservatoire des Arts et des Sciences établit dans les appartemens de Mesdames, au rez-de-chaussée, un Cabinet d'Histoire naturelle; des collections de chacun des trois règnes y étaient réunies à des objets d'arts ou d'une haute curiosité. En 1797, le ministre de l'intérieur, Bénézech, obtint l'autorisation d'y former un Musée spécial de l'École française; et un grand nombre de tableaux, la plupart des plus grands maîtres, aux différentes époques de l'art en France, furent distribués dans les salons au nord, la grande galerie et les grands appartemens: il avait aussi le dessein d'y recueillir des chefs-d'œuvre de la sculpture. Les tableaux de ce Musée, ainsi que les objets du Cabinet d'histoire naturelle, provenaient en grande partie, soit des églises, soit des propriétés devenues nationales. Ainsi, le château de Versailles, dépouillé de ses propres richesses, devint le dépositaire de celles qui avaient été ravies aux principaux lieux du

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On verra, page 108, comment on s'est em paré des plans du ministre Bénézech.

Cependant, on vendait plusieurs fermes situées dans le grand parc, on exécutait le partage de terres éparses entre les indigens, et sous le prétexte de fournir des bois de construction à la marine, on vendait à des marchands les arbres des grandes avenués plantées par Louis XIV. La dilapidation du château et des jardins et le défaut d'entretien des bâtimens, même de la toiture (*), avaient été suivis de la détérioration des célèbres peintures dont Lebrun et d'autres illustres maîtres ont enrichi la grande galerie et les grands appartemens. Il y a plus, pour fabriquer quelques centaines de piques, armé républicaine, des subalternes se portèrent à arracher la belle grille qui sépa

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(*) « Daru a été long-temps' intendant de la Liste « civile. Il m'a étonné en me disant qu'il y avait à Ver« sailles vingt-cinq arpens (8 hectares et demi, ou 85,000 « mètres carrés ) de toiture ». Mémoires du général Lamarque; I, 421. Ce qu'il faut entendre, non seulement du château, mais de tous les bâtimens royaux.

rait la Cour royale de celle dite des Ministres; en sorte que cet espace est, à présent, démesuré (*). En un mot, il semblait que le gouvernement de la république eut pris l'odieuse tâche d'anticiper de plusieurs siècles les sinistres prédictions du rêveur Mercier (**). Enfin,

(*) Si Vaisse de Villiers eut connu cette grille de séparation qui donnait à chacune des deux cours des proportions convenables à leur destination, il aurait proposé de les rétablir, et non pas le raccourcissement de celle des Ministres pour agrandir la place d'Armes, bien suffisante à des exercices militaires dans une ville.

(**) L'an 2440, tome 3, dernier chapitre.

Des curieux ont remarqué dans les prétendus Mémoires de Louis XVIII, ( dus à la plume féconde de M. d. L. M. L.) IX, 307, celle qui fut faite à mademoiselle de La Vallière, par un cabaliste célèbre. Il lui annonça qu'un siècle après la construction de Versailles, les Tuileries redeviendraient la demeure habituelle des rois de France. Surprise, elle lui demanda : « Retourneront-ils ensuite à Versailles? Non, répondit l'astrologue, le peuple ne le voudra pas », Louis XIV, à, qui la favorite rapporta cette prédiction, l'écouta en silence, et fort au-dessus de ces faiblesses, le Monarque lui en donna cette explication: «Mes successeurs seront bien chers à la nation, puisqu'elle ne consentira plus à les perdre de vue; c'est un bonheur que je leur envie ». Les journées des 5 et 6 octobre, dit le narrateur, ont justifié la prédiction tout autrement. Mais les curieux ont dû remarquer aussi que la révélation ne leur en a été faite que plus de quarante ans après ces évènemens.

le Directoire excité par d'avides spéculateurs et par des étrangers jaloux de nos richesses dans les arts, et incapables d'en produire d'aussi dignes d'être recherchées, voulut aussi, suivant son expression, déroyaliser Versailles. Le 7 janvier 1798, il adressa aux deux Conseils un message pour demander qu'on l'autorisât à vendre par lots, le château et le parc, ou, ce qui était dérisoire, à leur donner une destination conforme à leur beauté et à leur importance. Des divisions entre les directeurs, des incidens survenus dans le gouvernement, et singulièrement les constans efforts de l'un des membres du conseil des Cinq-Cents, de l'ingénieur Trouille, natif de Versailles, empêchèrent le Directoire et les Conseils de s'occuper sérieusement de ce message. Ainsi, c'est en quelque sorte à l'un de ses enfans que cette ville doit la conservation de ses monumens. (Voir la Biographie sommaire.)

Lorsque Buonaparte fut dévenu premier Consul, le palais de Versailles cessa d'être en butte aux spéculations des Vandales qui n'achetaient que pour détruire. Réuni au domaine de la Couronne, aussitôt que Napoléon

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