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qui se soit enrichie par des victoires (*)

».

Voltaire ajoute « Quand je dirai que tous « les grands monumens n'ont rien coûté à l'État qu'ils ont embelli, je ne dirai rien que de vrai. Le peuple croit qu'un Prince qui dé« pense beaucoup en bâtimens et en établis& semens, ruine son royaume; mais en effet « il l'enrichit; il répand l'argent parmi une « infinité d'artistes; toutes les professions y gagnent; l'industrie et la circulation augmentent; le Roi qui fait le plus travailler « ses sujets est celui qui rend son royaume le plus florissant (**) ».

Des observations aussi positives répondent bien à quelques expressions échappées à Voltaire contre les constructions et les embellissemens de Versailles; il n'y a point d'inconsé

(*) Siècle de Louis XIV; chap. xxx, Finances.

La conquête d'Alger, sous Charles X, est une heureuse exception.

(**) Siècle de Louis XIV. Anecdotes.

Voir au sujet des dépenses de Versailles, les notes du savant bibliographe M. Beuchot, tomes xvIл, page 217; xx, 251, 282 et XXXIX, 10, dans la belle édition qu'il a pu bliée des OEuvres complètes de Voltaire."

quence de sa part. De nouvelles lumières, de plus mûres réflexions, lui ont fait écrire l'histoire du grand siècle et considérer ces dépenses sous un point de vue et avec une impartialité qui s'accordent avec une juste admiration.

Maintenant, que l'on compare les pertes en hommes que les grands travaux de terrasse à Versailles, à Clagny et à Maintenon ont causées, dût-on en croire les rapports les moins favorables de quelques courtisans avides, et ce que les dépenses constatées plus haut, et fussent-elles même doublées, ont coûté durant quarante ans ; qu'on les compare avec les millions d'hommes prodigués, les milliards dévorés pendant les vingt-deux années de guerre de la révolution et les deux milliards qu'elles ont nécessité de sacrifier encore par suite de la seconde invasion; enfin, qu'on les compare avec les divers résultats que ces différentes époques ont produits pour la prospérité de la France, et qu'on prononce.

Toutefois, il importe de faire observer que, si les réflexions précédentes s'appliquent trèsbien aux immortels travaux qu'une pensée et

une volonté monarchiques pouvaient seules concevoir et faire exécuter, elles n'ont aucunement pour but de justifier, ni ces dépenses qu'entraînèrent l'absence d'un plan d'ensemble arrêté et des changemens considérables dans le palais et les jardins de Versailles, ni celles enfouies par le caprice à Clagny, à Marly, et ni celles hasardées à Maintenon. En effet, ces dépenses et les immenses trésors prodigués pour des guerres presque continuelles et pour des victoires souvent infructueuses, amenèrent enfin la détresse dans les finances, les malheurs publics et les regrets inutiles de Louis XIV, au déclin d'un règne long-temps comblé de gloire et de prospérité (*).

Après la mort de Louis XIV, le duc d'Orléans, déclaré régent et, « qui était importuné «< du séjour de Versailles, parce qu'il aimait « à demeurer à Paris où il avait tous ses plai

(*) Guillaumot assure que pendant les trois années qui suivirent la suspension des travaux de bâtimens, les dé penses de la guerre s'élevèrent à plus de sept cent soixantequinze millions, au cours d'aujourd'hui, ce qui fait plus de deux cent cinquante-huit millions, année commune. Observations, page 13.

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sirs sous sa main (*) », emmena son royal pupille à Vincennes, et ensuite, malgré les ordres formels du feu Roi, il l'établit aux Tuileries. Versailles se ressentit considérablement, pendant les sept années que dura encore la minorité, de l'absence de la Cour et d'une grande partie de la population. Mais Louis XV, devenu majeur, revint habiter le château bâti par son bisaïeul, et cette ville eut bientôt recouvré son aisance et son ancien éclat.

Ce Prince avait hérité de son prédécesseur l'amour du faste et de la magnificence. Oubliant que ce Monarque, en mourant, lui avait recommandé de ne pas l'imiter dans le goût qu'il avait eu pour les bâtimens, Louis XV voulut augmenter encore les beautés déjà si nombreuses de son royal séjour; je ne mentionnerai que les plus considérables, ce sont :

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Les peintures et les enrichissemens du vaste

et admirable Salon d'Hercule, ainsi nommé parce que le plafond représente l'apothéose de ce demi-dieu, chef-d'oeuvre de Lemoine,

(*) Mémoires de Saint-Simon, tome x111, page 233.

et le plus grand sujet de composition qui existe en ce genre (*)..

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La Salle de l'Opéra, ou des grands spectacles et bals de la Cour; elle ne fut terminée qu'en 1770, pour les fêtes du mariage du Dauphin, depuis Louis XVI (**). C'est l'une des plus grandes et des plus belles de l'Europe.

Avant la construction de cet édifice, le Roi avait ordonné celle du bassin de Neptune et Amphitrite. Sa belle forme est due au crayon

(*) Le cardinal de Fleury, en parlant à Louis XV de cette composition, lui dit : « j'ai toujours pensé que ce « morceau gâterait tout Versailles ». Son éminence ne trouva pas d'amateur impartial qui fut de son avis.

(**) Un écrivain n'a pas craint de répéter que, dans ces fêtes qui furent effectivement remarquables, les illuminations et les feux d'artifices avaient coûté dix millions; exagération ridicule, surtout si l'on considère qu'à cette époque le prix de toutes les choses était d'un tiers moins élevé qu'il ne l'est aujourd'hui. Le même Guide n'est pas moins exagéré dans les dépenses concernant l'Opéra et les autres divertissemens qui eurent lieu à différentes époques. Il prétend aussi que la Du Barri et sa famille ont coûté à la France plus de six cent millions. Certes, personne ne prendra, à cet égard, la défense de Louis XV, qui fut si prodigue pour cette favorite; mais six cent millions pendant cinq ans ! c'est une absurdité puisée à des sources qu'on n'oserait avouer.

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