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HISTORIQUES ET CRITIQUES

SUR

VERSAILLES.

VERSAILLES peut être comparé à tout ce que les anciens avaient construit de plus magnifique : aura-t-il une autre destinée que la plupart de leurs superbes monumens? Des révolutions ne hâteront-elles pas encore, comme à la fin du siècle dernier, l'action du temps pour détruire ses palais et disperser ses innombrables chefs-d'œuvre? Je ne veux point d'abord, tourner mes regards sur un avenir sombre et que des projets irréfléchis ne font que trop pressentir; mais examiner un indice inaperçu et qui paraît reporter l'existence de cette ville à une époque bien antérieure à celle reconnue jusqu'à présent, rectifier des faits inexacts, et réfuter des assertions qui tendent

à déprimer la ville de Louis XIV dans ses objets les plus intéressans.

On lit dans l'Abrégé chronologique de l'histoire de France, par le président Hénault, à l'année 635: « Dagobert tient des Assises gé<< nérales au palais de Gorges près Versailles; << il y fait son testament (*). »

Ainsi, Versailles serait fort ancien et aurait eu dès lors une certaine importance', puisque notre meilleur annaliste le mentionne pour indiquer plus sûrement la situation d'un palais où Dagobert a exercé des actes d'une haute souveraineté. Mais l'illusion s'affaiblit lorsqu'on reconnaît qu'il n'y a jamais eu aux environs de Versailles, un lieu nommé GORGES, et que ce qui se trouve de plus ancien sur le village de GARCHES, Garsiachus, entre cette ville et Saint-Cloud, est un titre rapporté par l'un de nos plus savans bénédictins, D. Mabillon, à l'an 1063 (**).

(*) Édition in-8.o, Paris, Amable Costcs, 1820-21, et dans toutes celles données par l'auteur : elle a été publiée par M. Auguis à qui l'on doit une Nouvelle continuation de l'Abrégé chronologique.

(**) Annal. Bened. tom. iv, pag. 642. On a écrit que

Je pensais donc que dans l'Abrégé chronologique il faudrait lire, GARGES près de SaintDenis. En effet, le lieu où Dagobert fit son testament, en 635, est nommé Bigargium, dans les Gesta Dagoberti, cap. 39, et dans Aimoin, De Gestis Francorum, cap. 3o. tom. 2, pag. 590, et tom. 3, pag. 132, des Historiens de France. Enfin, Bigargium, GARGES, est très-anciennement connu ; et il est certain que Dagobert y avait un palais où il se plaisait à résider, parce qu'il s'y trouvait à proximité de l'abbaye de Saint-Denis, qu'il avait comblée de toutes sortes de biens et dans laquelle il fut enterré, comme il l'avait ordonné par son testament.

Cependant, un historien aussi exact que le président Hénault, et qui a fait de son Abrégé chronologique la principale occupation de sa vie, ne devant pas être légèrement contredit, j'ai soumis mes observations à M. le baron Walkenaer, et suivant la réponse dont cet illustre philologue m'a honoré, en 1820, il

ce fut à Garches que Dagobert convoqua les Grands du royaume et leur fit donner lecture de son testament; c'est évidemment une erreur.

semble adopter mon opinion. Néanmoins, sous le mot GORGES, à la table des matières de l'édition que je cite, de l'Abrégé chronologique, et enrichie de ses notes, on lit: « c'est une erreur du président Hénault; (il n'y a pas de Gorges près Versailles, « voyez Garches ); peut-être a-t-il pensé que « c'était le Worchia (*), du Rythme saty

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rique dont Lancelot fait mention, tom. II, « page cxxxv. » Enfin, au mot GARCHES, (Garsiachus), on renvoie à l'année 635; ce qui complique encore la difficulté (**).

On ne peut donc déférer ni à cette correction, ni à cette conjecture; car, elles sont contredites par les ouvrages cités plus haut et indiqués par M. Walkenaer lui-même, dans sa réponse: ils portent tous Bigargium.

Ainsi, les expressions de l'Abrégé chronologique n'autorisent point à présumer que Versailles fût déjà connu au commencement du septième siècle.

(*) Vorges, près de Laon.

(**) M. Walkenaer a fait annoncer dans le Journal de la Librairie qu'il était étranger à la Continuation de cet Abrégé.

Parcourons les siècles suivans.

Lorsque, pendant le cours du neuvième, les Danois ou Normands, remontant la Seine pour pénétrer jusqu'à Paris, débarquaient en cet endroit que leur fatal séjour fit nommer Mala mansio, la Malmaison, et naguère autrement célèbre, ils se répandaient dans les campagnes voisines où leurs troupes détruisaient les châteaux et les monastères, pillaient et massacraient les habitans (*). Nos annalistes désignent les bourgs et les villages aux environs de Versailles, entre autres Montreuil qui, d'abord faubourg de cette ville, y est actuellement réuni, dans lesquels ces dévastations furent commises (Note 6); mais ils n'indiquent point Versailles leur silence semble prouver que ce n'était encore qu'un territoire sans habitations, ou bien, que peu nombreuses, elles avaient été abandonnées. Autrement les barbares du nord ne les eussent point épargnées, et les malheurs de ce lieu nous auraient transmis son nom.

La défense longue et mémorable que les

(*) Recueil des Historiens de la France; passim.

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