Imatges de pàgina
PDF
EPUB

ports entre les Chinois, les Indiens et les Occidentaux que les uns pas plus que les autres ne pouvaient demeurer étrangers à tous ces miraculeux événements de Bethléem, du Calvaire et du cénacle.

Qu'on admette ou non l'apostolat de saint Thomas dans la Chine, toujours est-il que la bonne nouvelle de la venue du Messie et de la Rédemption des hommes fut, dès l'origine du christianisme, annoncée aux peuples de la haute Asie. Nous verrons, de siècle en siècle, presque sans interruption, les apôtres et les missionnaires, bravant les dangers et les fatigues des plus lointains voyages, aller leur porter, par terre et par mer, la parole du salut éternel. La vérité ne leur a jamais manqué, et s'ils sont encore plongés dans les erreurs les plus grossières, si cet Orient, d'où nous est venue la lumière, est assis au milieu des ténèbres, ce n'est pas la faute des Occidentaux, qui, en fils reconnaissants, n'ont jamais cessé de revenir vers leur vieux père, non pas pauvres et dénués, comme l'enfant prodigue, mais resplendissants de lumières et les mains pleines de dons célestes.

Saint Pantène fut un de ces premiers apôtres de l'extrême Orient. Il était Sicilien d'origine, et vivait vers la fin du deuxième siècle. Il s'était beaucoup appliqué à l'éloquence et à la philosophie stoïcienne. Étant devenu chrétien, il entra peu après dans la cléricature et se servit de ses talents pour mettre dans un plus grand jour les divins mystères du christianisme. Mais, après avoir reçu le baptême, il s'étudia spécialement, par un véritable esprit d'humilité, à cacher son mérite Clément d'Alexandrie le chercha longtemps avec cette anxiété, disent les auteurs du temps, du chas

seur qui poursuit le gibier dans les profondeurs de la forêt. Il le trouva enfin caché en Égypte, vivant dans la solitude, la prière et la méditation des livres saints. Jusque-là Clément avait étudié sous divers maitres; mais s'étant lié d'amitié avec Pantène, il découvrit en lui un tel fonds d'esprit, un si riche trésor de sagesse divine qu'il ne crut pas devoir choisir un autre guide pour le conduire au faîte de la philosophie chrétienne. Dès lors Pantène jeta un tel éclat dans la ville d'Alexandrie que l'évêque Julien le chargea d'interpréter les saintes Écritures dans cette école célèbre. Les plus fameux de ses disciples furent ce même Clément et saint Alexandre, depuis évêque de Jérusalem.

La renommée de Pantène ne se renferma point dans les limites de l'empire romain. Les Indiens, attirés par le commerce à Alexandrie, eurent occasion de connaître le saint docteur, qui s'y trouvait à la tête de l'école des chrétiens, avant l'année 179. Ils le prièrent de passer dans leur pays, pour y combattre la doctrine des brahmes par celle de Jésus-Christ. A cette époque il y avait plusieurs saints personnages qui, sous le nom d'évangélistes et pleins du zèle de Dieu, abandonnaient volontairement toutes choses, à l'exemple des apôtres, pour propager au loin la religion chrétienne. Pantène fut de ce nombre. S'étant rendu aux instances d'une ambassade qui lui avait été envoyée de l'Inde, il quitta son école et partit pour ces lointaines contrées, en 189, avec la permission de Démétrius, évêque d'Alexandrie, qui l'établit prédicateur de l'Évangile pour les nations orientales (1). (1) Eusèbe, Hist., liv. V, ch. 10.

En arrivant dans l'Inde, Pantène y trouva les traces de la foi qui précédemment y avait été prêchée. On sait qu'il annonça Jésus-Christ aux brahmanes et aux philosophes du pays. Mais l'histoire ne nous donne aucun détail sur les fruits de sa mission. Elle nous apprend seulement qu'il trouva entre les mains de quelques chrétiens un Évangile de saint Matthieu, en caractères hébraïques. On croit qu'après avoir employé plusieurs années à cultiver cette vigne avec zèle il revint à Alexandrie et se consacra de nouveau à l'instruction des fidèles. Ce qui est certain, c'est que Pantène vivait encore lorsque déjà Origène remplissait avec beaucoup d'éclat la charge de professeur public; l'on ignore l'année précise de sa mort. Mais on pense communément qu'il vécut jusqu'à la fin du règne de Sévère ou au commencement de celui de Caracalla. L'Évangile de saint Matthieu qu'il apporta à Alexandrie existait encore du temps de saint Jérôme (1).

Dans les premiers temps du christianisme, la hiérarchie ecclésiastique s'organisa rapidement. Partout où se trouvaient réunis quelques fidèles, l'Église de Jésus-Christ, pleine de vigilance et de sollicitude, plaçait à leur tête des évêques pour confirmer les néophytes dans la foi et exciter l'ardeur du prosélytisme. On croit que saint Pantène, avant de partir pour les Indes, avait été sacré évêque à Alexandrie par Démétrius.

Après saint Pantène, l'extrême Orient fut évangélisé par Frumentius. Il visita l'Inde avec son frère Adhésius et son oncle paternel, natif de Tyr et très

(1) Eusèbe, liv. VI, ch. 14.

remarquable par sa science. En arrivant dans un certain port pour faire provision d'eau et de vivres, ils furent, en mettant pied à terre, attaqués à l'improviste par les naturels du pays. Plusieurs des voyageurs périrent; les autres furent traînés en captivité. Parmi les morts était l'oncle; mais les deux neveux furent présentés au roi, qui, ayant bientôt apprécié leur mérite, les éleva aux premières dignités de l'État. Frumentius résida longtemps dans l'Inde, où il fut durant plusieurs années premier ministre et gouverneur d'un des rois pendant sa minorité. Il prêcha l'Évangile dans les parties méridionales de la péninsule, et, comme il parlait d'une manière remarquable la langue du pays et exerçait sur les populations une grande influence, à cause de sa haute position, son apostolat fut couronné d'éclatants succès. Après avoir construit plusieurs églises, il obtint la permission de revoir sa patrie, où il fut sacré évêque. Il-revint ensuite aux Indes revêtu de cette nouvelle dignité.

Le christianisme était déjà si florissant sur les bords du Gange que l'Église avait cru devoir instituer un primat de l'Inde. L'évêque qui, le premier, fut revêtu de cette dignité se nommait Jean. En 325 il était présent au concile de Nicée, dont il signa les actes. L'année suivante Frumentius lui succéda et fut sacré primat, à Alexandrie, par Athanase. Il résida dans la péninsule, et depuis lors les chrétiens continuèrent d'y avoir un évêque appelé primat de l'Inde.

La religion de Jésus-Christ s'étendit rapidement dans ces vastes régions, et bientôt elle put pénétrer jusqu'au nord malgré les obstacles de tout genre que ne cessaient de lui susciter les brahmanes et les disci

ples de Bouddha. On sait que Muséus, évêque d'Aduli, sur les frontières de l'Abyssinie, évangélisa les parties septentrionales de l'Inde, dans la seconde partie du quatrième siècle, en compagnie du fameux Palladius, Goth de la Galatie. Ils s'embarquèrent avec des marchands sur la mer Rouge, où abordaient alors en grand nombre les navires de Ceylan et de la Chine. Palladius, dont le tempérament peu robuste ne pouvait supporter les chaleurs excessives de l'Inde, fut obligé de s'en retourner dans son pays. Mais l'évêque Muséus poursuivit sa mission et s'avança jusqu'en Chine et dans la petite Boukharie. Ces détails nous ont été conservés par saint Ambroise, dans son livre sur les mœurs des Brahmanes, lequel paraît avoir été composé pour l'instruction de ce même Palladius, qui avait été, pendant quelque temps, compagnon de voyage de l'évêque Muséus. Voici, en effet, de quelle manière s'exprime le saint docteur : « Le désir de votre <«< esprit, mon cher Palladius, qui, épris d'un grand << amour pour la sagesse, se porte toujours à connaître « des choses nouvelles, nous décide à entreprendre « un ouvrage neuf et difficile, celui de décrire la vie, <«<les mœurs et le pays des Brahmanes... »... Puis il commence ainsi son récit : « Notre frère Muséus,

«

évêque des Doléniens, m'a rapporté qu'étant parti, <«< il y a quelques années, pour les Indes, afin d'y <«< visiter les Brahmanes, il parcourut presque tout le << pays des Sères (Chinois). Après avoir vu un grand << nombre de nations et de pays, il arriva dans la pro<< vince d'Arianam, près du fleuve Indus (1)... »

(1) Saint Ambroise, De moribus Brachmanorum, t. IV, p. 1131. -OEuvres complètes, édition de Migne,

« AnteriorContinua »