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Son bras armé d'un dard porte encore une lance; Mais plus que tous les traits ce bras est sa défense. Il suit dans la forêt les traces de leurs pas;

Il arrive, il les voit victimes du trépas ;

Il voit le monstre affreux, redoublant ses morsures,
Sucer avidement leurs sanglantes blessures.

<< Compagnons, c'est pour moi que vous périssez tous;
Mais je veux vous venger, ou périr avec vous ».
Il dit, et soulevant une roche pesante,
De ses bras raffermis l'impulsion puissante
La lance comme un trait qui rassemble à-la-fois
La force du héros et la force du poids.

Ce choc eût fait crouler la plus forte muraille:
Le serpent, sur son dos ceint d'une triple écaille,
Reçoit l'énorme poids, et n'est pas terrassé.
D'un airain écailleux tout son corps cuirassé
Du roc qui rebondit repousse la blessure.
Mais malgré l'épaisseur de sa vivante armure,
Bientôt d'un trait plus sûr il se sentit percé.
Par la main du héros le javelot lancé

Vole au monstre, lui porte une atteinte invincible,
Et le fer pénétrant son épine flexible,

Perce l'os qui résiste, et descend dans son flanc.
L'ennemi tortueux qui voit couler son sang,
De douleur, en sifflant, sur son dos se replie,
S'élance sur le dard, le mord avec furie,

Constitit, et toto descendit in ilia ferro.

Ille, dolore ferox, caput in sua terga retorsit; Vulneraque aspexit, fixumque hastile momordit. Idque, ubi vi multâ partem labefecit in omnem, Vix tergo eripuit : ferrum tamen ossibus hæret. Tum verò, post quàm solitas accessit ad iras Plaga recens, plenis tumuerunt guttura venis, Spumaque pestiferos circumfluit albida rictus; Terraque rasa sonat squamis : quique halitus exit Ore niger stygio, vitiatas inficit auras. Ipse modò immensum spiris facientibus orbem Cingitur; interdum longâ trabe rectior exit : Impete nunc vasto, ceu concitus imbribus amnis, Fertur, et obstantes proturbat pectore silvas. Cedit Agenorides paulum, spolioque leonis Sustinet incursus; instantiaque ora retardat Cuspide prætentâ. Furit ille, et inania duro Vulnera dat ferro, frangitque in acumine dentes. Jamque venenifero sanguis manare palato Coeperat, et virides aspergine tinxerat herbas : Sed leve vulnus erat; quia se retrahebat ab ictu, Læsaque colla dabat retro; plagamque sedere ' Cedendo arcebat, nec longiùs ire sinebat.

Remarquez cette expression, par laquelle le poète applique à la plaie ce qui ne convient qu'au fer, qui ne pouvait s'appuyer et s'asseoir en quelque sorte que dans le gosier du monstre.

Le brise entre ses dents, aigrit encor ses maux :
Mais le fer meurtrier s'enracine en ses os.

Sa blessure l'irrite: une rage écumeuse
Gonfle et remplit de fiel sa gueule venimeuse.
Son écaille d'acier, qui se dresse et frémit,
Rase en se hérissant la terre qui gémit.
De son vaste gosier la profonde caverne
Exhale en noirs poisons les vapeurs de l'Averne.
Tantôt il se recourbe en longs cercles divers;
Tantôt tel qu'un long mât, redressé dans les airs,
Sur les arbres qu'il brise il se roule, il s'élance:
Un torrent dans sa chûte a moins de violence.
Le héros qui l'esquive, et ne l'évite pas,
Pour mesurer ses coups, recule quelques pas,
Sous sa peau
de lion se cache, et lui présente
De son fer alongé la pointe menaçante.
Le dragon furieux se jette sur l'acier;

Il le mord, il le ronge; et ses dents, son gosier
Sur le fer qui le blesse émoussent leur morsure:
Des gouttes de son sang ont rougi la verdure.
Mais l'atteinte est légère; et son col souple et fier
Trompe, en se repliant, le redoutable fer.
Le héros sur le monstre avec fureur s'élance.
Au moment qu'il recule, il le suit, il s'avance,
Le presse, et le serrant contre un chêne noueux,
S'alonge, et de sa lance il les perce tous deux.

Donec Agenorides conjectum in gutture ferrum
Usque sequens pressit : dum retro quercus eunti
Obstitit, et fixa est pariter cum robore cervix.
Pondere serpentis curvata est arbor, et imæ
Parte flagellari gemuit sua robora caudæ.

III. Orti à dentibus Draconis Martii milites.

DUM spatium victor victi considerat hostis, Vox subitò audita est: neque erat cognoscere promptum Unde; sed audita est. Quid, Agenore nate, peremptum Serpentem spectas? et tu spectabere serpens. Ille diu pavidus, pariter cum mente colorem Perdiderat ; gelidoque comæ terrore rigebant.

:

Ecce viri fautrix, superas delapsa per auras,
Pallas adest motæque jubet supponere terræ
Vipereos dentes, populi incrementa futuri.
Paret et, ut presso sulcum patefecit aratro,
Spargit humi jussos, mortalia' semina, dentes.
Inde, fide majus, glebæ cœpêre moveri ;
Primaque de sulcis acies apparuit hastæ.
Tegmina mox capitum picto nutantia cono;
Mox humeri pectusque, onerataque brachia telis
Exsistunt crescitque seges clypeata virorum.

'Belle apposition qui donne à ce vers beaucoup de force et de prix.

Le dragon tortueux se roule autour du chêne;
De ses nœuds écaillés il l'ébranle, il l'enchaîne;
Sur le tronc, sur le dard, il veut venger sa mort;
Et l'arbre, en se courbant, gémit sous son effort.

III. Soldats nés des dents du Serpent de Mars.

TANDIS que le vainqueur, de surprise immobile, Admire avec effroi le monstrueux reptile; Une invisible voix, du sein des airs émus, Fait entendre ces mots : Fils d'Agénor, Cadmus, Toi qu'étonne l'aspect de ce serpent énorme, Tremble: toi-même un jour tu dois prendre sa forme. Ces mots dans tous ses sens ont jeté la terreur: Il pâlit; ses cheveux se hérissent d'horreur.

Pallas qui le protège, à ses regards offerte, Lui prescrit d'enfouir dans la terre entr'ouverte, Les dents de ce dragon, cher au dieu des combats, Semence d'où doit naître un peuple de soldats. Le héros obéit : il prend les dents horribles, Jette dans un sillon ces semences terribles; Et tout-à-coup (à peine il en croit ses regards) Il voit croître d'abord des pointes de longs dards, Puis des casques d'airain à l'aigrette mouvante, Des épaules que ceint une armure pesante, Des bras armés de traits, chargés de boucliers, Enfin une moisson d'innombrables guerriers.

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