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pressions qu'ils devaient traduire. Voici le texte de ce document 1 :

BERSAUME, episcopo in partibus Orientis, salutem, etc.

Nuper ad apostolatus nostri presentiam te personaliter accedentem libenter vidimus et recepimus cum affectu gaudentes, et exultantes in Domino, a quo universorum carismatum dona manant, quod tu, christiane fidei radio illustratus et renatus fonte baptismatis, circa illa, prout habet fide digne relationis expressio, te sollicitum ex[h]ibes et attentum, per que ipsius fidei fines amplifices terminosque dilates, teque in conspectu Altissimi, cujus obsequiis salubriter adhesisti, de bono semper in melius constituas gratiosum. Hec sunt profecto, que de te cunctisque fidei orthodoxe cultoribus, gratanter percipimus et letanter audimus. Hec sunt, ex quibus nobis exuberans delectatio provenit, cumulus oritur gaudiorum. Hec sunt, que tibi laudis humane titulum vendicant, nomen efferunt, augent famam.

Excitamus igitur fraternitatem tuam et hortamur in Filio Dei Patris, quatenus, mentis oculis erectis ad Dominum, qui pro minimis grandia recompensat, christianam fidem ferventer amplectens et constanter observans, alios in ea, juxta datam tibi ex alto prudentiam, sollerter instruas et informes, ut eo reddaris acceptior et gratiosior domino Deo tuo, quo plures per tue sollicitudinis studium de infidelitatis nubilo ad christiane fidei claritatem et erroris invio ad rectitudinis semitam revocabis.

Ut autem in ipsa christiana fide, quam tenet et servat Romana mater Ecclesia, plenius et efficatius valeas alios informare, dictam fidem et ejus formam presentibus fecimus annotari, que sunt hec: Credimus etc.

Dat. ut supra. [Rome apud Sanctum Petrum, vij idus aprilis, anno primo.]

Parmi les compagnons de Rabban Çauma se trouvait un certain chrétien du nom de Sabadin, qualifié d'homme noble et surnommé Archaon, mot qui en mongol signifie précisément «<le chrétien », selon Rémusat 2.

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Nous retrouverons ce personnage dans une ambassade postérieure. Il avait demandé, comme font encore les catholiques qui accomplissent le pèlerinage de Rome, la bénédiction papale qui lui fut accordée par une lettre ainsi conçue 2:

Dilecto filio, nobili viro ŞABADINO Archaoni, salutem et
apostolicam benedictionem.

Te nuper, ad nostram presentiam accedentem, affectione paterna recepimus, et benigne audivimus que coram nobis proponere voluisti, letantes in Domino quod tu, catholice fidei lumine illustratus et lavacro regenerationis aspersus, in hiis salubri studio diceris delectari, que sint in oculis divine majestatis accepta, tue salutis accedant augmentum et dilatationem fidei christiane.

Duximus itaque sollicitudinem tuam excitandam attentius et hortandam, quatenus premissa de bono semper in melius prosequaris, ut eo gratiosior occurras domino Deo tuo, quo majori fultus extiteris cumulo meritorum.

Ceterum, quia benedictionis nostre munus exhiberi tibi humiliter postulasti, nos tuis devotis precibus benignius annuentes, benedictionem nostram in remissionem tuorum tibi concedimus peccatorum.

Dat. Rome apud Sanctum Petrum, idibus aprilis, anno primo.

A la suite de cette lettre le Registre du Vatican porte la mention:

In e[umdem] m[odum] pro dilectis filiis (sic) Elyae, capellano in partibus Orientis 3.

Cet Elias (ou Isaïe) était sans doute l'un de ces « prêtres et diacres de la résidence patriarcale » qui accompagnèrent Rabban Çauma en Europe *.

Une autre lettre, plus curieuse par son titre que par sa teneur, est adressée collectivement à neuf chrétiens laïcs, ori

1. Voir ci-dessous, p. 237.

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Le

2. Reg. Vat., 44, c. 19, fol. 90 ro. - LANGLOIS, no 579; POTTHAST, 22663. texte est donné ici d'après la copie du registre. - Voir Ann. eccl., ad ann. 1288, n° 35; MOSHEIM, App. no 30, p. 91.

3. La copie que j'ai reçue porte ainsi. LANGLOIS donne : In e. m. Esyae capellano in partibus Orientis.

4. Cfr. ci-dessus, p. 54.

ginaires de diverses villes d'Europe et qualifiés « d'interprètes du roi des Tartares ».

C'étaient, sans doute, quelques-uns de ces nombreux Occidentaux qui étaient allés pratiquer le commerce et chercher fortune dans les contrées asiatiques. Ces sortes d'émigrés n'étaient point rares à cette époque. Ils appartenaient à toutes. les régions occidentales, mais surtout aux nations commerçantes et particulièrement à Gèñes, à Pise, à Venise. Quand ils étaient parvenus, à force d'intelligence et d'habilėtė, å s'établir dans le pays, ils devenaient facilement des personnages importants. Leurs connaissances, bien supérieures à celles de leur entourage, leur donnaient du prestige, et, s'ils n'arrivaient pas toujours à occuper des charges importantes à la cour des princes, ils étaient du moins, de leur part, l'objet d'une grande considération. L'histoire de Marco Polo en est un exemple frappant et bien connu, auquel on en pourrait joindre beaucoup d'autres moins célèbres, mais non moins instructifs '.

1. « Le premier ambassadeur qui vint trouver le roi de la part des Tartares était un Anglais, banni de son pays pour certain crimes, et qui, après avoir erré dans toute l'Asie, avait fini par prendre du service chez les Mongòls. (MATTH. PARIS, ad ann. 1243). Un cordelier flamand rencontra dans le fond de la Tartarie une femme de Metz, nommée Paquette, qui avait été élevée en Hongrie, un orfèvre parisien, dont le frère était établi à Paris sur le grand pont, et un jeune homme des environs de Rouen qui s'était trouvé à la prise de Belgrade. Il y vit aussi des Russes, des Hongrois, des Flamands. Un chantre nommé Robert, après avoir parcouru l'Asie Orientale, revint mourir dans la cathédrale de Chartres. Un Tartare était fournisseur de casques dans les armées de Philippe le Bel (Comptes de la recette et de la dépense du trésor de 1296 à 1301). Jean de Plan-Carpin trouva près de Gayóuk un gentilhomme russe qu'il nomme Temer, qui servait d'interprète; plusieurs marchands de Breslau, de Pólôgné, d'Autriche l'accompagnèrent dans son voyage en Tartarie. D'autres revinrent avec lui par la Russie c'étaient des Génois, des Pisans, des Vénitiens. Deux marchands de Venise, que le hasard avait conduits à Bokkara, se laissèrent aller à suivre un ambassadeur mongol qu'Houlagou envoyait à Khoubilaï. Ils séjournèrent plusieurs années tant en Chine qu'en Tartarie, revinrent avec des lettres du grand Khan pour le pape, retournèrent auprès du grand Khan, emmenant avec eux le fils de l'un d'eux, le célèbre Marc-Pól, et quittèrent encore une fois la cour de Khoubilaï pour s'en revenir à Venise. Des voyages de ce genre ne furent pas moins fréquents dans le siècle suivant. Dans ce nombre sont ceux de Jean de Maudeville, médecin anglais, d'Oderic de Frioul, de Pegoletti, de Guillaume de Bouldeselle et de plusieurs autres. » A. RĖMUSAT, Mém. cité, pp. 154-155. . MARCO POLO dit, dans sa description de Tauriz et en plusieurs autres endroits, qu'il avait rencontré « pluseurs marchans latins et proprement genevois ». Voir plus haut, p. 110, n. 1; et ci-dessous, p. 215, ce qui est dit du pisan Isoli et d'autres chrétiens attachés à la personne d'Argoun.

La lettre adressée à ces « interprètes » était ainsi conçue 1:

NICOLAUS etc. dilectis filiis JOHANNI DE BONACHIA, HUGONI GANTELINI, PETRO DE MOLINA, GIRARDO GALINURI DE CONSTANTINOPOLI, BALABE DE JANUA, GIRARDO DE CATURCO, GEORGIO CHUFI, JOHANNI BARLARA et JOHANNI DE CASARIA, laicis, illustris.. regis Tartarorum interpretibus, salutem et apostolicam benedictionem.

Letamur in Domino, quod, sicut habet fide digna relatio, prudenter et laudabiliter vos gerentes, ad dilatandos christiane fidei terminos solerter intenditis, ad agnitionem ipsius alios, qui nondum ejus sunt lumine illustrati, sollicite inducendo; de quo vestre sollicitudinis studium tanto commendamus amplius, quanto magis salutem omnium affectamus.

Excitamus itaque diligentiam vestram et hortamur in domino Jhesu XPO, quatenus circa hujusmodi salubres actus vestros et opera sedule sollicitudinis studium impendatis, ut exinde tanto acceptiores et gratiores vestro reddamini Salvatori, quanto plures ab erroris invio ad veritatis semitam et ab infidelitatis nubilo ad claritatem catholice fidei reducetis. Nos autem benedictionem nostram vobis tenore presentium in vestrorum remissionem dirigimus peccatorum.

Dat. ut supra. [= Rome, apud Sanctum Petrum, idibus aprilis, anno primo.]

On confia encore aux envoyés une lettre adressée collectivement: Dilectis filiis universis fratribus ordinis Minorum inter Tartaros, de mandato vel ordinatione seu licentia aut permissione Sedis Apostolicae, constitutis. Elle renferme la concession de divers privilèges ecclésiastiques, tels que d'absoudre ceux qui ont encouru l'excommunication

1. Reg. Vat., 44, c. 20, fol. 90 ro. LANGLOIS, n° 581. Le texte est donné d'après une copie du registre. Le titre dans LANGLOIS présente ces deux variantes avec ma copie : « ... Hugoni Gantelmi... Girardo Gasinuri... ». 2. Reg. Vat., 44, c. 18, fol. 90 ro; LANGLOIS, no 578; POTTHAST, 22645. Cette lettre commence par les mots In apostolicae servitutis.... Le texte en est donné dans SBARALEA, t. IV, p. 11. Elle est datée : Romae apud Sanctum Petrum, v idus aprilis, anno primo.

Toutes les lettres que nous venons de citer sont précédées dans le Regist. Vat., fol. 88 ro, de la rubrique générale: Littere misse ad Tartaros.

pour avoir frappé les clercs, de recevoir l'abjuration des hérétiques, de bénir les ornements, linges et vases sacrés, etc.

Rabban Çauma, chargé de toutes ces missives, dut partir de Rome vers le milieu d'avril et rejoindre Argoun vers la fin de l'été de cette même année 1288. Il était très probablement accompagné des envoyés du roi de France, qui avaient dû le retrouver dans quelque port de la mer Noire, Ce qui est certain, c'est que Philippe le Bel envoya une ambassade à Argoun, et que celle-ci arriva en Perse, sûrement avant l'été de 1289 1. L'histoire ne nous a point conservé le nom des envoyés qui furent chargés de cette mission diplomatique. Nous verrons bientôt qu'ils se conduisirent à la cour mongole avec une fierté qui choqua le prince et son entourage. Malgré sa susceptibilité, Argoun retint, sans le dissimuler complètement, son vif mécontentement. Le désir de conquérir la Palestine, auquel s'ajoutait peut-être une crainte secrète inspirée par les progrės toujours croissants des armées égyptiennes, le poussa à redoubler d'instances auprès des princes occidentaux, afin de les engager à prendre promptement les armes pour la guerre sainte.

Voyant que, malgré les assurances données par Bar Çauma, les Francs n'abordaient point en Asie, il expédia, dès l'été de 1289, une troisième ambassade au pape et aux rois de France et d'Angleterre.

III. Troisième ambassade d'Argoun en Occident.

(1289-1290)

Argoun ne confia point cette nouvelle mission à un moine oriental. Il avait jugė bon, pour inspirer plus de confiance aux Occidentaux, de leur envoyer un chrétien. Peut-être pensat-il qu'un chrétien originaire de l'Occident aurait encore plus de crédit auprès de ses compatriotes. Ce fut donc un génois, un certain Buscarel, qu'il choisit pour messager. Nous ne

1. Cf. ci-dessus, p. 81, n. 1.

2. Voir ci-dessus, p. 64.

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