Imatges de pàgina
PDF
EPUB

"bien l'on est riche quand on ne dépense que 66 pour donner."

Le discours de M. de Florian a fini' comme il avait commencé, par des éloges adressés au prince son bienfaiteur, et à l'auguste famille dont il était entouré; c'était un moyen sûr d'obtenir les plus vifs applaudissemens.

Ce discours n'avait d'ailleurs rien de fort remarquable; on a seulement été tenté de sourire un moment à la gravité avec laquelle M. le directeur, en parlant de tous les titres académiques de M. de Florian, a cru devoir rappeler nommément les arlequins d'une nouvelle espèce dont il est le créateur. "Dans ce genre de drames, lui a-t-il dit, le principal personnage n'avait jusqu'à vous été connu que par sa balourdise et ses facéties bergamasques; il devient sous votre plume un être sensible, bon mari, bon père, bon maître; il force presque l'auditeur au respect par les vertus naïves, et par-là vous nous avez prouvé que nous aimons à rendre hommage à quiconque remplit les devoirs les plus chers à l'humanité, en quelqne rang que l'ait jeté le caprice de la fortune ou le hasard de la naissance.” (Le hasard de la naissance d'Arlequin !)

Les deux discours ont été suivis de la lecture qu'a faite M. de La Harpe d'une épître sur les effets de la nature champêtre et la poésie descriptive. On n'en a pas trouvé le plan très-naturel ni les transitions fort heureuses; mais on y a remarqué plusieurs beaux vers comme celui-ci :

Puisqu'il a peint Didon, Virgile avait aimé.

Le nouvel académicien a terminé la séance par. plusieurs jolies fables de sa composition, qu'il récitées avec beaucoup d'intérêt et de grâce. On a cru y voir un caractère de naïveté tout-à-fait neuf et piquant.

On n'a vu ici que fort peu d'exemplaires d'un livre intitulé: Correspondance secrète concernant la constitution de la Prusse, depuis le règne de Frédéric Guillaume II, traduit de l'allemand, avec des notes du traducteur, à Potzdam.

C'est une satire fort amère de toutes les personnes que Sa Majesté a paru honorer de sa confiance; la malignité en est d'autant plus noire qu'elle affecte de se montrer tranquille et réfléchie. Nous aurions dédaigné d'en parler si l'on n'avait pas osé l'attribuer assez hautement à un prince*, que son caractère et ses vertus semblaient devoir garantir d'un pareil soupçon. On ne se permettra d'en citer ici qu'une seule anecdote, non que l'on soit tenté de la croiré plus véritable que tout le reste, mais parce qu'elle se rapporte aux rêveries dont il paraît qu'on s'est occupé en Allemagne tout aussi sérieusement qu' ailleurs.

"M. de Woelner, accablé sous les affaires d'Etat, et qui ne peut donner de son temps précieux qu'à des banquiers juifs, a cependant trouvé le moyen de décorer dans sa maison une salle mystérieuse pour évoquer les esprits et faire les cérémonies du culte

* Monseigneur le prince Heuri de Prusse.

reçues dans le jésuitisme.* Cette maison maçonique a été vendue au roi, qui doit en faire présent à Dubosc, l'un des grands-prêtres de cette religion. Dès l'avènement du roi au trône, ce lieu fut consacré aux opérations magiques; mais comment réunir Jésus et Bélial? Cette question n'embarrasse pas des apôtres qui savent faire des prosélytes à leur religion par une douceur hypocrite. La forme de cet appartement enchanté est carrée, l'un des côtés est garni de petits fourneaux, dans lesquels se consomme le mystère de la fumigation. Au milieu de ce temple est une petite élévation sur laquelle paraît l'esprit sous un voile blanc, voile tissu en France et qu'on fait venir de ce royaume, où l'on trouve seulement les qualités qu'on lui attribue. Ce voile dérobe aux yeux des spectateurs aveugles un homme qui s'introduit sur le monticule lorsque l'heure des charlataneries approche. L'imposteur qui se prête à cette tromperie grossière est ventriloque, et imite assez bien le langage que la crédulité a prêté aux esprits. Non content de cette innocente supercherie, les coins du temple sont garnis de miroirs magiques, dans lesquels se représentent ceux que l'on conjure. Un grand seigneur assiste souvent à cette cabale d'un

* Il n'y a pas bien long-temps qu'il nous est tombé entre les mains une brochure intitulée, Protocole d'Esprit familier Gabli dona, etc.; une des prédictions les plus remarquables de ce génie, ami intime de M. le comte de Thun, c'est qu'en 1800 il n'y aura plus d'autre religion dominante en Europe que la religion naturelle.

nouveau genre, mais l'impression est si forte sur lui qu'il ne peut y résister qu'avec le secours de gouttes restaurantes. Elles sont de la composition du ventriloque Steinert, qui reçoit 500 écus de pension de cet auguste prosélyte pour l'art de distiller ce philtre mystique et confortatif. Il est sous-entendu qu'on donne à cette jonglerie tous les dehors d'une fête religieuse, qu'on met dans la bouche muette et éloquente du ventriloque des expressions ascétiques, et qu'on prend toutes les précautions pour envelopper le tout des nuages du mystère. Que penser maintenant d'un État où les chefs de cette imposture combinée tiennent le premier rang, soit dans les affaires civiles, soit dans les militaires? Que dire quand on voit que c'est par ce cabinet d'épreuves qne doivent passer les sujets que placent les Bischofwerder et les Woelner? Ces messieurs ont un art perfide pour réduire les esprits tendans à la crédulité et à les conquérir au jésuitisme. Ils font un mélange adroit de leurs connaissances occultes et de leur crédit connu; ils promettent la fortune ou les distinctions, s'emparent des premiers de l'Etat, et assurent ainsi un certain nombre de suffrages à leurs coupables opérations. Enfin ils cachent leur ambition effrénée sous une apparente modération, et confondent la maçonnerie, les illuminés et les martinistes; ils emploient les erreurs populaires à leur système, et, s'élevant au-dessus, se nomment citoyens du monde. Ils graduent les confidences, les pré. parent avec beaucoup d'art et même redoublent de

prudence depuis que des adeptes ont été transfuges de leur ordre, ne pouvant appaiser leur conscience révoltée à la vue des horreurs qui sont naturalisées dans cette secte. Mais ces vertueux apostats n'ont pu révéler les mystères, soit parce qu'ils avaient proféré des sermens, soit parce que leurs jours étaient menacés; c'est ce qu'on a vu dans la manière dont ils ont masqué leurs vrais sentimens (excellent passeport, comme l'on voit, pour toutes sortes de calomnies; aussi les feseurs de libelles ne manquent-ils jamais d'y avoir recours).

Couplets impromptu de M. le comte de Tott à une femme avec laquelle il avait été lié, et qui, quel ques années après, lui reprochait en plaisantant peur d'elle.

qu'il avait l'air d'avoir

[blocks in formation]
« AnteriorContinua »