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sur un plateau situé entre le 30° et le 31° degré de latitude septentrionale, et baignée par l'Araxe (Bend-emir). Cette cité fut la capitale des successeurs de Cyrus, le centre de la nationalité et de la religion; les rois y recevaient la consécration et revêtaient la robe de Cyrus, pour y revenir après leur mort. Là étaient le trésor, les assemblées des mages et le sanctuaire élevé sur le sol natal des dieux nationaux. On y voit encore des chambres, des escaliers, des terrasses, des mausolées, des colonnes cannelées dont plusieurs ont jusqu'à soixante pieds de hauteur, avec des chapiteaux étranges, des animaux fabuleux longs de vingt pieds sur dix-huit de haut, des bas-reliefs représentant les hommages et les tributs des peuples vassaux, qui, à ce qu'il paraît, étaient reçus, ainsi que les ambassadeurs, dans un grand portique réservé aux réceptions officielles. Des animaux bizarres, toujours en harmonie avec la destination de chaque édifice, couvrent les parois : les inscriptions sont en caractères cunéiformes (1) et trilingues, zend, pehlvi, et peut-être assyrien; mais on n'a pu déchiffrer jusqu'à présent que les titres des rois. Les Persans appellent encore ces lieux Toukl al-Schemschid, trône de Schemschid.

On rencontre les ruines du palais royal de Persépolis à Cil-Minar, sur les flancs du mont Racmed; elles peuvent encore donner la mesure des formes architectoniques. La corniche et le toit étaient des travées de cèdre revêtues de lames métalliques; il s'élève à plusieurs terrasses avec de vastes cours, des portiques magnifiques et une riche décoration dans le style ionique, mais dépourvue de symétrie. Dans ce palais, comme dans le temple, tout est couvert de bas-reliefs et d'animaux symboliques, qui se groupent souvent avec des hommes, et parfois, de représentations historiques. Le château d'Ecbatane, qui tient de celui de Babylone, a des murs en grosses pierres vernies, et des temples où brillaient l'or et l'argent; il en est de même dans le palais de Suse.

SILVESTRE DE SACY, dans le Journal des Savants, ann. 1819-1824, a donné d'excellents extraits des voyages de Morier, d'Ouseley et de Ker Porter.

Dans les Mémoires sur diverses antiquités de la Perse, du même Sacy (Paris, 1793), on trouve des matériaux très-importants sur les inscriptions cunéiformes, bien qu'ils se bornent à donner l'explication des monuments postérieurs aux Sassanides. Tychsen, Munter, Lichtenstein, ont fait beaucoup d'efforts pour déchiffrer ces inscriptions, et surtout Grotefend dans ses Additions aux Ideen de Heeren, t. II, 1830, qu'il a fait suivre de l'alphabet zend.

(1) Le savant voyageur Thomas Rawlinson a envoyé, vers 1839, à l'Académie des sciences de Londres trente inscriptions cunéiformes découvertes en Perse, avec leur explication.

Les rois n'étaient pas brûlés, de peur de souiller le feu; la Perse native leur donnait la sépulture. Leurs tombeaux sont donc dans l'enceinte du palais; on y conservait leurs corps avec grand soin, dans la croyance qu'ils devaient ressusciter pour établir le règne d'Ormuzd.

Ces monuments étaient-ils mèdes ou perses, et avait-on forcé les Égyptiens à concourir à leur érection? c'est ce qu'on ne peut affirmer; quoi qu'il en soit, ils annoncent un art propre et déjà avancé. Les murs sont construits de manière à le céder à peine à ceux de l'Égypte; car les énormes pierres tirées des montagnes voisines sont assemblées avec une grande habileté; mais, loin de témoigner d'une dérivation troglodytique, comme sur le Nil et l'Indus, ils s'élèvent en vastes terrasses. Des forêts de colonnes élancées comme le palmier et le lotos, de vastes bassins où jaillirent autrefois des fontaines, des escaliers disposés pour y monter à cheval, rappellent au regard l'image du paradis, comme la solidité des colonnes de Philé et de Thèbes rappelle les grottes d'où sortit l'architecture égyptienne. Dans celle-ci, tout est clos et couvert; dans celle de Perse, tout est ouvert et libre, ainsi qu'il convenait à des adorateurs du soleil et des éléments.

L'art plastique y conserve le caractère d'une cour orientale : point de femmes et rien de nu, rien de nu, mais des poses majestueuses qui, loin d'être roides et violentes comme celles des Égyptiens, expriment le repos et tendent plus à la dignité qu'à la beauté. Au lieu de représenter des divinités comme dans l'Inde et l'Égypte, les artistes perses n'ont copié que des hommes, en distinguant les races diverses; c'est tout au plus s'ils ont sculpté quelques fervers et des izeds. On n'a découvert jusqu'à présent aucune statue, et, dans les bas-reliefs, la sculpture donne la main à l'architecture en l'interprétant; grandiose comme elle, sans être colossale, elle offre une majestueuse simplicité (1).

(1) « Avant de m'éloigner, je parcourus le terrain qui environne la base de la plate-forme, pour voir s'il apparaissait ailleurs d'autres vestiges de l'ancienne cité. Il en reste bien peu. Un portique magnifique s'offrit d'abord à ma vue, isolé dans la plaine, au nord de la plate-forme, et peu éloigné des rochers. Les parois intérieures des deux côtés en sont sculptées : on y voit des personnages en longue robe, mais dégradés. Au sud-ouest, j'aperçus une masse de ruines magnifiques qui paraissent les débris d'un temple, ou d'un autre édifice de grande importance. Cet amas de décombres est indiqué, dans les vues de Persépolis de Chardin et de Le Brun, par une colonne s'élevant seule et majestueuse au milieu de compagnes brisées, comme un héros demeuré debout sur le champ de bataille au milieu de cadavres. Elle est tombée aussi aujourd'hui, et les longues herbes qui couvrent le sol agitent seules leurs verts étendards sur les colonnes renversées de la grandeur. Le dernier coup qui coucha à terre ce splendide débris lui

CHAPITRE V.

LA CRÈTE ET SPARTE.

Nous avons vu que la Grèce avait trouvé dans la nature tous les éléments propres à l'élever à la plus haute civilisation, et que, par sa situation non moins que par ses premières vicissitudes, elle était destinée à offrir le spectacle d'une grande diversité. Parmi les nombreuses tribus primitives, les Doriens et les Ioniens prévalurent, et se distinguèrent par le caractère le plus tranché : les premiers, conservateurs, aristocrates et sévères; les seconds, mous et démocrates. Il ne faut pas se figurer une race qui vient tout entière peupler un pays, mais quelques bandes qui l'envahissent pour le dominer. Les Achéens étaient les plus nombreux ; il paraît que les Doriens ne comptaient que de vingt à trente mille individus (1), ce qui les obligeait à faire sentir aux vaincus une autorité vigoureuse, à les refréner par des institutions qui rappelassent continuellement la différence d'origine, par des droits injurieux et des prérogatives humiliantes.

Athènes et Sparte, comme représentant les deux races parmi les divers États de la Grèce, occupèrent le premier rang, non-seulement à cause de leur puissance supérieure, mais encore par la législation, dont l'influence s'est étendue jusqu'à nous. Il est donc juste que nous leur accordions une attention particulière.

Sparte est située au pied du Taygète et sur les bords de l'Eurotas, où la chaîne des monts d'Arcadie va déclinant vers la mer (2). Son premier roi fut, dit-on, un Lélége; le quatrième, un fut porté, il y a quinze ans, par une bande de naturels avides de s'emparer du fer qui réunissait les morceaux de la colonne. Je le sus d'un paysan qui m'accompagnait, et qui avouait avoir pris part à ce dégât. Mais il protestait que cela n'arriverait plus, parce que l'on connaissait les conséquences d'un semblable sacrilége. Comme je lui demandais ce que cela voulait dire, il me répondit que peu auparavant un habitant de son village, ayant abattu une colonne de la grande terrasse, était mort subitement le lendemain. Ce n'était pas tout: plusieurs songes avaient prédit sa mort et menacé d'un châtiment pareil, de la part de Salomon ou du démon, quiconque imiterait son exemple; de sorte qu'il n'y avait plus personne d'assez hardi pour toucher du doigt ces édifices, dont la construction était due à l'un ou à l'autre de ces personnages, et peut-être à tous deux. Le résultat de cette superstition me plut infiniment, et il faudrait être ennemi de la vénérable antiquité pour dissiper ce nuage protecteur. » KER-PORTER. (1) MULLER, Dorier.

(2) Indépendamment des historiens généraux, on peut consulter le recueil de

Lacédémonien; le huitième, Ebalus, qui le premier donna l'exemple de contracter de secondes noces, en épousant une fille de Persée. Il eut d'elle Tyndare, qui engendra les deux jumeaux Castor et Pollux, et deux filles, Hélène et Clytemnestre. Les deux premiers furent placés au ciel, et les deux autres, immortalisées dans la tragédie et dans l'épopée.

En épousant Ménélas, Hélène transporta le royaume des Perséides aux Pélopides. Lorsque les derniers furent chassés par les Héraclides, le trône passa aux deux fils d'Aristodème, Eurysthène et Proclus, dont les descendants régnèrent en commun; ce fut probablement là une de ces transactions que nous avons déjà vues dans d'autres pays, où deux races et quelquefois deux chefs également puissants exercent ensemble l'autorité sans se détruire l'un l'autre. Les Proclides donc et les Agides, ainsi nommés d'Agis, fils d'Eurysthène, continuèrent durant neuf siècles à donner des rois à la Laconie.

Les Doriens, venus dans cette contrée avec les Héraclides, en chassèrent presque tous les Achéens, et réduisirent en esclavage le petit nombre d'habitants qui restèrent, exerçant à leur égard le droit sauvage de la conquête. Sparte commença sous Agis à soumettre à son autorité, outre le pays ouvert, les cent villes ou villages qui avaient fait surnommer la Laconie Hécatompolis; tous les habitants du territoire furent obligés de renoncer à la liberté politique, de se dessaisir de leurs armes de guerre et d'accepter de dures conditions. La population d'Hélos seule refusa de courber la tête; mais, vaincue de vive force, elle fut réduite au plus dur esclavage.

Trois classes de personnes, nous avons presque dit trois castes,

matériaux sur l'histoire de Sparte, fait avec beaucoup de soin par NICOLAS CRAGIUS, de Republica Lacedæmoniorum (Genève, 1593), et par MEURSIUS, de Regno laconico et Miscellanea laconica (Amsterdam, 1561 ).

Le meilleur ouvrage sur Sparte et sur tout ce qui la concerne dans l'histoire grecque, est celui de J. C. F. MANSO, Sparta, ein Versuch zur Aufklærung der Gesch. und Verfassung dieses Staats; Leipzig, 1800-1805.

Voyez aussi HEINE, de Spartanorum republica judicium, dans le XI vol. des Comment. soc. Gotting., où il redresse plusieurs jugements de PAW. PASTORET, Histoire de la légistation, vol. V, VI, VII; Paris, 1824. LACHMANN, K. H. die spartanische Staatsverfassung in ihrer Entwickelung und ihrem Verfalle; Breslau, 1836. C. F. HERMANN, de Causis turbatæ apud Lacedæmonios agrorum æqualitatis; Marbourg, 1834. W. WACHSMUTH, Hellenische Alterthumskunde aus dem Gesichtspunkle des Staates; Halle, 1826-1830. FR. KORTUM, Zur Gesch. hellenischer Staatsverfassungen, etc.; Heidelberg, 1821. G. FED. SCHOEMANN, Antiquitates juris publici Græcorum; Griefswald, 1838.

1740.

1186,

Ilotes.

898.

constituaient cet État : les Spartiates (Spartiata), habitants de la cité, race privilégiée et dominante dont l'histoire s'occupe exclusivement; les Lacédémoniens (Periæci), habitants de la campagne, peuple vassal, payant les tributs et faisant le service militaire; audessous d'eux et privés de tous droits, non pas seulement de citoyen, mais même d'homme, les Ilotes et les autres esclaves. Les premiers étaient peut-être au nombre de quarante mille; on comptait cent cinquante mille Lacédémoniens; les derniers s'élevaient à deux cent mille. Voilà la liberté de Sparte.

Les Ilotes furent esclaves de l'État plus que des particuliers; ils ne pouvaient être mis à mort ni affranchis que par décret public, et le gouvernement lui-même, en vertu d'une ancienne convention, ne pouvait les vendre hors du pays. Aux particuliers, dont ils cultivaient les terres, ils donnaient tous les ans une certaine portion du blé et des produits, au delà de laquelle le maître ne pouvait rien exiger, sous peine d'exécration. Tout ce qu'ils ramassaient, après avoir payé ce tribut, leur appartenait, et cette épargne permit à un certain nombre de parvenir à la richesse. En outre, les Ilotes avaient coutume de rendre des services à leurs maîtres ou à tout autre citoyen, et d'accompagner même les premiers à la guerre; peut-être y en eut-il qui cultivaient les terres, non des particuliers, mais de l'État, et qu'on employait dans les travaux publics. Enfin quelques-uns des plus jeunes et des plus robustes combattaient dans l'armée des Spartiates, mais seulement comme soldats armés à la légère, ou bien comme marins et rameurs sur les flottes, lorsque les Spartiates eurent commencé à faire la guerre sur mer. S'il arrivait, comme on le vit plusieurs fois dans la guerre du Péloponèse, que des Ilotes fussent enrôlés pour servir avec des armes pesantes, on leur promettait en récompense la liberté.

Il ne faut pas croire que les Ilotes fussent particuliers à Sparte, puisque Argos avait les Gymnètes, Sicyone les Corynéphores, la Crète les Démniotes, la Thessalie les Pénestes (1).

Guerroyer contre les Argiens, dompter les Lacédémoniens, combattre à l'intérieur citoyens contre citoyens, par suite de la rivalité des rois et des limites apportées à leur autorité, ou de l'inégalité des richesses, tels furent les exploits des Spartiates durant les premiers siècles qui suivirent l'invasion des Héraclides

L'ordre de succession, dans la double dynastie, continuait cependant en ligne directe; il fut interrompu à Polydecte, qui mourut

(1) Étienne de Byzance, au mot Xíos.

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