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de lui les ténèbres au moyen des purifications, confesser Ormuzd comme roi de l'univers dans la pureté de son cœur, honorer la création, faire triompher le bon principe, détruire l'empire du mal dans toute la nature matérielle et spirituelle, reconnaître Zoroastre comme prophète, voilà en quoi consiste toute la morale du Zend-Avesta. Elle a pour première conséquence la conservation de l'ordre, qui fait du royaume terrestre de l'Iran l'image de la cité céleste. De plus, le croyant doit, non-seulement maintenir son corps pur, mais se garder de souiller aucun élément; celui qui souffle sur le feu avec sa bouche encourt la peine de mort (1). De même qu'Ormuzd combat sans cesse Ahrimane, le fidèle doit être toujours prêt à combattre les puissances du mal. Dans les temples, nul ne doit prier pour soi en particulier, mais pour

tous.

Quoique Zoroastre fût né dans un pays où la servitude se respire avec l'air, il vit d'un côté les maux de la vie nomade, de l'autre les malheurs causés par l'arbitraire des satrapes et des monarques; comme il ne pouvait réduire ceux-ci à la mesure des autres hommes, on dirait qu'il a voulu les élever à la perfection de Dieu en leur enjoignant d'imiter Ormuzd, et en mettant sous leurs yeux l'exemple de temps plus heureux passés sous Schemschid, despote à l'asiatique, mais rempli de toute la bonté que permet une telle condition. Sous ce père des peuples, le plus glorieux de tous les mortels que le soleil ait élevés au pouvoir, les animaux ne mouraient point jamais disette d'eau, de fruits, ni de rien de ce qui soutient ou embellit la vie; le génie du bien triomphait du froid, de la chaleur, des passions effrénées, œuvre des dévis, et de la mort elle-même; les hommes paraissaient avoir toujours quinze ans, et les enfants devenaient bientôt adultes. Chacun des sujets de cet excellent prince exerçait son activité comme sous un père, et les arts de la paix prospéraient; la richesse et l'abondance pleuvaient de la main du monarque.

Tel était le type auquel devait se conformer le roi, âme et moteur de tout, soleil de justice, image de l'Éternel; aussi la doctrine sacrée voulait-elle qu'il ne commandât que des choses justes et utiles dans ses décrets, auxquels rien ne résistait.

Tout fidèle d'Ormuzd devait en outre travailler comme lui à extirper le mal de la terre, serpents, herbes vénéneuses, insectes

(1) Pour obvier à ce danger, ils appliquaient sur leur bouche le penom, dont on peut voir le dessin dans la planche jointe au tome II du Zend-Avesta.

nuisibles. Schemschid cultiva le premier le sol de la Perse; l'Iran devait donc être le pays de l'agriculture, tandis que le Touran, pays de nomades, était un séjour de discordes et de misères. «0 << Sapetman Zoroastre, j'ai créé un lieu de délices et d'abondance « auquel ne pourrait se comparer aucun autre sur la terre, et nul << autre n'aurait su le créer, ô Sapetman Zoroastre! Il a nom « Ériène Vedjo, et dépasse en beauté le monde et toute son éten« due. Rien n'égale la prospérité de cette terre de délices par moi « créée. Le premier séjour de bénédiction et d'abondance créé « par moi, par moi Ormuzd, pur de toute souillure, fut Ériène << Vedjo. »

Ceux qui s'adonnaient à la culture des champs honoraient Sapandomad, génie de l'agriculture. Kordab faisait couler pour eux les ondes bienfaisantes; Amerdab veillait sur leurs arbres et sur leurs jardins. « Juste juge du monde (lit-on dans le Vendidab),. << toi qui es la pureté même, quel est le point le plus pur de la << loi? Ormuzd répondit: C'est de semer sur la terre des grains ro« bustes, ô Sapetman Zoroastre. Celui qui sème du grain et le « fait avec pureté, accomplit dans toute son étendue la loi du << magisme; il est grand à mes yeux comme s'il avait donné la vie « à cent créatures, à mille productions, ou fait dix mille sacrifices. << Celui qui produit du grain extermine les dévis. Lorsqu'on en a << produit selon le besoin, les dévis sont atterrés. Pour peu que « l'homme en produise, il abattra et détruira les dévis dans le « lieu où il donnera ce peu de grain. La vaste gueule et la large poitrine des dévis seront brûlées quand il y aura abondance de « grain. Alors on lira la parole sacrée avec plus de soin. Si l'on << ne mange rien, on n'aura pas de force et l'on ne pourra faire de « travaux; il n'y aura ni robustes laboureurs, ni enfants vivaces, « si l'on est réduit à désirer sa nourriture. Le monde, tel qu'il « existe, ne vit que par la nourriture (frag. 18). »

Les rois punissaient donc les paresseux et récompensaient les cultivateurs diligents; une fois l'an, ils venaient s'asseoir à la table de ceux qui tirent du sein de la terre les richesses qu'elle recèle, ou qui, maniant le poignard avec lequel Schemschid ouvrait le sol, en font jaillir l'abondance. Cyrus l'Ancien planta beaucoup d'arbres de sa main; Cyrus le Jeune se vantait à Lysandre d'avoir dessiné et planté ses jardins lui-même. Les grands entouraient leurs palais de paradis où prospéraient les orangers, les citronniers, la vigne, l'azerolier, les hauts peupliers, et où le saule pleureur courbait ses longs rameaux sur le brillant émail des anémones, des renoncules, des jasmins et des chryanthèmes. Si le

patriotisme des Grecs nous a habitués à maudire ou à mépriser les envahisseurs de l'Hellade, n'oublions pas néanmoins que nous devons à la Perse les fruits les plus exquis, le figuier, l'amandier, le pêcher, le grenadier, le melon et le précieux mûrier.

Les Perses ne vénèrent pas les animaux comme les Brahmines, mais ils savent en inculquer le respect. Le dixième hymne du Yaçna se rapporte à un fragment très-ancien, qui dit : « Hom, ces paroles de toi sont célèbres: Je prie les animaux afin qu'ils << prient pour moi; je parle avec douceur aux animaux ; je les << appelle avec grandeur; je nourris les animaux; je vêts les « animaux; je maintiens les animaux en bon état. Ils me << donnent la nourriture et ce qui est nécessaire à la vie. » La loi d'Ormuzd est conforme à cette loi primitive. « Je recommande « de donner à manger au troupeau; quiconque le fera ira en « paradis. Procure-lui les joies du pâturage, nourris ceux qui ne « sont pas nourris; donne un berger à ceux qui ne l'ont pas. << Que l'homme et la femme sachent que le vent sera propice à << qui fera cette bonne action ( Yaçna, h. 35). » Voilà pourquoi le soin des animaux domestiques s'est conservé jusqu'à nos jours; ne pas leur fournir le nécessaire ou les maltraiter est considéré comme un péché, et tous sont obligés d'élever dans leurs maisons un boeuf, un chien, un cheval. On devait, au contraire, détruire les animaux d'Ahrimane. Agathias nous apprend que les mages, à des époques déterminées, se réunissaient en cérémonie pour tuer les reptiles : cet usage dure encore.

Le libertinage est proscrit comme œuvre d'Ahrimane. La monogamie est une loi; la personnalité de la femme n'est pas absorbée dans celle du mari; elle pouvait même devenir prêtresse. L'union entre parents était considérée comme la plus estimable; mais il paraît qu'on en abusait au point d'épouser les mères, les filles, les sœurs usage introduit peut-être par les Perses conquérants, comme la polygamie.

Les plus heureuses dispositions, favorisées encore par les lois sacrées, furent altérées par la manie des conquêtes, comme un fleuve limpide que trouble la vase quand il franchit ses bords. Cependant la religion du feu domina durant de longs siècles dans son pays natal, et résista à mille révolutions; elle jeta même des racines vigoureuses et vivaces chez des peuples lointains et policés, lutta de force avec le christianisme dans les hérésies des Gnostiques et dans les mystères de Mithras, et, au troisième siècle, suffit encore pour relever le puissant empire des Sassanides. Quand ses sectateurs furent persécutés par l'intolérance musul

HIST. UNIV. - T. II.

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Perses modernes.

mane, plutôt que d'abjurer, ils quittèrent leur patrie; réfugiés dans les déserts du Kerman et de l'Indoustan, ils y conservent encore la flamme immortelle et le code sacré que nous tenons d'eux. A Surate, à Bombay, sur le Gange, au midi de la Perse, sur la mer Caspienne, les descendants des Guèbres abhorrent l'idolâtrie, et voient dans le feu le symbole de la Divinité. Il existe à Artesh-Gah, dans le Caucase, une enceinte carrée contenant vingt cellules : c'est un couvent de sectateurs du Zend-Avesta. Au milieu du cloître s'élève un autel avec quatre cheminées quadrangulaires, au centre desquelles un foyer est sans cesse alimenté par le naphte qui abonde en cet endroit. Dans chaque cellule sont des tubes nombreux, d'où s'échappe du gaz inflammable que les reclus allument à certaines heures du jour et de la nuit. Ces moines, toujours tranquilles, épient avec anxiété le lever du soleil, le saluent de leurs acclamations, et s'embrassent l'un l'autre dès qu'ils le voient paraître ; c'est ainsi qu'ils savent manifester encore cette noble dignité, ce fort et puissant amour de la nature, qui plaisent tant chez les anciens Perses (1).

(1) OUSELEY ( Travels in various countries of the East, more particularly in Persia; Londres, 1819) déduit, de l'examen de la religion des Parses actuels, qu'ils adoraient en effet Dieu et le feu comme son symbole. Les disciples de Zoroastre se donnent le nom de Behedin, Mazdeisnan. Le premier signifie sectateur de la religion excellente; l'autre, invocateur d'Ormuzd. Lorsqu'ils parlent de personnes antérieures à la réforme de Zoroastre, ils les appellent Pakdin, homme de religion pure, Khoda-perest, Ieed-perest, adorateurs de Dieu, en opposition à Bout-perest, adorateurs des idoles. Les Persans aujourd'hui les appellent Guèbres, nom dérivé de cafir, qui, en arabe, veut dire infidèle, et a la même racine que Ghaour, Giaour; ils les nomment aussi Nogouschas, c'est-àdire apostats; Atisc-perest, adorateurs du feu; Philivs ou Calivs, insensés; mais plus communément Moghs, de mage, ou Zioudiks, Saducéens. LORD (History of the Persees), voyageur de peu de critique, il est vrai, mais qui racontait ce qu'il avait recueilli de la bouche d'un de leurs prêtres, rapporte les cinq commandements que chaque Behedin ou laïque est obligé d'observer; les voici : 1o Avoir toujours avec soi la honte, comme préservatif du péché; car un supérieur n'opprimerait jamais ses subalternes, s'il avait de la honte. On ne volerait pas, si l'on avait de la honte; on ne ferait pas de faux témoignage, si l'on avait de la honte; on ne s'enivrerait pas, si l'on avait de la honte. Mais parce que les hommes chassent parfois la honte, ils sont disposés à commettre tous ces péchés. Ainsi, que tout Behedin pense à la honte.

2o Avoir toujours peur de soi-même, au point de ne jamais ouvrir ni fermer les yeux sans craindre que par hasard les prières ne montent pas au ciel. Que cette pensée retienne de commettre aucun péché; car Dieu fait attention à la conduite de tout homme qui élève ses regards vers lui.

8° Chaque fois qu'on a une chose à faire, réfléchir si elle est bonne ou mauvaise, commandée ou prohibée par le Zend-Avesta. Si elle est prohibée, s'en abstenir; la faire, si elle est permise.

4° La première créature de Dieu que l'on voit le matin doit nous rappeler l'o

CHAPITRE IV.

CONSTITUTION MORALE ET POLITIQUE DES PERSES.

On jugerait mal les Perses si l'on s'en tenait exclusivement à Éducation. l'opinion des Grecs, qui avaient contre eux une haine profonde; mais il ne faut pas non plus se les représenter comme de bien

bligation que nous avons de rendre grâce à Dieu, qui mit des choses si bonnes à l'usage et au service de l'homme.

50 Quand on adresse à Dieu une prière dans le jour, tourner la face vers le soleil, et, dans la nuit, vers la lune: deux luminaires célestes qui rendent témoignage de la Divinité.

Le même écrivain rapporte ainsi les devoirs des prêtres :

10 Observer la liturgie de Zoroastre, la formule d'oraison qu'il a enseignée étant plus agréable à Dieu que toute autre.

2o Ne pas laisser les yeux désirer ce qui est à autrui, parce que Dieu ayant donné à chacun ce qui lui convient, désirer le bien d'autrui, c'est se montrer mécontent de la Providence et croire avoir droit sur ce que Dieu jugea à propos de nous refuser.

3o Dire toujours la vérité, parce qu'elle vient de Dieu, et que le démon est père du mensonge.

40 Ne s'occuper que de ses fonctions, sans songer aux affaires temporelles, parce qu'un laïque ne doit pas laisser l'ecclésiastique manquer du nécessaire, ni celui-ci désirer rien de superflu.

5° Apprendre par cœur le livre de la loi pour instruire toujours le pauvre laïque, et pour que celui-ci soit toujours tenu de respecter son prêtre.

6o Conserver la pureté, parce que Dieu aime les hommes purs, et que par ce moyen seul on peut en surpasser un autre.

70 Être prêt à pardonner toutes sortes d'injures, et se rendre un modèle de douceur, afin de se montrer le véritable ministre de ce Dieu que nous offensons chaque jour, et qui pourtant ne cesse de nous faire du bien.

80 Enseigner au peuple à prier selon la loi, s'unir à lui pour demander à Dieu la prospérité du pays, et accomplir toujours les devoirs de son état.

90 Unir l'homme et la femme par le mariage, et ne pas souffrir que les parents marient leurs enfants contre leur gré.

10o Passer le plus de temps possible dans le temple pour rendre service à ceux qui viennent le trouver, et répondre ainsi à sa propre vocation.

110 Ne pas admettre d'autre loi que celle qu'a donnée Zoroastre, ne rien y ajouter, n'en retrancher rien, parce que Dieu le veut ainsi.

Le grand prêtre ou Dislecoos, qui correspond à l'ancien Moubad-Moubadan, a de plus les devoirs suivants :

1o Se préserver de toute souillure, parce que Dieu l'a élu pour être saint. 2o Faire tout lui-même pour que l'impureté d'autrui ne le souille pas, et aussi pour montrer de l'humilité dans son haut rang.

30 Prendre la dime du laïque, non pour son usage, mais en se considérant

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