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athénien.

suivantes, elle s'éleva au plus haut degré de grandeur. Économes Caractère dans leurs dépenses privées, les Athéniens étaient prodigues lorsqu'il s'agissait de la magnificence de leurs fêtes, de leurs spectacles, de leurs édifices; ils sentaient la vie dans sa plénitude, car l'existence publique n'était pas chez eux distincte de l'existence privée, et la conscience de leurs propres forces leur inspirait une énergie extrême pour marcher dans les voies de la science et des arts. A l'aide du seul métier qu'ils crussent digne d'un homme libre, les Athéniens avaient dompté la stérilité de leur sol; quoique l'esprit mercantile n'eût jamais prévalu chez eux, ils se livraient au négoce sur les côtes de la Thrace et de la mer Noire. L'habitude de se mêler des affaires du gouvernement, de discuter en public les intérêts communs de la patrie et leurs propres affaires, leur valut la subtilité du raisonnement, l'aptitude à saisir d'un coup d'œil les rapports des choses, et la facilité pour les exprimer avec élégance; ils avaient même ouvert des écoles où l'on enseignait à bien penser et à bien dire. Qui pouvait mieux parvenir à ce but que ceux pour qui Homère était le livre élémentaire? La poésie se mêlait à toutes les solennités de la vie, Socrate enseignait sur la place publique, Sophocle instruisait au théâtre, Platon professait dans l'école, Démosthène haranguait à la tribune.

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Le poste de Thémistocle fut occupé par Cimon, fils de Miltiade, égal en habileté à son père, qu'il surpassa en droiture. Aristide l'arracha aux erreurs d'une jeunesse irréfléchie, bien rachetées par une probité incorruptible unie à la plus aimable aménité. Afin de conserver la paix dans sa patrie et l'union dans la Grèce, il continua la guerre contre les Perses, et, s'étant dirigé vers la Thrace, il prit Amphipolis et Éione, dont les habitants, plutôt que de se rendre, se précipitèrent dans les flammes. Avec eux périt en Europe la domination des Perses. Cimon, à la tête de trois cents voiles, s'avançant vers la Carie et la Lycie pour les poursuivre en Asie, appela sur sa route les colonies grecques à la liberté, et purgea l'île de Scyros des Dolopes, corsaires non moins redoutables que les Uscoques modernes.

La niort violente de Xerxès et les troubles qui la suivirent, avaient empêché les Perses de s'opposer à l'invasion; mais à peine Artaxerxès se fut-il affermi sur le trône par la mort d'Artaban qui lui en avait ouvert le chemin en égorgeant son père, qu'il envoya des troupes pour recouvrer Chypre, et rassembla une belle flotte sur les rives de l'Eurymédon. Cimon va l'attaquer, s'en empare, et fait monter les siens, vêtus à la manière des Perses,

Cimon.

470.

IIIe guerre messénienne.

465.

461.

Périclès.

sur les navires captifs. Il aborde ainsi dans le voisinage de l'armée
de terre, débarque, la taille en pièces, et remporte le même jour
deux victoires qui n'ont rien à envier à Salamine et à Platée. Une
partie du magnifique butin fut consacrée aux dieux, une autre
destinée à fortifier Athènes, et Cimon employa celle qui lui
revint à embellir sa patrie de rues, de portiques, de jardins.
L'année suivante, il poursuivit le cours de ses victoires en s'em-
parant de la Chersonèse.

Les alliés d'Athènes murmuraient, comme si les fatigues n'eus-
sent été que pour eux, et pour elle la gloire et les avantages; ils
parlaient de rompre la confédération pour se livrer au repos.
Cimon accéda à leur vou, sous la condition qu'au lieu de soldats
ils fourniraient leurs navires et de l'argent; cette convention ent
pour résultat de les affaiblir et d'accroître la puissance d'Athènes.
L'Eubée, Naxos, Thasos, qui se refusèrent à cet arrangement,
furent soumises par la force, et la raison d'État justifia la violation
des traités faits avec Aristide. Athènes s'était, en outre, renforcée
au dehors en s'assurant des côtes de la Macédoine par l'établis-
sement d'une colonie à Amphipolis.

Sparte, pour s'opposer à cet accroissement, déclara la guerre à Athènes; mais de terribles calamités suspendirent ses préparatifs. Un tremblement de terre produisit une telle secousse qu'une cime du Taygète s'écroula sur la ville et ensevelit vingt mille personnes. Prompts à profiter de ce désastre, les ilotes et les Messéniens brisèrent les fers de leur rude esclavage, et, relevant de ses ruines cette Ithôme dans laquelle ils avaient autrefois défendu leur indépendance, ils soutinrent une nouvelle guerre de dix ans; elle durait encore quand Cimon, craignant la contagion de la révolte, persuada aux Athéniens d'envoyer du secours à Sparte, qui le refusa. Les démagogues profitèrent de cette circonstance pour donner à entendre au peuple que Cimon était d'intelligence avec Sparte afin de rabaisser Athènes; il n'en fallut pas davantage pour qu'il fût réputé digne de subir l'ostracisme (1).

Le principal promoteur de cette mesure avait été Périclès, Â qui Zénon d'Élée et Anaxagore avaient révélé les mystères de la nature et appris à mépriser ce que redoutait le vulgaire. D'une naissance illustre, doué de beauté, d'éloquence et d'un grand esprit, versé dans la connaissance des temps et des hommes, il avait cette supériorité nécessaire pour être un bon politique au prix de la justice et de la probité. S'observant avec le plus grand soin

(1) TH. LUCAS, Versuch einer Charakteristik Cimons. Hirschberg, 1832.

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lorsqu'il parlait, il fut le premier à préparer et à écrire ses discours. Il avait coutume de se dire Rappelle-toi que tu vas parler à des hommes libres, à des Grecs, à des Athéniens, et il priait les dieux de ne laisser sortir de sa bouche rien qui blessât l'oreille délicate de ses concitoyens. Ses paroles, dit Aristophane, son contemporain, étaient des tonnerres et des foudres qui secouaient toute la Grèce. A l'éloquence du langage il joignait une argumentation si déliée que le vieux Thucydide disait un jour Quand je viens de le jeter par terre, il s'écrie: Non, non, ce n'est pas vrai, je suis debout! et il le persuade au peuple. Il montait rarement à la tribune; une affaire acquérait donc de l'importance dès qu'on le voyait la discuter. Extrêmement habile à montrer la plus grande insouciance pour ce qui lui tenait le plus à cœur, il ne paraissait viser ni aux honneurs, ni aux richesses, ni à son propre avantage; il écoutait les conseils, ou faisait semblant de les écouter, et agissait avec cette modération qui subjugue les ennemis et séduit la multitude. Un de ses adversaires lui avait adressé des injures à satiété; puis, comme la nuit était survenue durant la discussion, Périclès ordonna à son esclave d'accompagner, avec un flambeau, l'orateur jusqu'à sa maison (1).

Parvenu au maniement des affaires publiques, il visa toujours à accroître l'autorité du peuple, afin que celui-ci pût lui en céder une plus grande part. Toutes ses actions tendirent à ce but durant sa domination; car on peut bien appeler ainsi le pouvoir qu'il exerça quarante ans, quoiqu'il ne fût jamais archonte ni général. Il ne put même jamais se glisser dans l'aréopage, et fit dès lors tout son possible pour en diminuer l'autorité ; un de ses agents, Éphialte, enleva en effet à ce tribunal la connaissance de plusieurs délits, la haute direction des jeux, la révision des lois, la surveillance des mœurs, et chercha même à le discréditer en y introduisant des personnes indignes.

Afin que les jugements populaires ne manquassent pas d'assistants, Périclès fit décréter une rétribution pour ceux qui seraient présents, de sorte que les tribunaux furent pleins de désœuvrés et de fainéants. Il fit assigner une solde aux indigents pour qu'ils pussent entrer aux spectacles, et obtint qu'on leur distribuât une partie des terres conquises; dès lors les oisifs, qui ne savaient

(1) J. CHR. GOTTHEBER de Moribus Periclis in Gorgia expressis; Misenæ, 1775.-R. WEBER, Ueber Pericles Standrede; Darmst., 1827.. KUTSEN, Pericles als Staatsmann; Grimmæ, 1834. — R. LORENTZER, de Rebus Athen. Pericle duce; Gottinga, 1734. OGIENSKI, Pericles und Plato; Wratislaw,

1837.

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Embellisse.ments

que bavarder et commenter les lois, sans négliger de porter aux nues celui qui leur valait une pareille abondance, augmentèrent singulièrement de nombre. La plèbe dominait partout, les emplois se vendaient, et l'administration économique, introduite par Aristide, avait fait place à un gouvernement splendide et libéral; au milieu de tout cela se glissait le libertinage sous des dehors séduisants. La maison de la courtisane Aspasie était le rendezvous de tout ce que la Grèce comptait alors d'hommes remarquables; elle avait enseigné l'éloquence à Périclès. Les mères lui confiaient leurs fils pour achever auprès d'elle leur éducation et acquérir le savoir-vivre; les maris lui envoyaient leurs femmes pour se former aux manières élégantes, et de jeunes filles venaient la trouver pour prendre ses leçons dans l'art de tirer meilleur parti de leurs charmes.

Périclès, de même qu'il avait dompté les nobles en favorisant la d'Athènes. multitude, tint la multitude dans la sujétion en envoyant les braves à des guerres continuelles, en fournissant du travail aux gens paisibles et un aliment au génie, qui, à cette époque, atteignit à sa plus grande hauteur. Le Pirée contenait quatre cents vaisseaux, outre les rades de Munychie et de Phalère; celle-ci, de même que le Pirée, était jointe par une double muraille à la cité, qui, entourée d'oliviers au milieu desquels serpentaient l'Ilissus et le Céphise, avait soixante stades de circuit. On ne rencontrait, dans les rues et aux alentours, que portiques, peintures, sculptures, inscriptions, petites colonnes couvertes de sentences, trophées d'armes enlevées aux Perses ou aux Spartiates, trépieds gagnés par les vainqueurs des jeux. Le théâtre de Bacchus pouvait recevoir dans son enceinte trente mille spectateurs; Périclès dépensa onze millions de francs pour la construction des Propylées, magnifique vestibule dorique de la citadelle, rempli d'ouvrages de Phidias, de Myron, d'Alcamène. Il éleva, à ses frais, le Parthénon, en l'honneur de Minerve, et l'Odéon, pour les représentations musicales: la ville, en un mot, devint telle que Lysippe écrivit ces vers : « Insensé qui ne désire voir Athènes, << insensé qui la voit sans l'admirer; plus insensé qui la voit, l'ad<< mire et l'abandonne ! »

Guerre entre
Les Grecs.

460.

A l'extérieur, Athènes aggravait chaque jour les charges de ses alliés; elle augmenta la contribution que chacun devait payer, et fit transporter de Délos dans ses murs le trésor commun de la Grèce, ce qui lui donna davantage encore l'air d'une métropole. La jalousie et la malveillance s'accroissaient donc, et Sparte soufflait le feu. Corinthe et Épidaure, s'étant insurgées,

battirent les Athéniens à Haliæ; mais ceux-ci prirent bientôt leur revanche et soumirent même Égine. Un différend s'éleva entre Corinthe et Mégare, au sujet de leurs confins; Athènes embrassa la cause de Mégare, et les Corinthiens furent défaits par Myronide, près de Cimolie.

Les Spartiates ayant embrassé la défense des Doriens contre les Phocéens, une guerre éclata entre Athènes, Sparte et la Béotie. Cimon, bien qu'exilé, se présente à l'armée, offrant son bras et ses conseils; mais il lui est enjoint de se retirer. Une centaine de ses amis, accusés de le favoriser au préjudice de la patrie, se disculpèrent en mourant tous, les armes à la main, à Tanagra, où les Spartiates l'emportèrent; mais, l'année suivante et au même endroit, Myronide mit en déroute les Béotiens, tandis que Tolmidas et Périclès se signalaient par les succès les plus heureux et serraient de près Lacédémone effrayée.

458.

456.

Id.

Cimon.

A la première défaite qu'on essuya, Périclès fut le premier à Rappel de demander le rappel de Cimon, banni depuis cinq ans. A son retour, il trouva toute la Grèce en armes. Sparte venait enfin de prendre Ithome, et étouffait dans le sang la troisième guerre des Messéniens, dont les débris étaient accueillis dans Athènes; Argos avait détruit Mycènes, l'antique demeure des héros; les Éléens démolissaient Pise, la directrice des jeux sacrés d'Olympie; Athènes attaquait le Péloponèse, que Tolmidas et Périclès menaçaient du côté de la mer. Cimon proposa une suspension d'armes qui, acceptée tacitement, fut suivie d'une trêve de cinq années, et, pour donner une autre direction à l'ardeur guerrière de ses concitoyens, il marcha contre la Perse.

455.

450.

Égypte.

463.

L'Égypte s'était révoltée contre elle quelque temps auparavant, Expedition en avait chassé ses garnisons et ses exacteurs, proclamé son indépendance. Inarus de Libye, qui s'était mis à la tête du mouvement, eut recours aux Athéniens, qui expédièrent à son aide les deux cents navires armés contre Chypre, et les Perses vaincus durent se renfermer dans Memphis; mais leur général Mégabaze, tirant parti du grand nombre des canaux, parvint à détourner le cours d'un bras du Nil, de sorte que la flotteennemie demeura à sec. Les Athéniens, plutôt que de la laisser tomber au pouvoir des Perses, l'incendièrent eux-mêmes, et déjà ils se préparaient à s'ouvrir le passage avec le fer, quand il leur fut accordé par un traité; mais le petit nombre d'entre eux qui avait survécu aux combats et aux maladies, périt presque entièrement dans la retraite. Soixante autres navires, qui avaient été expédiés comme renfort, furent même coulés bas par les Phéniciens.

HIST. UNIV.

T. II.

11

445.

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