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Dynastie des
Kaïaniens.

Caucase, désignés par les Grecs sous le nom de Scythes, par les
Perses sous les noms modernes de Chinois et de Turcs.

Quand Gerschap eut cessé de vivre, le roi de Turan envoya Afra-
siab pour occuper l'Iran; mais Zal fit élire par les grands Kaï-
Kobad, du sang de Férydoun, qui défit cet ennemi avec l'aide de
Roustam. L'Oxus resta encore la limite des deux empires.

Kaï-Kous, monté sur le trône après Kaï-Kobad, voulut conquérir Mazanderan, résidence des mauvais génies, et il sortit vainqueur de cette entreprise, comme de beaucoup d'autres, par la coopération de Roustam. Enorgueilli de ses succès, il voulut essayer de monter au ciel sur les ailes de certains oiseaux; mais, retombé à terre, il expia son péché par quarante jours de pénitence. Son fils Siavech, aussi vaillant et aussi beau que vertueux, repoussa l'amour coupable de sa belle-sœur, qui l'accusait de son propre crime, et se justifia par l'épreuve du feu.

Après lui, vient Kaï-Kosrou, peut-être le Cyrus des Grecs, trouvé au milieu des forêts, reconnu pour héritier du royaume d'Iran, grand conquérant, qui se retira ensuite sur une haute montagne en laissant le trône à Lorasp. Sous le règne de ce dernier vivait Zerdust, sage vieillard qui se présenta au schah en lui disant: Je viens, messager du ciel, pour montrer la voie qui conduit à Dieu. Il lui remit alors un bassin plein du feu sacré, et sa doctrine qui devint celle de l'empire; ce changement amena d'autres guerres avec les États voisins. Isfendiar, son fils, combattit contre Roustam, encore vigoureux à l'âge de sept cents ans, et fut tué par lui; mais Roustam lui-même mourut par la trahison de son frère.

Gustasp (1) dit en montant sur le trône: Je suis le roi qui adore Dieu. Dieu nous a donné cette couronne; il nous a donné cette grande couronne pour que nous écartions le loup du sentier de la brebis, pour que nous ne rendions pas la vie douloureuse aux hommes d'une noble nature, et que nous ne fassions pas la guerre à ceux qui pratiquent la justice. Si nous sommes fidèle à nos devoirs de roi, nous ferons entrer les méchants dans la religion de Dieu. Le poëte ajoute que la justice de Gustasp fut si grande que les brebis se désaltéraient avec le loup au même ruisseau. Il transmit la couronne à Baaman, fils d'Isfendiar (2), qui vengea son père. A sa mort, il laissa enceinte Omaï, qui fit jeter à la mer son enfant nouveau-né. Un prêtre recueillit cet enfant et le nomma Darab, c'est-à-dire

(1) Paraît le même que Hystaspe; mais c'est un nom appellatif, du zend vista aspa, seigneur de chevaux.

(2) Mirkhond l'appelle Ardescir Diraz-Dest, Artaxerxès Longue-Main.

sauvé des eaux; il fut reconnu et obtint l'empire. Il eut, de deux femmes, les princes Sekander et Darab (1), qui se firent la guerre, l'un à la tête de la Grèce, l'autre de la Perse, parce que Sekander (Alexandre) avait refusé le tribut de mille œufs d'or promis à son père. Les conquêtes des Grecs furent aussi rapides qu'étendues, et Darab succomba.

Tel est le récit poétique des historiens perses. On pouvait supposer que leurs écrivains nationaux, venus vers la fin de cette série d'empires qui s'étaient succédé en Asie, avaient, par ignorance ou vanité, enté leur histoire sur celle des peuples antérieurs, confondant ainsi Mèdes, Assyriens et Perses; mais cette hypothèse est écartée par la découverte des livres zends, où l'on voit paraître les mêmes noms et en général les mêmes faits anciens. Il faut y joindre le Dabistan, qui traite de douze religions différentes; il ne fut compilé que dans le dix-septième siècle, mais sur des documents pelvi, entre autres le Déçatir (2), publié naguère, et qui, bien qu'étrangement altéré, ne saurait être entièrement rejeté. On y voit aussi que quatre dynasties primitives dominèrent sur l'Iran, parmi lesquelles celle des Yanianiens ou purs dura tout un aspar, c'est-à-dire mille millions d'années. Un saint patriarche, Mahabali, demeuré seul à la fin du grand cycle, reçut de Dieu quatre livres de lois et de prières, partagea le peuple en quatre castes, et fonda la grande monarchie de l'Iran. Sous lui et ses treize successeurs, le pays jouit du bonheur de l'âge d'or;

(1) Alexandre le Grand et Darius. Le premier est aussi appelé Iskender DzulKarnain, c'est-à-dire Alexandre aux cornes (celles d'Ammon qu'il portait à son cimier).

(2) Le Dabistan, ouvrage de Scheik Mohammed-Mohsen, dit Fani ou le Périssable, traite de douze religions différentes, et, entre autres, de celles de la Perse. Le texte persan fut publié en entier à Calcutta en 1809. Il acquit de la valeur par la découverte du Déçatir, l'une des autorités dont il s'appuie (The Desatir, by Moulla Firouz bin Kaous; Bombay, 1820, 2 vol. in-8°). Quelques savants s'en appuyèrent; mais un examen plus rigoureux ne fut pas favorable à ces deux ouvrages. Les orientalistes les plus compétents s'accordent aujourd'hui à penser: 1° que le Déçatir (recueil de révélations divines faites dans le cours d'un grand nombre de siècles à quinze prophètes, depuis Mahabad jusqu'à Sassan V, contemporain de Kosroës) n'est pas autrement pelvi, mais qu'il fut écrit dans l'Inde par un auteur inspiré tout à la fois par sa propre religion et par le mahométisme; 2° que l'auteur de la traduction et du commentaire persan est probablement aussi celui du texte, qui n'est écrit dans aucune des langues antérieures aux Sassanides, mais dans l'idiome conventionnel de quelque secte, comme le Balaïbalan des Sophis; 3o qu'il est postérieur à l'hégire et peut-être même au treizième siècle. De Hammer soutient qu'il est antique, au moins dans beaucoup de ses parties; mais Silvestre de Sacy le nie. Journal des savants, 1821, janvier et septembre.

Critique.

les cœurs étaient innocents, les offrandes simples et pures, les rois se montraient les pères des peuples. Mais à la simplicité du culte primitif vint se mêler, sous leur règne, celui des astres, des génies et des planètes, représentés tels qu'ils étaient apparus à plusieurs saints et prophètes.

Or comment mettre les récits des Orientaux d'accord avec ceux des classiques? Un grand nombre de systèmes ont été inventés à ce sujet, notamment par les Allemands, aussi savants que laborieux; mais aucun ne saurait convaincre : nous ne leur emprunterons donc que les faits qui nous paraîtront les plus vraisemblables.

Les temps primitifs offrent un caractère plutôt mythique qu'historique les constitutions astrologiques et les grandes périodes sidérales ont fourni, soit le fond, soit les circonstances de ces récits, dans lesquels les astres figurent comme des hommes, tandis que les prouesses des héros métamorphosés en planètes se confondent avec les révolutions de celles-ci. Des écrivains, cependant, veulent y retrouver la trace d'une grande monarchie qui, en communauté de langage, de croyances et d'institutions, aurait embrassé l'Inde, la Perse et l'Assyrie.

Le premier fait qui ressort de la connaissance des Naskas est leur analogie avec les Védas. Les deux langues sont sœurs (1); seulement le pelvi, agreste, moins développé, abonde en aspirations, tandis que le sanscrit est plus musical: le premier revêt le caractère des montagnes dont il ne franchit pas les limites; le second porte l'empreinte de climats plus doux et de divers mélanges. Comme on ne connaît jusqu'à présent que très-peu de chose des Naskas et peu des Védas, on ne saurait établir un parallèle complet; néanmoins ces quelques éléments suffisent pour attester la communauté de leur origine. Presque toutes les dénominations théologiques des Naskas figurent aussi dans les Védas; les noms des divinités sont presque les mêmes, bien qu'on ne puisse encore indiquer les traits particuliers qui les distinguent. Seulement, chose digne de remarque, ce qu'une religion adore est souvent maudit par l'autre. Les Dévas sont des divinités bienfaisantes dans l'Inde, et dans les Naskas les Daévas sont les ennemis de l'homme. Ahoura est le nom du Dieu suprême dans les Naskas, et les Asouras dans les Védas sont les génies du mal. Nous ne pouvons expliquer pour quel motif la même race parvint à des différences si fondamentales, tandis qu'elle resta d'accord sur d'autres points. De même, on rencontre

(1) Burnouf le démontre, Comm. sur le Yaçna.

souvent dans les livres sanscrits le nom de Mithras, si vénéré dans le magisme, qui lui donne pour compagnon, comme les premiers, Aryaman-Haoma, Dieu suprême des textes zends et identique avec Soma, divinité sanscrite; dans les deux religions, il est représenté par le suc de la plante sacrée, employée dans les sacrifices. Bien plus, le premier nom des deux peuples est le même, puisque celui d'Airya, célébré dans les Naskas comme titre national des peuples mèdes, indique dans le sanscrit (arya) les agriculteurs et les marchands, c'est-à-dire le gros de la population brahmanique; Aryavarta est le nom primitif de l'Inde (1). Peut-être les deux nations se séparèrent-elles lorsque celle de l'Inde adopta le dogme panthéistique.

La plupart, distinguant dès le principe les Mèdes des Perses, rattachent aux premiers Zoroastre, le système des mages et la civilisation des Perses. Les Mèdes n'auraient d'abord formé qu'un seul État avec les Bactriens, civilisés même avant eux; puis ils se seraient divisés en deux royaumes, auxquels se rapporteraient les dynasties différentes d'Hérodote et de Ctésias mais leur origine et leurs relations avec les Assyriens demeurent tout à fait obscures.

La grande nation des Ériens, dont nous avons déjà parlé, se divisa ensuite en plusieurs peuples. Ceux de la Bactriane, plus voisins du sol natal, restèrent plus fidèles au nom et à l'idiome anciens; d'autres s'en allèrent vers le sud-ouest et le Caucase, où ils transportèrent le nom de l'Albordi et de l'Ériène (Arménie): de sorte qu'il y eut des Ériens orientaux et des Ériens occidentaux. A ces derniers appartinrent les Mèdes, appelés Pahlavas par les Indiens, et les Perses qui, issus du rameau primitif, comme le témoignent des faits nombreux, s'établirent dans la contrée désignée particulièrement sous le nom de Pars.

Cette migration se rattache au nom de Schemschid, et nous en voyons l'indication poétique dans le Vendidad. L'Ériène-Veedjo, où Ormuzd plaça le premier homme, jouissait de sept mois d'été contre cinq d'hiver; mais, Arimane l'ayant bouleversé, il n'eut plus que deux mois de chaleur. Les habitants le quittèrent donc, et Ormuzd créa pour eux seize autres pays, comblés de bénédictions. Ce fut ainsi qu'ils vinrent de l'est à l'ouest dans la Sogdiane, puis dans le Korassan, dans la Bactriane, enfin dans l'Iran. Là, les Bactriens et les Mèdes devinrent riches par le commerce, tan

(1) Hérodote lui-même (livre VII) dit que les Mèdes autrefois portaient le nom d'Ériens : Ἐκαλέοντο δὲ πάλαι πρὸς πάντων Ἄριοι.

dis que les montagnards s'occupèrent du soin des troupeaux; ce furent les Perses.

A peine les Perses commencent-ils à paraître, qu'ils tombent sous la domination, soit des Assyriens (1), soit des Arabes Chuscites, soit des Chaldéens, représentés par Zoak, qui peut-être ne fait qu'un avec Nemrod, fils de Chus (2). L'Iran est alors divisé en deux : la partie occidentale appartient aux Chuscites, et l'est ou le nord devient la résidence des Sémites. Dix siècles après, peut-être, ces derniers s'affranchissent sous la conduite de Férydoun (3) ou d'une famille qui se partage l'Iran, le Touran et les provinces de l'ouest. Bientôt les deux premiers pays deviennent ennemis, et deux guerres terribles avaient été soutenues de part et d'autre quand monta sur le trône Kaï-Kobad (4), c'est-à-dire le fondateur de la première dynastie mède des Kaïanides: cette dynastie met fin à la guerre avec le Touran, bâtit des villes et civilise les Mèdes, qui apparaissent comme dominateurs.

La couronne passe alors à Déjocès, autrement à la dynastie des Kaï-Kous, vantée pour sa prudence et son courage, et qui fonde une ville sur une montagne (Ecbatane). Les victoires et les défaites se succèdent; l'Iran se trouve deux fois sur le bord du précipice; il doit son salut à des héros et à des rois (Roustam et Kaï-Kous), etrepousse les Scythes (Afrasiab) dans les déserts. Vient en dernier lieu Kaï-Kosrou (Cyrus), issu de deux races ennemies, élevé par son aïeul, auquel il succédera sur le trône, qui poursuivra Afrasiab jusqu'aux extrémités de la terre, et éteindra les inimitiés dans des flots de sang.

Il est inutile de s'arrêter sur les détails, car c'est déjà beaucoup si, dans une obscurité aussi complète, nous pouvons distinguer les masses principales. Nous remarquerons seulement que les Grecs se plaisent à embellir chaque chose et à lui imprimer le cachet européen, soit en commentant, soit en voulant circonstancier. Les Orientaux, au contraire, s'occupant de ce qu'il y a de sévère chez l'homme, de la passion et de la sagesse, encore plus que des faits, mettent souvent dans la bouche des monarques des préceptes de morale. Ils font dire à Férydoun : « Si l'homme con<< sidérait bien sa propre nature, la vanité des biens d'ici-bas et << la grandeur de Dieu, il appliquerait toute sa pensée à ce seul

(1) Selon Goerres, les Assyriens sont la dynastie des Pisdadianiens; Schemschid représente les nations des Sémites.

(2) Ce nom comprendrait le Mardokente, le Ninus, le Sésostris des Grecs. (3) Le Beletoras, Beλttavas, de Ctésias, vers 1400 avant J.-C.

(4) Arsace, vers 900.

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