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suprématie. Les nobles avaient pour chefs les Alcméonides; à la tête du peuple était Pisistrate, parent de Solon, citoyen riche et généreux, qui se montrait le protecteur des faibles et aspirait à la tyrannie. Afin d'y parvenir, il se présenta un jour sur la place publique, couvert de blessures sanglantes, dont il accusa les nobles en disant qu'ils le haïssaient comme partisan du peuple. Il n'en fallut pas davantage pour que la plèbe lui décrétât une garde avec laquelle il s'empara de la citadelle, chassa les Alcméonides et usurpa le pouvoir suprême.

Pisistrate possédait toutes les qualités nécessaires pour séduire, pour aveugler un peuple; beau de sa personne, vaillant, splendide, habile orateur, il joignait l'esprit naturel au savoir; affable avec tous, l'indigent trouvait en lui un bienfaiteur, l'opprimé un appui toujours favorable à la multitude lorsqu'il s'agissait de lois et d'institutions, il était le protecteur des gens de lettres et des artistes. Solon, lui-même, fut séduit et le favorisa d'abord, lorsqu'il ignorait encore ses projets; mais une fois qu'il les eut pénétrés, il lui dit : Tu serais le premier citoyen de la Grèce, si tu n'en étais le plus ambitieux, et il lui fit une vive opposition. Pisistrate lui ayant demandé un jour ce qui l'encourageait à tant de résistance, il répondit: Ma vieillesse. On aimerait mieux qu'il eût pu dire: Mon devoir. Enfin, ne pouvant supporter plus longtemps le spectacle des maux de sa patrie, Solon l'abandonna et mourut dans un âge avancé. Il avait coutume de dire: Je vieillis en apprenant. Près de mourir, il se fit relire des vers, afin, disait-il, de mourir plus instruit.

Pisistrate ne jouit pas en paix du pouvoir qu'il avait usurpé; il fut même contraint de quitter la ville quand les Alcméonides y rentrèrent avec Mégaclès; mais ses amis conduisirent si bien les choses qu'il s'arrangea avec ses rivaux, en épousant la fille de l'un d'eux. Le peuple, qui le disait ramené par Minerve, le replaça bientôt au premier rang. Il en fut renversé de nouveau, et vécut quinze ans dans l'exil; rappelé à Athènes, il la gouverna jusqu'à sa mort.

Pour rendre les assemblées moins tumultueuses et la brigue moins facile, il dirigea vers l'agriculture beaucoup de citoyens, en leur concédant des terres sous la condition d'y planter l'olivier sacré, et de payer à l'État le dixième du revenu. Afin de polir et d'instruire les Athéniens, il favorisa les arts et les sciences, forma une bibliothèque, mit en ordre les poëmes d'Homère, en même temps qu'il ouvrait des routes au commerce et des asiles aux soldats invalides. Dans l'intention de maintenir le peuple dans la

soumission, il fit construire beaucoup (1), et commença le temple de Jupiter Olympien.

Sa douceur naturelle, son affabilité, sa clémence, contribuèrent à lui concilier les esprits. Un jeune homme ayant osé donner un baiser à sa fille, la mère en demandait vengeance; Pisistrate lui dit: Si nous punissons ceux qui montrent de l'amour pour notre fille, que ferons-nous à ceux qui nous haïssent? Quelques mauvais sujets adressèrent un soir des injures à sa femme; puis, le lendemain, leur ivresse dissipée, ils vinrent présenter leurs excuses; mais lui, feignant la surprise: Vous devez vous être trompés, ma femme n'est pas sortie hier au soir. Quelques-uns de ses amis, fâchés contre lui, se retirèrent dans une place forte; Pisistrate, en étant informé, va les rejoindre, suivi d'un grand nombre d'esclaves qui portaient son bagage, et dit aux boudeurs étonnés : J'ai résolu de vous ramener avec moi, ou de rester avec vous.

Avec un pareil tyran, Athènes pouvait se trouver heureuse; mais un État est bien à plaindre lorsqu'il doit fonder sa félicité sur les qualités personnelles d'un maître! Sous ses dignes fils, Hipparque et Hippias, la culture intellectuelle se perfectionna dans Hipparque et Athènes (2); des sentences morales, sculptées sur la pierre, fai

(1) ARISTOTE, Politique, liv. VIII, ch. IX.

(2) Voici ce qu'écrivait Platon dans l'Hipparque (p. 228): « Hipparque, l'aîné et le plus sage des fils de Pisistrate, celui qui, entre autres preuves de sagesse, a le premier apporté dans ce pays les livres d'Homère, et obligé les rapso des à les réciter alternativement et par ordre aux Panathénées, comme ils le font encore aujourd'hui, envoya aussi un vaisseau avec cinquante rameurs chercher Anacréon de Téos pour l'amener à Athènes, et retint toujours auprès de lui Simonide de Cos, en le comblant de présents et de pensions. Il cherchait ainsi à former ses concitoyens, voulant commander à des gens éclairés, et trop généreux pour se réserver à lui seul la possession de la sagesse. Quand il eut répandu quelque instruction parmi les habitants de la ville, il dirigea ses soins vers ceux de la campagne, et fit élever pour eux des hermès sur tous les chemins communiquant de la ville à chaque dème. Puis, de tout ce qu'il possédait de mieux dans son esprit et dans ses connaissances, il composa des vers élégiaques pour les faire graver sur les hermès et enseigner la sagesse; de sorte que bientôt les citoyens n'admirèrent plus tant ces fameux préceptes qui se lisaient inscrits à Delphes Connais-toi toi-même, Rien de trop, et autres semblables, et qu'ils trouvèrent plus de sagesse dans ceux d'Hipparque. En lisant ces inscriptions, les passants acquéraient le goût de la philosophie, et accouraient à la ville pour en apprendre davantage. Chaque hermès avait deux inscriptions; à gauche étaient le nom de l'hermès, celui du lieu et du dème; à droite, on lisait: Monument d'Hipparque: Marche en pensant à la justice. Il y avait d'autres inscriptions, sur d'autres hermès, belles et en grand nombre. Celle de la voie Stiriaque portait : Monument d'Hipparque: Ne trompe jamais ton ami. »

Hippias.

528.

HIST. UNIV.

T. II.

8

514.3

310.

Clisthène.

saient l'ornement des chemins, tandis qu'à la cour brillaient des esprits d'élite, parmi lesquels se trouvaient Simonide et Anacréon. La contribution du dixième, payée par les cultivateurs, fut réduite au vingtième; on était sur le point d'achever le temple de Jupiter.

Pourtant les vieilles haines duraient encore. Les Alcméonides bannis s'étaient réfugiés en Macédoine, où ils formaient un noyau de mécontents. Hippias et Hipparque, peu réservés en fait de femmes, corrompaient les autres par leurs exemples, et se créaient des ennemis. Harmodius, outragé dans la personne d'une sœur, se concerta avec Aristogiton et plusieurs autres; ils assaillirent les deux princes, et tuèrent Hipparque. Hippias lui survécut pour le venger. Harmodius fut massacré par le peuple en fureur. Aristogiton, mis à la torture, désigna pour ses complices les meilleurs amis d'Hippias, qui subirent le dernier supplice. Interrogé par le tyran s'il avait encore des traîtres à dénoncer, il lui répondit Maintenant je ne connais plus que toi qui mérites la mort. Léæna, maîtresse du meurtrier, mise à la torture, se coupa la langue avec les dents, de peur que les tourments ne lui arrachassent quelque nom.

Ces événements réveillèrent chez les Athéniens l'amour assoupi de la liberté. On dressa des statues en l'honneur d'Harmodius, d'Aristogiton et de Léæna; l'hymne fait à leur louange devint un chant national (1). Hippias, en proie aux soupçons et avide de vengeance, rendait sa domination plus pesante. Les Alcméonides appelèrent à leur aide Sparte et les oracles de la Pythie; puis, marchant sur Athènes, ils s'en emparèrent les armes à la main. Le gouvernement républicain fut rétabli, et Hippias s'enfuit chez les Perses.

Ici la confusion est grande. Clisthène, chef des Alcméonides, qui dominait dans Athènes avec le titre de libérateur, chercha à déraciner les vieilles factions, en faisant une nouvelle distribution de citoyens; il porta donc les quatre tribus ioniques au nombre de dix, dans chacune desquelles devaient être pris cinquante sé

(1) Athénée, XV, 15 : « Je porterai mon épée recouverte de myrte, comme Harmodius et Aristogiton, quand ils tuèrent le tyran et rétablirent dans Athènes l'égalité des lois.

<«< Cher Harmodius, tu n'es pas mort. On dit que tu vis dans les îles des bienheureux, où sont Achille aux pieds légers, et Diomède, fils de Tydée. « Je porterai mon épée recouverte de myrte, etc.

«Que votre gloire soit éternelle, cher Harmodius, cher Aristogiton, parce que vous avez tué le tyran, et rétabli dans Athènes l'égalité des lois. >>

nateurs, et chacune encore eut ses magistrats particuliers, formant ainsi une sorte de gouvernement municipal ce qui faisait sentir davantage la liberté, par l'exercice étendu du pouvoir. Cette liberté fut le véritable fondement de la grandeur d'Athènes.

Cependant Sparte, qui était intervenue dans les affaires d'Athènes, en secourant d'abord les Alcméonides contre Hippias, puis Hippias contre sa patrie, finit par s'unir aux Béotiens, aux Chalcidiens et aux Éginètes, et tenta de soumettre Athènes à la domination d'Isagoras, ennemi de Clisthène. Mais la discipline spartiate succomba sous la vaillance des Athéniens, combattant pour la défense de leurs droits. Enhardis par le succès, ils aidèrent les Grecs de l'Asie Mineure à secouer le joug des Perses; ce qui leur attira la guerre de Darius et de Xerxès. Mais, avant de nous occuper de ce grand drame, nous devons jeter un regard sur les autres républiques grecques.

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Le Péloponèse, outre la montueuse Laconie, comprenait l'Arcadie, que ses pâturages, le temple des Grâces à Orchomène, l'Alphée et l'Éryman the rendirent fameuse dans les chants des poëtes. Ajoutez-y la Messénie, dont nous avons déploré les infortunes; l'Élide, où les jeux Olympiques rassemblaient toute la Grèce; l'Argolide, l'Achaïe, Sicyone, et enfin Corinthe, assise sur deux mers.

Les Arcadiens se vantaient de n'avoir jamais quitté le territoire natal, ni porté le joug de l'étranger ; c'était un peuple trèsancien, chez lequel furent introduits de bonne heure, par les habitants d'Éleusis, les mystères de la grande déesse, c'est-à-dire la culture du blé. Mylès, l'un de leurs rois, fut l'inventeur des moulins, uúa, auxquels il donna son nom, et Eurotas contint par des digues le fleuve du même nom; si toutefois Mylès et Eurotas ne sont pas des noms collectifs de Pélasges, bienfaiteurs de ce pays, dans lequel leurs débris s'étaient en partie réfugiés. A des mœurs sauvages s'associait, chez les Arcadiens, le goût de la musique, et,

Péloponèse.

Arcadie.

1480.

Argos.

820.

comme les Suisses, ils combattaient pour qui les prenait à sa solde. Pan était dans ce pays l'objet d'un culte spécial. L'Alphée, très-beau fleuve, fut le théâtre des amours d'Apollon et de Daphné; dans le lac Stymphale, Hercule tua les oiseaux malfaisants. Ces traditions mythologiques s'y conservèrent mieux, grâce à l'isolement du pays; mais la civilisation hellénique n'y brilla jamais d'un vif éclat.

Arcas et Lycaon commencèrent une série de rois, soigneux de conserver à leurs sujets les avantages de la paix. Une colonie partie de Psophis en Arcadie, avec le fils de Dardanus, fonda la Psophis de l'île de Zacynthe, qui, plus tard, bâtit Sagonte, en Espagne, deux cents ans avant la guerre de Troie. Quand le Péloponèse fut envahi par les Doriens, l'Arcadie, protégée par son roi Cypsélus, ou plutôt par ses montagnes, fut la seule contrée qui leur échappa; elle se ligua plus tard contre Sparte avec les Messéniens, et, pour les avoir trahis, le roi d'Arcadie Aristocrate fut lapidé par le peuple, qui abolit la dignité royale.

Alors se formèrent autant d'États qu'il y avait de villes ; les deux principales étaient Tégée et Mantinée (Tripolitza et Mochli), qui se gouvernaient en république, forme naturelle à des pasteurs, souvent en guerre l'une contre l'autre, et ne s'alliant jamais entre elles (1).

Argos et Sicyone passaient pour être les deux royaumes les plus anciens de la Grèce, et leur fondation remontait au fabuleux Inachus. Persée, l'un de ses descendants, s'établit à Tirynthe, ville dont les constructions révèlent une origine pélasgienne; ses successeurs y résidèrent jusqu'à l'époque où les fils d'Hercule, chassés par Eurysthée, trouvèrent un asile chez les Doriens. Le royaume de Mycènes, appartenant à la famille de Pélops, dut être fondé aussi par Persée. Lors de l'invasion des Doriens, Argos tomba au pouvoir de Téménus, dont le fils, Cisus, vit son autorité de roi réduite à n'être plus guère qu'un vain nom. Le nom même fut aboli, et le gouvernement républicain remplaça la monarchie. Phidon y dicta des lois, et accorda les droits politiques à quiconque pouvait avoir un cheval; il protégea l'industrie et institua, dit-on, les poids, les mesures et les monnaies. Quatre-vingts sénateurs et des magistrats appelés Artynes, Apruvot, étaient à la tête du gouvernement d'Argos. A Épidaure, cent quatre-vingts familles élisaient le sénat dans leur sein. Ces trois villes, Mycènes,

(1) G. A. BREITENBACH, Histoire de l'Arcadie, 1791 (allem. ).

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