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caractère moral de Sa Majesté, que cette protection accordée aux créanciers de l'État, que cette longue et constante fidélité; car, en y renonçant, le Roi n'aurait eu besoin d'aucun secours extraordinaire, et il n'aurait pas été soumis aux diverses conséquences qui en sont résultées. C'est là peut-être un des premiers conseils que les aveugles amis de l'autorité, que les Machiavel modernes, n'auraient pas manqué de lui donner.

Qu'il me soit permis encore de joindre aux motifs qui embrassent le bonheur général d'une Nation considérée collectivement et dans toute sa durée, le motif plus touchant peut-être encore du bonheur des individus dont l'existence passagère n'est que plus digne de soin et de compassion. Je parle surtout de ces hommes du peuple que la crainte de l'indigence a rendus laborieux, et qui, dans l'abandon d'une douce confiance, ont déposé entre les mains de leur Roi, à l'abri de sa probité et de son amour, le fruit des travaux pénibles de toute leur vie, et l'espoir long-temps acheté de quelque repos dans les jours de la vieillesse et des infirmités qui l'accompagnent; car tel est un grand nombre des créanciers de l'État. Je n'essaierai pas de peindre le désordre et la douleur qui résulteraient de leur attente si cruellement trompée; il est des maux assez grands, même en perspective, pour qu'on n'ose les fixer par la pensée, et la crainte qu'ils inspirent semble être le garant de leur impossibilité. »

M. le Directeur général des finances traite en

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suite des besoins particuliers de l'année courante, des anticipations, des remboursemens, des dettes en arrière; et l'équilibre des finances une fois ré tabli, il invite au nom du Roi les Représentans de la Nation à s'occuper du soin de maintenir cet ordre, et de le mettre à l'abri des erreurs et des fautes de tous les Ministres et de tous les agens auxquels le Souverain d'un grand Empire est dans la nécessité de se confier. « Réunissons-nous, Messieurs, le Roi le permet, réunissons-nous pour arranger les choses de telle manière, que l'homme le plus ordinaire soit en état à l'avenir de gouverner le trésor royal, et que l'homme le plus habile ne soit jamais dangereux.

» Enfin, Messieurs, et il est bon de vous le faire observer, ce n'est pas à la nécessité absolue d'un secours d'argent que vous devez le précieux avantage d'être rassemblés pas Sa Majesté en ÉtatsGénéraux. En effet, le plus grand nombre des moyens qui vous ont été présentés comme propres à combler le déficit a toujours été dans la main du Souverain.... (Il en est encore d'autres dans la libération de différentes charges, dont on fait un calcul détaillé ); ainsi, tandis que la France, tandis que l'Europe entière attribue la convocation des États- Généraux à la nécessité absolue, au besoin inévitable d'augmenter les impositions, l'on voit par ce résumé précis qu'un Roi, jaloux uniquement de son autorité, aurait trouvé dans les retranchemens soumis à sa puissance ou à sa volonté un moyen de suffire aux

circonstances, et de se passer de nouveaux tributs. >>

Après la lecture de ce discours, le Roi s'est levé et s'est tenu debout pendant quelques minutes; ensuite Sa Majesté est sortie suivie et précédée de la Cour, de son cortége, aux acclamations de toute l'Assemblée. Les cris de vive la Reine se sont mêlés aux cris de vive le Roi! et les applaudissemens d'une foule immense ont accompagné Leurs Majestés jusqu'au château.

Il était impossible d'assister à ce grand spectacle, à cette scène sublime, dont les suites vont peut-être décider à jamais du sort de la France, sans éprouver les plus vives émotions de crainte, d'espérance et de respect. Si les détails que nous nous sommes permis de rappeler avec une attention si scrupuleuse n'ont pas tous le même intérêt, on voudra bien nous le pardonner; tout frappe, tout paraît remarquable dans une circonstance où l'âme est vivement émue.

A une jeune personne nommée Rose.

Tes yeux annoncent de l'esprit,
Rose, et ta bouche tient parole.
Chez toi la volupté sourit,
Mais la décence la contrôle.
Ton œil dit oui, ta bouche non ;
Sois donc d'accord avec toi-même,
Et fait mieux honneur à ton nom.
Flatter et piquer ce qu'on aime
Tient de la rose et du chardon.

Quatrain sur Dorat.

Il eut des mots, des riens charinans,
Il fut léger, doux, presque tendre;
Je crains seulement dans vingt ans
Qu'on ait de la peine à l'entendre,

On a donné au Théâtre français, le vendredi 24 avril, la première représentation de la Fausse Apparence, comédie en trois actes, en vers, par M. Imbert, l'auteur du Jugement de Páris, du Jaloux sans amour, etc.

La Fausse Apparence, comme la plupart de nos pièces modernes, n'offre qu'un fonds trèsléger, et ne se soutient que par des détails plus

ou moins heureux.

Ce joli ouvrage, écrit d'ailleurs d'un style brillant et facile, a été parfaitement bien joué : le rôle du mari jaloux par Molé, celui de l'amoureux par Fleuri; le rôle de la femme, avec beaucoup d'intérêt, par madame Petit-Vanhove, celui de la sœur par mademoiselle Contat avec infiniment d'esprit et de grâces.

On vient de donner enfin ees jours passés, au Théâtre de Monsieur, une comédie française qui a réussi, le Conseil imprudent; c'est une imitation de la pièce de M. Goldoni, intitulée Un Curioso Accidente. Le sieur Paillardelle, qui l'a traduite y joue le principal rôle et le joue avec une grande vérité. Cet acteur a un organe assez ingrat, peu

de maintien, même une sorte de disgrâce; mais il est impossible d'entendre mieux la scène et de faire oublier plus parfaitement l'acteur pour ne laisser voir que le personnage dans tous les momens et dans toutes les nuances de l'action.

Nous nous sommes empressés de vous annoncer le Voyage d'Anacharsis au moment où l'ouvrage a paru; nous avons mis moins d'empressement à vous rendre compte de la sensation qu'il avait faite et du jugement que nous avions osé en porter. Aujourd'hui que l'opinion qu'on peut avoir du mérite de cet ouvrage paraît plus généralement arrêtée, nous nous permettrons d'en parler avec plus de confiance. Peu de livres avaient joui, même avant d'être publiés, d'une aussi grande faveur ; la répulation de l'auteur, l'estime personnelle qu'il a méritée à plus d'un titre, l'attente où l'on était depuis long-temps d'un travail qui avait occupé pour ainsi dire sa vie entière, tout justifiait une prévention si favorable; aussi la première édition du livre a-t-elle été enlevée en moins de deux mois. C'est en effet un des plus riches monumens qu'on ait encore élevés à la gloire du peuple le plus intéressant de l'univers; il n'existe, je crois, en aucune langue, rien de si exact, rien de si complet sur les arts, les sciences, la religion, la politique, les usages et les mœurs de la Grèce, et dans notre langue, il est au moins peu d'ouvrages dont le style soit d'une correction aussi pure, d'une élégance aussi continue. Que lui manque-t-il donc ?

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