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inscrit Joannes parmi les écrivains ecclésiastiques.

Mais il ne faut pas croire que saint Chrysostome resta longtemps fidèle aux promesses faites à sa mère; car on le trouve dès l'an 374, et pendant quatre ans (1), dans les montagnes du territoire d'Antioche, associé aux austérités d'un Syrien. Puis pendant deux ans, dans l'isolement complet d'un ermitage, il mortifia tellement sa chair que ses membres en devinrent presque paralysés, et qu'il en conserva toute sa vie un corps décharné et une figure empreinte d'une pâleur ascétique, ainsi qu'il l'avoue lui-même. Il paraît que sa mère, dont il ne parle plus dans ses nombreux écrits, mourut dans les premières années de l'acte qui l'attacha à l'église comme lecteur, vers 371. - Il fut obligé de revenir à Antioche, et pendant cinq ans encore Mélèce suspendit sa promotion au diaconat. Ce ne fut qu'après la mort de ce prélat (en 381), et six ans après (an 386), qu'il fut ordonné prêtre par Flavien. Il avait alors atteint sa trente-huitième année, âge qu'il appelle extréme jeunesse (2). Mais on sait que le mot véos comprenait jusqu'à l'âge de trente-cinq ans environ. N'étant que diacre (en 382), il rédigeait les écrits qui l'ont rendu immortel. Il écrivit (vers 380) sa célèbre exhortation à Stagire, qui ayant, comme lui, passé des années dans la solitude de l'ascétisme, en avait presque perdu la raison (3). Il lui donne, d'après son expérience, le conseil de se guérir par de bonnes œuvres. C'est la contre-partie des trois livres qu'il avait écrits contre les détracteurs de la vie monastique (vers l'an 375). Un de ses amis du barreau, Théodore, l'avait quitté pour se livrer à des exercices ascétiques, mais depuis il était revenu dans le monde. Il n'avait guère que vingt ans, et il y était retenu par l'amour d'une jeune fille qu'il voulait épouser. Saint Chrysostome lui écrivit deux longues lettres sur sa chute, et parvint, dit-on, à le convertir, au point que Théodore devint évêque de Mop sueste. Mais Tillemont pense qu'il s'agit d'un autre personnage. Quoi qu'il en soit, si ces écrits datent de 368 et de 369, ils seraient l'œuvre de saint Chrysostome encore bien jeune, et son preInier ouvrage (4). N'y a-t-il pas aussi quelque excès de zèle dans ses écrits sur la virginité? En employant toute son éloquence à persuader aux veuves de ne pas se remarier (5), il aidait à la dépopulation de l'empire, qui comptait déjà autant de célibataires que de personnes mariées. Toutefois, on doit reconnaître que c'est en opposant à la corruption des mœurs romaines l'exaltation, même exagérée, de la virginité, que le christianisme rendit service à la société.

(1) V. Palladius, p 19. t. XIII.

(2) Cela résulte de la combinaison des phases de sa vie indiquées avec précision par son premier biographe, Palladius (p. 19, ibid.).

(3) Tom. Ier, p. 189-278.

(4) Tom. Ier, p. 151.

(3) Tom. Ier, p. 328-489.

De son temps, bien des personnes, en rendant hommage aux vertus de Jésus-Christ, ne le considéraient encore que comme un homme inspiré, comme un sage. C'était une grande victoire que de les convertir à sa divinité, et c'est à quoi saint Chrysostome travailla par un grand nombre d'écrits. Il commença à se livrer à la prédication orale, dans laquelle il obtint tant de succès. Vers la fin de l'année 387, les Antiochiens, écrasés d'impôts par Théodose, firent, par l'entremise de leurs magistrats, des remontrances sur l'impuissance où ils étaient de les acquitter. Mais la populace, au lieu d'attendre les résultats de cette démarche, se révolta, et brisa les statues de l'empereur et de sa femme Pulchérie. Théodose, affermi par dix ans de règne, était un maître sévère et absolu. Il l'avait prouvé par la vengeance qu'il tira dans une circonstance semblable de Thessalonique. L'émeute fut comprimée, et on s'attendait à de sanglantes exécutions. Le patriarche Flavien, qui gouvernait le diocèse, se détermina, malgré son grand âge, à se rendre à Constantinople pour implorer la clémence du puissant empereur. On croit généralement qu'en rapportant le discours touchant et courageux adressé par ce vénérable vieillard à Théodose, saint Chrysostome l'a paré de sa propre éloquence (1). Pendant les anxiétés de la mission de son évêque, il ne cessa de monter en chaire, pour rendre compte à cette immense population des progrès de la négociation. Ses nombreux discours ont été conservés, et lui font un éternel honneur. Quelle fut la joie de la cité d'Antioche lorsqu'elle reçut par sa bouche la nouvelle du pardon! Rien ne peut rendre l'élan de la reconnaissance publique. Le crédit de l'éloquent prêtre devint immense. Il était l'oracle des pays orientaux et l'arbitre des fréquents con flits qui s'élevaient entre les évêques des divers siéges. Quand sa voix était couverte d'applaudissements, il employait l'émotion qu'il avait produite, à la conversion des infidèles et des indifférents, surtout à l'amendement des riches, auxquels il reprochait le luxe de leurs esclaves, de leurs vêtements et de leurs voitures; et il les conjurait de les convertir en aumônes pour les pauvres, en secours pour les malheureux. La charité est pour ainsi dire son thème perpétuel, et on s'étonne de son inépuisable fécondité dans les moyens d'amener ce sujet. Mais c'est aussi à cette époque qu'il encourut la haine de Théophile, archevêque d'Alexandrie.

En 397 le siége de Constantinople devint vacant; c'était le premier de l'empire, car la puissance romaine allait périr en Occident, et la primauté du siége de Rome devenait nominale. Ce ne fut pas par élection que saint Chrysostome fut appelé à cette haute dignité, mais par la volonté de l'empereur Arcadius et d'Eutrope, son ministre. Comme on craignait son

(1) Tom. II, p. 255-262.

refus et l'opposition d'Antioche, le comte de l'Orient l'attira hors de la ville sous un prétexte pieux, pour le conduire à Constantinople.

Théophile, patriarche d'Alexandrie, son compétiteur, y avait été mandé pour le sacrer. Les intrigues qu'il avait ourdies contre saint Chrysostome furent découvertes, et il n'eut que le choix de présider à la cérémonie ou de subir un procès criminel. Saint Chrysostome, monté sur ce siége éminent et dangereux (398), usa de la même liberté de langage qu'à Antioche; il fit aux riches et aux grands de la cour, ses auditeurs, les mêmes exhortations, et opéra lui-même de grandes réformes dans son Église pour assister les pauvres. Il acquit par ses vertus une immense popularité. Eutrope, le premier ministre, étant tombé en disgrâce, et menacé de mort, trouva la vie dans l'asile où saint Chrysostome le recueillit et put le protéger contre un mouvement populaire. Le pontife saisit cette occasion de révendiquer le privilége de l'asile dans les églises qu'Eutrope avait lui-même conseillé à l'empereur de restreindre par une loi de l'an 398 (1). C'est dans le discours qu'il prononça à cette occasion, dans sa cathédrale, que se révèle la puissance de l'éloquence de saint Chrysostome et l'élévation de sa pensée. Le droit d'asile était un abus grave, puisqu'il avait pour résultat d'assurer l'impunité des coupables. Mais dans la circonstance, et vu l'arbitraire qui régnait alors dans la justice impériale, et d'après le déchaînement des passions populaires, le saint archevêque faisait acte d'humanité et d'équité en sauvant l'ancien favori. Il fit un tableau pathétique du changement subit d'une si grande fortune, et sut attirer la commisération publique sur la tête de celui qui avait abusé de la confiance du faible Arcadius et en était alors lâchement abandonné, à cause des menaces d'un prince goth, Gaïnas. Saint Chrysos. tome interpella Eutrope lui-même sur ses actes passés, et ne dissimula pas que pour le protéger il oubliait l'injure faite à l'Église et bravait les ordres de l'empereur. Cette homélie, remarquable par sa brièveté, est un des ouvrages les plus sublimes de saint Chrysostome, et probablement il n'a pas été sans influence sur le rapport fait en 431 (2) de la loi de 398 relative à la limitation du droit d'asile.

Saint Chrysostome eut aussi la puissance de soustraire deux généraux de l'empire à la vengeance de Gaïnas, qui à cette époque faisait trembler Arcadius et attaquait l'indépendance de l'empire. Au moment où le sort de cet empire était livré au hasard des armes, saint Chrysostome se rendit auprès de Gaïnas, converti au christianisme, et parvint à le désarmer. Mais lorsque l'ambition de ce barbare l'entraîna à re'commencer les hostilités, il le fit expulser de Constantinople, et en fut ainsi le sauveur.

(1) Code Théod., IX, 45, liv. 3.

(2) Loi de Théodose II et de Valentinien, Code Théodos et Code Justinien

Malgré ces importants services, les réforines que saint Chrysostome avait introduites dans son clergé, la répression du luxe, sur laquelle il insistait avec plus d'autorité que jamais, et les grandes aumônes qu'il faisait avec les revenus de l'Église, avaient donné aux intrigues ecclésiastiques une nouvelle vivacité. Une coalition s'était formée pour le perdre : Théophile, d'Alexandrie, avait pris des mesures de rigueur contre des membres de son clergé qu'il accusait d'origenisme; plus de cinquante de ces ecclésiastiques étaient venus à Constantinople, et avaient été admis dans la communion du bienveillant archevêque, qui écrivit à Théophile en leur faveur. Celui-ci, loin de les recevoir à merci, suscita contre saint Chrysostome, Épiphane, évêque en Chypre, auteur du livre célèbre Contre les hérésies, et le zèle de Jérôme, qui répandit ses insinuations dans l'Église de Rome. Saint Augustin est resté, ainsi que l'Église d'Afrique, étranger à cette malheureuse polémique. Épiphane s'était rendu à Constantinople pour forcer saint Chrysostome à condamner Origène. Celui-ci s'y était refusé, à cause des services immenses rendus à l'Église par Origène, dont les écrits n'étaient encore censurés par aucun concile. Epiphane avait par suite refusé de recevoir l'hospitalité que lui offrit l'archevêque de Constantinople, et s'était retiré, outré de son insuccès. Il mourut dans la traversée. On accusait saint Chrysostome de sa mort, ou au moins d'un défaut de déférence pour un si grand personnage (1). Cependant l'impératrice Eudoxie, fatiguée des censures indirectes que faisait saint Chrysostorne de son luxe et de son avidité, se réunit à ses ennemis. Par ordre du faible Arcadius, Théophile et un synode nombreux furent convoqués à Constantinople pour demander compte à sain! Chrysostome de sa conduite. A son arrivée, l'archevêque d'Alexandrie refusa de communiquer avec lui. Le synode se réunit dans le faubourg Drys (du Chêne), sous sa présidence. Saint Chrysostome y fut mandé; il promit d'y comparaître si Théophile, son ennemi personnel, et trois autres évêques, qu'il récusa pour la même cause, se retiraient. Le synode rejeta la récusation; Photius nous a conservé l'analyse de cet important document (2). Le synode était composé de quarantecinq évêques (2).

On y admit douze chefs d'accusation sur vingtneuf que Jean, son diacre, et sur dix-huit autres qu'Isaac, un autre de ses prêtres, avaient formulés contre lui. On l'accusait de s'enfermer avec des femmes, après avoir congédié tout le monde; de manger seul et avec l'intempérance d'un cyclope, pour se soustraire à l'hospitalité; d'outrager, de faire frapper et de frapper luimême les membres de son clergé, et d'écrire contre eux; d'avoir vendu et dissipé les riches

(1) Palladius, et autres.

(2) T. XIII, p. 325-328.

(3) Selon Palladius, il n'étalt que de 36,

ses de son église et les dons qui étaient destinés à sa décoration; d'avoir commis plusieurs actes arbitraires et impies; on allait jusqu'à lui reprocher sa tenue dans l'église. On y ajoutait des infractions prétendues aux lois canoniques et son refus de communier avec saint Épiphane, avec Acace et avec d'autres évêques respectables; on l'accusait d'exciter le peuple à la sédition; d'être favorable aux païens, qu'il recevait trop facilement au baptême; et enfin d'être origéniste.

Photius dit que ses juges étaient accusateurs et témoins. Saint Chrysostome a cherché à se disculper (1) dans ses écrits d'un commerce clandestin avec les femmes, en disant que le délabrement de son corps prouvait à quel point on le calomniait.

Photius rapporte seulement l'admission de quatre de ces griefs, notamment de celui d'origénisme. Son défaut d'hospitalité s'explique par sa mauvaise santé, et se trouve d'ailleurs contredit par sa sobriété. On ne voulut pas aller plus loin, et on le condamna à être déposé de son siége. Cette sentence fut approuvée par le faible Arcadius, et notifiée au clergé de Constantinople par le synode, qui ne manqua pas de l'aggraver par une accusation au moins indirecte de lèsemajesté, en disant qu'il avait désigné l'impératrice Eudoxie sous le nom de Jésabel. Arcade, l'un de ses prêtres, qui avait porté témoignage contre lui, fut élu et installé à sa place. Ce vicitlard octogénaire, malgré son intrusion, a été mis au nombre des saints dans l'Église grecque, après avoir gouverné le siége un an à peine.

Saint Chrysostome était très-populaire; pendant qu'on le jugeait, il prononçait tranquillement, dans son église, ces admirables homélies qui faisaient tant de conversions, et il enseignait au peuple à contenir son indignation et à se confier à la justice divine. — On jugea prudent de l'enlever la nuit de son palais, et de le conduire en exil à Prinetos, dans le golfe de Nicomédie. Le peuple à cette nouvelle se souleva; un tremblement de terre survint, agita le palais, et effraya l'impératrice Eudoxie, qui demanda deux jours après son rappel à Arcadius. Elle écrivit au saint archevêque qu'elle était étrangère à sa disgrâce. Il rentra dans le port de Constantinople au milieu des acclamations universelles. Il voulait qu'auparavant la sentence fût rapportée; mais il céda à l'enthousiasme, et vint à Sainte-Sophie remercier Dieu du retour de la justice impériale; il exhorta le peuple à rester dans le calme (2). Théophile et son parti voulurent résister; mais, craignant pour sa vie, celui-ci s'embarqua pour Alexandrie, et ses adhérents se dispersèrent.

-

Dès le mois de décembre de la même année, saint Chrysostome s'éleva dans son église contre

(1) V. sa lettre à Cyriaqne, III, p. 669-699.

(2) On a cette brève homélie, tom. III, 424, qui fut suivle blentôt de celle sur la Chananéenne (ILL, 432).

les excès qui furent la suite de l'érection d'une statue d'argent et des jeux en l'honneur de l'impératrice, trop voisins du temple. Sa harangue fut véhémente, et ses ennemis y relevèrent une nou velle allusion injurieuse pour l'impératrice, qu'il aurait, dit-on, désignée sous le nom d'Hérodiade (1). L'historien Socrate le blâme de son défaut de circonspection (2). Eudoxie, irritée, sollicita de nouveau l'empereur de convoquer les évêques pour le juger. Arcadius suspendit même toute communication avec lui. Il y eut un grand concours d'évêques à Constantinople; quarantedeux s'étaient prononcés pour saint Chrysostome, mais ses adversaires étaient plus nombreux. L'accusé se présenta devant le synode, et fit baisser les yeux à ses accusateurs; mais le concile confirma (mars 404) la sentence de déposition, comme ayant acquis l'autorité de chose jugée. Saint Chrysostome, fort de sa popularité et du parti qui le soutenait, résista d'abord; mais le 16 avril les soldats se livrèrent à des violences même dans l'église, et massacrèrent jusqu'à des femmes. Son parti se dispersa, et saint Chrysostome rendit compte au pontife de Rome (Innocent Ier) de la violence dont il était la victime, en réclamant son appui. Mais la papauté n'avait pas alors le pouvoir qu'elle a exercé depuis; et Innocent ne put qu'intercéder pour lui auprès de l'empereur Honorius. Il convoqua cependant un concile général à Thessalonique; mais (le'20 juin) saint Chrysostome fut enlevé de son siége par la force armée, conduit à Nicée, et de là à Césarée de Cappadoce, dont l'évêque, autrefois son ami, le repoussa. Cependant de grands troubles survinrent à Constantinople; le peuple, ne voulant pas recevoir Arsace, son successeur, mit le fen à l'église de Sainte-Sophie, ce qui donna lieu à l'arrestation de beaucoup d'évêques partisans de l'exilé. Dans le cours de son voyage, et malgré la faiblesse résultant d'une vieillesse anticipée, saint Chrysostome leur adressa des lettres de consolation; il entretint la correspondance la plus active avec le pontife Innocent et la plupart des évêques de l'Orient; on en possède une partie. Sa résidence avait été fixée à Cucuse (Cocussos, aujourd'hui Gogsyn), dans le Taurus, pays rude, où il tomba grièvement malade; il fut obligé, par les incursions des montagnards Isauriens, de se réfugier un peu plus loin, au fort d'Arabissus (Zantschin). L'empereur Honorius avait écrit en sa faveur, mais vainement, à son frère Arcadius. Quoique l'impératrice Eudoxie, que saint Chrysostome avait offensée, fût morte en couches, il ne put rentrer en grâce. Au contraire, sa popularité, croissant en raison de ses vertus et du zèle avec lequel il continuait ses travaux apostoliques, le rendit encore plus odieux à la cour

Un ordre vint de Constantinople pour le transférer à Pityonte, petite ville de la côte d'Abasie, sous le mont Caucase, dans le Pont-Euxin, (1) Homélle VIII, 1, (2) VI, 18.

l'hérésie (1), et en ajoutant, d'après la parole du Christ, qu'il ne faut persécuter personne, et que tuer l'hérétique serait exciter la guerre dans le monde entier (2). Aussi a-t-il encouru devant le synode l'accusation de s'être montré trop tolerant pour les Hellènes (paiens). Le motif le plus plausible de sa déposition et de la persécution de trois années dont il devint la victime repose principalement sur son refus de condamner la mémoire d'Origène.

Ses œuvres sont considérables en nombre; elles ont été publiées plusieurs fois complétement: H. Savile, Eton, 1612, 8 vol. in-fol.; Fronton-du-Duc, 12 vol. in-fol., 1614-1621-1624 et 1633; Montfaucon et les bénédictins, 13 vol. in-fol., 1718-1738, édition réimprimée à Venise en 1753. MM. Dübner et Th. Fix, d'après Montfaucon et les inédits, 13 vol. in-4°, 18341840, avec une table des matières, très-prolixe, mais incomplète en ce qui concerne les noms propres. — M. Fr. Dübner travaille à une édition définitive des œuvres historiques et des chefs d'œuvre oratoires pour la bibliothèque grecque de MM. Didot (sous presse, in-8°, 1854, en 2 vol.). Ses œuvres ont été traduites partiellement dans presque toutes les langues. Voyez l'édition des Euvres choisies par Ath. Auger, 1785, 4 vol. in-8°; par Guillon, évêque de Maroc, Bibl. des Pères de l'Église, in-8°, 1835, et suiv., vol. X à XIX. Voyez aussi la magnifique apologie de M. Villemain, avec la traduction des passages les plus intéressants, dans son livre Sur l'éloquence chrétienne au quatrième siècle, 2o éd., 1849, in-8°, p. 154-217. Les travaux critiques sur ce Père de l'Église sont innombrables.

pays entièrement inhospitalier. Pour l'y con-, qu'il ne fallait pas poursuivre l'hérétique, mais duire, il fallait traverser presque toute la péninsule de l'Asie Mineure. On eut l'inhumanité de lui faire parcourir cette route à pied, au milieu des chaleurs de l'été, la tête nue et chauve, sous la garde d'une escorte de soldats, qui n'avaient aucun ménagement pour la faiblesse d'un vieillard épuisé de travaux et ruiné par de fréquentes maladies. A l'approche de Comana du Pont, il se trouva dans l'impuissance de poursuivre sa route, et demanda, comme dernière faveur, de retourner à l'étape du matin, où se trouvait la chapelle de Saint-Basilisque, afin qu'il pút y réciter ses prières. Là, il se revêtit de vêtements blancs, en signe du voyage qu'il allait faire dans un autre monde, et il mourut sur le tombeau du saint, à peine sexagénaire. La nouvelle de son martyre se répandit rapidement dans les contrées d'alentour, et tous ceux auxquels la foi chrétienne était chère accoururent à ses funérailles. Ses cendres furent tranférées à Constantinople en 438 (1); mais dès l'an 414, sur les pressantes sollicitations du sage pontife Innocent Ier, saint Chrysostome fut porté sur la liste des saints, même à Constantinople, où Atticus, qui était devenu archevêque, revint sur le témoignage qu'i) avait porté contre son illustre prédécesseur en 404. Théodose II vint prier sur ses cendres, et deman→ der au saint martyr pour les auteurs de ses jours, Arcadius et Eudoxie, le pardon de leurs persécutions (2). Saint Chrysostome était de petite taille, et il avait le corps décharné; mais le feu de son génie éclatait dans ses yeux : son éloquence était vive et abondante. Ses amis, cependant, lui ont reproché trop de prolixité, surtout dans ses prologues. Il s'en est excusé, dans un de ses ouvrages, par la nécessité de l'improvisation et du grand nombre d'auditeurs illettrés auxquels il s'adressait. Sous le rapport littéraire et historique, il est utile qu'un choix de ses œuvres soit fait, pour ménager sa réputation d'écrivain éloquent et pour éviter de nombreuses répétitions. Il est incontestable qu'il était emporté et violent de caractère, et que la liberté de ses apostrophes n'aurait pas été tolérée dans une bouche moins éloquente et dans des fonctions moins sacrées. Saint Chrysostome rencontra du reste dans Sisinnius, évêque des novatiens, à Constantinople, un antagoniste éloquent et savant, qui, maître de lui-même dans la discussion, parvint-sur la question de la fête de Pâques à tenir en échec le pouvoir de saint Chrysostome et composa un ouvrage contre lui. Un historien ecclésiastique presque contemporain atteste ce fait singulier (3).

Du reste, saint Chrysostome était beaucoup plus tolérant que sa véhémence et le nombre de ses écrits polémiques le feraient supposer; car il a reconnu la liberté de conscience, en professant

(1) Palladius, Socrate.

(2) Théodoret.

(3) Socrate, 22.

Analyse des principaux ouvrages de saint Chrysostome: Tome 1er de l'édition des bénédictins. Exhortation à Théodore, son amf, qui, après avoir embrassé la vie solitaire, était rentré dans le monde, et que par ce motif il appelle tombé. Divisé en deux parties, l'ouvrage renferme l'histoire de plusieurs jeunes hommes, opulents comme Théodore, qui après avoir abandonné momentanément la vie du désert, y étaient revenus, après avoir ressenti la satiété et le remords des voluptés illicites. Tel n'était peut-être pas le cas de son ami, qui recherchait dans le mariage une position honorable; car on dit qu'il ne céda pas aux prières de saint Chrysos‣ tome. Il est suivi de trois opuscules sur la préférence due à la vie monastique, au point de vue du salut des âmes; d'un écrit dans lequel il compare un moine à un monarque; et de deux livres à Stéléchius, sur la componction, ou religion du cœur. Mais l'ouvrage capital sur cette matière est celui, en trois parties, qu'il écrivit à Stagire, auquel l'ascétisme avait donné des hallucinations. Pour le guérir de cette maladie, saint Chrysostome lui conseille une vie active. Cinq écrits sont relatifs aux mœurs des femmes et à la virginité. Le premier a pour but de flétrir un état qui n'était ni le mariage ni la virginité: c'était l'usage de recevoir dans sa maison des vierges, dont on prétendait respecter la vertu; le second, d'interdire aux (1) Tom. II, p. 841. (2) Tom. VII, p. 542.

chrétiens de donner asile aux femmes qui avaient fait des vœux; le troisième exalte la virginité, et la place bien au-dessus du mariage; le quatrième recommande aux jeunes veuves de rester dans cet état, et leur donne sa mère pour modèle; et le cinquième prescrit d'éviter les secondes noces. L'œuvre capitale de ce volume est le traité du Sacerdoce épiscopal, en six livres, dans lequel on lit le touchant épisode des efforts faits par la mère de saint Chrysostome pour le détourner de se retirer du monde. Vient ensuite sa première homélie, pour l'inauguration de sa promotion à l'état de prêtrise. On y remarque encore, parmi de nombreux traités théologiques, une homélie sur saint Philogonius, qui d'avocat était devenu évêque; sur le tremblement de terre d'Antioche de l'an 386; sur les trop fréquents anathèmes portés contre les vivants et les morts, et sur les divisions existant à Antioche entre les évêques nommés par les orthodoxes et par les ariens; sur la célébration des calendes de janvier, ou étrennes du jour de l'an, adoptée par les païens et les chrétiens. Ce volume est terminé par d'assez nombreux écrits apocryphes attribués à saint Chrysostome, et notamment par une prétendue réponse de Théodore le Tombé à son antagoniste.

Tom. II. Il renferme les écrits relatifs à l'émeute d'Antioche dans laquelle on renversa les statues de Théodose et de l'impératrice, à la désolation qui s'empara de la population quand elle se rendit compte des dangers que lui faisait courir la colère de l'empereur; aux premiers actes de répression; à la résolution généreuse que prit l'archevêque Flavien, malgré son grand âge et ses infirmités, d'aller à Constantinople implorer la clémence du souverain; aux incidents du voyage; au discours que le prélat adressa à Théodose et au résultat heureux de cette démarche ; à la joie que ressentit la population nombreuse d'Antioche de l'obtention de son pardon ; à la reconnaissance qu'elle en témoigna à saint Chrysostome, son consolateur pendant les jours de crise; aux mesures de répression auxquelles l'empereur se restreignit vis-à-vis de quelques coupables, et aux priviléges perdus par la cité rebelle; aux leçons que le saint prêtre en tira pour l'amendement des chrétiens. Nous citerons particulièrement les homélies 2, 3, 6, 11, 14, 17, et surtout la 24, contenant le discours à l'empereur, composé par saint Chrysostome. Ce volume contient encore, p. 447-432, un discours sur l'époque précise de la naissance de Jésus-Christ, qu'on croyait avoir été récemment découverte, et qu'on voulait fixer définitivement; plusieurs homélies sur les actes de la vie de saint Paul, le plus lettré et peut-être le plus grand des apôtres, notamment la quatrième; l'homélie sur Mélétius, archevêque d'Antioche, le premier bienfaiteur de saint Chrysostome; les deux sermons sur saint Babylas, qui contiennent des accusations exagérées contre l'empereur Julien, et l'apologie de l'incendie du temple paien de Daphné, dont Libanius avait déploré la perte. On y trouve, enfin, une homélie sur un nouveau tremblement de terre éprouvé par Antioche, un grand nombre d'éloges de martyrs, des dissertations bibliques, et d'autres ouvrages théologiques.

Tom. III. La plus grande partie du Ier vol. de ce tome est consacrée aux écrits de saint Chrysostome relatifs à des sujets moraux, religieux et sociaux, tels que le choix d'une épouse, la répudiation, etc.; mais l'éditeur a eu le bon esprit de réunir dans un ordre chronologique les écrits relatifs aux actes de la vie politique de saint Chrysostome, depuis son ar

rivée à Constantinople, et à son double exil, jusqu'à sa mort prématurée. Ils terminent la première partie, et remplissent toute la deuxième, à partir de la p. 434 jusqu'à là p. 904. Cette série importante commence par les deux homélies de l'an 399, au sujet de l'asile accordé à Eutrope. La seconde fut prononcée après qu'Eutrope, qui s'était imprudemment éloigné de cet asile inviolable et avait été pris, eut subi la peine capitale. Cette seconde homélie, bien inférieure à la première, a paru suspecte au savant et consciencieux Tillemont. L'homélie suivante a été prononcée sur les troubles de Constantinople et l'exil des généraux Saturninus et Aurélien, victimes des persécutions de l'usurpateur Gaïnas. L'auteur n'aborde ce sujet qu'avec circonspection, et par allusions. Trois sermons, conservés en latin seulement, sont relatifs au voyage de saint Chrysostome, en Asie, pour apaiser les troubles d'Éphèse, et au différend qui s'éleva entre lui et Sévérien, évêque de Gabales, à cause des intrigues que fit celui-ci à Constantinople pour le supplanter dans son siége et lui faire encourir la disgrâce du souverain. On y trouve ensuite (p. 494-499) l'homélie dans laquelle l'auteur rendit compte au peuple de sa disgrace et de l'exil dont il était menacé (en 403); elle est suivie de deux écrits très-courts, dont un au moins fut prononcé la veille de son départ et dont l'autre est suspect de fabrication. Trois homélies aussi courtes, qui auraient été prononcées au retour de son premier exil, sont ici rapportées. L'homélie sur la Chananéenne, attaquée comme suspecte par Fronton, est défendue comme authentique par Tillemont et par Montfaucon, au moins pour la majeure partie, à cause des détails qu'elle renferme sur son premier exil. Quatre pièces de l'an 404 et de l'an 405 figurent ensuite dans ce recueil; c'est 4° la lettre par laquelle saint Chrysostome informa Innocent, pontife de Rome, des circonstances de son deuxième exil; 2o la réponse, courte mais sympathique, du saint pontife; 3° sa lettre au clergé de Constantinople pour la réunion d'un concile; 4° la lettre de l'empereur d'Occident Honorius à son frère Arcadius, contre cet acte odieux de persécution. Une cinquième lettre au nom de saint Chrysostome, est adressée aux pretres arrêtés pour sa cause en 404. Enfin, on y trouve une deuxième lettre écrite par saint Chrysostome au pontife de Rome, du lieu de son exil et sur ses misères, en 406. Le volume se termine par le. texte de 242 lettres écrites pendant le cours de cet exil et par quelques autres, postérieurement découvertes, et qui complètent le récit du martyre du grand et saint prélat, qui dans cette terrible épreuve, et malgré l'épuisement de ses forces, ne cessa d'édifier le monde chrétien par ses vertus apostoliques, et fit rougir ses ennemis les plus acharnés.

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Tom. V. Commentaires sur les Psaumes; c'est un ouvrage écrit avant son épiscopat, et dont il nous reste à peine le cinquième.

Tom. VI. Commentaires sur Isafe, Jérémie, Daniel, et sur les obscurités des prophéties, avec sept écrits de Sévérien sur la création du monde et le serpent du jardin d'Eden.

Tom. VII et VIII. Commentaires sur l'Évangile de saint Matthieu et sur l'Évangile de saint Jean. Tom. IX. 55 homélies sur les Actes des Apôtres, et 32 sur l'Epitre de saint Paul aux Romains. Tom. X, XI, XII. Homélies sur les autres

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