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taine revenant à lui comme d'un rêve interrompu : 1664-1667 <«< De quoi riez-vous donc? » demanda-t-il. « Com- Æt. 43-46 >>ment, lui dit Despréaux, je m'épuise à vous

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injurier fort haut, et vous ne m'entendez point,

quoique je sois si près de vous, que je vous touche; » et vous êtes surpris qu'un acteur sur le théâtre » n'entende point un à parte, qu'un autre acteur » dit à côté de lui 39 ? »>

que

que

La Fontaine

Bouillon.

Cependant on a étrangement exagéré ces distrac-Amerdute de tions et ces rêveries de La Fontaine, et on a cru à et de Mad. de tort d'après une anecdote mal interprétée, qu'elles le plongeoient dans une sorte d'insensibilité physique. La duchesse de Bouillon, allant à Versailles, rencontra le matin La Fontaine, qui rêvoit seul sous un arbre du Cours, et le soir, en revenant, elle le trouva dans le même endroit et dans la même attitude, quoiqu'il eût plu toute la journée. Ce fait prouve seulement La Fontaine aimoit mieux travailler en plein air dans l'enceinte d'une chambre, et qu'il préféroit se mettre à couvert sous un dais de verdure plutôt que sous un toit sombre et triste. Nul ne croira certainement qu'il n'avoit pas changé de position depuis la première fois que la duchesse l'avoit rencontré. Il s'étoit bien trouvé le matin dans ce lieu solitaire, et il y étoit retourné le soir. En effet tous les endroits lui étoient bons pour travailler; il n'eut jamais de ca- plein air. binet particulier, ni de bibliothèque : mais il se plaisoit davantage dans la solitude des champs; et il nous apprend qu'il aimoit surtout les frais ombrages, les

verts tapis des prés, et le doux bruit des ruisseaux 4o.

La Fontaine aimoit à travailler en

1664-1667

La Fontaine

Thierry.

La Fontaine alloit tous les ans en automne à

Et. 43-46 Château-Thierry, pour l'arrangement ou plutôt le dérangement de ses affaires : ses dépenses excédoient Voyages de Chateau ses revenus; il établissoit la balance en vendant régulièrement une portion de son patrimoine. Alors les réunions des cinq amis se trouvoient interrompues, parce que La Fontaine emmenoit avec lui Boileau et Racine. Molière étoit trop occupé pour céder à ses instances; et Chapelle, qui d'ailleurs quittoit difficilement la capitale, eût été, par les habitudes qu'il avoit contractées, un compagnon de voyage fort incommode. C'est à Château-Thierry que Boileau conçut l'idée de sa satire sur le festin, et qu'il trouva une partie des originaux qu'il a mis en scène, entre autres celui qui dit,

Siatuts des

réunions de

Ja

Vienx - Co

lombier.

Ma foi, le jugement sert bien dans la lecture;
A mon gré, le Corneille est joli quelquefois.

A leur retour de Château-Thierry, les réunions 1 rue du de la rue du Vieux-Colombier recommençoient plus fréquentes qu'auparavant, et parmi les plaisanteries qui égayoient les repas, une des plus bouffonnes, sans contredit, étoit d'avoir toujours ouvert sur une table le poëme de la Pucelle de Chapelain, pour servir à celui qui avoit commis quelques fautes dignes de punition. Selon les statuts de la société, celui qui s'étoit rendu coupable d'une faute grave devoit lire vingt vers de ce poëme ; l'arrêt qui condamnoit à lire la page entière étoit assimilé à un arrêt de mort. Ces vrais amis ne se contentoient pas de se faire respectivement sur leurs ouvrages de salutaires cri

Anecdote de

Boileau et de
Chapelle.

tiques, ils cherchoient aussi à se corriger mutuelle- 1664-1667 ment des défauts qu'ils observoient en eux; mais t. 43-46 cela étoit plus difficile. Tous faisoient de continuelles réprimandes à Chapelle, sur sa passion pour le vin. Boileau, le rencontrant un jour dans la rue, lui en voulut parler. <«<Vous avez raison, dit Chapelle, je me corrigerai; mais entrons ici, nous en causerons plus à notre aise. » Ils entrèrent tous deux dans un cabaret, et Chapelle demanda une bouteille qui fut bientôt suivie d'une autre, puis celle-ci, d'une troisième; Chapelle, écoutant avec attention et d'un air repentant, remplissoit le verre de Boileau, qui, s'animant dans son discours, buvoit toujours sans s'en apercevoir, jusqu'à ce qu'enfin le prédicateur et le nouveau converti s'enivrèrent 3. Depuis lors, Boileau se promit de renoncer à corriger Chapelle de son inclination pour le vin. De même les quatre On veut réamis échouèrent contre l'invincible antipathie de Fontaine avec La Fontaine, lorsqu'ils entreprirent de le racommoder avec sa femme. Mme de La Fontaine, qui se trouvoit alors à Paris, avec son mari, mécontente de lui, l'avoit quitté, et s'étoit retirée à ChâteauThierry. On fit comprendre à La Fontaine que cette séparation ne lui faisoit point honneur, et on l'engagea à faire un voyage à Château-Thierry, pour se réconcilier avec sa femme. Boileau et Racine lui firent tant d'instances, qu'il se fit violence, et partit dans la voiture publique, Arrivé chez sa femme, il trouva une domestique qui ne le connoissoit pas, et qui lui dit que Madame étoit au Salut. La Fontaine,

concilier La

sa femme.

1664-1667 se rendit alors chez un de ses amis qui lui donna à At. 43-46 souper et à coucher, et le garda pendant deux jours.

Soit que, durant cet intervalle de temps, il y ait eu par des personnes intermédiaires des explications qui aigrirent encore davantage les deux conjoints l'un contre l'autre, soit qu'enfin La Fontaine, n'étant plus poussé par les instances et les conseils de ses amis, ne pût vaincre la répugnance que lui causoit cette réconciliation, il retourna à Paris par la voiture publique, sans avoir vu sa femme. Quand ses amis le revirent et lui demandèrent s'il étoit réconcilié avec elle, La Fon- honteux, confus, et voulant, pour s'épargner les rede Chateau- montrances, taire la raison de son retour, il leur dit:

taine revient

Thierry, sans

l'avoir vue.

J'ai été pour la voir, mais je ne l'ai pas trouvée ; elle étoit au Salut.» Comme les enfants qui craignent de déplaire en laissant entrevoir la vérité, et qui cependant ne peuvent la dissimuler, de même La Fontaine aimoit mieux faire une réponse quelconque que d'entrer en explication sur un sujet qui lui déplaisoit ; peu lui importoit que cette réponse fût ou ridicule ou absurde, pourvu qu'il échappât à ce qui l'importunoit. Mais il est singulier que ceux qui ont eu à parler de lui, aient attribué à une distraction du bon-homme la résolution d'éviter toute entrevue avec sa femme. Depuis cette époque, il chercha même à oublier entièrement qu'il étoit marié, et les sociétés qu'il fréquentoit n'avoient aucune envie de le lui rappeler.

Cependant, malgré le relâchement de ses mœurs, La Fontaine respecta toujours la religion; il désapprouvoit ceux qui se targuoient de leur impiété. Il

s'abandonnoit sur ce sujet, comme sur beaucoup 1664-1667 d'autres, à son insouciance; mais, lorsque ses idées . 43-46 se reportoient sur cet objet, il étoit plutôt enclin,

Ballade sur

1664.

du moins en théorie, au rigorisme qu'à l'indulgence. Quoiqu'il n'ait pris aucune part aux disputes a religieuses qui alors agitoient la société, et même ébranloient l'Etat, cependant il résuma en quelque sorte toutes les railleries du janséniste Pascal sur les Jésuites dans sa jolie ballade sur Escobar 45.

Racine se

brouille avec

Les réunions bier essent

Les assemblées de la rue du Vieux-Colombier devinrent plus rares, lorsque Racine eut désobligé Moliere. Molière, en retirant de son théâtre sa pièce d'Alexandre, pour la donner à l'hôtel de Bourgogne, et en lui enlevant pour ce dernier théâtre la Du Parc, une de ses meilleures actrices 46. Chapelle d'un autre côté, emporté par le tourbillon du grand monde, ne se prêta plus à ses amis aussi souvent qu'ils l'auroient souhaité. Enfin les réunions cessèrent. La Fontaine resta toujours l'intime ami de Racine et de Molière, mais il fréquenta moins Boileau, dont l'humeur austère et le caractère peu indulgent lui convenoient moins. Quant à Chapelle, dont les excès augmentoient avec les années, La Fontaine cessa de le voir. Le bonhomme s'entendoit trop bien en plaisirs, pour ne pas détester la débauche..

de la rue du Vieux-Colomcessent,

La Fon

avec la du

rière d'Or→

Vers ce temps, La Fontaine paroît avoir été ho- taine est lié noré des bontés de la duchesse douairière d'Orléans, chesse douaiet étoit fort répandu dans la société du Luxem- léaus. bourg. C'est ce que prouvent suffisamment trois petites pièces qu'il publią dans un recueil en 1671,

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