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Fausses m'

1658-1664 ilconçut, au milieu du tourbillon qui l'entraînoit trop. Et. 37-43 rapidement, des plans incohérents, en cas que le premier ministre voulût le mettre en jugement. Il acheta Belle-Isle, fortifia ce lieu, et eut des idées vagues de résistance. Il en parla à quelques uns de ses intimes amis; il rédigea et écrivit même les notes où les rôles étoient distribués. Ces notes trouvées par la suite parmi ses papiers furent fatales à ceux qu'il avoit nommés, et faillirent lui coûter la vie "1.

sures de Fou

quet

Conduite

Enfin, Mazarin mourut, et Fouquet se trouva à l'égard délivré de toutes ses craintes 7. Débarrassé d'un si

de Louis XIV

de Fouquet.

puissant rival, il ne douta point qu'avec un roi âgé de vingt-trois ans, qui aimoit les plaisirs, et qu'on avoit toujours tenu éloigné des affaires, il ne devînt premier ministre : il est certain qu'il en auroit eu en partie la puissance, et qu'il auroit acquis toute la confiance de Louis XIV, s'il avoit su le juger. Le roi, à qui Mazarin, en mourant, avoit surtout conseillé de commencer par mettre l'ordre dans les finances de son royaume, et à qui il avoit spécialement recommandé Colbert, ne demandoit pas mieux cependant que de se servir des grands talents de Fouquet. Par les hommes de mérite dont il avoit su s'entourer, par sa générosité et la grandeur de ses vues, la noblesse et l'élégance de ses manières, le surintendant convenoit à Louis XIV plus que tout autre; aussi fut-il, avec Le Tellier et Lyonne, au nombre des trois ministres qui furent seuls appelés dans le conseil privé. Mais en même temps, le jeune monarque

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fit entendre à Fouquet qu'il n'ignoroit pas les abus 1658-1664 qui avoient eu lieu; il lui dit qu'il vouloit connoître Æt. 37-43 les finances de son royaume, comme la partie la plus importante de son gouvernement, et il l'engagea à lui présenter sans déguisement la situation des choses 73.

Fouquet consulta ses amis, qui lui conseillèrent unanimement de marcher droit avec le roi, et de ne lui rien cacher 74. S'il eût suivi ce conseil, il obtenoit la confiance de Louis XIV, et il s'associoit à la gloire de ce beau règne. Mais il eût fallu pour cela qu'il renonçât à son luxe effréné, à son jeu scandaleux, à ses intrigues avec des femmes de la cour, du rang le plus élevé; aux créatures qu'il se faisoit, par le moyen de quatre millions de pensions, distribuées annuellement; il eût fallu enfin qu'il ne vît que le bien de l'Etat, qu'il se confiât au roi, et qu'il le regardât comme son unique appui. Le surintendant n'eut pas le courage de changer ses habitudes; d'ailleurs, il crut que la volonté qu'avoit manifestée Louis XIV, de gouverner par lui-même, étoit le résultat de l'ardeur première d'un jeune homme qui ignore que l'exercice du pouvoir entraîne après lui plus d'embarras que de douceurs. Il se flatta que le monarque se lasseroit bientôt de captiver, pendant de Fouquet. plusieurs heures de la journée, son attention sur des matières aussi sèches et aussi arides que celles des finances, et il crut qu'après que ce premier feu seroit calmé, Louis XIV reprendroit le train de vie qu'il menoit du temps de Mazarin : il osa donc lui présenter des états inexacts; Louis XIV les com

Causes

de la disgrâce

1658-1664 muniquoit tous les soirs à Colbert. Celui-ci lui déÆt. 37-43 montroit alors comment Fouquet, en diminuant les recettes et en augmentant les dépenses, se réservoit les moyens de continuer toujours son système de profusion. Louis XIV, qui déjà possédoit l'art, si nécessaire, pour celui qui est appelé à régner, de dissimuler ses pensées et ses intentions au milieu de tant d'hommes qui s'étudient à les pénétrer dans l'unique but de les faire tourner à leur profit, ne faisoit au surintendant que de légères observations; il vouloit seulement lui montrer qu'il ne perdoit pas de vue cet important objet de son gouvernement, et il essayoit à le rendre sincère: mais l'ayant, pendant cinq mois, trouvé fidèle à son plan de déguisement, il résolut de s'en débarrasser, et de se confier à l'austère probité de Colbert.

Cependant Fouquet étoit encore protégé par la reine-mère, et il est probable que Louis XIV se seroit contenté d'écarter le surintendant, et que la punition de toutes ses prévarications se fût bornée à une éclatante disgrâce, sans une circonstance qui aggrava beaucoup ses torts dans l'esprit du monarque, et alluma contre lui sa colère.

Le goût de Fouquet pour les femmes sembloit s'augmenter tous les jours, en proportion des facilités qu'il avoit trouvées à le satisfaire au milieu d'une Portrait cour galante et corrompue. Il y avoit au nombre des La Vallière. filles d'honneur de MADAME, belle-sœur du roi, une

de

jeune personne, dont la beauté n'étoit pas, au premier abord, fort remarquable, mais qui, cependant,

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avoit un teint d'une blancheur éclatante, de beaux 1658-1664
cheveux d'un blond argenté, des yeux bleus, et un re- Et. 37-43
gard si tendre, si doux, si modeste, qu'il gagnoit le
cœur, et imprimoit le respect. Elle avoit peu d'esprit,
quoiqu'elle aimât beaucoup la lecture; mais son sou-
rire et le son de sa voix prêtoient à ses moindres
paroles un charme inexprimable. Un léger vice de
conformation rendoit sa démarche un peu inégale et
traînante, et lui donnoit un air indolent qui plaisoit,
parce qu'il étoit en harmonie avec son maintien naïf
et timide. Malgré ce défaut, c'étoit une des meil-
leures danseuses de la cour, et celle qui montoit à che-
val avec le plus de dextérité. Tous ses gestes étoient
si naturellement gracieux que l'abbé de Choisy 76
qui a été élevé avec elle, et qui nous fournit la
plupart des traits dont nous la peignons, dit que ce
vers de La Fontaine semble avoir été fait pour elle,

Et la grâce plus belle encor que la beauté.

Fouquet en devient amoureux, et lui fait des

A ce portrait, tous mes lecteurs ont déjà reconnu
La. Vallière. C'est elle dont Fouquet étoit épris;
la désirer et chercher à la corrompre, étoit pour propositions.
Fouquet la même chose.

Il eut donc recours à son agent ordinaire pour
ces sortes d'affaires, Mme du Plessis-Bellière, femme
d'un officier-général, et mère de la marquise de
Crequy 77, qui rendoit à Fouquet les mêmes genres
de service que le duc de Saint-Aignan à Louis XIV.
Mme du Plessis-Bellière alla trouver La Vallière,
et lui dit que le surintendant avoit vingt mille pis-

1658-1664 toles à son service 78. Le rejet de cette offre et de Et. 37-43 toute autre de cette nature étonna Fouquet, qui n'y étoit pas accoutumé, et il chercha à en con

le secret des

amours

Louis XIV.

de

noître le motif. Comme il avoit des agents partout, Il découvre il découvrit bientôt un secret inconnu encore à toute la cour; c'étoit la liaison du roi avec Mlle de La Vallière. L'amour seul, et non l'ambition et l'intérêt, avoit vaincu La Vallière, dont le cœur étoit d'une sensibilité extrême, mais dont l'âme étoit pure, élevée, et portée à la vertu. Fouquet, qui n'avoit pas mieux conçu son caractère que celui du roi, renonçant à ses prétentions sur elle, chercha à se faire un moyen utile à ses projets, du secret qu'il avoit découvert, et n'ayant pu devenir l'amant de La Vallière, il aspira à devenir son confident. Un jour qu'il la rencontra dans l'antichambre de MADAME, il l'entraîna à l'écart, et lui fit un pompeux éloge du roi; il lui dit que c'étoit l'homme le mieux fait de son royaume, et en même temps le plus aimable. La Vallière, surprise et confuse, fut offensée des discours du surintendant, et le quitta brusquement. Le soir elle instruisit le roi 79, non seulement des insinuations que Fouquet s'étoit permises dans la journée, mais des indignes propositions par lesquelles il avoit osé tenter de la séduire. On peut juger de la colère et du ressentiment que l'indiscrète audace du ministre dut allumer dans le cœur d'un monarque tel que Louis XIV. Dès ce La perte de moment-là, il résolut sa perte. On adopta le plan proposé par Colbert, sous Mazarin; et même, par

Fouquet est

résolue.

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