Imatges de pàgina
PDF
EPUB

1.

es

ra

ng

m

ne,

ant

Dou

aller

ren

loit;

gus

telle

phes

lité,

Au

ɔn 46.

t des

trou

èrent

souvent l'humeur de l'homme le plus patient, des 1658-1664
sujets de gaieté et des occasions nouvelles pour ba- £t. 37-43
diner avec sa Muse. Un jour il se présenta à Saint-
Mandé pour faire une visite au surintendant, et
après avoir attendu une heure, il fut obligé de partir
sans le voir. Il fallut absolument qu'il exhalât son
mécontentement dans une épître. Pour bien con-
noître La Fontaine, il faut voir comment il s'ex-
prime quand il est fâché 47.

Seigneur, je ne saurois me taire.
Celui qui plein d'affection
Vous promet une pension,

Celui-là, dis-je, a contre vous,
Un juste sujet de courroux.
L'autre jour étant en affaire,
Vous ne daignâtes recevoir
Le tribut qu'il croit vous devoir
D'une profonde révérence.
Il fallut prendre patience,
Attendre une heure, et puis partir.
J'eus le cœur gros, sans vous mentir,
Un demi-jour, pas davantage;
Car enfin ce seroit dommage
Que, prenant trop mon intérêt,
Vous en crussiez plus qu'il n'en est.

Il déplore ensuite les occupations trop multipliées
de Fouquet, et dit, que si cela continue, il lui arri-
vera comme aux moines d'Orbais qui, lorsque les
jours deviennent courts, se plaignent de n'avoir pas
le temps de prendre leurs repas. Orbais étoit une
abbaye de Bénédictins à cinq lieues au sud-est de
Château- Thierry. Il est probable que ces bons
moines avoient la réputation de faire bonne chère,
et le trait satirique que La Fontaine leur décoche

Epitre

à Fouquet,

1658-1664 en passant, est bien dans le caractère de sa Muse Et. 37-43 dont la bonhomie n'est presque jamais sans malice.

Il continue à plaindre le sort de Fouquet condamné
aux ennuis de la grandeur, et il lui donne les con-
seils suivants :

A jouir pourtant de vous-même
Vous auriez un plaisir extrême;
Renvoyez donc en certain temps
Tous les traités, tous les traitants,
Les requêtes, les ordonnances,
Le parlement et les finances,
Le vain murmure des frondeurs,
Mais, plus que tous, les demandeurs.

Renvoyez, dis-je, cette troupe,
Qu'on ne vit jamais sur la croupe
Du mont où les savantes Sœurs
Tiennent boutique de douceurs.
Mais que pour les amants des Muses
Votre suisse n'ait point d'excuses,
Et moins pour moi que pour pas un :

Je

ne serai pas importun;

Je prendrai votre heure et la mienne.

Fouquet ne savoit que trop bien secouer à SaintMandé le joug des affaires; mais c'étoit pour don

ner audience à d'autres personnes qu'aux amants Détails sur des Muses. « Il se chargeoit de tout, dit l'abbé de

Fouquet.

Choisy dans ses Mémoires, et prétendoit être premier ministre sans perdre un instant de ses plaisirs. Il faisoit semblant de travailler seul dans son cabinet à Saint-Mandé; et pendant que toute la cour, prévenue de sa future grandeur, étoit dans son antichambre, louant à haute voix le travail infatigable de ce grand homme, il descendoit par un escalier dérobé dans un petit jardin, où ses nymphes, que

4

int

on

ants

é de

pre

sirs.

cabi

our,

anti

gable calier

que

je nommerois bien si je voulois, et même les mieux 1658-1654
cachées, lui venoient tenir compagnie au poids de Et. 37-43
l'or 48. » Fouquet avoit fait construire à Saint-Mandé
une superbe galerie 49, et La Fontaine qui y avoit
attendu une heure nous la décrit en détail, et nous
apprend qu'elle étoit ornée des statues d'Osiris et des
tombeaux des rois d'Egypte, que le surintendant
avoit fait venir à grands frais : ainsi les merveilles des
arts modernes ne suffisoient point à Fouquet, et il
lui falloit encore tout ce que l'antiquité offre de plus
curieux et de plus rare. La Fontaine oublie son cour-
roux dans la contemplation de ces antiques, et il ter-
mine son épître par une de ces réflexions d'une douce
mélancolie qui donnent tant de prix à ses écrits :

Vous que s'efforce de charmer
L'antiquité qu'on idolâtre,
Pour qui le dieu de Cléopâtre,
Sous nos murs enfin abordé,
Vient de Memphis à Saint-Mandé;
Puissiez-vous voir ces belles choses
Pendant mille moissons de roses!
Mille moissons, c'est un peu trop,
Car nos ans s'en vont au galop,
Jamais à petites journées.
Hélas! les belles destinées
Ne devroient aller que le pas.
Mais quoi! le ciel ne le veut pas.
Toute âme illustre s'en console,
Et pendant que l'àge s'envole,
Tâche d'acquérir un renom
Qui fait encor vivre le nom,

Quand le héros n'est plus que cendre.

Il est probable qu'à cette époque (en 1658) La Fontaine avoit déjà composé quelques uns des contes qui établirent sa réputation comme poëte, car une

[blocks in formation]

1658-1664 abbesse du Brabant, qui paroît avoir été peu scruEt. 37-43 puleuse, eut un grand désir de faire connoissance

Dizain pour Madame

de

avec notre poëte, et l'invita à la venir voir; mais la
guerre duroit encore avec les Espagnols qui pos-
sédoient le Brabant. La Fontaine écrivit donc une
épître en vers à la jeune et aimable abbesse, pour
lui expliquer comment il n'osoit aller lui déclarer
son amour, et il lui rappelle l'aventure alors récente
de M. Girardin, qui, en se rendant à Bagnolet, fut
enlevé par M. Barbezière de Chemezant, et trans-
porté à Bruxelles, où l'on négocioit encore pour
sa rançon 50.

Les Rocroix 51, gens sans conscience,
Me prendroient aussi bien que lui,
Vous allant conter mon ennui.
J'aurois beau dire à voix soumise:
Messieurs, cherchez meilleure prise ;
Phébus n'a point de nourrisson
Qui soit homme à haute rançon ;
Je suis un homme de Champagne
Qui n'en veux point au roi d'Espagne;
Cupidon seul me fait marcher.
Enfin, j'aurois beau les prêcher;
Montal ne se soucieroit guère

De Cupidon ni de sa mère :

Pour cet homme en fer tout confit
Passeport d'amour ne suffit.

Fouquet qui faisoit une cour assidue à Mme la Sévigné marquise de Sévigné, et qui trouva en elle une résistance qui le força de se réduire aux témoignages d'une simple amitié, lui montra cette épître de La Fontaine. Cette aimable veuve, aussi régulière dans sa conduite, qu'indulgente et facile pour tout le reste, et dont la vertu n'ôtoit rien à l'enjouement et

a

e

S

a

le

et

aux grâces, loua cette épître, quoique la fin en soit 1658-1664 assez libre. La Fontaine, flatté du suffrage d'une Æt. 37-43 femme aussi polie que spirituelle, envoya de suite à Fouquet un dizain pour Me de Sévigné, où il laisse éclater la joie que lui cause ce succès.

Entre les Dieux, et c'est chose notoire,
En me louant, Sévigné me plaça:
J'étois alors deux cents mille au-deçà,
Voire encor plus du temple de Mémoire.
Ingrat ne suis, son nom seroit pieça

De-là le ciel, si l'on m'en vouloit croire.

53:

Mais bientôt La Fontaine fut invité par Fouquet, à occuper sa Muse d'un événement, que tous les poëtes d'alors s'empressèrent de célébrer à l'envi. Je veux parler du voyage de toute la cour dans le midi, de la paix des Pyrénées, qui fut signée le 7 novembre 1659, et du mariage de Louis XIV avec Marie-Thérèse, qui fut célébré à Fontarabie, le 3 juin 1660 53 : cette alliance et ce mariage terminoient la guerre entre la France et l'Espagne, et tendoient à faire cesser l'inimitié qui subsistoit depuis si longtemps entre ces deux grandes monarchies presque toujours divisées, et dont l'union constante seroit cependant nécessaire à leur mutuelle prospérité. La Fontaine fit une ode sur la paix qui n'étoit pas encore conclue, et qui dépendoit de la réussite de des Pyrénées. la négociation du mariage du roi avec l'infante 54.

Le début de cette ode, tel qu'il fut d'abord imprimé, nous apprend que Mazarin, en partant de Paris, pour se rendre à Saint-Jean-de-Luz, alla coucher à Vaux comme tout ce qu'il y avoit d'a

Ode sur la paix

« AnteriorContinua »