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de laisser à Bois-le-Vicomte son cœur pour otage: 1689-1692 il se reconnoît ainsi par le cœur, susceptible de Et. 68-71constance et de fidélité; mais il ajoute :

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Le reste du composé
Est l'être le plus volage
Dont Dieu se soit avisé.

<«< Toutes Muses que vous êtes (dit-il aux Neuf Sœurs), entreprendriez-vous de me préserver des périls, à quoi je m'exposerois, en m'allant en» fermer dans un château, où Mme d'Hervart et ses >> nièces 48 me retiendroient par enchantement contre >> tout droit d'hospitalité? » Enfin il s'exprime à cet égard clairement, et donne le véritable motif de son refus: << de demeurer tranquille à Bois-le-Vicomte

pendant que l'on répétera à Paris mon opéra; >> c'est ce qu'il ne faut espérer d'aucun auteur, quelque sage qu'il puisse être. »

>>

Collasse fit la musique

Il paroît qu'on disoit beaucoup de bien de la musique de Collasse pour Astrée, et La Fontaine en d'Astrée.

tiroit un bon augure.

Oh! si le dieu du Parnasse

Avoit inspiré Collasse,

Comine l'on dit qu'il a fait,

La chose iroit à souhait.

Collasse.

Collasse fut un des meilleurs élèves de Lully, qui Détails sur l'employoit même pour composer quelques symphonies dans ses opéras, et il devint après lui le musicien en vogue; mais ses compositions, sans être plus savantes, étoient beaucoup plus froides que celles du Florentin; il eut la passion de chercher le secret de la pierre philosophale, par là il se ruina, et

1689-1692 affoiblit sa santé : il eût mieux fait de dérober le At. 68-71 secret de Lully son maître, qui, avec les sept notes de la musique, trouva le moyen de devenir millionnaire 49.

La Fontaine, dans le pro

La Fontaine, dans un prologue dont, selon l'u

logue de son sage, il fit précéder son opéra, mit dans la bouche

opéra, loue

Louis XIVsur

ses projets de d'Apollon les paroles suivantes, que ce dieu adresse

conquêtes.

Ce passage du prologue

au chœur qui recommande avant tout de se soumettre à l'amour.

Vos chants sont pour l'Amour, ma lyre est pour la gloire.
Du nom de deux héros je veux remplir les cieux,

De deux héros que la Victoire

Doit reconnoître pour ses dieux :

Le Rhin sait leur vaillance;

Le Danube en pourra ressentir les effets.

Qui peut mieux qu'Apollon en avoir connoissance?

Mais je veux taire ces secrets;

Louis m'apprend, par sa prudence,

A cacher ses projets.

Il faut croire que cette singulière manière de

déplait au roi. cacher un secret déplut à Louis XIV, et qu'il ne se

et La Fontai

me.

ne le suppri- soucioit pas qu'on le représentât, comme ayant le projet de pousser ses conquêtes jusqu'au Danube; car on mit un carton dans l'édition qu'on avoit faite en 1691, de cet opéra, afin de supprimer ces vers: ils ne se trouvent pas dans les éditions de La Fontaine, ni dans le recueil des opéras de Ballard, imprimé en France, quoiqu'on les ait insérés dans l'édition de ce recueil, faite en Hollande en 16925°. Les deux héros, dont parle La Fontaine dans ces vers, sont, je crois, les maréchaux de Luxembourg et de La Feuillade qui commandoient sous le roi,

lorsqu'il assiégea Mons. Le prince de Conti se trou- 1689-1692 voit aussi à ce siége "1.

le

Æt. 68-71

de la guerre.

Prise de Namur.

Steinkerck.
3 août 1692.

L'année d'ensuite Louis XIV prit Namur, et re- Evénements tourna à Versailles, tandis que Luxembourg tenoit tête à toutes les forces des ennemis. Trompé par les faux avis d'un de ses espions qui avoit été découvert, le général français avoit fait des dispositions qui devoient le faire battre, quand il fut surpris, le 3 août 1692, par le prince d'Orange, près de Steinkerck. Luxembourg, sans se laisser déconcer-Bataille de ter, après avoir tenté deux attaques sans succès, se mit avec le duc de Chartres, le duc de Bourbon, prince de Conti, le duc de Vendôme, et son frère le grand-prieur, à la tête de la brigade des gardes, et commença une troisième attaque. Les guerriers français firent des prodiges de valeur; le prince d'Orange fut battu, et forcé de se retirer, après avoir perdu sept mille hommes 52. Dès que cette nouvelle Lettre de La fut arrivée à Paris, elle y causa une joie extraordinaire, et La Fontaine, pour témoigner la sienne, écrivit au chevalier de Sillery, qui étoit attaché au service de M. le duc de Bourbon. Ce prince, imitant aussi relativement à La Fontaine, l'exemple de son aïeul le grand Condé, répandoit sur lui ses bienfaits, et venoit de lui faire remettre cent louis. La Fontaine, dans sa lettre au chevalier de Sillery, le félicite, et loue la générosité du duc, aussi bien sa valeur, à laquelle on attribuoit en partie le gain de la bataille de Steinkerck. Notre poëte le compare Steinkerck. à un lion poursuivi par des chasseurs.

que

Fontaine au

chevalier de

Sillery.
28 août 1692.

M. le duc de da

Bourbon fait des dons à La Fontaine,

et montre

sa valeur au combat de

1692-1694

Æt. 71-73

Louis XIV n'aimoit pas

politique.

Tel on voit qu'un lion, roi de l'ardente plage,
De sang et de meurtre altéré,
Porte sur les chasseurs un regard assuré,
Et se tient fier d'être entouré

De mille marques de carnage 53,

Cette comparaison étoit plus exacte que flatteuse, Saint-Simon nous peint M. le duc avec un naturel farouche, et un courage féroce. « Il avoit, dit-il, un air presque toujours furieux, et en tout temps si fier et si audacieux, qu'on avoit peine à s'accoutumer à lui 54. » En apprenant de si grands succès, une ambition patriotique, pour l'agrandissement de la France, s'empare du bon La Fontaine ; cependant il s'arrête, parce qu'il se rappelle sans doute les motifs qui firent supprimer les vers de son opéra. Ah! si le ciel vouloit que nous eussions le tout! Quel pays! Vous voyez ses défenseurs à bout. Je n'en dirai pas plus; notre roi n'aime guères Qu'on raisonne sur ces matières.

Et en effet MADAME nous apprend que Louis XIV qu'on parlat ne pouvoit souffrir que dans la conversation on parlât de politique. « Du temps du feu roi, dit-elle, on avoit appris à toutes les dames à ne jamais s'entretenir de ces matières 55. >>

Jusqu'ici nous avons vu La Fontaine, recherché pour son génie, aimé pour son caractère, répandu dans le monde, s'intéressant à tout ce qui s'y passoit, toujours occupé de ses plaisirs, et quelquefois de ses ouvrages, ou plutôt ne se livrant à la composition de ses ouvrages, que parce que c'étoit lui un plaisir de plus. Il avoit, jusqu'alors, joui d'une santé robuste; mais, vers la fin de l'année

pour

est atteint

1692, d'une

maladie vio

1692, il fut attaqué d'une maladie, qui fit craindre 1692-1694 pour ses jours, et qui porta une irréparable atteinte Æt. 71-73 à cette constitution vigoureuse, dont la nature l'a- La Fontaine voit doué. La Fontaine, par l'affoiblissement de ses vers la fin de forces, sentit enfin que la main du temps s'appe- lente. santissoit sur lui. Alors Mme de La Sablière s'approchoit de sa fin, et alloit bientôt terminer une vie, depuis long-temps consacrée à la religion et aux bonnes œuvres. Les exhortations d'une amie presque Racine et mourante, d'une amie si constamment chérie, et si La Sablière digne de l'être, jointes à celles de Racine, firent Fontaine à se sur La Fontaine la plus forte impression. Le curé de Saint-Roch, sur la paroisse duquel il se trouvoit, en fut instruit, et entreprit sa conversion.

le

Madame de

exhortent La

convertir.

Saint - Roch

envoie Pouget SOR vicaire..

Depuis quelques semaines le curé de Saint-Roch Le curé de avoit un jeune vicaire, nommé Pouget, qui s'est fait lui connoître depuis par de savants écrits, mais, qui alors, âgé seulement de vingt-six ans, n'avoit jamais assisté ni confessé aucun malade. Ce fut lui que curé de Saint-Roch choisit pour convertir La Fontaine. Pouget s'y refusoit, prétendant qu'un homme si célèbre par des ouvrages scandaleux, et qui avoit vécu pendant si long-temps d'une manière si peu conforme aux règles du christianisme, avoit besoin d'un guide plus éclairé et plus expérimenté que Mais le curé de Saint-Roch insista, et Pouget se prépara à obéir à son supérieur.

lui.

Le père de Pouget étoit

avec La

Le père de Pouget étoit lié avec La Fontaine : ce fut une occasion toute naturelle pour le jeune vicaire Face de s'introduire chez notre poëte, non comme pas

Fontaine.

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