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dans la rue quelque personne de sa connoissance, 1684-1687 après les compliments ordinaires, il élevoit la voix Æt. 63-66 pour dire : « Avez-vous lu Baruch; c'étoit un grand

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génie 5. » Malgré la licence de ses écrits, et ses mœurs relâchées, La Fontaine avoit du respect pour

respectoit la

la religion. Arnauld ayant loué ses fables, il crut La Fontaine devoir lui en témoigner sa reconnoissance en lui religion. adressant à son tour des éloges dans le prologue d'un de ses contes. Ce conte renfermoit une application de quelques paroles de l'Evangile. Racine et Boileau, Sur l'avis à qui il le montra, lui firent observer que cette appli- Racine, il cation étoit impie, et lui donnoit le caractère d'un vide homme sans religion; il ne fit aucune difficulté de supprimer ce conte qui n'a jamais paru 16

Girardon n'étoit pas alors le seul artiste dont la ville de Troyes dût s'enorgueillir; Mignard y étoit né". Ce peintre, par le grand nombre de portraits qu'il avoit faits en France, et par les belles fresques du Val-de-Grâce, avoit encore augmenté la réputation qu'il s'étoit acquise en Italie. Barthélemy d'Hervart, qui avoit été autrefois intendant et contrôleur général des finances, homme d'une richesse immense, et-qui savoit l'art d'en jouir, avoit acheté l'ancien hôtel d'Epernon, et l'avoit agrandi et embelli. Il sacrifia une somme considérable pour orner de peintures à fresques son cabinet et son salon. Mignard fut chargé de les exécuter. Il avoit représenté sur la voûte du cabinet l'apothéose de Psyché : on la voyoit s'élever sur le sommet de l'Olympe, portée par Mercure et par Hyménée; Jupiter

de Boileau et

de

supprime un de ses contes

dié à Arnauld.

est lié avec

le

La Fontaine peintre Mi

gnard,

qui orne de

fresl'hôtel

Hervart,

1684-1687 paroissoit empressé de recevoir la divinité qui veEt. 66-86 noit embellir son empire; une troupe d'Amours

servoient de cortége à leur nouvelle souveraine. Sur la voûte du salon, Mignard avoit peint les principales aventures d'Apollon, sa cruelle vengeance envers Niobé, le combat contre le serpent Python, son séjour à la cour du roi Laomédon, la douleur dont il avoit été accablé par la perte du beau Hyacinthe, son amour pour la sévère Daphné, et le soin qu'il prenoit d'arroser l'arbre dont elle avoit subi la métamorphose. Sur la coupole on le voyoit dans toute sa gloire, occupé à instruire les Muses attentives. Cette fresque étoit considérée comme le chef-d'œuvre de Mignard 18. Ce grand peintre étoit intimement lié avec La Fontaine, ainsi que lui homme de Champagne*, et encore plus avec Molière; il fut même, dans le temps, admis aux petites réunions de ces deux poëtes avec Racine, Boileau et Chapelle ". Molière fit un poëme exprès pour célébrer la fresque du Val-de-Grâce 20 et le roman de Psyché, que composa La Fontaine, contribua aussi à la célébrité des peintures que Mignard

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dans lequel avoit exécutées dans le cabinet de l'hôtel d'Hervart.

La Fontaine

devoit finir C'est dans cet hôtel, qui étoit situé rue Plâtrière,

es jours.

où est actuellement l'administration des Postes, que

La Fontaine devoit terminer sa vie "1.

* Je suis un homme de Champagne,

Qui n'en veut point au roi d'Espagne,

dit La Fontaine, en parlant de lui, dans l'épître à une abbesse de Brabant. Voyez ci-dessus, p. 32.

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avec l'abbé

Le Camus, depuis évéque

La Fontaine fut aussi lié avec plusieurs ecclé- 1684-1687 siastiques recommandables: nous avons déjà fait Æt. 63-66 mention de Huet, son ami particulier, qui fut nommé sous-précepteur du dauphin, puis évêque de Soissons, et ensuite évêque d'Avranches ". La Fontaine avoit eu aussi des liaisons avec l'abbé Le Camus, homme plein d'esprit, et qui, d'abord, Liaisonside s'étoit montré galant, aimable, libertin, et même e impie. L'exemple de Bouthillier de Rancé, fonda- de Grenoble. teur de la Trappe, qui, dans sa première jeunesse, avoit mené aussi une vie assez déréglée, convertit l'abbé Le Camus. On lui donna l'évêché de Grenoble, et ensuite le chapeau de cardinal 23. La Réponse en Fontaine fait indirectement allusion à la conduite de M. Girin passée et à la vie présente de ce prélat, dans quelques vers qu'il écrivit au bas d'une lettre que lui avoit adressée M. Girin, contrôleur des finances à Grenoble, pour le rendre juge d'une gageure faite au sujet d'une difficulté grammaticale, qui s'étoit élevée sur le refrain d'un rondeau. Notre poëte, après avoir exposé fort clairement les raisons de sa décision, en vers jolis et faciles, ajoute :

Je ne me donne point ici pour un oracle;
Et, sans chercher si loin, Grenoble en possède un;
Il sait notre langue à miracle,

Son esprit est en tout au-dessus du commun;
C'est votre cardinal que j'entends; ses lumières
Dédaignent, il est vrai, de semblables matières;
Ballades et rondeaux, ce n'est point son affaire.
A l'égard du salut, unique nécessaire,

Il n'est point de difficulté

Qui ne doive occuper en pareille occurrence,
Non seulement son éminence,

Mais même encor sa sainteté 24.

vers à la lettre

de Grenoble.

1684-1687

taine fait un

teau-Thierry en 1686.

Lettre

à Racine.

1686.

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Racine, qui avoit pour La Fontaine une amitié Et. 63-66 tendre et sincère, et qui auroit voulu le corriger La Fon- de ses défauts, l'exhortoit surtout à prendre plus de eyage a Cha- soin de ses affaires. C'est probablement dans ce but que La Fontaine s'étoit déterminé à se rendre à Château-Thierry en 1686. Racine, ne recevant pas de ses nouvelles, s'en plaignit ; et La Fontaine lui écrivit : «< Poignan, à son retour de Paris, m'a >> dit que vous preniez mon silence en fort mauvaise » part, d'autant plus qu'on vous avoit assuré que je travaillois sans cesse depuis que je suis à Châ» teau-Thierry, et qu'au lieu de m'appliquer à mes affaires, je n'avois que des vers en tête. Il n'y a » de tout cela que la moitié de vrai mes affaires m'occupent autant qu'elles en sont dignes, c'est» à-dire nullement; mais le loisir qu'elles me laissent, ce n'est pas la poésie, c'est la paresse qui l'emporte.: » Il rapporte ensuite à son ami une chanson qu'il a faite en réponse à un couplet lui avoit adressé une petite fille de huit ans : ç'a été là, ajoute-t-il, ma plus forte occupation depuis mon arrivée. » Puis viennent des vers qui contiennent des jugements sur Ronsard, Racan et Malherbe, qu'il se proposoit d'insérer dans une lettre au prince de Conti; il termine en disant : « Ne montrez ces derniers vers à personne; car » Mme de La Sablière ne les a pas encore vus 25. Tonchants On aime ces touchants égards de La Fontaine pour Fontaine en- sa bienfaitrice; et il paroît, d'après ce passage, que Mme de La Sablière, quoique livrée alors tout en

égards de La

vers madame

de LaSablière.

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que

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tière à de pieux devoirs, conservoit cependant 1684-1687 encore le goût des vers.

étoit aimé de tous col

legues de l'A

cadémie.

Et. 63-66 La Fontaine s'étoit fait tellement aimer de ses La Fontaine confrères académiciens, qu'un jour ils voulurent se départir en sa faveur d'une règle académique qu'on n'enfreint jamais. Il est d'usage, dans ces corps littéraires, de signer des listes de présence, et, lorsqu'on commence la séance, le secrétaire tire une barre pour clore la liste. Ceux qui arrivent après la barre tirée n'ont point part aux jetons de cette séance. La Fontaine entra un jour comme on venoit de tirer la barre; tous ses confrères, qui savoient qu'il n'étoit pas riche, réclamèrent aussitôt pour que l'on fit exception en sa faveur mais il insista pour qu'on n'enfreignît pas la règle, et dit : « Non, >> Messieurs; cela ne seroit pas juste. Je suis venu >> trop tard; c'est ma faute 26. >>

querelle de La Fontaine

tière.

L'attachement que les membres de l'Académie Causes de la avoient pour La Fontaine, la confiance qu'ils avoient et de Fureen lui, furent ce qui engagea cet homme si doux, si conciliateur, dans la querelle avec Furetière, et lui attira l'inimitié de ce dernier, avec lequel il étoit fort lié.

l'Académie

juillet 1637.

parlement à

L'édit du roi Louis XIII, qui créoit l'Académie Création de française, en date du 24 janvier 1635, ne fut vérifié française, 10 et enregistré que le 10 juillet 1637. D'assez vives Craintes du oppositions s'étoient élevées, dans le sein du parle- ce sujet. ment, contre la création de ce corps littéraire. On savoit qu'il étoit l'ouvrage du cardinal de Richelieu, et l'on craignoit que cette innovation ne cachât encore quelques nouveaux piéges de ce ministre despotique:

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