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Belphegor et

d'Ephèse.

opéra

Malgré la médiocrité du poëme du Quinquina, 1679-1682 et celle de l'opéra de Daphné", le volume qui Æt. 58-61 contenoit ces deux ouvrages, eut du succès, parce Contes de que l'auteur y joignit son charmant conte de Bel- de la Matrone phégor", qui n'avoit pas encore paru, et celui de la Matrone d'Ephèse13, qui semble avoir été imprimé séparément, en 1664, mais que La Fontaine, par une raison que nous ignorons, n'avoit pas fait réimprimer dans aucun des recueils de contes qu'il avoit publiés pendant ce long intervalle de temps. Le même volume renferme aussi deux actes d'un opéra, intitulé Galatée 24, que La Galatée, Fontaine avoit commencé. « Mais, dit-il dans son >> avant-propos, l'inconstance et l'inquiétude qui >> me sont si naturelles, m'ont empêché d'achever les » trois actes, à quoi je voulois réduire ce sujet. Peut-être est-il fâcheux que La Fontaine n'ait pas terminé cette petite pièce; les deux actes qui nous en restent promettoient quelque chose de mieux que Daphné. Elle commence par une chanson charmante, qui fut mise en musique, dans le temps, par Lambert; et Mathieu Marais, qui écrivoit peutêtre plus de vingt ans après, nous dit que, de son temps, cette chanson se trouvoit dans la bouche de tout le monde 25.

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la naissance

Bourgogne.

de

La Fontaine avoit chanté le mariage du dauphin Ballades sur dans son épître à Mme de Fontanges; et, deux ans et du duc demi après, il composa deux ballades sur la nais- 6avu: 1682. sance de Louis, duc de Bourgogne 26, dont l'enfance devoit bientôt protéger sa vieillesse. La dauphine

1682-1684 accoucha le 6 août 1682, et La Fontaine eut bien 1.61-63 raison de dire, dans une de ses ballades :

La Fontaine sollicite une

démie.

Or est venu l'enfant tant souhaité.

me

Jamais événement ne produisit une plus grande alégresse. « Chacun, dit Choisy, se donnoit la liberté d'embrasser le roi. La foule le porta, depuis la Surintendance où Me la dauphine accoucha, jusqu'à ses appartements; il se laissoit embrasser à qui vouloit. Le bas peuple paroissoit hors de sens; on faisoit des feux de joie, et tous les porteurs de chaises brûloient familièrement la chaise dorée de leur maîtresse. Ils firent un grand feu dans la cour de la galerie des Princes, et y jetèrent une partie des lambris et des parquets, destinés pour la grande galerie. Bontemps, en colère, le vint dire au roi, qui se mit à rire, et dit : « qu'on les laisse faire; »> nous aurons d'autres parquets. » La joie parut aussi vive à Paris, et fut de bien plus longue durée; les boutiques furent fermées trois jours durant; toutes les rues étoient pleines de tables, où les passants étoient conviés et forcés de boire sans payer; et tel artisan mangea cent écus, dans ces trois jours, qu'il ne gagnoit pas dans une année "7. »

La mort de Colbert qui eut lieu, le 6 septemplace à l'Aca- bre 168328, laissoit une place vacante dans l'Académie française. La Fontaine avoit publié presque. toutes ses fables et presque tous ses contes, Boileau avoit fait paroître l'Art poétique, le Lutrin, neuf de ses satires, et neuf de ses épîtres, et ni

l'un ni l'autre de ces deux grands poëtes n'é- 1682-1684 toient de l'Académie. Il faut avouer pour la justifi- Æ1. 61-63 cation de ce corps, que, sous le rapport des convenances morales, les contes du premier, comme, sous le rapport des convenances sociales, les satires du second, formoient des motifs d'objections trèsfondés mais cette compagnie comprit enfin que c'étoit s'illustrer elle-même que d'admettre dans son sein, deux hommes qui faisoient la gloire de la littérature française seulement ses membres ne s'accordoient pas sur celui qu'il falloit recevoir le premier. La Fontaine qui désiroit vivement être nommé, mit dans cette affaire plus de suite et de constance que son caractère indolent ne sembloit le comporter. Il écrivit, dit-on, une lettre à un prélat, membre de l'Académie, pour témoigner quelques regrets de la licence de ses écrits, et pour promettre de n'en plus composer de semblables 29. Comme il craignoit la concurrence de Boileau, il II est le le pria de se désister en sa faveur. Boileau lui dit Boileau. que, si l'Académie lui faisoit l'honneur de le nommer, il accepteroit, mais qu'il ne feroit aucune démarche. Cependant les amis de Boileau cherchèrent autant qu'ils le purent à empêcher la nomination de son concurrent: un d'eux, l'académicien Roze, qui étoit secrétaire du cabinet du roi, et président d'une cour dans l'Acadé souveraine, jeta sur la table de l'Académie un des volumes des Contes de La Fontaine, comme pour faire honte à la compagnie de penser à choisir un homme qui étoit l'auteur d'écrits aussi licencieux 3°. S'aperce

concurrent de

Roze attaque

La Fontaine

mie.

1682-1684 vant qu'il n'avoit pas produit par ce moyen beaucoup Et. 61-63 d'impression, il dit avec humeur : « Je vois bien,

Benserade le défend.

La Fontaine

est élu.

>>

Messieurs, qu'il vous faut un Marot. » — « Et à

» vous une Marotte», répliqua vivement Benserade, qui opinoit pour La Fontaine, et que cet acharnement du président Roze, contre le bon homme, impatientoit. Cette bouffonnerie fit rire, et l'opinion de Benserade, si hautement déclarée, eut sur plusieurs membres, encore incertains, une heureuse influence pour La Fontaine 3.

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L'Académie, par ses statuts, lorsqu'il y avoit une place vacante, devoit procéder à deux scrutins, le premier pour déterminer à la pluralité des suffrages quel sujet elle proposeroit au protecteur, c'est-à-dire auroi, et l'autre pour consommer l'élection après que le protecteur auroit répondu en faveur du sujet proposé. Le second scrutin n'étoit, comme on le pense bien, qu'une forme imaginée pour avoir l'air de laisser à l'Académie seule le libre choix de ses membres.

Au premier scrutin, La Fontaine eut seize voix, Nov. 1683. et Boileau sept. Aussitôt les amis de Boileau et les

antagonistes de notre fabuliste allèrent prévenir Louis XIV, et n'eurent pas de peine à intéresser sa religion; car il étoit déjà très-mécontent qu'on eût préféré La Fontaine à Boileau en faveur auprès de lui, et qu'il avoit nommé son historiographe avec Racine. Lors donc, que selon l'usage, M. Doujat, député de l'Académie, alla le lendemain savoir de Sa Majesté si l'on procéderoit au second scrutin, le roi répondit avec humeur : « Je sais qu'il y a eu du

corde pas

d'a

bruit et de la cabale dans l'Académie. » M. Doujat 1682-1684 voulut lui faire entendre que tout s'étoit passé dans Æt. 61-63 les formes, et lui expliquer ces formes; mais le Le roi n'acroi l'interrompit en disant : « Je le sais très-bien, sentement mais je ne suis pas encore déterminé; je ferai tion.' savoir mes intentions à l'Académie 3. »

à

sa nomina

roi.

Ballade au

Le roi partit pour la campagne de Flandre, et ne donna point de décision. Ce fut alors que La Fon- Janvier 1684. taine qui désiroit le fléchir, composa, pour célébrer

ses victoires, une ballade dont le refrain étoit,

L'événement n'en peut être qu'heureux.

L'envoi de cette ballade avoit pour but de faire consentir le monarque à sa nomination. Mme de Thianges se chargea d'en faire à Louis XIV la lecture et le commentaire 33; et, comme on pense bien, elle appuya fortement sur la fin, où le poëte, en parlant du plaisir qu'il a de songer à la gloire dont le roi jouira dans l'histoire, dit,

Ce doux penser depuis un mois ou deux
Console un peu mes Muses inquiètes.
Quelques esprits ont blâmé certains jeux,
Certains récits qui ne sont que sornettes;
Si je défère aux leçons qu'ils m'ont faites,
Que veut-on plus? Soyez moins rigoureux,
Plus indulgent, plus favorable qu'eux,

Prince, en un mot, soyez ce que vous êtes,
L'événement ne peut m'être qu'heureux.

De Vizé qui inséra cette ballade dans son Mercure du mois de janvier 1684, dit qu'elle est du fameux M. de La Fontaine ; et il en fait un grand éloge. Le journaliste ne déguise pas que l'auteur l'a principalement composée, dans le but d'obtenir du roi que

Madame de tercède auprès

Thianges indu roi pour La Fontaine.

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