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cachoit sa gorge, tâchoit de se retrancher sur les 1671-1675 plaisirs de la table, qu'elle aimoit beaucoup; mais, t. 50-54 ce qui étoit plus difficile, c'étoit de se restreindre sur son penchant à la raillerie et à la médisance : cependant elle y prenoit garde, et quand il lui échappoit quelque trait mordant, elle faisoit un cri, en détestant sa mauvaise habitude. Mme de Sévigné, à qui nous empruntons ces détails, dit que Madame de Thianges en étoit devenue plus aimable 54 : en effet, malgré ses dispositions à la dévotion, elle pardonnoit à La Fontaine ses contes, et le servoit à la cour de tout son pouvoir.

Elle donne pour étrennes en à

le duc du

Maine, une

rée nommée

Chambre

du sublime

1

Au commencement de l'année 1675, elle donna pour étrennes au duc du Maine, fils légitimé du M. roi et de Mme de Montespan, une chambre toute chambre dodorée, grande comme une table. Au-dessus de la la porte, il y avoit en grosses lettres, chambre du sublime; au dedans un lit et un balustre, avec un grand fauteuil, dans lequel étoit assis le duc du Maine fait en cire, et fort ressemblant; auprès de lui M. de La Rochefoucauld, auquel il donnoit des vers pour les examiner; autour du fauteuil M. de Marcillac, et M. Bossuet, alors évêque de Condom. A l'autre bout de l'alcôve Mme de Thianges et Mme de La Fayette lisoient des vers ensemble. Au dehors du balustre Despréaux, avec une fourche, empêchoit sept ou huit méchants poëtes d'approcher. Racine étoit auprès de Despréaux, et, un peu plus loin, La Fontaine, auquel il faisoit signe d'avancer. Toutes ces figures étoient de cire et en petit; les principales

1671-1675 étoient fort ressemblantes, parce que ceux qu'elles Æt. 50-54 représentoient, avoient posé devant l'artiste 55. Le genre de Ce fait qui nous est attesté par Ménage, aug

la fable est

omis dans l'Art poétique de Boileau,

mente encore la difficulté que l'on éprouve de se publiée en rendre raison du silence de Boileau sur la fable 1674. dans son Art Poétique. Cet admirable poëme parut en 1674, dans le premier recueil que donna l'auteur de ses œuvres complètes. Il devoit renfermer des préceptes sur tous les genres de poésies, et Boileau, en effet, y donne en peu de mots la poétique de l'idylle, de l'églogue, de-l'élégie, de l'ode, du sonnet, de l'épigramme, du vaudeville même; il ne dit rien de l'apologue que les anciens ont fait descendre du ciel pour l'instruction des hommes. Cependant on ne peut douter que Boileau ne reconnut tout le mérite du fabuliste français, lui qui, dans l'effusion de son admiration pour cet auteur et pour notre grand comique, dit un jour : « La belle nature et tous ses agréments ne se sont fait sentir que depuis que Molière et La Fontaine ont écrit 56. » On a attribué cette omission à la désunion qu'on croit avoir existé alors entre Boileau et La Fontaine; mais il eût mieux valu, pour l'auteur de l'Art Poétique, qu'il commît l'injustice de parler de la fable sans faire mention de La Fontaine, que d'omettre, dans un poëme tel que le sien, de caractériser un genre de poésie dans lequel Phèdre, sans parler de tant d'autres, avoit laissé de si parfaits modèles. Au reste, La Fontaine s'est plu dans plusieurs endroits de ses ouvrages à donner des pré

a

t. 50-54 donné de tes à ce sujet.

La Fontaine

ceptes sur ce genre d'écrire, et dans son premier 1671-1675
recueil de fables il l'avoit fait dans des vers qui sont
tellement dans la manière de Boileau, qu'ils semblent
avoir été composés d'avance pour suppléer à la
lacune que le législateur du Parnasse devoit laisser
dans son code poétique.

Les fables ne sont pas ce qu'elles semblent être ;
Le plus simple animal nous y tient lieu de maître.
Une morale nue apporte de l'ennui:

Le conte fait passer le précepte avec lui.

En ces sortes de feinte, il faut instruire et plaire 57.

bons précep

Causes de

tre La Fon

lean.

Quoiqu'on n'ait aucune preuve qu'une épigramme désunion_encontre Boileau, insérée pour la première fois dans taine et Boiune des dernières éditions des œuvres complètes de La Fontaine, soit de lui, et que nous ne croyions même pas qu'il en soit l'auteur 58, cependant nous ne nierons pas qu'on ne puisse soupçonner d'après plusieurs indices, qu'au temps dont nous nous occupons, ces deux illustres écrivains ne fussent pas aussi unis qu'ils l'avoient été dans leur jeunesse. L'on doit dire à la louange de Boileau que la sévérité de ses principes et de ses mœurs paroît avoir été une des causes qui l'éloignèrent de La Fontaine. Boileau fut toujours par tempérament insensible auprès des femmes, et il n'avoit aucune indulgence pour les foiblesses qu'il n'avoit jamais ressenties. Si la cause du bon goût outragé par la comparaison qu'on avoit établie entre le Joconde de Bouillon et celui de La Fontaine, l'avoit porté à écrire sa dissertation pour démontrer la prééminence de l'ouvrage de ce dernier, il s'en étoit repenti depuis. Ilnefit point imprimer de lui-même cette dissertation

1671-1675 et elle ne fut jamais tant qu'il vécut insérée dans ses At. 50-54 œuvres. On ne peut douter que l'auteur de l'Art Poétique n'ait eu en vue La Fontaine, dans les vers suivants, aussi bien écrits que bien pensés.

Sentence de police qui dé

Que votre âme et vos mœurs, peintes dans vos ouvrages 59,
N'offrent jamais de vous que de nobles images.

Je ne puis estimer ces dangereux auteurs

Qui de l'honneur, en vers, infàmes déserteurs,
Trahissant la vertu sur un papier coupable,

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de leurs lecteurs rendent le vice aimable.

Peut-être ces vers hâtèrent-ils la mesure de rigueur

fend les Con- qui fut prise contre les nouveaux ouvrages de La

tes de La Fon

taine.

5 avril 1675. Fontaine. Jusqu'alors les divers recueils de contes

qu'il avoit publiés, avoient paru avec privilège du roi. En 1675 il fit paroître un nouveau recueil, sous la rubrique de Mons, mais que nous soupçonnons avoir été imprimé à Paris 6. Ce fut contre ce recueil qu'il y eut une sentence de police, rendue par Nouveaus lieutenant de police La Reynie, le 5 avril 16756, Mars 1675. qui en interdisoit le débit, attendu, est-il dit dans

Contes.

le

la sentence << que ce petit livre est imprimé sans aucun privilége ni permission, qu'il se trouve rempli de termes indiscrets et malhonnêtes, et dont la lecture ne peut avoir d'autre effet que celui de corrompre les bonnes mœurs et d'inspirer le libertinage. » Malheureusement cette défense ne produisit d'autre résultat que d'augmenter, pour cet ouvrage qu'on vouloit interdire, l'empressement du public, déjà très-grand pour tout ce qui sortoit de la plume de La Fontaine. Noédit: Il parut l'année d'après une autre édition de ce même

Nouv.

des Nouveaux

Contes.

Amst. 1676. recueil, évidemment imprimée en France subrepti

cement, quoiqu'elle porte le nom d'Amsterdam, 1675-1679 pour lieu d'impression 62.

Et. 54-58

du mot bluson

Nous avons remarqué le goût particulier de La Fontaine pour tous les genres de compositions qui rappeloient notre ancienne poésie. Dans les recueils de contes qui précédèrent celui dont nous nous occupons ici, il avoit inséré des ballades, et des arrêts d'amour. Dans celui-ci, il mit un blason, sorte de petit poëme dont le nom et la nature étoient tout-àfait oubliés. Nos anciens poëtes entendoient par le Définition mot blason la louange ou le blâme continu de la en poésie. chose qu'on vouloit blasonner. Ce mot étoit encore en usage du temps d'Amyot, dont la traduction de Plutarque n'a pu être effacée par celles qui l'ont suivie, et qui fait encore après plus de deux siècles et demi les délices des lecteurs. Cet auteur appelle une épitaphe un blason funéral. Les blasonneurs devoient écrire en rimes plates et en petits vers 63 Les plus grands vers ne devoient pas excéder huit ou dix syllabes. Le blason de La Fontaine est intitulé Janot et Catin 64. Ce dernier nom dans l'ancien tin. langage est le diminutif de Catherine, et Ronsard donne encore le nom de Catin à la reine Catherine de Médicis. C'est ainsi que garce signifioit une jeune fille, comme garçon, un jeune homme. Le mot courtisienne dont on a fait depuis courtisane, étoit un titre d'honneur, et servoit à désigner une femme de la cour. La Fontaine dit au sujet de Janot et Catin : « J'ai composé ces stances en vieil style à la » manière du blason des fausses amours et de celui

Blason de Janot et Ca

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