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D'une clarté fugitive et légère frappant tour à tour le flot, l'écume, la mousse, l'arbrisseau, si le soleil pénétrait cet ombrage touffu, c'était comme l'éclair perce la nuit sombre. Hélas! il n'est plus, le beau feuillage; sa dépouille froide et solitaire, la voilà.

Consolez-vous, belles Naïades; bientôt le printemps sera de retour, bientôt il vous rendra ces berceaux de verdure. Cette urne, fermée trop long-temps, ne tardera plus à répandre ici la fraîcheur de son onde.

Alors daignez encore me recevoir sous votre ombre hospitalière où nul soin n'osait me poursuivre, riante Cascade, jeunes arbrisseaux, et toi lit délicieux dont la mousse fine et tendre plairait à la volupté même.

Du sein des vallons, du sommet des collines, de l'obscurité des forêts, de l'émail brillant des prés, de la plus modeste fleur du printemps, je sens passer alors dans mon ame un ravissement inexprimable.

Et pourrais-je envier le sort des rois lorsqu'à mes côtés l'onde fraîche du ruisseau caresse ici le large flacon rempli jusqu'au bord d'un vin généreux?

Lorsque cette douce solitude m'inspire quelque heureuse chanson, quelque chanson dont l'innocente joie puisse remplir encore le cœur de nos derniers neveux? (Ces trois pièces sont en vers blancs dans l'original, et n'avaient jamais été traduites. )

Anecdote sur le Masque de fer (1).

M. de La Borde, ancien valet de chambre du roi, a

(1) C'est là une des mille conjectures auxquelles on s'est livré sur le pri sonnier inconnu qui a excité dans tous les temps une curiosité d'autant plus vive qu'il est douteux maintenant qu'elle soit jamais satisfaite. Nous croyons in

trouvé dans les papiers de M. le maréchal de Richelieu une lettre originale de la duchesse de Modène, fille du régent, au maréchal qui était alors son amant. Cette lettre commence par ces mots qui sont en chiffres:

« Voici enfin la fameuse histoire. J'ai arraché le secret. Il m'a horriblement coûté..... >>

Vient à la suite l'histoire du Masque de fer, d'après la déclaration faite par son gouverneur au lit de la niort, telle qu'elle suit :

<< Pendant la grossesse de la reine, deux pâtres se présentèrent et demandèrent à parler au roi, et lui dirent qu'ils avaient eu une révélation par laquelle ils avaient appris que la reine était grosse de deux Dauphins, dont la naissance occasionerait une guerre civile qui bouleverserait tout le royaume. Le roi écrivit sur-le-champ au cardinal de Richelieu, qui lui répondit de ne point s'a larmer et de lui envoyer les deux hommes, qu'il s'assurerait de leurs personnes et les enverrait a Saint-Lazare.

La reine accoucha à l'issue du dîner du roi d'un fils (Louis XIV) en présence de toutes les personnes qui, par état, sont présentes aux couches de la reine, et l'on dressa le procès-verbal d'usage.

Quatre heures après, madame Perronet, sage-femme de la reine, vint dire au roi, qui goûtait, que la reine sentait de nouvelles douleurs pour accoucher. Il envoya chercher le chancelier et se rendit avec lui chez la reine, qui accoucha d'un second fils plus beau et plus gaillard

utile de mentionner ici les nombreux ouvrages publiés sur ce personnage mystérieux que l'on disait être le comte de Vermandois, le duc de Beaufort, le duc de Montmouth, le comte Matthioli, ministre du duc de Mantoue, un frère jumeau de Louis XIV, un enfant adultérin d'Anne d'Autriche et du duc de Buckingham, le fruit d'un mariage secret de cette princesse, devenue veuve, avec Mazarin, et enfin une victime des Jésuites.

que le premier. La naissance fut constatée par un procèsverbal qui fut signé par le roi, le chancelier, madame Perronet, le médecin et un seigneur de la cour, qui devint par la suite le gouverneur du Masque de fer, et fut enfermé en même temps que lui, comme on le verra in

cessamment.

Le roi dressa lui-même, à trois fois différentes avec le chancelier, la formule du serment qu'il fit prêter à tous ceux qui avaient été présens à ce second accouchement de ne révéler ce secret important que dans le cas où le Dauphin viendrait à mourir, et il leur fit jurer de n'en jamais parler, méme entre eux. On remit l'enfant à madame Perronet, qui eut ordre de dire que c'était un enfant qui lui avait été confié par une dame de la Cour.

Lorsque l'enfant parvint à l'âge de passer aux hommes, on le confia à ce même homme qui avait été présent à sa naissance, et il se rendit avec son élève à Dijon, et de là entretenait une correspondance suivie avec la reine-mère, le cardinal Mazarin et le roi. Il ne cessa pas d'être courtisan dans sa retraite; il eut pour le jeune prince le respect qu'un homme de Cour conserve pour celui qui peut devenir son maître. Ces égards, que le prince ne pouvait expliquer dans un homme qu'il regardait comme son père, donnaient lieu à de fréquentes questions sur sa naissance, sur son état. Les réponses n'étaient point satisfaisantes. Un jour le jeune prince demanda à son gouverneur le portrait du roi (Louis XIV); le gouverneur déconcerté répondit par des lieux communs; il usa des mêmes ressources toutes les fois que son élève cherchait à découvrir un mystère auquel il paraissait mettre chaque jour plus d'importance. Le jeune homme n'était point étranger à l'amour; ses premiers vœux s'étaient

adressés à une femme de chambre de la maison; il la conjura de lui procurer un portrait du roi; elle s'y refusa d'abord, en alléguant l'ordre qu'avaient reçu tous les gens de la maison de ne lui rien donner hors de la présence de leur maître. Il insista, et elle promit de lui en procurer un. A la vue du portrait il fut frappé de sa ressemblance avec le roi, et se rendit auprès de son gouverneur, lui réitéra ses questions ordinaires, mais d'une manière plus pressante et plus assurée; il lui demanda de nouveau le portrait du roi. Le gouverneur voulut encore éluder : « Vous me trompez, lui dit-il, voilà le portrait du roi, et une lettre qui vous est adressée me dévoile un mystère que vous voudriez en vain me cacher plus long-temps. Je suis frère du roi, et je veux partir à l'instant aller me faire reconnaître à la Cour et jouir de mon état. » (Le gouverneur dit, dans sa déclaration de mort, qu'il n'a jamais pu s'assurer par quel moyen le jeune prince s'était procuré la lettre qu'il lui montra; il dit seulement qu'il ignore s'il avait ouvert une cassetle dans laquelle il mettait toutes les lettres du roi, de la reine et du cardinal Mazarin, ou s'il avait intercepté la lettre qu'il lui montra). Il renferma le prince et envoya sur-le-champ un courrier à Saint-Jean-de-Luz, où était la Cour pour traiter de la paix des Pyrénées et le mariage du roi. La réponse fut un ordre du roi pour enlever le prince et le gouverneur, qui furent conduits aux îles Sainte-Marguerite, et ensuite transférés à la Bastille, où le gouverneur des îles Sainte-Marguerite les suivit.»

M. de La Borde, qui a été long-temps dans la familiarité de Louis XV, a rapproché ce récit des conversations qu'il avait eues avec le roi sur ce Masque de fer, et elles s'y rapportent assez.

Sur la curiosité qu'il a souvent montrée à Louis XV sur cette histoire vraiment extraordinaire, le roi lui répondait toujours: «Je le plains, mais sa détention n'a fait de tort qu'à lui et a prévenu de grands malheurs; tu ne peux pas la savoir. » Et à ce sujet, il lui rappelait qu'il avait témoigné dans son enfance la plus grande curiosité d'apprendre l'histoire du Masque de fer, et qu'on lui avait toujours répondu qu'il ne pouvait la savoir qu'à sa majorité; que le jour de sa majorité il l'avait demandée, que les courtisans qui assiégeaient la porte de sa chambre se pressèrent autour de lui en l'interrogeant, et qu'il leur avait répondu : «Vous ne pouvez pas la savoir.»

M. de La Borde a compulsé les registres de Saint-Lazare, mais ils ne remontent point à l'époque de la naissance de Louis XIV.

Les Époux réunis, comédie en un acte, en prose, représentée pour la première fois au Théâtre Italien le vendredi 31 juillet, a eu quelque succès. Nous en ignorons l'auteur. L'idée de cette petite pièce est tirée d'un drame, ou plutôt du cinquième acte d'un drame alle mand de M. le baron de Gemingen, intitulé le Père de Famille.

La marche de ce petit ouvrage est en général faible et lente, mais le ton et le style en sont agréables et faciles, On l'attribue à une femme,

M. Cérutti, à qui la révolution actuelle a déjà inspiré plusieurs excellens ouvrages, Mémoire au peuple français (1) Observations rapides (2), Étrennes au public (3),

(1) Sur la convocation des états-généraux. (Note de Grimm.)

(2) Sur la seconde lettre de M. de Calonne an roi. (Note de Grimm.) (3) Réponse au Mémoire des princes, etc. (Note de Grimm.)

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