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ses vieilles amours, ne tarda pas à se réunir sous sa bannière, contre celle du plus grand maître de l'Italie, qui venait nous apporter de nouvelles jouissances et tous les secrets de son art. Ce fut là sans doute la véritable cause de la guerre de musique que l'on vit s'élever en France à l'arrivée de Piccini. Quelque importance que mirent à une dispute si ridicule des gens de lettres trèsdistingués, ils ne vinrent pas à bout de faire proscrire au Théâtre de l'Opéra les chefs-d'œuvre de Piccini: le charme si attachant, si sensible d'une musique faite sur des poëmes français, et continuellement adaptée au sentiment des paroles et des situations, garantit Roland, Atys, Iphigénie en Tauride, des efforts d'une cabale qui, malgré toute sa constance et toute son adresse, ne pouvait en imposer ni à nos oreilles ni à nos cœurs. Il n'en fut pas de même de la troupe de Bouffons qui avait suivi ce grand compositeur à Paris; il y avait si peu de spectateurs qui entendissent leur langue, qu'on ne pouvait apprécier généralement ni l'esprit ni la justesse de l'expression; leur jeu parut trop étrange, et leur manière de chanter arma contre eux jusqu'aux chanteurs de notre Opéra, auxquels on les opposait en les faisant jouer sur le même Théâtre; cette seconde troupe fut encore obligée de repasser les monts. Mais, Piccini fixé en France, Sacchini vint seconder ses efforts, et les divers chefs-d'œuvre de ces deux grands maîtres, chantés tous les jours sur notre scène lyrique, répétés dans tous nos concerts, accoutumèrent nos oreilles, celui de nos sens qui est peut-être le plus esclave de l'habitude, à ne plus entendre et à ne plus aimer que la musique italienne, tant il est vrai que, dans les arts comme dans toutes les institutions humaines, le temps et la raison

entraînent à la longue tous les esprits, et détruisent tôt ou tard les préjugés et les préventions les plus opiniâtres. C'est ce que viennent de justifier les premières représentations de l'opéra delle Vicende amorose, dont la musique (de Tritta) a été vivement applaudie, quoique le poëme en ait paru détestable.

L'Opéra-Comique français attaché à ce spectacle a eu un succès encore plus complet. Le premier opéra parodié de l'italien qu'on y a donné est le Marquis Tulipano, musique du célèbre Paësiello; cette composition, pleine de verve, d'originalité, qui offre à chaque instant une variété de motifs et les tournures les plus élégantes d'un chant toujours soutenu par les accompagnemens les plus brillans et les plus pittoresques, a été reçue avec transport. La marche du poëme, dégagée de plusieurs rôles accessoires qui sont dans l'original, se trouve plus près de cette simplicité d'action que nous regardons comme une des premières convenances dramatiques; le dialogue n'en est pas fort spirituel, mais parlé, débité rapidement, il n'a pas du moins l'inconvénient de l'ennuyeux récitatif. Pour avoir tout le succès que mérite une musique si délicieuse, il ne lui manque que d'avoir été faite sur un poëme d'un intérêt plus vrai, d'un comique plus analogue à nos mœurs. Le défaut d'un mérite si essentiel pour réussir sur nos Théâtres n'a pas empêché jusqu'ici que toutes les représentations du Marquis Tulipano n'aient été fort suivies.

La Feinte Jardinière, musique d'Anfossi, n'eut qu'un succès médiocre lorsque les derniers Bouffons la donnèrent en italien; cette composition parut manquer de la variété, de l'originalité qui caractérisent les ouvrages des grands maîtres italiens; on trouva que, sans les avoir

copiés, Anfossi rappelait au moins la manière de plusieurs de ces maîtres, et n'en avait pas une qui lui appartînt. Les chanteurs français qui viennent d'exécuter cet ouvrage parodié n'étaient guère propres à dissimuler un pareil défaut, et l'on a trouvé le fonds du drame triste et languissant.

Mon Arrivée à la Ville.

Chanson, par M. Collin-d'Harleville.

C'est donc ici qu'elle demeure!
Après quatre ans je vais la voir!

Je crains que d'aise elle ne meure
Dès qu'elle va m'apercevoir.
Ah! qu'elle doit être embellie
Depuis que nous sommes absens :
Elle était déjà si jolie,

Et n'avait encor que douze ans.

On ouvre; c'est elle, je gage.

Eh! bonjour donc, c'est pourtant moi
Qui viens exprès de mon village
Pour te voir. Mais, est-ce bien toi?
Voyons un peu que je te mire.
Je t'ai vu mille appas naissans :
Combien de nouveaux j'en admire
Que tu n'avais pas à douze ans !

Tu boudes, c'est que je tutoie;
Pardon, c'est l'usage chez nous;
Et puis dans l'excès de ma joie........
Mais je vais te parler par vous.
Auriez-vous perdu la parole?
Dites? Le fâcheux contre-temps !
Votre babil était si drôle

Lorsque vous n'aviez que douze ans !

Faites-moi signe, au moins, de grace,
Par un souris, par un regard...
Eh quoi! froide comme de glace!
Me tromperais-je, par hasard?
Voyons... Mais plus je l'examine,
Voilà ses yeux, voilà ses dents,
Voilà cette friponne mine
Qui me ravissait à douze ans.

Ne vous nommez-vous pas Claudine?
Ne m'appelé-je pas Colin?
Alors vous étiez si badine;
Je suis toujours un peu malin.
On nous voyait sur la fougère
Jouer tous deux en vrais enfans.
Ne vous souvient-il plus, ma chère,
Que jadis vous eûtes douze ans?

Mais enfin il faut que j'éclate:
Jamais vous ne me reverrez;
Allez, vous n'êtes qu'une ingrate,
Mais vous vous en repentirez.
C'est fort mal, étant du village,
De mépriser les paysans....

Eh! bonsoir... C'est pourtant dommage!

Que n'a-t-elle encor ses douze ans !

Inscription d'une statue de Pygmalion (1).

L'Amour seul peut attendrir la beauté.
Aux vœux de ce mortel le marbre se remue;

Mais Plutus si vanté

Dans les bras de Crésus ne met qu'une statue.

(1) C'est à peu près la seule pièce qui mérite d'être citée d'un recueil de vers, intitulé les Soupers du Jeudi, ou Étrennes à ces Dames pour l'année 1789. Un vol. in-16. (Note de Grimm.)

Epigramme par M. le chevalier de La Poujade.

Maître Glossard tant babille, babille,
Qu'en l'écoutant chacun bâille et s'endort;
Maître Glossard tant crie et s'égosille,
Que pour dormir feriez un vain effort.
Or, de par Dieu, mons Glossard, je vous prie,
Si le voulez, parlez jusques au soir,

Mais de dormir ne nous donnez l'envie,

Ou de dormir laissez-nous le pouvoir.

A la petite fête donnée par M. le duc de Nivernois au prince Henri, ce qu'il y eut de plus intéressant, ce fut un proverbe en musique dont le mot est, une Hirondelle ne fait pas le printemps. Les paroles et la musique sont de M. le duc de Nivernois; en voici le sujet en deux

mots :

Un bon fermier, Mathurin, servit autrefois dans les dragons. Se voyant entouré un jour de sept hussards noirs contre lesquels il se défendait courageusement, le prince qui leur commandait, touché de sa bravoure, lui sauva la vie, et, après l'avoir fait guérir de ses blessures, le renvoya dans sa patrie comblé de bienfaits, et lui promit de marier sa fille au premier voyage qu'il ferait en France. C'est l'arrivée de ce prince que l'on attend pour célébrer les noces de Lise avec le jeune Colin. La bonne Gertrude raconte à sa fille le trait que nous venons de rapporter : Si tous les princes, dit Lise, étaient comme celui-là, maman! - Ah dame, répond Gertrude, une Hirondelle ne fait pas le printemps. -Lise: Vous qui le connaissez, papa, dites-nous - en quelque chose. Mathurin: Je vais vous faire son portrait, c'est l'ouvrage

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