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coupable. S'ils paraissent résister dans ce moment à un bienfait du Gouvernement, c'est par un mouvement trop prolongé de la ferme résistance qu'ils ont dû faire à une subversion désastreuse, etc. >>

Pour retrouver les principes généraux d'une saine représentation nationale, M. Lacretelle remonte jusqu'aux premiers principes de l'ordre social; c'est cette partie de son ouvrage qu'on a trouvée trop abstraite; elle l'est surtout relativement à l'objet qu'il paraît avoir eu essentiellement en vue. Ses conclusions n'en sont pas moins raisonnables, et les voici :

<< Les grandes nations ne peuvent voter que par représentans; mais pour que le corps représentatif réunisse les droits de la généralité, pour qu'il puisse les exercer avec cet avantage de modération et cette sûreté de moyens qui peuvent se rencontrer dans une assemblée d'hommes choisis, et non dans une cohue populaire, il faut que la représentation soit un extrait de la nation elle-même, en sorte que la nation elle-même ait concouru à la former. >>

« Il ne serait guère plus possible de réunir tous les habitans d'un empire pour une élection de députés que pour une délibération commune. Il y a plusieurs classes très-nombreuses qui n'ont pas droit à cet avantage, plusieurs n'y sont pas nécessaires individuellement. Tous ceux qui n'ont dans l'État qu'une habitation transitoire, ceux qui sont trop misérables pour contribuer aux charges publiques jusqu'à une certaine mesure, et qui offriraient plutôt un suffrage à vendre qu'à donner, les soldats qui ont aliéné leur liberté au pouvoir exécutif, les employés du fisc, les domestiques, les ouvriers qui sont sous la direction d'un maître particulier, toutes

ces classes ne peuvent ici réclamer ni assistance ni influence..... Mais il y a cette équité dans ces exclusions qu'elles suspendent une faculté plutôt qu'elles ne la détruisent. >>

« Les grands propriétaires étant en moindre nombre, et ayant un droit sur la chose publique proportionné aux secours plus étendus qu'elle reçoit de leur fortune, on pense qu'il ne serait point injuste de les appeler individuellement. Les petits propriétaires, obligés de se réunir pour donner à l'un d'eux le droit de voter pour tous, n'en risqueraient pas davantage d'être opprimés, leurs délégués formant nécessairement la majeure partie dans le corps électif..... >>

« Ce serait une erreur d'attacher uniquement les droits de citoyen à la propriété du sol. Contribuer aux charges et avoir intérêt aux lois, suffit pour associer à la puissance de qui émanent et les impôts et les lois. »>

« Une société peut avoir admis des classes qui jouissent d'exemptions et de prérogatives particulières; ces classes, subordonnées à la nation, ne peuvent avoir que par abus des droits exclusifs du bien général et des moyens de l'opérer.... Possédant cependant leurs privilèges du consentement au moins tacite de la nation, elles ne peuvent être dépouillées que par un décret national.... Mais de cela même il résulte qu'il est contre toute justice et toute raison que ces classes dominent dans l'assemblée représentative, car alors elles pourraient écraser l'intérêt général de l'ascendant de leurs intérêts particuliers, ce qui équivaudrait à la dissolution de la société, en substituant la force au droit; elles jugeraient dans leur propre cause, ce qui est la plus intolérable usurpation du despotisme même; elles y jugeraient

avec la majorité, ce qui est une oppression par le fait, et une dérision par la forme. >>

Après avoir développé ce dernier résultat, l'auteur discute enfin la question qui nous occupe le plus dans ce moment: Qui peut former une assemblée nationale sur de vrais principes, et dans quel cas le peut-on? Il commence par se perdre dans des raisonnemens d'une métaphysique fort subtile, mais il arrive encore à une conclusion qui nous a paru d'une grande évidence et d'une grande sagesse.

« Je l'avouerai, dit-il, je m'étonne de la gravité, de la profondeur que j'ai cherchée dans ces raisonnemens, car enfin qu'ai-je prouvé? Qu'un roi a toujours le droit de faire le bien, et qu'une nation peut en conscience l'accepter. Le souverain peut convoquer une nation mieux qu'elle ne l'était, mais il ne peut lui imposer un plan de convocation; à elle seule il appartient de le régler. Il dépend donc d'elle de ne pas opérer dans l'ordre qu'il a suivi pour la rassembler, et d'en arrêter un autre. Soit qu'en ceci il fasse bien, soit qu'il fasse mal, il court toujours ce hasard, si cependant il est un hasard qui amène les homines à refuser leur bien offert par une autorité dont l'ascendant est si puissant sur les choses, et dont les intentions généreuses ont un si grand charme pour les cœurs. En un mot, à lui le provisoire, à la nation le définitif. Tout peut être bon dans ce qu'il a fait, rien ne peut être légal que par ce qu'elle acceptera.

Quel est le titre en vertu duquel on peut réclamer pour une nation le dernier plan de ses assemblées? point d'autre que son intérêt. Or, si la nation est mieux représentée, non-seulement son droit reste en entier, mais il est accru.... Un propriétaire évincé serait-il bien reçu

à se plaindre de ce qu'ayant abandonné son champ inculte, on le lui rendrait dans une plus florissante culture? etc. >>

Une autre brochure écrite dans le même esprit, mais plus particulièrement adaptée à la circonstance présente, intitulée les États-Généraux convoqués par Louis XVI, est de M. Target, avocat au Parlement, et l'un des Quarante. Cet excellent écrit respire le patriotisme le plus pur, le plus éclairé, les meilleurs principes, qui y sont mis à la portée de tous les esprits; et le sentiment qui l'a dicté semble fait pour en imposer à toutes les préventions de l'intérêt personnel et de l'esprit de parti.

L'auteur commence par rappeler tous les présages de l'heureuse révolution qui se prépare. La noblesse et le clergé ont reconnu, dans l'assemblée des Notables de 1787, la justice de supporter une contribution proportionnelle.... La province du Dauphiné vient d'adopter une forme d'États fondée sur la liberté, l'égalité, la fraternité des hommes.... Les Parlemens, détachés de leur autorité et renonçant à un ancien usage, ont renvoyé à la nation son droit antique et imprescriptible d'accorder les subsides nécessaires.... Tous les principes d'une constitution nationale ont été avoués, reconnus, consacrés le roi lui-même. « Qu'on me cite, ajoute-t-il, une seule époque où les préjugés contraires au bien de la nation aient été si puissamment attaqués, où l'intérêt personnel se soit plus noblement retiré à l'approche des intérêts publics, où les droits de la nation aient été plus authentiquement reconnus, où la nation ait développé d'avance plus de lumières et plus de zèle, où les comices

par

généraux aient été convoqués sous de plus heureux auspices!»>

Après avoir fait un tableau rapide et précis de toutes les variations qui ont eu lieu dans la formation de nos différens états-généraux, depuis leur naissance jusqu'en 1614, il en conclut avec beaucoup de raison, ce semble, que le roi peut bien exercer le pouvoir que s'arrogeaient les baillis et les assemblées de députation, de donner plus ou moins de représentans au bailliage, pouvoir qui, ayant toujours été exercé sans principe et sans règle, n'est certainement pas une partie de la constitution de l'État.

Questions à examiner avant l'assemblée des états-généraux; par le marquis de Casaux, de la Société royale de Londres et de celle d'Agriculture de Florence, l'auteur des Considérations sur le Mécanisme des Sociétés.

Ces questions ne présentent en général ni le même intérêt ni la même clarté que les deux brochures dont nous venons de parler; mais on y a remarqué cependant le germe de plusieurs idées importantes qu'il serait fort à désirer de voir développer de la manière la plus propre à frapper tous les esprits; de ce nombre est sans doute la sixième question : Des effets mécaniques d'une banqueroute nationale. «On porte aujourd'hui, dit M. de Casaux, à deux cent cinquante et quelques millions la somme annuellement nécessaire en France pour subvenir à l'intérêt légal des capitaux empruntés par le Gouvernement à différentes époques. Qu'on examine s'il y a possibilité d'anéantir pour deux cent cinquante millions de moyens d'acheter, sans anéantir du même coup pour deux cent cinquante millions de motifs pour reproduire. Or, si la

TOM. XIV.

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