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Amérique, ce qui était dégrader ce pays dans l'opinion. Ce motif et d'autres griefs irritèrent les Virginiens, et il en résulta une guerre civile, où les royalistes eurent le dessus.

Entre les territoires assignés à la compagnie de Londres et à celle de Plymouth se trouvaient installés les Hollandais. L'Angleterre, effrayée de leur concurrence active, occupa en pleine paix le New-York, pays de ses voisins, qui fut cédé au duc d'York, et qui reçut par suite, au lieu du nom de Nouvelle-Belgique, celui de Nouvelle-York.

1664.

Une partie de ce pays fut détachée en faveur de lord Berkeley et de sir George Carteret, qui l'appelèrent Nouvelle-Jersey; mais New-Jersey. comme la colonie ne réussit pas, ils la cédèrent à la couronne.

Charles II s'efforça de réprimer l'esprit d'indépendance de ces colonies; mais, en réalité, il ne parvint qu'à l'accroître ; et il céda à quelques lords, ses courtisans, un territoire très-vaste, qui fut appelé la Caroline. Ces seigneurs demandèrent à Locke une constitution pour le pays; et le philosophe en rédigea une, mais absurde, pleine de titres fastueux et d'entraves pour la propriété. La colonie aurait même tourné au plus mal, par suite de démêlés entre les habitants et les propriétaires, sans la liberté de conscience, qui y attira beaucoup de monde.

La lutte de Charles II avec le parlement permit aux colonies d'agir comme si elles eussent été indépendantes, et de trafiquer avec les autres nations, en dépit de l'acte de navigation. Lorsque ensuite Jacques II songea à y rendre quelque force à l'autorité royale et à soumettre les colonies à son gouvernement, peu s'en fallut qu'il n'en résultât une rébellion; mais la maison d'Orange ayant été substituée aux Stuarts, Guillaume, tout en restreignant la constitution coloniale, accorda de grands avantages au commerce; et ces concessions conjurèrent le danger.

Il restait entre les colonies du nord et celles du sud un vaste pays, où déjà Gustave-Adolphe avait cherché à procurer un asile à ceux qui se trouvaient persécutés en Europe pour leurs opinions religieuses. Charles II en fit concession à Guillaume Penn, quaker fervent, moyennant un faible tribut, avec le droit de faire des lois conformes à celles d'Angleterre, et la promesse que le roi ne mettrait point de taxes sans le consentement de Pennet de l'assemblée. Raynal représente Penn comme un des plus grands bienfaiteurs de l'humanité; Montesquieu, comme un Lycurgue moderne; Franklin et d'autres, comme un adroit charlatan. La constitution qu'il publia

T. XVII.

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Caroline.

1064.

W. Penn. 1644-1718.

avant son départ d'Angleterre n'était qu'une amorce; car, une fois arrivésur les lieux, il lui en substitua une autre entièrement dans son intérêt. Il s'attribua, au lieu de la laisser au peuple, la nomination des conseillers et des fonctionnaires publics, ainsi que le pouvoir exécutif, avec le droit d'opposer son veto aux décisions du conseil, et de traiter avec les Indiens pour les acquisitions de territoire. Il imposa aux colons une taxe perpétuelle, qui, légère d'abord, s'accrut de jour en jour, et produisit de grandes richesses à ses descendants. Il en établit aussi une sur les propriétaires, en prenant soin d'en exempter ses héritiers, qui prétendirent maintenir ce privilége contre le vœu unanime des habitants; et ce fut une semence de discorde (1). Cependant, lorsqu'il ne fut point égaré par l'intérêt, Penn fit des règlements empreints de sagesse. La secte à laquelle il appartenait enseignait le travail, la paix, la tolérance religieuse, les vertus frugales, la simplicité; et elle écartait de Philadelphie, bâtie par Penn au confluent de la Delaware et du Schuylkill, le contraste insultant du luxe et de la mendicité.

Cependant les Français avaient aussi établi des colonies dans ces contrées, et ils auraient pu avoir une très-grande part à la civilisation du nouveau monde; mais ils n'eurent jamais en partage la persévérance qui fait prospérer les établissements en se prenant d'affection pour un lieu, en se proposant de s'y fixer; et cela sans projets farouches d'extermination, sans vouloir arriver au but en dépit des obstacles et de la conscience. De plus, le despotisme féodal et monarchique ne permettait pas ces concessions si nécessaires à la prospérité des colonies; la proscription des protestants enlevait l'assistance d'un grand nombre de bras et d'intelligences. Cependant les Français étaient aimés des naturels du Canada, à raison de leur tolérance et de leur facilité à se plier à leurs usages; ceux-ci étaient à leur tour enclins à plusieurs des qualités et des défauts des Français, l'impétuosité à la guerre, le goût des aventures et des plaisirs du moment, plutôt qu'ils ne songeaient à jouir d'une prospérité durable.

(1) Les colons lui présentèrent, en 1707, une réclamation qui commence ainsi : « Nous et le peuple représenté par nous, opprimés et ruinés par la mauvaise administration et les manéges de ton délégué, par la conduite détestable, les procédés rebutants et les exactions énormes de ton secrétaire, nous succombons sous le poids des injustices et des oppressions arbitraires de tes mauvais ministres, qui abusént des pouvoirs à toi concédés par la couronne, et qui, nous le supposons du moins, dominant ton esprit, sont cause que tu nous as laissés jusqu'à présent sans soulagement, etc. » On sait que les quakers em- ` ploient constamment le tu au lieu du vous.

Tout portait à croire que les Français et les Anglais ne pourraient pas demeurer longtemps en paix dans ce voisinage. En effet, ces derniers ayant cherché à accaparer le commerce des pelleteries avec les Iroquois, il en résulta une guerre qui troubla l'état florissant des colonies. On combattit avec des chances diverses; et, dans ces luttes, la valeur farouche des sauvages s'allia à celle des Européens, jusqu'au moment où le traité d'Utrecht assura l'Acadie à l'Angleterre.

Les Français ne purent se résigner à cette perte. Épiant sans cesse l'instant de recouvrer un territoire aussi important, et ne se trouvant pas assez forts, ils excitaient, ils armaient contre la colonie les sauvages, qui renouvelaient sans cesse leurs attaques. D'autre part, les Espagnols poussaient avec acharnement les sauvages contre la Caroline, où les colons, se trouvant en grand péril, réclamèrent l'assistance des propriétaires n'ayant pu rien obtenir d'eux, ils songèrent à se rendre indépendants sous la protection du roi, et ils y réussirent. Le gouvernement avare et désastreux des propriétaires fut aboli, ainsi que la constitution de Locke; et la Caroline, où tous furent appelés à participer à la confection des lois et au vote de l'impôt, divisée en septentrionale et en méridionale, devint bientôt florissante.

Mais elle n'eut jamais assez de population pour qu'elle pût s'étendre sur la plaine marécageuse au midi, qui resta déserte jusqu'au moment où certains philanthropes eurent l'idée d'y transférer d'Angleterre les pauvres qui manquaient de pain dans leur patrie. Ainsi commença la colonie, à laquelle on donna le nom de Géorgie de celui du roi, qui fonda la ville de Savannah: Plus tard, le Suisse Pierre Pury y conduisit quatre cents de ses compatriotes, et fonda Purisbourg. Mais les propriétaires ne voulurent pas admettre les colons à partager leurs droits ; ils leur interdirent aussi la faculté de se faire aider par les nègres et celle de faire usage du rhum, lois plus morales qu'opportunes. La colonie languissait en conséquence, lorsque la non-répression de la contrebande excita les Espagnols à faire la guerre aux Anglais; et la Géorgie, qui se trouvait exposée aux premières attaques, sans avoir ni hommes ni munitions pour se défendre, fut envahie par l'ennemi ; mais sa résistance fut si énergique, qu'il fut obligé de se retirer.

Lors de la guerre pour la succession d'Autriche, qui mit aux prises les Français et les Anglais, les premiers envahirent l'Acadie;

1719.

Géorgie.

1733.

1740.

1748.

175.

1759.

les autres s'emparèrent de Louisbourg, ville de l'Ile-Royale, dans une situation importante, attendu qu'elle commandait le golfe de Saint-Laurent et les bancs de pêche de Terre-Neuve, en même temps qu'elle était le boulevard du Canada. Shirley, homme trèsaventureux, qui avait tenté follement cette entreprise, ayant réussi, songea à en faire autant pour le Canada; mais, lors de la paix d'Aix-la-Chapelle, l'Angleterre restitua sa conquête, et remit les choses dans l'état où elles devaient être avant la guerre.

Les frontières restaient donc indéterminées entre les colonies anglaises et le Canada, ce qui avait déjà causé les démêlés antérieurs. De plus, les Français s'étaient établis dans la Louisiane, sur le Mississipi, contrée aussi étendue que fertile; leur projet était de la réunir au Canada, en occupant les terres intermédiaires, qu'ils appelaient territoire de l'Ouest, de manière à restreindre les Anglais dans le demi-cercle formé par les monts Alléghanys. Ils avaient fortifié à cet effet les lacs Ontario et Érié, ainsi que les sources de l'Ohio. Or, des marchands anglais ayant obtenu du roi un vaste territoire sur l'Ohio, les Français s'opposèrent à ce qu'ils l'occupassent. Les Canadiens réclamèrent cette terre comme leur appartenant, et ils dirent aux envoyés français : Pères, c'est trop de venir bátir sur nos terres et de s'en emparer par force. Pères, les Anglais sont blancs, et vous aussi; or nous sommes dans un pays au milieu, qui a été destiné à notre résidence par le grand Etre de là-haut. Nous demandons, pères, en conséquence, que vous vous retiriez, comme l'ont fail vos frères les Anglais.

Mais ni pères ni frères ne se retirèrent ; et la guerre seule eut à décider à qui des deux usurpateurs resterait le versant occidental des Alleghanys.

La turbulence des Acadiens fut cause qu'on les arracha tous à leurs foyers et qu'on les dispersa dans les autres colonies, en laissant le pays dépeuplé. Cette discorde entre les colons et la mère patrie, ainsi que l'impéritie des ministres de George II, valut aux Anglais de fréquents revers. Mais lorsque Guillaume Pitt apporta au ministère des intentions énergiques, tout changea de face: on redoubla d'efforts, et Louisbourg fut repris avec d'autres points importants. Wolf se conduisit en héros à Québec, et mourut vainqueur (1).

(1) Blessé à la tête, el craignant que son armée ne se décourage, il reparaît le front bandé; mais bientôt une autre balle l'atteint dans le ventre. Il dissimule encore cette blessure, et continue à donner ses ordres, quand une troisième balle le

Bientôt les Français, resserrés dans Montréal, furent contraints de capituler, en laissant tout le Canada à la merci des Anglais, et la puissance française ruinée dans l'Amérique septentrionale. Peu après fut signée la paix de Paris, qui assura à l'Angleterre le Canada, l'Ile-Royale et la Louisiane, sans compter qu'elle obtint de l'Espagne la cession des deux Florides.

L'Angleterre posséda donc tout le pays depuis la baie d'Hudson jusqu'au golfe du Mexique, et depuis l'Atlantique jusqu'au Père des fleuves, comme les Indiens appellent le Mississipi, sur un espace de plus de douze cents milles du nord au midi, et de mille de l'est à l'ouest. Parmi ces colonies, le New-Hampshire, le Massachusets, Rhode-Island, le Connecticut, étaient au nord et à l'est; NewYork, New-Jersey, la Pensylvanie, le Delaware, au centre; enfin le Maryland, la Virginie, les deux Carolines et la Géorgie, au midi. Ces pays, très-favorables à l'agriculture, comptaient environ deux millions de blancs; mais ils n'avaient qu'un très-petit nombre de villes.

La Nouvelle-Angleterre n'est donc pas un établissement d'industrie et de commerce, comme les factoreries d'Afrique, ni une domination sur des peuples agricoles d'unc autre race, comme l'empire britannique dans l'Inde et l'empire espagnol au Mexique et au Pérou, mais un établissement religieux, où la liberté civile se montrait, dès l'origine, inséparable de la liberté du culte. Ce qui étonne dans cette contrée, c'est l'infinité des sectes religieuses : les puritains fondèrent Boston, les quakers Philadelphie, les anglicans New-York, les catholiques Maryland: cette origine fit que ces croyances diverses se supportèrent mutuellement, et que la liberlé des cultes exista en Amérique avant que la tolérance fût pratiquée en Europe.

Ces colonies ayant été fondées sous la direction et aux frais de personnes privées, le gouvernement ne s'en mêla que tard pour en tirer des avantages. Quelques-uns des colons étaient des citoyens libres, venus dans le pays pour y chercher la liberté de conscience; d'autres, des malfaiteurs déportés ; d'autres encore, des indigents qui y avaient été amenés pour travailler, et qui, après être restés un certain temps serfs, pour payer les frais de leur voyage et de leur

frappe à la poitrine. Obligé de se retirer, et sentant sa fin prochaine, il se fait exhausser un peu pour voir la bataille; mais sa vue s'obscurcissant, il demande des renseignements à un officier; puis, lorsqu'il lui entend dire que l'ennemi est en fuite: Je suis content, s'écrie-t-il; et il expire.

1763.

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