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d'y intéresser vivement toutes les classes des lecteurs. Il en est résulté un foyer de lumière qu'aucun pouvoir humain ne pouvait éteindre, une liberté de penser que les entraves qu'on cherchait à lui donner ne rendaient que plus hardie et plus attrayante. Ces dispositions furent encore exaltées par le goût des voyages, par l'établissement des clubs, par l'habitude que les hommes prirent de vivre davantage entre eux, par tous les ridicules de l'anglomanie; car quelle est la révolution qui pourrait se faire en France sans que la mode y eût plus ou moins de part?

La guerre d'Amérique, cette guerre qui ruina les deux Nations les plus riches de l'Europe pour assurer à jamais l'indépendance du peuple le plus pauvre de l'univers, cette guerre, si folle pour les Rois qui l'entreprirent, ne pouvait manquer d'être utile à leurs peuples : elle a sauvé la constitution de l'Angleterre; elle en va donner une à la France; car qui ne voit pas que, sans l'énorme déficit de ses finances, il n'y aurait jamais eu ni États-Généraux, ni Assemblée de Notables, ni Necker, ni Calonne ? Quelque justice qu'on soit disposé à rendre aux déprédations de ce dernier, sans la dépense d'une guerre où l'on eut à combattre une puissance qui disposait des richesses et du crédit des deux Mondes, il est bien clair que les ressources ordinaires auraient suffi pour réparer tout le mal qui ne peut être imputé qu'aux vices de son administration.

Les liaisons qu'eut la France avec l'Angleterre et l'Amérique ont été pour elle, disait un homme de beaucoup d'esprit, ce que sont pour le fils d'un riche bourgeois les liaisons de quelques grands seigneurs; elles le ruinent communément, mais elles le forment toujours plus ou moins, donnent à ses manières plus d'aisance et de liberté, quelquefois même à sa façon de penser plus de noblesse et d'élévation.

COUPLETS à Babet pour le jour de sa fête. Par un vieux Philosophe.

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Ils vont chanter leurs tendres feux,
Son teint de rose et ses beaux yeux;
C'est ce qui me désole.

Des charmes dont je suis jaloux
Ils n'ont pas senti le plus doux;
C'est ce qui me console.

Qu'un air naïf, tendre et fripon
Nous trouble aisément la raison !

C'est ce qui nous désole.
Son regard même au froid bon sens
Donnerait encore des sens;

C'est ce qui la console.

Enchaînant et jeunes et vieux,
Si jolie on fait trop d'heureux,
C'est ce qui me désole.

Mais si Babet peut tout charmer,

Il n'est qu'un cœur pour bien l'aimer;
C'est ce qui me console.

J'ai vu s'envoler mon printemps;
De plaire, hélas! il n'est plus temps;
C'est ce qui me désole.

Mais cœur sensible est jeune encor;
Aimer est toujours un trésor,

C'est ce qui nous console.

LE Plaisir, l'Espérance et la Pudeur. Fable allégorique. Par M. Grainville.

Dans un pays (ce n'était pas en France,
Et son nom même est perdu par malheur),
On dit que le Plaisir, suivi de l'Espérance,
Un jour sur son chemin rencontra la Pudeur.
Puisque le hasard nous rassemble,
S'écria le plus gai des Dieux,

Tous trois, si vous voulez, nous ferons route ensemble.
Très-volontiers... Alors par maints propos joyeux,
Par le plus léger badinage,

Le Plaisir sut tromper les ennuis du voyage;
Mais il fallut se séparer.

On ne peut pas toujours aller de compagnie;
Et puis d'ailleurs tout prend fin dans la vie.
Où pourrons-nous nous rencontrer,
Dit alors le Plaisir, car votre connaissance
M'est précieuse, en vérité?

Le froid séjour de la vaine opulence

En aucun temps n'est par moi fréquenté.

Moi je suis très-souvent, interrompt l'Espérance,

Chez les amans et les gens à projets.

Pour moi, dit à son tour la Pudeur ingénue,
Quand une fois on m'a perdue,

On ne me retrouve jamais.

CHARADE.

M. de L.......s est ma première, M. de R.....l est ma seconde, M. de M......u est les deux et mon tout. (1)

On faisait fort mauvaise chère chez madame d'Aligre, et l'on y médisait beaucoup. En vérité, disait M. de Lauragais, si avec son pain l'on ne mangeait pas ici le prochain, il y faudrait mourir de faim.

M. le Garde des Sceaux demandait un jour au comte de Mirabeau quel homme était son frère le Vicomte. S'il faut répondre franchement, lui dit M. de Mirabeau, dans toute autre famille il passerait pour un homme d'esprit et pour un mauvais sujet, mais dans la nôtre, c'est un homme ordinaire.

Un des laboureurs élus députés dans le bailliage présidé par M. de Coigni avait toutes les apparences d'un homme peu délié. Eh bien, lui dit M. de Coigni, qui l'avait fait asseoir à table à côté de lui, que vous proposez-vous de demander aux États-Généraux? -La suppression des pigeons,

(1) Fougueux.

-

des lapins et des moines. - Voilà un rapprochement assez bizarre. Il est fort simple, Monseigneur : les premiers nous mangent en grain, les autres en herbe, les troisièmes en gerbe.

M. le comte d'Oëls rencontra M. Séguier dans la galerie de Versailles ayant sous le bras l'Histoire secrète de la Cour de Berlin que Sa Majesté venait de lui remettre en lui ordonnant d'en faire la dénonciation à la Cour; Monsieur le Comte, lui dit-il en montrant les deux volumes, c'est de la boue, mais cela ne tache pas.

Le mardi 10 mars les Comédiens italiens ont donné la première représentation de l'Homme à sentimens, comédie en cinq actes et en vers de M. Pluteau, qui n'est connu que par cet ouvrage. C'est une imitation d'une des comédies les plus connues du Théâtre anglais, the School for Scandal, de M. Sheridan. Un de nos petits spectacles s'était déjà emparé de ce sujet sous le titre de l'oncle et les deux Neveux; ce n'était qu'une mauvaise découpure d'un excellent tableau.

Cette copie d'un excellent modèle a peu réussi. La marche de l'intrigue a paru froide et languissante; ce n'est que dans les scènes fidèlement imitées de l'original qu'on a trouvé quelque intérêt. On peut reprocher à l'auteur français de n'en avoir pas conservé plusieurs dont l'intention très-comique aurait répandu sur tout l'ouvrage plus de mouvement et de variété. Nous sommes

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