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tragédie une pièce (1) composée avant elle, et dont le style par conséquent est encore plus incorrect. Je ne sais si j'aurais dû tenter de le corriger, mais la conception et l'exécution doivent être du même jet et de la même force; et revenir sur ses pensées, changer à froid l'expression d'un sentiment, est un travail si pénible, que son succès doit se ressentir de son effet. Ces réflexions pouvaient me conduire à jeter ma pièce au feu ; cependant, déterminée à ne la faire connaître qu'à mes amis, quelques vers sensibles qui s'y trouvent m'ont suffi pour avoir du plaisir à la leur donner. C'est à ce bonheur que je me bornerais quand je pourrais obtenir de la gloire, c'est à lui seul que je puis aspirer aujourd'hui.

Les Mais.

Un jeune époux qu'amour enflamme
A sa moitié jure à jamais

De lui rester fidèle... mais

Ariste est l'amant de sa femme,

Ils n'ont qu'un cœur, ils n'ont qu'une âme,

Ariste l'idolâtre... mais

La jeune Annette est sa voisine:
Elle est folle, vive, inutine:
Du reste assez maussade... mais.
Madame Ariste a mille attraits,
Des yeux, une taille divine
Que son époux admire... mais

La jeune Annette est sa voisine.

(1) Sophie, ou les Sentimens secrets, pièce en trois actes et en vers, composée en 1786.

Vertvert, divertissement nouveau en un acte, en prose, mêlée d'ariettes, paroles de M. Desfontaines, musique de M. d'Alayrac, a été représenté sur le Théâtre italien pour la première et dernière fois le lundi 11.

Le fonds de ce charmant poëme de Vertvert, traité par tout autre, a dit M. d'Alembert, n'eût été qu'une plaisanterie insipide et monotone. Il serait difficile de le prouver mieux que ne l'a fait M. Desfontaines, en se bornant tout platement à mettre en dialogue et en ariettes une grande partie des traits qu'on avait le plus applaudis dans le poëme, parce qu'ils y sont placés avec goût, préparés avec adresse, et surtout avec cette juste mesure de badinage si difficile à saisir dans un sujet de ce genre.

L'action du drame commence au moment où les Religieuses de Nevers attendent avec inquiétude des nouvelles du retour de l'oiseau voyageur; on le voit rapporter enfin dans une belle cage dorée. Son nouveau langage scandalise, comme on sait, tout le couvent; les jeunes Sœurs croient qu'il parle grec; on le proscrit. Sa conversion suit de près son exil, car avant la fin de l'acte on vient annoncer son repentir et sa mort.

La musique offre quelques morceaux agréables, et que le sieur Solier, qui joue un rôle de jardinier, a fait valoir avec beaucoup d'intelligence. Le compositeur s'est avisé de mêler dans son ouverture des phrases entières d'un saint cantique, O Filii, ó Filia, avec celles d'un vaude

ville très - profane, Quand je bois du vin clai ret, etc.; cette licence musicale eût passé autrefois pour une impiété scandaleuse, mais aujourd'hui nous sommes plus indulgens, du moins pour tout ce qui ne contrarie pas le sens de la Révolution.

De la Saltation théâtrale, ou Recherches sur l'origine, les progrès et les effets de la Pantomime chez les anciens, avec neuf planches coloriées; dissertation qui a remporté le prix double à l'Académie des Inscriptions et BellesLettres en novembre 1789; par M. Delaulnaye. Un volume in-8°, ayant pour épigraphe :

Mirabilis ars est

Quæ facit articulos, ore silente, loqui.

Ce savant discours a pour objet cette partie de l'art du geste résultante du principe imitatif qui lui est commun avec les autres arts, et par laquelle les Anciens savaient exprimer toutes les passions, toutes les actions des personnages qu'ils mettaient sur la scène. L'auteur cherche d'abord quelle a été l'origine de cet art, et il en prouve la haute antiquité par le témoignage des anciens auteurs, ensuite par la nature même de l'art qui, intimement lié à la faculté de parler, a dû naître avec la langue primitive.

Plutarque divise la Saltation théâtrale en trois parties, la Contenance, le Geste et l'Indication. Par le mot Contenance il entend ce maintien,

cette disposition du corps qui lui restent lorsque tout geste cesse, et par lesquels l'acteur doit exprimer le caractère du personnage qu'il représente. Il faut, dit-il, que l'on reconnaisse au seul port, à la seule démarche du pantomime, si c'est Apollon, Pan ou une Bacchante qui paraissent sur la scène. Le mot Geste est facile à comprendre, c'est l'expression du sentiment qui anime l'acteur, c'est la peinture des actions qu'il veut représenter, c'est pour ainsi dire la déclamation, l'accent pathétique du saltateur. L'Indication n'est que la simple ostension des objets dont il est censé s'occuper, tels que le ciel, la terre, les enfers. Cette partie de l'art pantomimique doit être exécutée avec noblesse, avec grâce, et cependant avec vérité; elle comporte l'emploi des images, lorsque, par exemple, on cherche à représenter un objet par la peinture de ses attributs, etc. Plutarque appelle l'art du geste une poésie muette, et la poésie une danse parlante.

M. Delaulnaye parcourt rapidement l'histoire de l'art pantomimique chez tous les peuples de l'antiquité, chez les Grecs, chez les Égyptiens, chez les Hébreux, chez les Arabes, chez les Persans, chez les Chinois, chez les Indiens, chez les Goths, chez les sauvages, et nommément chez les Iroquois. Il dispute avec plus de détail quels furent les commencemens et les progrès de cet art chez les Romains. La première représentation des Jeux Scéniques ne remonte qu'à l'an 390 de Rome; on donna ce nouveau spectacle pour apaiser les

Dieux et pour distraire le peuple du fléau de la peste. La seconde époque est de l'an 514. Livius Andronicus fut le premier qui hasarda de composer une action dramatique complète en vers; ce poëte-acteur, ayant perdu la voix, obtint la permission de faire chanter son poëme par un jeune esclave placé devant le joueur de flûte, tandis que lui ferait les gestes convenables aux paroles; de là naquit l'usage d'affecter à chaque rôles deux acteurs. Dans la suite la Saltation fut admise dans les entre-actes de la comédie, c'est la troisième époque; elle finit par en être entièment séparée, c'est la quatrième.

L'auteur nous donne ensuite une notice trèssavante des plus fameux mimes, de Pylade, de Bathylle, etc., de leurs habillemens, de leurs masques, de leurs pièces et de leur manière de les jouer. Le monument le plus précieux qui nous reste de ces scènes pantomimiques se trouve dans l'Ane d'or d'Apulée; c'est une description du Jugement de Paris.

Les notes qui sont à la suite de cette dissertation renferment plusieurs digressions intéressantes, entre autres, un pompeux éloge du système musical et des chefs-d'œuvre lyriques du chevalier Gluck.

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