Imatges de pàgina
PDF
EPUB

Afrique un sauvage ne sait point le déguiser; les témoignages d'admiration qu'excitait parmi nous mon jeune chasseur agrandissaient son regard et développaient les muscles de son visage ; fier d'un pareil triomphe et de mes applaudissemens, ses pieds ne touchaient plus terre, il mesurait ma taille; se rangeant à mes côtés, il semblait me dire: Toi, Moi. >>

C'est dans l'ouvrage même qu'il faut lire le détail de ses chasses aux tigres, aux éléphans, aux rhinocéros; quelque merveilleux que soient ses exploits, il en détaille si naturellement toutes les circonstances qu'il est impossible de n'y pas croire. Ce qu'on ne lira pas avec moins d'intérêt, ce sont les différens traits qu'il rapporte du caractère de son fidèle Klaas, un Hottentot qui lui avait été donné au Cap, et dont il reçut les marques d'attachement les plus touchantes. Les peintures qu'il fait de l'adresse, des charmes et de l'ingénuité d'une jeune Gonaquoise, de la belle Narina, sont autant d'idylles d'un genre tout-à-fait neuf. C'est à la suite de ces rians tableaux qu'il cherche à prouver que les Hottentots ne sont ni pauvres ni misérables, et l'on conçoit aisément que pour démontrer de pareilles vérités il ne faut qu'un peu de métaphysique dans la tête et beaucoup de poésie dans le style.

Des vues plus sérieuses sont celles qu'il a développées sur la race des Basters (les hommes provenus du mélange des blancs avec les femmes hottentotes). I estime que cette race deviendra

quelque jour la race dominante du Cap. La copulation des femmes hottentotes avec les Nègres moins fréquente, vu le préjugé qu'elles ont contre les Nègres qu'elles méprisent, donne naissance à des individus bien supérieurs aux Basters; ils sont d'une stature plus belle et plus distinguée, ils joignent à beaucoup d'activité sans turbulence le mérite d'une fidélité qui ne se dément jamais, et qui n'est guère le partage d'aucun Baster blanc...

nym.

Notre voyageur, croyant que le scrupule sied mal où la nature n'a point placé de honte, avoue qu'il a fait le sacrifice de sa pudeur au progrès de ses études. En voici le résultat. Pour détruire l'opinion où l'on était généralement que les Hottentotes avaient été gratifiées exclusivement à toutes les autres femmes d'un tablier naturel quí servait à cacher le signe de leur sexe, un auteur moderne a avancé que cette singularité n'était autre chose qu'un prolongement considérable des phes, une infirmité occasionée par la vie inactive, par la chaleur du climat... Ce fameux tablier, ajoute M. Le Vaillant, n'est qu'une mode, une affaire de goût, je ne dirai pas dépravé, les signes de la pudeur n'en sauraient constituer l'essence, mais original, mais extravagant, mais si l'on veut, absurde et tel que la seule vue suffirait au plus monstrueux libertin pour chasser de son esprit toute idée d'une atteinte profane; c'est une prolongation non pas des nymphes, mais des grandes lèvres des parties de la femme; elles peuvent arri,

ver jusqu'à neuf pouces plus ou moins, suivant l'âge de la personne ou les soins assidus qu'elle donne à cette décoration singulière; d'abord ce sont les frottemens, les tiraillemens qui commencent à distendre, des poids suspendus achèvent le reste, etc.

M. Le Vaillant juge assez sévèrement les voyageurs qui l'ont précédé. Il regarde le Voyage de Kolben comme un tissu de fables et d'inepties. Les observations intéressantes, les faits bien décrits par le docteur Sparman lui paraissent noyés dans un déluge de récits très - apocryphes de chasses de lions, d'éléphans, plus invraisemblables et plus maladroits les uns que les autres. M. Sparman a cru trop légèrement, dit-il, tout ce qui lui était certifié par les Colons, et entre autres par un M. Jean Kock, dont les rapports ne lui ont paru mériter aucune confiance.

M. Le Vaillant est depuis quelques années de retour à Paris, où il a formé un cabinet d'histoire naturelle fort curieux et fort intéressant. Il nous apprend lui-même dans sa préface qu'il est né à Paramaribo, sur la rive gauche du fleuve Surinam, dans la partie hollandaise de la Guyane. C'est sa passion pour la chasse et pour l'histoire naturelle, surtout pour celle des oiseaux, qui l'a déterminé à entreprendre ses longs voyages; il n'eut point 'd'autre goût, il n'eut point d'autre ambition depuis sa plus tendre enfance.

LETTRE de l'abbé | Raynal à l'Assemblée nationale. Marseille, ce 10 décembre. Brochure de 94 pages.

On sait aujourd'hui que cette prétendue lettre de l'abbé Raynal est de M. le comte de Guibert. Elle contient de grandes vérités et d'étranges vues politiques. De tous les travaux de l'Assemblée nationale l'auteur n'approuve que celui de la division du Royaume et de l'organisation de la Puissance Législative. Il se plaint de l'avilissement et de l'inertie où l'on a laissé tomber le Pouvoir Exécutif; cependant il ne veut pas qu'on se presse de mettre à exécution la formation des Municipalités et des Départemens : le Trône, dit-il, le Trône doit maintenant vous occuper, et il ne veut pas qu'on laisse au Roi le droit de faire la paix et la guerre, etc. Une des plus belles pages de cette lettre est celle où l'auteur ose reprocher à l'Assemblée nationale sa conduite envers le premier Ministre des finances.

REGRETS d'un Sybarite.

Temps heureux où régnaient Louis et Pompadour!
Temps heureux où chacun ne s'occupait en France
Que de vers, de romans, de musique, de danse,
Des prestiges des arts, des douceurs de l'amour!
Le seul soin qu'on connût était celui de plaire;
On dormait deux la nuit, on riait tout le jour;
Varier ses plaisirs était l'unique affaire;

A midi, dès qu'on s'éveillait,
Pour nouvelle on se demandait-

Quel enfant de Thalie ou bien de Melpomene
D'un chef-d'œuvre nouveau devait orner la scène;
Quel'tableau paraîtrait cette année au Salon;
Quel marbre s'animait sous l'art de Bouchardon;
Ou quelle fille de Cythère,

Astre encore inconnu, levé sur l'horizon,
Commençait du plaisir l'attrayante carrière.
On courait applaudir Dumesnil ou Clairon,
Profiter des leçons que nous donnait Voltaire,
Voir peindre la Nature à grands traits par Buffon.
Du profond Diderot l'éloquence hardie
Traçait le vaste plan de l'Encyclopédie;
Montesquieu nous donnait l'esprit de chaque loi;
Nos savans mesurant la terre et les planètes,
Éclairant, calculant le retour des comètes,
Des peuples ignorans calmaient le vain effroi.
La renommée alors annonçait nos conquêtes;
Les Dames couronnaient au milieu de nos fêtes
Les vainqueurs de Lawfeld et ceux de Fontenoi.
Sur le vaisseau public les passagers tranquilles
Coulaient leurs jours gaîment dans un heureux repos,
Et sans se tourmenter de soucis inutiles,
Sans interroger l'air et les vents et les flots,

Sans vouloir diriger la flotte,

Ils laissaient la manœuvre aux mains des matelots,
Et le gouvernail au pilote.

L'Esclavage des Nègres, ou l'Heureux Naufrage, drame en trois actes, en prose, par madanie de Gouges, représenté pour la première fois sur le Théâtre de la Nation le lundi 28, a eu si peu de succès et en méritait si peu, qu'on nous pardonnera volontiers de ne pas en donner une analyse; la pièce d'ailleurs est imprimée depuis long-temps dans les œuvres de l'auteur.

« AnteriorContinua »