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de l'Opéra sans le secours des paroles et même de la musique. On n'a guère reconnu dans celle de cet ouvrage le talent de M. Grétry. Si l'on a reproché à M. Morel d'avoir donné aux personnages les plus aimables d'Athènes un langage qu'on pardonne à peine aux interlocuteurs de La Caravane et de Panurge, òn a été bien plus étonné de leur entendre chanter des airs dont le caractère était à peine celui de la composition bouffonne la plus triviale. Parmi les airs de danse qui composent la partie essentielle de l'opéra d'Aspasie, on en a distingué deux ou trois d'un caractère très-neuf et très-piquant, presque tous ont au moins de la grâce et de la fraîcheur.

Le Petit Almanach de nos grandes femmes, accompagné de quelques prédictions pour l'année 1789.

C'est le même cadre que l'Almanach des Grands Hommes, mais ce n'est assurément ni le même esprit, ni la même gaieté. Il suffit d'être méchant pour réussir, mais encore, méchant, ne l'est pas qui veut.

QUELQUES vues sur les suites probables des États-Généraux.

Si le parti des Princes, de la Noblesse, du Clergé, des Parlemens, des Privilégiés de toutes les classes, si ce parti pouvait encore l'emporter,

on verrait bientôt ces mouvemens qui étonnent aujourd'hui la France et l'Europe entière n'aboutir à rien, les Etats-Généraux réduits à l'inaction la plus complète, et le prompt retour de tous les abus, dont la destruction paraît si nécessaire et si prochaine.

Si au contraire le fanatisme républicain prenait tellement le dessus qu'il parvînt à subjuguer tout-à-la-fois la sage modération du ministre et l'opiniâtre résistance de nos antiques maximes, de nos vieux préjugés, de tous les intérêts divers qui en dépendent, son triomphe serait infailliblement de peu de durée, car en brisant tous les appuis de la Monarchie, il précipiterait l'Etat dans un abîme de désordre et de confusion.

Ce que cette alternative offre de plus affligeant, c'est qu'on peut prévoir que ces deux partis, si fort opposés en apparence, seront également bien servis par des hommes dont les talens et l'ambition ne fondent leur espoir que sur les périls d'un bouleversement général.

On ne sait si l'on doit plus de mépris ou plus de pitié à ces écrivains qui, se croyant doués du génie des Lycurgue et des Solon, veulent fixer despotiquement les bases d'une constitution libre, et s'étonnent que toutes les opinions, tous les préjugés, tous les intérêts ne se soumettent pas aveuglément à l'autorité de leurs sublimes spéculations. Je vois tous les jours ces hommes de génie dépouiller le Monarque des

prérogatives les plus essentielles avec moins de peine qu'on n'en aurait à les faire renoncer euxmêmes à une seule de leurs phrases. Je vois des Nobles discuter les titres de la couronne avec plus de légèreté qu'ils ne permettraient à qui que ce soit de discuter ceux du moindre de leurs écussons. Je vois d'ardens défenseurs de l'égalité civile et naturelle sourire à l'impunité qu'usurpent une grande audace ou de grands talens, comme si tout droit d'être injuste ou méchant n'était pas également odieux.

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J'ai lu, j'ai médité les idées de plusieurs de nos législateurs modernes, et je me permettrai d'avouer que je ne conçois guère le bonheur de vivre sous de pareilles lois. Mais supposons un, moment que ces sages eussent trouvé l'idéal de la plus parfaite de toutes les constitutions, estce assez pour espérer de voir réaliser un si beau rêve? Quand se lassera-t-on de confondre les idées et les choses? Quand cessera-t-on de traiter les élémens de la société comme ceux d'un problème de géométrie? Quand n'oubliera -t-on plus que les hommes ne se calculent point comme des puissances algébriques dont le génie peut déterminer avec précision tous les rapports et tous les résultats? C'est sans doute aux bonnes lois à faire le bonheur de l'humanité; mais ces lois n'ont qu'une force abstraite, il faut que leur action se combine avec d'autres pouvoirs qui agissent et plus vivement et plus continuement sur notre pensée et sur nos volontés; ce sont nos

besoins, nos sentimens, nos passions, nos préjugés, nos mœurs, nos habitudes.

3

Chaque Nation comme chaque individu a un caractère qui lui est propre; ce caractère ne dépend d'aucune circonstance en particulier, et tient à toutes; il est l'effet nécessaire de leur réunion simultanée et successive. C'est ce qui constitue éminemment ce génie national dont l'ascendant paraît souvent irrésistible, qu'il est au moins fort dangereux de vouloir combattre avec trop de violence ou trop de précipitation.

Un écrivain célèbre a dit que la France était géographiquement monarchique. Ne l'est-elle pas aussi moralement? Comment parvenir à concilier les habitudes d'une Nation si vive, si susceptible, si légère, avec cette raison froide, ces résolutions soutenues, cette austérité de principes et de mœurs sans lesquelles la faveur d'une liberté républicaine serait de toutes les sources de corruption la plus funeste et la plus redoutable? Je suis loin d'en conclure qu'il faut revenir aux anciens abus, n'espérer aucune réforme utile, n'entreprendre rien de ce qui doit nous y conduire; mais je ne crains point d'assurer que c'est à ces mêmes abus, à de plus grands peutêtre, qu'on se verra nécessairement entraîné, si, pour vouloir faire de trop grands changemens àla-fois sans égard et sans mesure, l'on court tous les risques d'une subversion générale.

La liberté sans doute est le plus grand des biens; mais se doute-t-on seulement en France

de tous les sacrifices, de tous les dangers, de toutes les privations auxquels il faudrait se résoudre pour en jouir? N'y paraît-on pas même, au milieu de l'effervescence actuelle, beaucoup plus jaloux de ses vanités que de ses droits? L'intervalle qui sépare nos opinions d'un moment et nos mœurs de tant de siècles n'est-il pas immense? Est-ce l'affaire d'un jour de les rapprocher, de les réunir, de les confondre? Et que serait-ce donc que la plus belle constitution du monde qui se trouverait sans cesse en opposition avec le génie et les mœurs du peuple qui aurait fait semblant de s'y soumettre?

Le joug des lois pèse comme celui de l'autorité; il est beaucoup de caractères même sur lesquels il pèse cent fois davantage, parce qu'il est de sa nature d'être et plus rigoureux et plus inflexible. On a dit, il y a long-temps, que la Nation française ne pouvait supporter ni d'être entièrement libre ni d'être entièrement esclave; c'est par cette raison-là que, de tous les gouvernemens possibles, il n'en est aucun qui puisse lui convenir mieux que celui d'une monarchie tempérée, c'est-à-dire une puissance unique capable de contenir une population immense sans aucune gêne habituelle trop apparente, puissance balancée elle-même par la force des lois et de l'opinion. Ce contre-poids ne fut jamais, il est vrai, tout ce qu'il pouvait, tout ce qu'il devait être ; mais dans quelles circonstances pourrait-on se flatter de l'établir sur de meilleurs principes, sur une

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