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qui défit et déposséda son bourreau. Ebn-el-Thammouna se réfugia près du Normand Roger, dont la vaillance devenait de plus en plus célèbre dans la Calabre, et l'excita à tenter la conquête de l'île. L'aventurier normand l'écouta volontiers; et bien que les Sarrasins reçussent quelques secours de l'Afrique, son courage infatigable sut les dompter. Syracuse fut prise en 1088; trois ans après, Enna et Girgenti tombèrent en son pouvoir. Beaucoup de riches musulmans quittèrent le pays; ceux qui demeurèrent conservèrent leurs biens et l'exercice de leur culte, mais ils furent privés de certains droits, comme d'avoir des boutiques, des moulins, des fours et des bains publics.

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Parmi les peuples venus de l'Asie pour occuper le nord de l'Europe, et désignés par le nom commun de Teutons ou de Daces (Deutsch), ceux qui se transplantèrent sur le territoire de l'em

(1) Chroniques anglo-normandes. Recueil d'extraits et d'écrits relatifs à l'histoire de Normandie et d'Angleterre pendant les onzième et douzème siècles, publié, pour la première fois, d'après les manuscrits de Londres, de Cambridge, de Douai, de Bruxelles et de Paris; par FRANCISQUE MICHEL. Rouen, 1836.

DEPPING, Hist. des expéditions maritimes des Normands; Paris, 1826, 2 vol. in-8.

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RHUS, l'Edda. Dans l'Introduction, il fait un exposé des mœurs de la Norwége et l'Islande.

HEIBERF, Mythologie du Nord, d'après l'Edda et les poésies d'Oelenschläger; Copenhague.

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BERGMANN, Poëmes islandais. Traduct. de la Voluspa, du Wafthrudnismale et du Lokassena. L'Edda entière a été traduite en français par mademoiselle DU PUGET; 1840.

X. MARMIER, Histoire de la littérature en Danemark et en Suède

pire romain prirent le nom de Germains et des Francs; ceux qui s'établirent dans la péninsule scandinave et dans les îles environnantes furent appelés Normands, hommes du Nord (North mann). Quels étaient avant eux les habitants de la Scandinavie? C'est chose très-obscure, comme tout ce qui concerne les peuples primitifs. On sait seulement que la péninsule danoise fut nommée Chersonèse cimbrique, de ces mêmes Kymrys ou Cimbres qui parcoururent d'abord l'Europe, puis se fixèrent dans la Gaule belgique et dans l'île de Bretagne, où leur race subsiste encore dans la Cambrie ou pays de Galles (1). Peut-être le reste de la Scandinavie était-il habité par des Finnois (Jotni), qui se trouvèrent ensuite refoulés dans la Finlande et dans la Laponie.

La Scandinavie, ainsi appelée de la Scanie, la partie la plus méridionale de la Suède, la seule que les Romains connussent, forme une vaste péninsule contiguë au nord-est avec la Finlande, partagée, dans sa longueur, par une chaîne de montagnes, et dont les côtes sont baignées par la mer Glaciale, par celle du Nord et par la Baltique. Elle s'ouvre, au midi, comme pour embrasser l'autre péninsule opposée, habitée d'abord par les Kymrys, puis par les Jutes, et qui tient, par le Schleswig, au Hosltein et au Lauenbourg, anciennes résidences des Angles, et par ces pays, à l'Allemagne. Des golfes et des caps entrecoupent les rivages, qu'entourent une infinité d'iles, parmi lesquelles il en est d'assez étendues, comme la Fionie, Seeland, Laaland. Celles-ci, avec le Jutland, forment aujourd'hui le Danemark, tandis que la péninsule compose les deux royaumes de Suède et de Norwége.

Dans la partie la plus voisine du pôle, le soleil reste en été sur l'horizon pendant plusieurs semaines, et pendant plusieurs semaines aussi il disparaît en hiver. Le reste de l'année, des scènes manifiques de neige et de glaces, qui s'embrasent et sc colorent aux rayons des aurores boréales, alternent avec les pompes d'une végétation vigoureuse, que développent rapidement les ardeurs d'un été très-court.

Odin passe pour avoir conduit sur la Baltique les Germains,

WHEATON, Hist. des peuples du Nord, ou des Danois et des Normands, traduite en français par Paul Guillot; Paris 1844.

GEFFROY, Histoire des États scandinaves (Suède, Norwége, Danemark ); Paris, 1851.

(1) Voy. tome VII, 270. 1.

qui formèrent les peuples connus depuis sous les noms de Suédois, de Norwégiens et de Danois; mais le temps où s'accomplit cet événement est si incertain, que les érudits ont supposé trois migrations à de longs intervalles. Les nouveaux peuples se mélèrent avec les indigènes; les Goths, qui s'étaient fixés dans les îles, prirent le nom de Danes; la population du Jutland, plus ancienne sur le sol, engendra ces Saxons et ces Angles qui conquirent la Grande-Bretagne. Le mélange des Teutons et des Scandinaves se fait particulièrement sentir dans les parties méridionnales, et la distinction entre les Suédois et les Goths, comme races conquérantes et vaincttes, se maintint longtemps en Suède.

Il est dit dans une saga que Thor, chef très-puissant d'une tribu, et prêtre dans le voisinage du golfe de Botnie, ayant invité ses enfants à un sacrifice solennel, Nor et Gor s'y présentèrent, mais sans leur charmante sœur Goa. Les deux frères se mirent donc à sa recherche, Nor par terre, Gor par mer. Le premier, traversant les monts, trouva une plaine immense et une nation guerrière, commandée par Rolf de la montagne, qui avait enlevé sa sœur; mais informé de sa puissance, il n'osa l'affronter, et lui laissa celle dont il s'était emparé. Poursuivant alors sa route, il découvrit le pays entre l'Océan et les Alpes Dofrines, et l'appella Nor-veg, c'est-à-dire voyage de Nor.

La chasse et la pêche, auxquelles les invitaient les forêts et les lacs de leur pays, étaient, plus que l'agriculture, l'exercice favori des hommes du Nord. Les femmes étaient respectées parmi eux, et apprenaient à tracer les caractères runiques, interdits aux esclaves. Cultivant la poésie, elles s'appliquaient plus souvent à la médecine et à la chirurgie, interprétant les songes, prédisant l'avenir, devinant le caractère par l'inspection de la physionomie. Elles ne négligeaient pas pour cela les soins domestiques; car les reines elles-mêmes préparaient les aliments, brodaient, faisaient le pain et la cervoise. La femme mariée portait à sa ceinture le trousseau de clefs, symbole de l'autorité domestique. Si deux personnes de sexe différent, se rencontrant en voyage, étaient réduites à partager la même couché, l'homme plaçait son épée au milieu du lit, et c'en était assez. Ainsi le rapportent les sagas.

Les Danois et les Scandinaves obéissaient à des rois supérieurs (over kongar), et à des rois tributaires (unter kongar). Après ceux-ci venaient les iarls ou comtes qui avaient au dessous d'eux

390.

794

855-936.

936-985.

863-933.

des vassaux appelés herses (1), et conduisaient à la guerre les
hommes libres, les bandes. Les rois étaient élus, selon les circon-
stances, dans certaines familles issues d'Odin. Les jeunes gens
de race royale qui restaient sans domaines se mettaient à faire
la course,
avec le titre de rois de la mer (sækongar), ou pre-
naient le commandement de quelque station maritime sur
les côtes pillées par leurs compagnons, avec le titre de wi-
kings.

Les rois de Danemark, qui se vantaient de descendre de Skiold, fils d'Odin, étaient aussi tout à la fois pontifes, juges et généraux. Différents chefs, s'étant rendus indépendants, livrèrent le pays à l'anarchie jusqu'au moment où Widfame les subjugua tous, et étendit ses conquêtes sur le sol même de la Suède. Cette grandeur dura peu, et le royaume alla déclinant jusqu'à Lodbrog Ragnar, qui fut pris et tué par le Saxon OElla. Gorm le Vieux, son neveu, réunit les différents États danois, sur lesquels régna son fils Harald à la Dent Noire (Blaatand).

En Suède, Yngling, petit-fils d'Odin, fonda le temple national d'Upsal, où ses descendants régnèrent heureusement jusqu'à Yngiald, qui, attaqué par le Danois Widfame, mit le feu à la ville, et se brûla avec sa famille. Un de ses successeurs, Harald aux Beaux Cheveux (Häarfäger), réunit les principautés de la Norwége en un seul royaume, qu'il transmit à ses fils.

Les Normands sont le peuple qui joue le plus grand rôle dans l'histoire après les Hellènes, auxquels ils ressemblent par leur caractère aristocratique, par leurs monarchies tempérées, par un besoin d'action incessant, par l'orgueil, par l'audace, par le goût inné du luxe, qui chez eux devança la civilisation, au lieu d'en être la suite. Aussi ont-ils formé l'aristocratie des temps modernes, comme les Grecs celle des temps anciens; mais ils restèrent de beaucoup au-dessous de ceux-ci dans le sentiment de l'ordre et du beau.

Ils tenaient des Francs et des autres Germains par une stature élevée, un beau visage, un noble maintien (2). Les mœurs farouches que leur inspirait la religion d'Odin, le père du carnage, le ravageur, l'incendiaire, n'étaient pas tempérées chez eux par le contact de nations plus civilisées. Souillant leur culte de superstitieuses atrocités, ils sacrifiaient des hommes, et se

(1) En Allemand, herren, barons.

(2) Ermoldus NiGELLUS, de gestis Ludov. Pii.

renvoyaient de l'un à l'autre des enfants qu'ils recevaient sur la pointe de leurs lances.

Arrivés au terme de leur vie aventureuse, ils faisaient jeter au feu tout ce qu'ils possédaient, afin que leurs fils fussent obligés de se procurer d'autres richesses en courant la mer. Une fois sur les flots, ils se sentaient par moments pris d'une fièvre de courage, d'une sorte de frénésie (1), et, se plaçant sur la poupe, ils affrontaient les plus terribles dangers. Bardur, roi d'Ulfsdal, disait : Je n'espère rien des idoles. J'ai couru maints pays pour ma part, j'ai rencontré des géants et des esprits, et ïls n'ont rien pu contre moi; aussi c'est dans mes seules forces que je me confie. Un législateur modéra ces excès de vaillance, en ordonnant d'attaquer l'ennemi quand il était seul, de se défendre contre deux, de ne pas en éviter trois, de se retirer seulement contre quatre (2). Mais comment tenir en bride une valeur qui défiait jusqu'aux êtres surnaturels et se riait de la mort même? Quand Lodbrog, fait prisonnier par le Saxon OElla, fut jeté dans une fosse pleine de vipères, il entonna fièrement son chant de mort. En voici les les strophes les plus remarquables :

« Nous avons combattu avec l'épée ! Il n'y a pas longtemps « que nous sommes allés combattre un énorme serpent dans la << terre des Goths; Thora (3) fut mon salaire, et les guerriers « m'appelèrent Lodbrog (4), en souvenance de ma victoire. a Alors je triomphais; l'acier luisant de mon sabre frappa le << dragon de plusieurs blessures mortelles.

« Nous avons combattu avec l'épée! J'étais jeune encore quand, à l'orient, dans le détroit d'Eirar, nous avons creusé << un fleuve de sang pour les loups, et convié l'oiseau aux pieds << jaunes à un large banquet (de cadavres; la mer était rouge <«< comme une blessure qui vient de s'ouvrir, et les corbeaux << nageaient dans le sang.

« Nous avons combattu avec l'épée! Au sortir de l'enfance, « je tenais déjà ma lance haute; à peine comptais-je vingt hi

(1) Ceux qui en étaient atteints s'appelaient Bersekir (pugiles rabiosi ). Furore bersekico si quis grassetur disent les sagas, auxquels nous empruntons encore d'autres traditions.

(2) DEPPING, I, 2.

(3) Fille de Herrauth, iarl de Gothland, ou roi de Suède, suivant SAXO GRAMMATICUS, IV, p. 169. Ne voit-on pas ici commencer l'esprit de chevalerie? (4) SAXO GRAMM. traduit ce nom par villosa femoralia (chausses à poils).

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